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04/07/2022 | FRANCE | N°21/04056

France | France, Cour d'appel de Nîmes, 2ème chambre section b, 04 juillet 2022, 21/04056


ARRÊT N°



N° RG 21/04056 - N° Portalis DBVH-V-B7F-IHWE



CJP



TJ HORS JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP DE NIMES

13 octobre 2021

RG :21/00339



S.C.I. BALAURIE



C/



[T]-[K]

[Y]

[W]



Grosse délivrée

le

à













COUR D'APPEL DE NÎMES



CHAMBRE CIVILE

2ème chambre section B



ARRÊT DU 04 JUILLET 2022





APPELANTE :



S.C.I. BALAURIE
>agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux, domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 5]

[Localité 4]



Représentée par Me Jean-michel DIVISIA de la SCP COULOMB DIVISIA CHIARINI, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de NIMES





INTIMÉS :



Madame [D] ...

ARRÊT N°

N° RG 21/04056 - N° Portalis DBVH-V-B7F-IHWE

CJP

TJ HORS JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP DE NIMES

13 octobre 2021

RG :21/00339

S.C.I. BALAURIE

C/

[T]-[K]

[Y]

[W]

Grosse délivrée

le

à

COUR D'APPEL DE NÎMES

CHAMBRE CIVILE

2ème chambre section B

ARRÊT DU 04 JUILLET 2022

APPELANTE :

S.C.I. BALAURIE

agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux, domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 5]

[Localité 4]

Représentée par Me Jean-michel DIVISIA de la SCP COULOMB DIVISIA CHIARINI, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de NIMES

INTIMÉS :

Madame [D] [T]-[K]

née le 29 Avril 1984 à [Localité 4]

[Adresse 2]

[Localité 4]

Représentée par Me Jean luc VINCKEL de la SELARL VINCKEL SOCIETE D'AVOCATS, Plaidant, avocat au barreau de MONTPELLIER

Représentée par Me Jérôme ARNAL, Postulant, avocat au barreau de NIMES

Madame [M] [Y]

née le 22 Avril 1983 à [Localité 6] (ESPAGNE) (28006)

[Adresse 3]

[Localité 4]

Représentée par Me Jean christophe LEGROS de la SCP LEGROS, Plaidant, avocat au barreau de MONTPELLIER

Représentée par Me Jérôme ARNAL, Postulant, avocat au barreau de NIMES

Monsieur [R] [W]

[Adresse 5]

[Adresse 5]

[Localité 4]

Représenté par Me Charles FONTAINE de la SCP FONTAINE ET FLOUTIER ASSOCIES, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de NIMES

Statuant sur appel d'une ordonnance de référé

Ordonnance de clôture rendue le 25 avril 2022

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS :

Mme Chantal JACQUOT-PERRIN, Conseillère, a entendu les plaidoiries en application de l'article 805 du code de procédure civile, sans opposition des avocats, et en a rendu compte à la cour lors de son délibéré.

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Madame Nicole GIRONA, Présidente de Chambre

Mme Chantal JACQUOT-PERRIN, Conseillère

Mme Elisabeth GRANIER, Conseillère

GREFFIER :

Madame Véronique PELLISSIER, Greffière, lors des débats et du prononcé de la décision

DÉBATS :

à l'audience publique du 02 Mai 2022, où l'affaire a été mise en délibéré au 20 Juin 2022, prorogé au 4 juillet 2022.

Les parties ont été avisées que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d'appel ;

ARRÊT :

Arrêt contradictoire, prononcé publiquement et signé par Madame Nicole GIRONA, Présidente de Chambre, le 04 Juillet 2022, par mise à disposition au greffe de la Cour.

La SCI Balaurie est propriétaire d'un immeuble situé [Adresse 1] (34) faisant l'objet d'un bail verbal pour l'exercice d'une activité d'avocats par le cabinet d'avocat [W]-[T]-[Y]. M. [R] [W] a donné sa démission après avoir fait valoir ses droits à la retraite, les locaux objets du bail sont, ainsi, désormais occupés par Mme [M] [Y] et Mme [D] [T] [K].

