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04/07/2022 | FRANCE | N°21/04002

France | France, Cour d'appel de Nîmes, 2ème chambre section b, 04 juillet 2022, 21/04002


ARRÊT N°



N° RG 21/04002 - N° Portalis DBVH-V-B7F-IHR7



NG



PRESIDENT DU TJ D'AVIGNON

26 juillet 2021

RG:21/00082



[U]

[U]



C/



[A]

[U]

[U]

[V]

Société CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL ALPES

PROVENCE



Grosse délivrée

le

à













COUR D'APPEL DE NÎMES



CHAMBRE CIVILE

2ème chambre section B



ARRÊT DU 04 JUILLET 2022





APPELANTS :



Monsieur [D] [U]

agissant tant en son nom personnel qu'en sa qualité d'héritier de Mme [P] [Y] [N], décédée le 24 janvier 2014

né le 27 Août 1947 à [Localité 25]

[Adresse 14]

[Adresse 14]

[Localité 25]



Représenté par Me Eric FORTUNET, Plaidant/Postulant...

ARRÊT N°

N° RG 21/04002 - N° Portalis DBVH-V-B7F-IHR7

NG

PRESIDENT DU TJ D'AVIGNON

26 juillet 2021

RG:21/00082

[U]

[U]

C/

[A]

[U]

[U]

[V]

Société CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL ALPES

PROVENCE

Grosse délivrée

le

à

COUR D'APPEL DE NÎMES

CHAMBRE CIVILE

2ème chambre section B

ARRÊT DU 04 JUILLET 2022

APPELANTS :

Monsieur [D] [U]

agissant tant en son nom personnel qu'en sa qualité d'héritier de Mme [P] [Y] [N], décédée le 24 janvier 2014

né le 27 Août 1947 à [Localité 25]

[Adresse 14]

[Adresse 14]

[Localité 25]

Représenté par Me Eric FORTUNET, Plaidant/Postulant, avocat au barreau d'AVIGNON

Monsieur [H] [U]

agissant tant en son personnel qu'en sa qualité d'héritier de Mme [P] [Y] [N], décédée le 24 janvier 2014,

né le 01 Mars 1949 à [Localité 25]

[Adresse 28]

[Localité 25]

Représenté par Me Eric FORTUNET, Plaidant/Postulant, avocat au barreau d'AVIGNON

INTIMÉS :

Maître [S] [A] Es qualité de syndic à la liquidation judiciaire de «[O] [U]»

assigné le 3 décembre 2021 à personne et le 7 janvier 2022 à personne habilitée

[Adresse 9]

[Localité 24]

Non comparant ni représenté

Madame [F] [U]

née le 22 Octobre 1971 à [Localité 25]

[Adresse 6]

[Localité 26]

Représentée par Me Pierre-françois GIUDICELLI de la SELARL CABINET GIUDICELLI, Plaidant, avocat au barreau D'AVIGNON

Représentée par Me Emmanuelle VAJOU de la SELARL LEXAVOUE NIMES, Postulant, avocat au barreau de NIMES

Madame [E] [U] épouse [R]

née le 17 Janvier 1967 à [Localité 25]

[Adresse 18]

[Localité 27]

Représentée par Me Pierre-françois GIUDICELLI de la SELARL CABINET GIUDICELLI, Plaidant, avocat au barreau D'AVIGNON

Représentée par Me Emmanuelle VAJOU de la SELARL LEXAVOUE NIMES, Postulant, avocat au barreau de NIMES

Madame [C] [V] veuve [U]

née le 06 Avril 1945 à [Localité 25]

[Adresse 19]

[Adresse 19]

[Localité 25]

Représentée par Me Pierre-françois GIUDICELLI de la SELARL CABINET GIUDICELLI, Plaidant, avocat au barreau D'AVIGNON

Représentée par Me Emmanuelle VAJOU de la SELARL LEXAVOUE NIMES, Postulant, avocat au barreau de NIMES

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2021/011722 du 12/01/2022 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de Nîmes)

Société CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL ALPES PROVENCE

immatriculée au RCS d'AIX EN PROVENCE sous le n° 381 976 448

prise en la personne de ses représentants légaux en exercice domiciliés es qualité audit siège

[Adresse 10]

[Adresse 10]

[Localité 3]

Représentée par Me Pascale COMTE de la SCP AKCIO BDCC AVOCATS, Postulant, avocat au barreau de NIMES

Représentée par Me Patrice BIDAULT de la SELARL JURISBELAIR, Plaidant, avocat au barreau de MARSEILLE

Statuant sur appel d'une ordonnance de référé

Ordonnance de clôture rendue le 9 mai 2022

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

Madame Nicole GIRONA, Présidente de Chambre,

Mme Chantal JACQUOT-PERRIN, Conseillère,

Mme Elisabeth GRANIER, Conseillère,

GREFFIER :

Madame Véronique PELLISSIER, Greffière, lors des débats et du prononcé de la décision

DÉBATS :

à l'audience publique du 16 Mai 2022, où l'affaire a été mise en délibéré au 04 Juillet 2022.

