ARRÊT N°
N° RG 21/01807 - N° Portalis DBVH-V-B7F-IBGD
CG
TJ HORS JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP D'AVIGNON
23 mars 2021 RG :11-20-757
SA GRAND DELTA HABITAT
C/
[I]
Grosse délivrée
le
à Me Pomiès Richaud
Me Tartanson
COUR D'APPEL DE NÎMES
CHAMBRE CIVILE
2ème chambre section A
ARRÊT DU 28 JUILLET 2022
APPELANTE :
SA GRAND DELTA HABITAT (venant aux droits de la SA HLM LOGIS MEDITERRANEE) Société Coopérative d'intérêt collectif HLM à conseil d'Administration inscrite au RCS AVIGNON sous le N° 662 620 079 prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié ès qualités au siège social sis
[Adresse 1]
[Localité 2]
Représentée par Me Georges POMIES RICHAUD, Postulant, avocat au barreau de NIMES
Représentée par Me Christiane CANOVAS-ALONSO, Plaidant, avocat au barreau de MARSEILLE
INTIMÉE :
Madame [T] [I] épouse [H]
née le 20 Décembre 1960 à [Localité 4] (Ile Maurice)
[Adresse 3]
[Localité 2]
Représentée par Me Jacques TARTANSON, Plaidant/Postulant, avocat au barreau D'AVIGNON
ORDONNANCE DE CLÔTURE rendue le 21 Avril 2022
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS :
Mme Catherine Ginoux, conseillère, a entendu les plaidoiries en application de l'article 805 du code de procédure civile, sans opposition des avocats, et en a rendu compte à la cour lors de son délibéré.
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :
Mme Marie-Agnès Michel, présidente de chambre
Mme Catherine Ginoux, conseillère
Madame Laure Mallet, conseillère
GREFFIER :
Mme Véronique Laurent-Vical, greffière, lors des débats et Mme Céline Delcourt, greffière, lors du prononcé de la décision
DÉBATS :
à l'audience publique du 09 Mai 2022, où l'affaire a été mise en délibéré au 07 Juillet 2022 prorogé à ce jour
Les parties ont été avisées que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d'appel ;
ARRÊT :
Arrêt contradictoire, prononcé publiquement et signé par Mme Marie-Agnès Michel, présidente de chambre, et Mme Céline Delcourt, greffière, le 28 Juillet 2022, par mise à disposition au greffe de la cour
EXPOSE DU LITIGE
Par acte sous seing privé en date du 22 septembre 1996, la société Logis Méditerranée a donné à bail à Mme [T] [I] épouse [H] un logement sis à [Localité 2] « Résidence le Clos du Page », moyennant un loyer mensuel de 2.763 francs , soit l'équivalent en euros de 583, 83 € .
Se plaignant de désordres d'infiltration, Mme [H] a obtenu en référé la désignation de M. [Y] [L] désigné le 2 décembre 2019 en qualité d'expert.
Celui-ci a déposé son rapport le 29 juin 2020.
Par acte du 19 août 2020, Mme [H] a fait citer sa bailleresse aux fins d'obtenir la réalisation de travaux, outre des dommages et intérêts pour trouble de jouissance.
Par jugement rendu le 23 mars 2021, le tribunal judiciaire d'Avignon a, sous le bénéfice de l'exécution provisoire :
- dit que la demande de réalisation des travaux préconisés par l'expert dans le bien loué est devenu sans objet du fait de la libération des lieux par Mme [H] début janvier 2021,
- condamné la SA HLM Grand Delta Habitat à payer à Mme [H] la somme de 20 200 € au titre de la réparation du préjudice de jouissance et du préjudice moral subi par sa locataire Mme [H] du 23 août 2015 à janvier 2021 (64 mois),
- rejeté la demande d'indemnisation du préjudice professionnel,
- condamné la SA HLM Grand Delta Habitat à verser à Mme [H] la somme de 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, et à payer les dépens de l'instance,
- dit que le présent jugement sera transmis au préfet de Vaucluse s'agissant d'un logement indécent, par les soins du greffe.
Par déclaration enregistrée le 6 mai 2021, la Sa Grand Delta Habitat venant aux droits de la société Logis Méditerranée, a interjeté appel.
Par ordonnance rendue le 8 mars 2022, le conseiller de la mise en état a déclaré irrecevables les conclusions de Mme [T] [I] épouse [H] en date du 10 novembre 2021 , en application de l'article 909 du code de procédure civile
Suivant conclusions notifiées le 29 juillet 2021, la société Grand Delta Habitat, venant aux droits de la SA Logis méditerranée demande à la cour de :
- réformer la décision entreprise, s'agissant de l'indemnisation du préjudice de Mme [H],
- la ramener à de plus justes proportions en la fixant à la somme de 2.500 €- condamner Mme [H] à la somme de 1.000 € au titre des frais irrépétibles, ainsi qu'aux entiers dépens.
La clôture de la procédure a été fixée au 21 avril 2022.
Motifs de la décision
Sur les conclusions de Mme [H] et les pièces communiquées
Mme [H] a notifié de nouvelles conclusions le 10 mars 2022 dont il ne pourra être tenu compte.