Par acte du 11 mai 2021, la SCI Balaurie a assigné Mme [M] [Y], Mme [D] [T] [K] et M. [R] [W] devant le président du tribunal judiciaire de Nîmes, statuant en référé, aux fins de voir condamner chaque défendeur à lui payer une provision de 33 600 € au titre des loyers dus pour l'occupation des locaux loués.

Par ordonnance contradictoire du 13 octobre 2021, le président du tribunal judiciaire de Nîmes a déclaré irrecevable la demande de la SCI Balaurie et l'a condamnée à payer à chaque défendeur la somme de 600 € en application de l'article 700 du code de procédure civile, outre les dépens de l'instance.

Par déclaration du 9 novembre 2021, la SCI Balaurie a interjeté appel de cette ordonnance en toutes ses dispositions.

Aux termes de ses conclusions notifiées le 25 avril 2022, auxquelles il est expressément renvoyé pour un exposé complet de ses moyens et prétentions, la SCI Balaurie, appelante, demande à la cour, au visa des articles 484 et 835 du code de procédure civile et 1714 et 1728'2 du Code civil, de réformer l'ordonnance dont appel et de :

-déclarer recevable sa demande,

-condamner chaque intimé à lui verser une provision de 33 600 € TTC à valoir sur les loyers dus au titre de l'occupation du premier 2e étage de l'immeuble située [Adresse 1],

-débouter Mme [M] [Y] et Mme [D] [T] [K] de leur appel incident,

-et condamner les intimés aux entiers dépens et au paiement chacun d'une somme de 2 000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Au soutien de son appel, la SCI Balaurie fait valoir :

-que Mme [M] [Y] et Mme [D] [T] [K] qui occupent actuellement les locaux s'abstiennent de tout règlement des loyers depuis le mois de février 2018, et ce malgré une mise en demeure adressée le 3 juillet 2018 ;

-qu'une précédente ordonnance de référé a été rendue le 20 janvier 2021 et a dit n'y avoir lieu à référé sur la demande de provision, uniquement au motif que la convention d'association ne précisait pas le montant dû par chaque avocat et ne contenait pas de clause de solidarité ; qu'elle a, en conséquence, à nouveau saisi le juge des référés en mettant en cause cette fois les trois avocats débiteurs des loyers et en réclamant à chacun une somme sans solidarité ; que la présente instance porte sur une demande nouvelle à l'égard de parties différentes ; qu'aucune autorité de la chose jugée ne peut être invoquée et que son action est donc recevable ;

-qu'il n'est pas contesté que les intimés occupent les locaux et ne règlent pas les loyers correspondants ; que le montant des loyers n'est également pas contesté ; que l'exception d'inexécution invoquée par les intimés ne peut être retenue, dès lors que ceux-ci n'ont jamais adressé de mise en demeure de réaliser les travaux à leur bailleur, si ce n'est le 13 août 2019 soit postérieurement à la mise en demeure de payer les loyers qui leur a été notifiée, et n'ont jamais formulé de demande de consignation des loyers ; que cette exception d'inexécution est invoquée aujourd'hui de mauvaise foi pour tenter de se soustraire au règlement des loyers ;

-qu'au surplus, les demandes de réparation portent sur le 3e étage de l'immeuble, lequel n'est pas occupé par le cabinet d'avocat ; que la nécessité d'effectuer des travaux réclamés est totalement contestable.

Mme [M] [Y], en sa qualité d'intimée, par conclusions en date du 14 janvier 2022, auxquelles il convient de se reporter pour un plus ample exposé de ses prétentions et moyens, demande à la cour, au visa des articles 488 et 835 du code de procédure civile et 1720 et 1755 du Code civil, de confirmer en toutes ses dispositions l'ordonnance entreprise, de juger l'action irrecevable en l'absence de circonstances nouvelles depuis l'ordonnance du 20 janvier 2021, de juger l'action irrrecevable en l'absence de justification de la qualité de propriétaire de l'appelante et, ajoutant à la décision de première instance, de condamner la SCI Balaurie à lui payer la somme de 3000 € de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens de l'instance.