Les parties ont été avisées que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d'appel ;

ARRÊT :

Arrêt réputé contradictoire, prononcé publiquement et signé par Madame Nicole GIRONA, Présidente de Chambre, le 04 Juillet 2022, par mise à disposition au greffe de la Cour.

La Caisse régionale de Crédit Agricole Mutuel des Alpes Provence (dite dorénavant le Crédit Agricole) a consenti le 1er juillet 1981 une ouverture de crédit hypothécaire de 4 500 000 Fr. à Madame [Y] [N] [P] veuve [U], Messieurs [O], [D] et [H] [U], ainsi qu'à la SCEA du [Adresse 19] et à la SCI Le Prayal du Moulin et Pont Aurel, tous co-emprunteurs et codébiteurs solidaires.

À défaut de remboursement de ce prêt à son terme, des poursuites ont été engagées par le Crédit Agricole à l'encontre des consorts [U]. La société des travaux publics [U] a été déclarée en liquidation judiciaire le 24 juillet 1987. Cette procédure a été étendue, dans un premier temps aux consorts [U], puis limitée à la seule personne de Monsieur [O] [U] par un arrêt de la cour d'appel de Nîmes du 31 janvier 1991.

Un premier protocole d'accord transactionnel a été conclu le 17 février 1995 entre Madame [Y] [N] [P] veuve [U], Messieurs [D] et [H] [U], la SCI de [Adresse 19] et la SCA de [Adresse 19], prévoyant notamment divers règlements de la part de ses signataires au Crédit Agricole ainsi que la cession à leur prêteur de l'intégralité des droits qu'ils détenaient sur 16 lots du lotissement [Adresse 30] situé à [Localité 25]. L'une des conditions suspensives prévoyait l'accord de Maître [B] [A] pris en sa qualité de liquidateur de Monsieur [O] [U]. Un second protocole en date du 13 septembre 1995 a recueilli l'accord du mandataire judiciaire, ès qualités, et a été homologué par le tribunal de commerce d'Avignon par jugement du 19 janvier 1996, malgré l'opposition de Monsieur [O] [U] que la cour d'appel de Nîmes a débouté de son appel à l'encontre de cette décision.

Pourtant, depuis cette date, aucun acte authentique n'a été établi entre les consorts [U] et le Crédit Agricole et Messieurs [D] et [H] [U] se sont acquittés seuls des taxes foncières et des frais d'entretien afférents aux 16 lots du lotissement devant revenir au Crédit Agricole. Ainsi, ces derniers ont engagé une action devant le juge des référés du tribunal judiciaire d'Avignon à l'encontre du Crédit Agricole, de Me [A] en qualité de liquidateur judiciaire de Monsieur [O] [U], de Madame [E] [U] épouse [R], de Madame [F] [U] et de Madame [C] [V] épouse [U] aux fins, principalement, de contraindre le Crédit Agricole et, le cas échéant, Me [A] à mandater un notaire à l'effet d'établir un acte de notoriété en exécution desdits accords et à leur payer la somme de 96 909,51 € à titre de provision sur les frais d'entretien des parcelles et sur les taxes foncières qu'ils ont supportés de 1995 à 2020.

Par ordonnance prononcée le 26 juillet 2021, le juge des référés a :

-rejeté la fin de non-recevoir tirée du défaut d'intérêt à agir par Madame [C] [V] épouse [U], veuve de Monsieur [O] [U],

-dit que les créances provisionnelles sollicitées et relatives à des sommes antérieures au 3 février 2016 sont prescrites,

-débouté Messieurs [H] et [D] [U] de leurs demandes principales de condamnations à une obligation de faire et de condamnation à payer des sommes provisionnelles ainsi que des dommages intérêts,

-dit n'y avoir lieu à renvoi devant le juge du fond dans les conditions de l'article 837 du code de procédure civile,

-dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile,

-condamné Messieurs [D] et [H] [U] aux entiers dépens.

