ARRÊT N°
N° RG 20/01709 -
N° Portalis DBVH-V-B7E-HX7P
ET-AB
COUR D'APPEL DE NIMES
23 avril 2020
RG :18/01811
[N]
C/
S.A. CREDIPAR IPAR EXERÇANT PSA FINANCE FRANCE FREE2MOVE LEASE S
Grosse délivrée
le 09/06/2022
à Me Clotilde LAMY
à Me Laure REINHARD
COUR D'APPEL DE NÎMES
CHAMBRE CIVILE
1ère chambre
ARRÊT DU 09 JUIN 2022
DEMANDEUR A l'OPPOSITION :
Monsieur [U] [N]
né le [Date naissance 1] 1975 à [Localité 7]
[Adresse 2]
[Localité 3]
Représenté par Me Clotilde LAMY de la SELEURL CABINET CLOTILDE LAMY - AVOCAT, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de NIMES
DEFENDEUR A l'OPPOSITION:
S.A. CREDIPAR
prise en la personne de ses représentants légaux domiciilés en cette qualité adudit siège
[Adresse 4]
[Localité 5]
Représentée par Me Laure REINHARD de la SCP RD AVOCATS & ASSOCIES, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de NIMES
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS :
Mme Séverine LEGER, Conseillère, a entendu les plaidoiries en application de l'article 805 du code de procédure civile, sans opposition des avocats, et en a rendu compte à la cour lors de son délibéré.
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :
Mme Marie-Pierre FOURNIER, Présidente de chambre
Mme Elisabeth TOULOUSE, Conseillère
Mme Séverine LEGER, Conseillère
GREFFIER :
Mme Nadège RODRIGUES, Greffière, lors des débats et du prononcé de la décision
DÉBATS :
À l'audience publique du 14 Avril 2022, où l'affaire a été mise en délibéré au 09 Juin 2022,
Les parties ont été avisées que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d'appel ;
ARRÊT :
Arrêt contradictoire, prononcé publiquement et signé par Mme Elisabeth TOULOUSE, Conseillère, en l'absence du Président légitimement empêché, le 09 Juin 2022 conformément aux dispositions des articles 452 et 456 du code de procédure civile, par mise à disposition au greffe de la Cour
EXPOSE DU LITIGE
Par acte sous seing privé du 1er août 2013, M. [U] [N] a contracté auprès de la société Credipar un crédit d'un montant de 14 990 euros affecté à l'achat d'un véhicule Citroën Picasso C4 immatriculé [Immatriculation 6] moyennant un remboursement en 60 mensualités à un taux débiteur fixe de 8,50 %.
A la suite d'impayés, la déchéance du terme a été prononcée le 15 septembre 2016.
Par ordonnance du 28 décembre 2016, le tribunal d'instance de Nîmes a enjoint à M. [N] de payer la somme de 9687,47 euros avec intérêts au taux contractuel de 8,50 % à la société Credipar ainsi que la somme de 200 euros d'indemnité de clause pénale et les dépens.
Par courrier reçu au greffe le 29 mars 2017, M. [N] a fait opposition à l'ordonnance portant injonction de payer.
Par jugement contradictoire du 20 juillet 2017, le tribunal d'instance de Nîmes a :
- déclaré 1'opposition formée par M. [U] [N] recevable
- mis à néant l'ordonnance portant injonction de payer rendue le 28 décembre 2016,
et statuant à nouveau, a :
- prononcé la déchéance du droit aux intérêts de la Sa Credipar au titre du prêt souscrit par M. [U] [N] le 1er août 2013, à compter de cette date
- condamné M. [U] [N] à payer à la Sa Credipar la somme de 4 871,46 euros au titre du contrat de crédit du 1er août 2013, avec intérêts au taux légal à compter du 15 septembre 2016
- débouté la Sa Credipar du surplus de ses demandes
- condamné M. [U] [N] aux entiers dépens.
Par déclaration du 14 mai 2018, la Sa Credipar a interjeté appel de cette décision.