À titre subsidiaire, l'intimée souhaite voir la cour, en cas d'absence de confirmation de la décision dont appel ;

-débouter la SCI Balaurie de l'ensemble de ses prétentions,

-condamner reconventionnellement la SCI Balaurie à effectuer sous astreinte de 150 € par jour de retard courant à compter de l'expiration d'un délai de 2 mois après la signification de la décision à venir les travaux dont la liste figure au devis de rénovation de la société GRM Rénovation en date du 7 février 2019 et les travaux définis par le devis de la société Sietelec en date du 10 mars 2019,

-l'autoriser à consigner sur le compte séquestre du bâtonnier du barreau de Béziers la somme correspondant aux loyers objets de la condamnation jusqu'à la complète réalisation des travaux objets des condamnations précitées,

-condamner la SCI Balaurie à lui payer la somme de 3 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi que les entiers dépens de l'instance.

Mme [M] [Y] expose :

-que l'action est irrecevable faute pour la SCI Balaurie de produire un titre de propriété concernant l'immeuble en cause,

-qu'une première ordonnance de référé rendue le 20 janvier 2021 a débouté la SCI de sa demande de paiement des loyers au titre du même bail professionnel ; qu'il n'est pas possible de modifier une ordonnance de référé, sauf en cas de circonstances nouvelles ; qu'aucun fait nouveau n'est invoqué dans la présente instance aussi bien dans l'assignation que dans les conclusions d'appel ; que la mauvaise organisation de la procédure d'origine est sans incidence, dès lors qu'il n'existe pas de faits nouveaux et qu'il appartenait à la SCI de mener correctement sa procédure de référé d'origine ;

-qu'il est inexact de dire que le loyer n'est pas contesté, et ce alors que le loyer a évolué bien que les parties se trouvent en l'état d'un bail verbal qui ne peut contenir de clause d'indexation ;

-que l'immeuble est occupé non pas par deux avocates mais par trois, en ce compris M. [R] [W], dans le cadre d'une convention d'association régularisée les 28 décembre 2012 et 25 septembre 2013 ; que cette association ne dispose pas de la personnalité morale et que ce sont donc les trois avocats, à titre personnel, qui sont débiteurs du loyer ; qu'en application de la convention d'association M. [R] [W] ne peut quitter l'association tant que le crédit, contracté solidairement entre les trois avocats, n'aura pas été remboursé ;

-qu'il est surprenant que la SCI réclame à chacun des trois locataires une somme répartie par tiers, alors même que les associés avaient convenu d'une proportion différente, à savoir 50 % à la charge de M. [R] [W] ; que ce dernier continue d'occuper l'immeuble, les lieux n'ayant pas été libérés des affaires lui appartenant ;

-qu'il est regrettable qu'aucune facture ni qu'aucun tableau de calcul ne vienne à l'appui de la demande de l'appelante ;

-que les lieux se trouvent dans un état de vétusté inconvenant pour un cabinet d'avocats ; que les conséquences de cette vétusté doivent être reprises par le bailleur qui a la charge de ces réparations ;

-qu'il résulte de l'ensemble de ces éléments que l'obligation en litige est sérieusement contestable ;

-que les demandes reconventionnelles sont faites, à titre subsidiaire, dans l'hypothèse où la cour déclarait la procédure recevable.

Mme [D] [T] [K], en sa qualité d'intimée, par conclusions en date du 24 janvier 2022, auxquelles il convient de se reporter pour un plus ample exposé de ses prétentions et moyens, demande à la cour, au visa des articles 488 et 835 du code de procédure civile, 1720 et 1755 du code civil, de confirmer en toutes ses dispositions l'ordonnance entreprise et de juger ainsi l'action irrecevable en l'absence de circonstances nouvelles depuis l'ordonnance du 20 janvier 2021 et, ajoutant à la décision de première instance, de condamner la SCI Balaurie à lui payer la somme de 3000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens.