Par déclaration du 4 novembre 2021, Messieurs [D] et [H] [U] ont interjeté appel de cette décision, excepté en ce qu'elle a rejeté la fin de non-recevoir tirée d'un prétendu défaut d'intérêt à agir les concernant.

Dans leurs dernières conclusions transmises par RPVA le 14 février 2022, Messieurs [D] et [H] [U] sollicitent la réformation des dispositions dont ils ont fait appel et réclament, statuant à nouveau :

-vu les articles 834 et suivants du code de procédure civile, de renvoyer les parties à se pourvoir ainsi qu'elles aviseront,

-vu l'article 1142 ancien du Code civil et en tant que de besoin l'article 1221 nouveau, vu les articles 711 à 717 du Code civil, 1100 et suivants du même code, encore 2044 et suivants, rejetant toutes contestations sérieuses et ordonnant les mesures justifiées par l'existence du différend, retenant par ailleurs le trouble manifestement illicite pour les concluants, dès à présent, faute de paiement des sommes sollicitées et justifiées auxquelles seront ajoutés les frais et taxes des années 2020 et 2021, voire 2022, faute de régularisation spontanée de la situation au service de la publicité foncière après établissement d'un acte notarié à l'initiative et aux frais du Crédit Agricole, de :

-condamner le Crédit Agricole, en présence de Me [A], ès qualités, et en présence de Mesdames [C], [E] et [F] [U] habilles à se porter héritières de feu Monsieur [O] [U] et de feu Madame [P], à payer aux concluants, pour leur compte (à hauteur de 59 647,51 €) et celui de l'indivision successorale constituée au décès de Madame [P] (à hauteur de 37 262 €), la somme provisionnelle de 96 909,51 € représentant au principal les taxes foncières des années 1995 à 2020 et les frais d'élagage et de débroussaillage, et représentant à titre subsidiaire une provision sur dommages-intérêts,

-réserver les droits de créance des concluants au titre des impositions et charges 2021 et suivants,

-juger que, à hauteur de 37 262 €, cette condamnation sera versée entre les mains de Maître [J], notaire au [Localité 31], en charge du règlement de la succession de Madame [Y] [N] [P] veuve [U],

-vu l'article 64-1 du règlement national et inter-cours des notaires, vu la sommation délivrée au Crédit Agricole de faire connaître le nom et les coordonnées de son notaire et tenant compte de sa réponse ou non-réponse apportée, de :

-condamner le Crédit Agricole, en présence de Me [A], ès qualités, et en présence des héritières de feu Monsieur [O] [U] et de feu Madame [P], à mandater un notaire à l'effet d'établir un acte notarié en exécution des protocoles des 6 janvier 1994 et 13 septembre 1995, acte notarié emportant cession des parcelles cadastrées sur le territoire de la commune de [Localité 25], lieu-dit « [Adresse 30] », section BC n° [Cadastre 1],[Cadastre 2], [Cadastre 4],[Cadastre 5], [Cadastre 7],[Cadastre 8], [Cadastre 11],[Cadastre 12], [Cadastre 13],[Cadastre 15], [Cadastre 16],[Cadastre 17], [Cadastre 20],[Cadastre 21], [Cadastre 22] et [Cadastre 23] au Crédit Agricole,

-juger que l'acte notarié précisera que le Crédit Agricole doit rembourser aux concluants et à la succession de leur mère, sur justificatifs, les frais, taxes, impôts et charges avancées,

-condamner ladite caisse et les héritières de Monsieur [O] [U] et de Madame [P] - en présence de Me [A] ' à signer l'acte qui sera préparé pour consacrer sous la forme authentique la cession des droits indivis sur les parcelles ci-dessus inventoriées,

-assortir les condamnations d'une astreinte définitive de 1 000 € par jour de retard à compter de la signification de l'arrêt à intervenir pendant un délai de 3 mois, après quoi il serait à nouveau statué, sauf pour le Crédit Agricole de justifier avoir réalisé les démarches et pris les mesures pour que soit régularisée la situation,

-condamner le Crédit Agricole - en présence de Me [A], ès qualités, et de Mesdames [U] - au paiement d'une provision sur dommages-intérêts pour résistance abusive et négligence abusive de 10 000 €,

-condamner le Crédit Agricole - en présence de Me [A], ès qualités, et de Mesdames [U] - au paiement de la somme de 15 000 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, en contrepartie de leurs frais irrépétibles,

-condamner les mêmes aux dépens.