En effet, par ordonnance définitive du 8 mars 2022, le conseiller de la mise en état a déclaré irrecevables les conclusions de l'intimé pour non-respect des délais de procédure de sorte que ces nouvelles conclusions de Mme [H] notifiées le 10 mars 2022 ne pourront pas être examinées par la cour, de même que les pièces communiquées par Mme [H] au soutien de ses conclusions.
Il y a lieu de rappeler par ailleurs , que conformément à l'article 954 du code de procédure civil en son dernier alinéa, la partie qui ne conclut pas est censée s'approprier les motifs du jugement .
Sur les dommages et intérêts au titre du préjudice de jouissance
Selon l'article 6 c de la loi du 6 juillet 1989 régissant les rapports des parties, le bailleur est tenu d'entretenir les locaux en état de servir à l'usage prévu par le contrat et d'y faire toutes les réparations autres que locatives nécessaires au maintien en état et à l'entretien normaldes locaux loués.
En l'espèce, depuis le mois d'août 2015 la locataire s'est plainte d'infiltrations dans les chambres et a démandé à plusieurs reprises au bailleur d'intervenir.
Il résulte de l'expertise :
- la présence d'infiltrations se situant à l'étage dans chacune des chambres provenant d'un défaut de joint de dilatation entre le bâtiment mitoyen à celui de Mme [H] pour la chambre nord-ouest, d'un défaut de pose des tuiles ainsi que du mauvais état du solin pour les trois autres chambres.
- des traces de condensation provenant d'un manque d'isolation au niveau de la jonction façade-toiture .
Ces désordres nécessitant de grosses réparations incombent au bailleur et caractérisent un manquement du bailleur à son obligation d'entretenir le clos et le couvert de l'immeuble donné à bail, l'expert notant que 'les solins et la toiture ont l'âge du batiment et n'ont jamais été entretenus ou refaits .. si un couvreur était passé à intervalle régulier pour contrôler les toitures, ces désordres auraient pu être évités...'.
Ces désordres imputables au manquement du bailleur à son obligation d'entretien, ont occasionné un préjudice de jouissance à Mme [H] dont les chambres étaient affectées par les infiltrations, et ce d'autant que selon l'expert, l'humidité était susceptible de provoquer une prolifération des champignons.
L'expert situent les premières manifestations des désordres au mois d'août 2015. C'est donc cette date qui sera retenue comme point de départ du préjudice subi par Mme [H].
Ce préjudice a duré jusqu'au 22 octobre 2020, date à laquelle les travaux de couverture ont été accomplis par le bailleur , soit pendant 63 mois.
Si l'importance du préjudice a fluctué nécessairement au cours des saisons puisque les infiltrations se manifestaient essentiellement pendant la période des pluies et s'attenuaient lors des périodes sèches , il n'en demeure pas moins que les embellissements (peintures des murs et du plafond) étaient affectés en permanence .
Le loyer du logement , selon sa valeur en 1996 , étant relevé que l'engagement de location portant sur un P5 de 90 m2, ne fait pas état d'une indexation du loyer , représente une somme mensuelle de 583,83€.
Compte tenu des éléments développés supra, il convient de fixer le préjudice de jouissance mensuel subi par Mme [H] à 204 €(représentant 35 % du montant du loyer de l'habitation entière) , et l'indemnité à allouer à Mme [H] à la somme de 12.875 € (63 mois x 204 ).
Il ne peut être tenu compte dans la détermination des dommages et intérêts du montant de l'apl perçue par Mme [H].
Le jugement déféré sera donc infirmé en ce qu'il a fixé à 19.200 € le montant de l'indemnité au titre du préjudice de jouissance.
Sur les dommages et intérêts au titre du préjudice moral
La cour ne trouve ni dans le jugement ni dans les pièces du dossier de l'appelant d'éléments susceptibles de caractériser l'existence d'un préjudice moral subi par la locataire .
Par voie de conséquence, il y a lieu d'infirmer le jugement en ce qu'il a condamné la bailleresse à payer à ce titre à Mme [H], la somme de 1.000€ .
Sur les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et les dépens
La cour ayant confirmé le principe retenu par le premier juge de condamnation du bailleur à verser des dommages et intérêts à la locataire, confirmera le jugement déféré en ce qui concerne l'indemnité allouée au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et la charge des dépens .
En cause d'appel, il ne sera pas accordé d'indemnité à la société bailleresse qui succombe partiellement.
Les dépens d'appel seront supportés par la société bailleresse.
PAR CES MOTIFS,
LA COUR :
Après en avoir délibéré conformément à la loi,
Statuant publiquement, contradictoirement, en matière civile et en dernier ressort,
Ecarte des débats les conclusions de Mme [T] [I] épouse [H] notifiées le 10 mars 2022 et les pièces communiquées
Confirme le jugement déféré sauf en ce qui concerne le quantum de la condamnation de la société Grand Delta Habitat au titre du préjudice de jouissance et en ce qui concerne le principe de la condamnation de cette société au titre du préjudice moral.
Statuant des chefs infirmés
Condamne la SA HLM Grand Delta Habitat à payer à Mme [T] [I] épouse [H] la somme de 12.875 € à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice de jouissance
Déboute Mme [T] [I] épouse [H] de sa demande au titre du préjudice moral
Dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile
Condamne la SA HLM Grand Delta Habitat aux dépens d'appel
Arrêt signé par la présidente de chambre et par la greffière.
La greffière, La présidente,