À titre subsidiaire, l'intimée souhaite voir la cour, en cas d'absence de confirmation de la décision dont appel ;

-débouter la SCI Balaurie de l'ensemble de ses prétentions,

-condamner reconventionnellement la SCI Balaurie à effectuer sous astreinte de 150 € par jour de retard courant à compter de l'expiration d'un délai de 2 mois après la signification de la décision à venir les travaux dont la liste figure au devis de rénovation de la société GRM Rénovation en date du 7 février 2019 et les travaux définis par le devis de la société Sietelec en date du 10 mars 2019,

-l'autoriser à consigner sur le compte séquestre du bâtonnier du barreau de Béziers la somme correspondant au loyer objet de la condamnation jusqu'à la complète réalisation des travaux objets des condamnations précitées,

-condamner la SCI Balaurie à lui payer la somme de 3 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi que les entiers dépens de l'instance.

Mme [D] [T] [K] fait valoir :

-que la seconde assignation diffère uniquement en ce qu'elle a attrait M. [R] [W] aux côtés des deux autres avocates ; que les circonstances nouvelles, exigées pour que le juge des référés soit saisi une seconde fois, ne peuvent résulter de faits antérieurs à la date d'audience devant le premier juge des référés ;

-qu'il est erroné de dire que le loyer n'est pas contesté, dès lors que le montant sollicité ne peut être validé en l'absence de convention ou de factures reprenant le détail des loyers, des charges, ainsi que la répartition entre les associés, sachant que la convention d'association prévoyait une répartition différente entre les avocats, soit 50 % pour M. [R] [W] et 25 % pour chacune des co intimées ; que la créance n'est pas certaine, liquide et exigible ;

-que s'agissant de l'exception d'inexécution, elle a, ainsi que son associée, plusieurs fois mis en demeure l'appelante de procéder aux travaux nécessaires et a sollicité des devis pour ce faire ; que la SCI est demeurée taisante sur ce point ; que la non-délivrance d'un bien conforme à sa destination et la non-exécution de l'obligation de permettre une jouissance paisible des locaux donnés à bail justifie parfaitement l'exception d'inexécution.

M. [R] [W], en sa qualité d'intimé, par conclusions en date du 21 janvier 2022, auxquelles il convient de se reporter pour un plus ample exposé de ses prétentions et moyens, demande à la cour de dire et juger fondé et recevable l'appel de la SCI Balaurie, sauf à le mettre hors de cause, étant délié de toute obligation depuis le mois de juin 2018 et, faisant droit à son appel incident, condamner toute partie succombant à lui payer la somme de 3000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens.

M. [R] [W] expose :

-qu'il a démissionné en juin 2018 et n'est donc plus directement concerné par le règlement des loyers que la comptabilité du cabinet aurait dû assumer en priorité au titre des frais et charges ;

-que chacune des deux associées restantes est donc tenue à proportion de 50 % des loyers et charges afférentes ; qu'à ce jour, il ignore tout de la gestion assurée par les deux associées restantes ; que s'il doit continuer à être totalement impliqué dans le fonctionnement de l'association, il eut fallu que les éléments comptables lui soient communiqués, ce qui n'est pas le cas ; que le comptable indique que les associés ont fonctionné à 50 % chacune et qu'il n'a tiré aucune ressource de l'activité de l'association dont il a été exclu ; que n'étant plus impliqué, le loyer ne peut le concerner ;

-qu'au surplus, Mmes [D] [T] [K] et [M] [Y] lui ont interdit l'accès aux caves et au 3e étage de l'immeuble sur lequel elles n'ont aucun droit et où se trouvent des meubles et objets personnels.

La clôture de la procédure est intervenue le 25 avril 2022 et l'affaire a été appelée à l'audience du 2 mai 2022 pour être mise en délibéré, par mise à disposition au greffe, au 20 juin 2022, prorogée au 4 juillet 2022.

MOTIFS DE LA DECISION :

Sur la recevabilité de la demande de la SCI Balaurie :

Aux termes de l'article 488 du code de procédure civile, l'ordonnance de référé n'a pas, au principal, l'autorité de la chose jugée. Elle ne peut être modifiée ou rapportée en référé qu'en cas de circonstances nouvelles.