Ils soutiennent notamment :

-que le premier juge ne pouvait, en référé, statuer sur l'acquisition de la prescription,

-qu'en considération des protocoles liant les parties, le Crédit Agricole avait vocation à être en indivision avec la seule liquidation de biens de Monsieur [O] [U] sur les 16 lots du lotissement, en l'état du protocole prévoyant leur cession, mais qu'aucun acte notarié n'a pu être conclu,

-que, pourtant, l'économie générale de la transaction oblige le Crédit Lyonnais à faire face aux frais et taxes assumés par les consorts [U], depuis 1995, et subsidiairement à compter de 2016,

-que Mesdames [U] ne sauraient opposer à leur demande qu'elles ont accepté la succession de Monsieur [O] [U] à concurrence de l'actif net, dès lors que deux arrêts des 26 février 2015 et 28 juin 2018 ont reconnu leur qualité d'héritières,

-qu'il n'est plus demandé à Maître [A], ès qualités, de se charger de la rédaction de l'acte notarié sollicitée.

Dans ses dernières écritures reçues par RPVA le 2 mai 2022, le Crédit Agricole conclut au débouté de Messieurs [D] et [H] [U] de leur demande, à la confirmation en toutes ses dispositions de l'ordonnance entreprise et, reconventionnellement, à leur condamnation à lui payer la somme de 5 000 € au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, outre les dépens. À titre subsidiaire, si la cour estimait devoir faire droit à la demande tendant à le contraindre à saisir un notaire, il réclame que sa condamnation soit étendue à Mesdames [U] afin de les contraindre à signer l'acte translatif de propriété, étant précisé que, pour sa part, ils feraient le choix de Me [L] [X], notaire associé au sein de la SELARL EXCEN, sise à [Localité 29].

Il expose, entre autre :

que, suivant les termes du protocole d'accord du 17 février 1995, il était prévu qu'il « recevra l'intégralité des droits des consorts [U] sur les 16 lots », formulation laissant supposer l'établissement d'un acte translatif de propriété rédigé par un notaire,

-que malgré l'acceptation de cette cession par Me [A], une multitude de procédures a été engagée, situation complexifiée par le décès de Monsieur [O] [U], puis de Mme [P], auxquelles ont succédé Mesdames [U], qui s'opposent aux appelants depuis 2012 en contestant, à tort, leur qualité d'héritières de Monsieur [O] [U], ainsi que cela résulte de deux arrêts rendus par cette cour les 9 mars et 7 avril 2022,

-que, depuis plus de 25 ans, il est pris en otage d'un imbroglio judiciaire qui l'a privé de la possibilité de se faire titrer et de recouvrer une partie de sa créance,

-que l'article 64 du règlement national intercours ne peut être invoqué par les appelants pour faire reconnaître un quelconque manquement à ses obligations,

-qu'il demeure que la signature d'un acte notarié portant dation en paiement ne peut être sérieusement envisagée qu'avec un accord complet sur l'ensemble des clauses de l'acte entre les différentes parties, ce qui est loin d'être acquis, en considération de l'opposition manifestée par Mesdames [V]-[U],

-concernant la provision sollicitée à son encontre, qu'il n'est pas titré, n'a pas la jouissance de ces biens immobilier et que le protocole d'accord de 1995, qui ne constitue pas un compromis de vente, a été conclu sous condition suspensive, sans prévoir aucune date d'effet, ni de clauses particulières sur les dépenses liées à la conservation des biens.

Dans leurs dernières conclusions, reçues par RPVA le 18 janvier 2022, Madame [C] [V] veuve [U], Madame [F] [U] et Madame [E] [U] épouse [R] sollicitent la confirmation de la décision de première instance, le débouté de leurs oncles de leurs prétentions, le rejet des demandes formées par le Crédit Agricole et la condamnation de Messieurs [D] et [H] [U] à leur verser la somme de 1 500 €, chacune, au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Elles font notamment valoir :

-qu'en retenant que la demande en paiement portant sur des sommes antérieures au 3 février 2016 se heurtait à la prescription, le premier juge a relevé l'existence d'une contestation sérieuse justifiant qu'il ne soit pas fait droit à la demande de provision présentée,

-que, du fait de la liquidation judiciaire de leur père et époux, Monsieur [O] [U], remontant au 16 novembre 1984, elles ont accepté la succession à concurrence de l'actif net, celui-ci ayant de fortes chances d'être inexistant,

-qu'elles sont toujours héritières à concurrence de l'actif net,

-que les condamnations provisionnelles formées se heurtent à des contestations sérieuses.