À l'appui de ces dispositions, le premier juge a relevé qu'une ordonnance de référé a été rendue le 20 janvier 2021 à la requête de la SCI Balaurie et que si la seconde assignation est fondée sur des moyens différents, elle ne fait état d'aucun fait ou circonstance nouvelle survenue postérieurement permettant de modifier l'ordonnance de référé.

L'ordonnance de référé rendue le 20 janvier 2021 a dit n'y avoir lieu à référé sur la demande de provision de la SCI Balaurie à l'encontre de Mmes [D] [T] [K] et [M] [Y] considérant que l'obligation des parties défenderesses n'était pas incontestable au regard de la convention d'association qui est composée non pas de deux mais de trois avocats, qui ne précise pas le montant dû par chaque associé au titre de l'occupation des locaux et qui ne contient aucune clause de solidarité.

L'alinéa 2 de l'article 488 susvisé, s'il prévoit les conditions dans lesquelles une ordonnance de référé peut être modifiée ou rapportée, suppose une identité de litige et donc que la chose demandée soit la même et que cette demande concerne les mêmes parties à l'instance.

En l'espèce, dans ce premier litige ayant donné lieu à l'ordonnance du 20 janvier 2021, le juge des référés a estimé l'obligation contestable notamment parce que l'ensemble des débiteurs n'était pas attrait à cause, alors même qu'il ne s'agissait manifestement pas d'une obligation solidaire.

Il ne saurait dès lors désormais être reproché à la SCI Balaurie d'introduire une nouvelle procédure à l'encontre des trois avocats qui occupent les locaux loués et de formuler une demande différente excluant toute solidarité entre les débiteurs. Si l'ordonnance de référé ne peut en effet être modifiée ou rétractée qu'en cas de circonstances nouvelles, encore faut-il que la demande de modification de rétractation porte sur un litige similaire. En l'espèce, les parties à l'instance n'étant pas les mêmes que celles qui se sont opposées devant le premier juge des référés, il n'y a pas lieu de faire application de ces dispositions.

C'est en conséquence à tort que le premier juge a déclaré la demande de la SCI Balaurie irrecevable. L'ordonnance dont appel sera réformée de ce chef.

Sur le fond :

Sur la demande en condamnation à une provision au titre des loyers impayés :

L'alinéa 2 de l'article 835 du code de procédure civile, le président du tribunal judiciaire ou le juge des contentieux de la protection dans les limites, dans les cas où l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable, peuvent accorder une provision au créancier, ou ordonner l'exécution de l'obligation même s'il s'agit d'une obligation de faire.

Il n'appartient pas au juge des référés, juge de l'évidence, de se prononcer sur la qualification ou sur les modalités d'exécution d'un engagement souscrit entre les parties. Également, si le juge des référés est tenu d'appliquer les clauses claires du contrat qui lui est soumis, il n'a pas à trancher à cette occasion de contestations sérieuses.

En l'espèce, la SCI Balaurie fonde sa demande en paiement sur un contrat de bail verbal.

Mme [M] [Y] souligne que la SCI ne justifie pas de sa qualité de propriétaire. S'il n'est effectivement versé aucun titre de propriété par la partie appelante, il y a lieu cependant de constater que jusqu'en 2017, les avocats ont occupé les locaux et ont réglé les loyers à la SCI et ne contestaient donc pas sa qualité de propriétaire.

Nonobstant cet élément, il convient de mettre en exergue que la SCI Balaurie ne verse au dossier, pour justifier de sa créance que des factures manuscrites de 2013 et informatiques de 2017, alors même qu'elle réclame paiement des loyers à compter de février 2018. Il n'est également versé aucun décompte reprenant les loyers réclamés et visant précisément la période impayée.

Également, il doit être relevé que la convention d'association signée entre les parties intimées stipule que chacun des associés participera au bénéfice et perte de l'association dans proportion initialement fixée à hauteur de 50 % pour M. [R] [W], 25 % pour Mme [D] [T] [K] et 25 % pour Mme [M] [Y]. Pour autant, la SCI Balaurie réclame paiement des loyers impayés à chacun des avocats occupant les locaux à hauteur d'un tiers sans tenir compte de cette répartition. Or, il n'appartient pas au juge des référés, juge de l'évidence d'interpréter ladite convention d'association, dont l'appelante semble faire une application différente sans pour autant apporter d'explication.

De la même manière, s'agissant de l'obligation de M. [R] [W] ce dernière estime être délié de toute obligation depuis le mois de juin 2018, date à laquelle il a quitté l'association. Cependant, l'annexe à la convention prévoit des dispositions spécifiques s'agissant du retrait de ce dernier de l'association qu'il n'appartient également pas au juge des référés d'analyser et d'interpréter afin de déterminer si celui-ci demeure effectivement toujours redevable des loyers.

Ainsi, force est de constater qu'il existe des contestations sérieuses faisant manifestement obstacle aux pouvoirs du juge des référés s'agissant de la demande de condamnation au paiement d'une provision.

Il sera, en conséquence, dit n'y avoir lieu à référé de ce chef.

Sur les demandes reconventionnelles :

Aux termes de l'article 835 alinéa 1 du code de procédure civile, le président du tribunal judiciaire ou le juge des contentieux de la protection dans les limites de sa compétence peuvent toujours, même en présence d'une contestation sérieuse, prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s'imposent, soit pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite.

Arguant de l'existence d'un trouble manifestement illicite, Mmes [D] [T] [K] et [M] [Y] souhaitent voir la cour condamner, sous astreinte, la SCI Balaurie à exécuter divers travaux aux fins de reprise des désordres affectant les locaux, considérant que ceux-ci sont en état de vétusté.

Le trouble manifestement illicite peut se définir comme « toute perturbation résultant d'un fait matériel ou juridique qui, directement ou indirectement, constitue une violation évidente de la règle de droit ».

Si Mmes [D] [T] [K] et [M] [Y] justifient, par la production d'un procès-verbal de constat du huissier, de l'état de l'immeuble, elles sont, en revanche, défaillantes dans la démonstration du trouble manifestement illicite qui en résulte pour elles et ce d'autant que les parties sont en désaccord sur l'assiette même du bail, l'appelante indiquant que le bail ne porte pas sur le dernier étage ni sur les caves de l'immeuble, alors que les intimées font état essentiellement de désordres dans ces parties de l'immeuble.

Le trouble en lui-même n'apparaît au surplus pas démontré et plus précisément il n'est pas justifié par les intimées des conséquences quant à l'exercice de leur profession de l'état de l'immeuble.

Il sera, en conséquence, dit n'y avoir lieu à référé de ce chef. Il en sera de même pour la demande de consignation  des loyers et pour les mêmes motifs.

Sur les dépens et les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile :

Le sort des dépens et des frais irrépétibles a été exactement réglé par le premier juge.

La SCI Balaurie, qui succombe à titre principal, devra supporter les dépens de l'instance d'appel et ne saurait bénéficier d'une somme au titre des frais irrépétibles.

En cause d'appel, l'équité commande de condamner la SCI Balaurie à payer à chacun des intimés la somme de 1 200 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles d'appel.

PAR CES MOTIFS :

La Cour, après en avoir délibéré conformément à la loi, statuant publiquement, par arrêt contradictoire, en référé et en dernier ressort,

Infirme l'ordonnance de référé rendue le 13 octobre 2021 par le président du tribunal judiciaire de Nîmes en ce qu'elle a déclaré la demande de la SCI Balaurie irrecevable,

Et statuant à nouveau du chef réformé,

Déclare recevable la demande de la SCI Balaurie,

Dit n'y avoir lieu à référé sur la demande de provision de la SCI Balaurie,

Dit n'y avoir lieu à référé sur les demandes reconventionnelles de Mmes [D] [T] [K] et [M] [Y],

Déboute la SCI Balaurie de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne la SCI Balaurie à payer à Mmes [D] [T] [K] et [M] [Y] et M. [R] [W], chacun, la somme de 1 200 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétible d'appel,

Condamne la SCI Balaurie aux dépens d'appel.

Arrêt signé par Madame GIRONA, Présidente et par Madame PELLISSIER, Greffière.

LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Nîmes
Formation : 2ème chambre section b
Numéro d'arrêt : 21/04056
Date de la décision : 04/07/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-07-04;21.04056 ?
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