Me [A], assigné à personne par exploit en date du 16 mai 2022, n'était pas représenté aux débats, qui se sont déroulés le 16 mai 2022.

Par référence à l'article 455 du code de procédure civile, il est fait expressément référence aux conclusions déposées par les parties pour un plus ample exposé des faits, moyens et prétentions présentés.

SUR CE :

-sur la demande relative à l'acte notarié de dation en paiement :

Les appelants demandent :

-d'une part, de condamner le Crédit Agricole, en présence de Me [A], ès qualités, et en présence des héritières de feu Monsieur [O] [U] et de feu Madame [P], à mandater un notaire à l'effet d'établir un acte notarié en exécution des protocoles transactionnels des 6 janvier 1994 et 13 septembre 1995, acte notarié emportant cession des parcelles cadastrées sur le territoire de la commune de [Localité 25], lieu-dit « [Adresse 30] », section BC n° [Cadastre 1],[Cadastre 2], [Cadastre 4],[Cadastre 5], [Cadastre 7],[Cadastre 8], [Cadastre 11],[Cadastre 12], [Cadastre 13],[Cadastre 15], [Cadastre 16],[Cadastre 17], [Cadastre 20],[Cadastre 21], [Cadastre 22] et [Cadastre 23] au Crédit Agricole, correspondant à une dation en paiement, et

-d'autre part, de condamner ladite caisse et les héritières de Monsieur [O] [U] et de Madame [P] - en présence de Me [A] - à signer l'acte qui sera préparé pour consacrer sous la forme authentique la cession des droits indivis sur les parcelles ci-dessus inventorié.

Il convient de rappeler que les pouvoirs du juge des référés sont circonscrits par les articles du code de procédure civile.

D'une part, l'article 834 de ce code prévoit, dans tous les cas d'urgence, le président du tribunal judiciaire ou le juge du contentieux de la protection dans les limites de sa compétence, peuvent ordonner en référé toutes les mesures qui ne se heurtent à aucune contestation sérieuse ou que justifie l'existence d'un différend. L'alinéa 2 de l'article 835 autorise le juge des référés a ordonné l'exécution d'une obligation même s'il s'agit d'une obligation de faire, dans tous les cas où l'existence de cette obligation n'est pas sérieusement contestable.

Les premières dispositions citées ne sauraient recevoir application en l'espèce, dès lors que la condition d'urgence n'est pas démontrée du fait de l'ancienneté des protocoles sur lesquels se fonde la demande. Il sera observé, à titre superfétatoire, que cette dernière se heurte à des contestations sérieuses, tenant principalement de l'opposition de Mmes [U] à signer, en l'état, quelque acte notarié que ce soit. Même si leur opposition ne peut plus se fonder sur leur qualité d'héritier à concurrence de l'actif net, au vu des deux décisions rendues par cette cour les 9 mars et 7 avril 2022, elles disposent d'un intérêt légitime à se réserver de contester potentiellement un acte notarié dont les modalités ne sont pas, pour lors, définis.

De plus, imposer au Crédit Agricole de confier la rédaction d'un acte authentique à un notaire et à Mesdames [U] de signer ce document portant dation en paiement ne se justifie pas par l'existence du différent opposant les parties.

Les secondes dispositions citées ci-dessus se heurtent à des contestations sérieuses, dans la mesure où le choix d'un notaire n'empêchera pas que l'acte préparé ne soit pas signé par Mesdames [U], qui s'opposent encore à se comporter en qualité d'héritier de leur père ou mari. La présente décision ne peut les contraindre à accepter, même si elles ont été jugées héritières de M. [O] [U] par deux arrêts de cette cour d'appel, dès lors qu'elles n'ont pas contracté à titre personnel une telle obligation et que les modalités de cession des biens immobiliers visés sont à préciser.

D'autre part, l'article 835 alinéa 1 de ce même code dispose que le président du tribunal judiciaire ou le juge des contentieux de la protection dans les limites de sa compétence peuvent toujours, même en présence d'une contestation sérieuse, prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s'imposent, soit pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite.

Il s'avère que la nature de la demande présentée au juge des référés ne constitue en l'espèce ni une mesure conservatoire, ni une mesure de remise en état.

Dans ces conditions, il y a lieu de constater que les demandes de saisine d'un notaire par le Crédit Agricole et de condamnation de mesdames [U] et du Crédit Agricole à signer l'acte authentique de cession, présentées par Messieurs [D] et [H] [U], n'entrent pas dans les pouvoirs du juge des référés. Les appelants seront donc renvoyés à mieux se pourvoir.

-Sur la demande en paiement d'une provision :

L'alinéa 2 de l'article 835 du code de procédure civile donne au juge des référés, dans tous les cas où l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable, le pouvoir d'accorder une provision au créancier.

Messieurs [D] et [H] [U] demandent au Crédit Agricole le remboursement des taxes foncières et des frais d'entretien qu'ils ont engagés entre 1995 et 2020, à titre provisoire.

Le premier juge n'avait pas à se prononcer sur l'acquisition de la prescription relative à une partie des sommes réclamées. Ces dispositions de l'ordonnance entreprise seront réformées dès lors que cette constatation devait se limiter au caractère non sérieusement contestable d'une partie de la somme réclamée.

Pour le surplus, la demande pécuniaire formée se heurte à des contestations sérieuses dans la mesure où elle ne se fonde sur aucune disposition contractuelle, voire légale. En effet, si un accord de principe entre les parties aux deux protocoles transactionnels conclus les 17 février et 13 septembre 1995 est intervenu, les modalités de cette dation en paiement n'ont pas été précisées et aucune disposition ne fait état d'une date de transfert de propriété ou des modalités d'entretien des bien immobiliers concernés.

Par ailleurs, les appelants demandent, à titre subsidiaire, paiement d'une provision à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi du fait des manquements du Crédit Agricole à faire établir l'acte notarié qui devait être rédigé en exécution des protocoles. Ils engagent ainsi la responsabilité délictuelle ou quasi-délictuelle de cette banque devant le juge des référés, alors qu'il est constant qu'une telle action relève du juge du fond. En effet il n'appartient pas au « juge de l'évidence » de caractériser, comme il se doit dans ce type d'hypothèse, une faute de l'établissement bancaire, un préjudice pour les appelants et un lien de causalité entre l'un et l'autre.

En conséquence, les dispositions de la décision déférée seront confirmées sur ce point.

-Sur les autres demandes :

Il n'est pas démontré par les appelants que le Crédit Agricole aurait agi avec l'intention de nuire ou de leur porter préjudice, ni même qu'ils auraient fait preuve d'une légèreté blâmable. Ils seront donc déboutés de leur demande en paiement de dommages et intérêts pour résistance et négligence abusives.

Les dépens de première instance ont été justement arbitrés par le premier juge. Les appelants, qui succombent dans le soutien de leurs prétentions en cause d'appel, supporteront les dépens de cette procédure. En considération d'éléments tirés de l'équité et du caractère familial liant certaines des parties, il ne sera pas fait application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile au profit de l'une ou l'autre des parties.

PAR CES MOTIFS :

La cour, statuant publiquement, par arrêt réputé contradictoire et rendu en dernier ressort, par mise à disposition au greffe,

Dans les limites de l'appel,

Confirme l'ordonnance de référé prononcée le 26 juillet 2021 par le président du tribunal judiciaire d'Avignon, en ces dispositions déférées à la cour, en ce qu'elle a :

-débouté Messieurs [H] et [D] [U] de leurs demandes principales de condamnations à une obligation de faire et de condamnation à payer des sommes provisionnelles ainsi que des dommages intérêts,

-dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile,

-condamné Monsieur [D] et [H] [U] aux entiers dépens.

Réforme les dispositions déclarant que les créances provisionnelles sollicitées et relatives à des sommes antérieures au 3 février 2016 sont prescrites,

Statuant à nouveau,

Dit n'y avoir lieu à statuer sur la prescription,

Déboute le Crédit Agricole de sa demande en paiement de dommages et intérêts pour résistance abusive,

Dit n'y avoir lieu de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne Messieurs [D] et [H] [U] aux dépens de la procédure d'appel.

Arrêt signé par Madame GIRONA, Présidente et par Madame PELLISSIER, Greffière.

LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Nîmes
Formation : 2ème chambre section b
Numéro d'arrêt : 21/04002
Date de la décision : 04/07/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-07-04;21.04002 ?
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