Par arrêt de défaut du 23 avril 2020, la cour d'appel de Nîmes a :
- infirmé la décision déférée en ce qu'elle a prononcé la déchéance du droit aux intérêts de la SA Credipar au titre du prêt souscrit par M.[U] [N] le 1er août 2013 et en ce qu'elle a condamné M.[U] [N] à payer à la SA Credipar la somme de 4 871,46 euros avec intérêts au taux légal à compter du 15 septembre 2016 ;
Statuant à nouveau,
- dit n'y avoir lieu à déchéance du droit aux intérêts ;
- condamné M. [U] [N] à payer à la SA Credipar la somme de 10 325,77 euros avec intérêts au taux conventionnel de 8,50 % sur la somme de 9 687,47 euros à compter du 15 septembre 2016 ;
- débouté la SA Credipar de sa prétention au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
- condamné M. [U] [N] aux entiers dépens de l'appel.
Cet arrêt a été signifié à domicile à M [N] par acte du 4 mai 2020.
Le 16 juillet 2020, M. [N] a formé opposition de cette décision.
Selon conclusions d'incident signifiées le 25 janvier 2021, la société Credipar a saisi le conseiller de la mise en état aux fins d'irrecevabilité de l'opposition.
Par ordonnance du 8 juillet 2021, le conseiller de la mise en état a déclaré l'opposition recevable et a déclaré irrecevable l'incident soulevé par la Sa Crédipar relatif à la prescription des demandes de M.[N].
Dans ses dernières conclusions notifiées par voie électronique le 14 mars 2022 , M.[N] demande à la cour de confirmer le jugement rendu le 20 juillet 2017 par le tribunal d'instance de Nîmes en ce qu'il a prononcé la déchéance du droit aux intérêts de la société Credipar au titre du prêt qu'il a souscrit le 1er août 2013 avec intérêt au taux légal depuis le 16 septembre 2016, débouté la SA Credipar du surplus de ses demandes et de l'infirmer en ce qu'il l'a condamné aux dépens. Il sollicite en outre la condamnation de la SA Credipar à lui payer la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Il fait valoir que les demandes qu'il forme ne sont pas prescrites au regard de la requête introduite le 13 octobre 2016 par la société Credipar ayant interrompu la prescription, et de la procédure de première instance et d'appel.
Il rappelle que la société Credipar ne peut saisir les biens de la communauté des époux [N] mariés sous le régime légal de la communauté puisqu'il est seul à avoir souscrit le contrat.
Il soutient que l'organisme de crédit n'a pas vérifié sa solvabilité et a manqué à son obligation d'information sur le droit à rétractation de l'emprunteur et de transmission du bordereau afférent telle que prévue à l'article L. 311-12 ancien et suivants du code de la consommation, et que par voie de conséquence il doit être déchu de son droit aux intérêts.
Il ajoute que la société Credipar, pourtant à l'origine de la procédure, ne justifie pas le mode de calcul des intérêts et du TAEG, or la mention, dans l'offre de prêt, d'un taux conventionnel calculé sur la base d'une année autre que l'année civile, est sanctionnée par la déchéance du droit aux intérêts y compris lorsque l'inexactitude du taux entraîne, au regard du taux stipulé, un écart supérieur à une décimale.
Il sollicite en toute état de cause, eu égard sa situation financière, que la cour fasse application des articles L. 314-20 du code de la consommation et 1343-5 du code civil afin qu'il bénéficie des plus larges délais de paiement.
Dans ses dernières conclusions notifiées par voie électronique le 16 mars 2022, la société Credipar demande à la cour d'infirmer le jugement en ce qu'il a prononcé la déchéance du prêteur de son droit aux intérêts conventionnels, de juger irrecevables pour être prescrites les demandes de M. [N] et de le condamner à lui payer la somme de 10 325,77 euros avec intérêts au taux conventionnel de 8,50 % sur la somme de 9 687,47 euros à compter du 15 septembre 2016.
Y ajoutant, elle demande à la cour de condamner M. [N] à lui payer une indemnité de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Elle fait valoir que la demande formulée par M. [N] au titre de son régime matrimonial est irrecevable au regard des dispositions de l'article 577 du code de procédure civile, l'opposition ne faisant pas mention d'une telle demande et reste en toute hypothèse, sans conséquence sur la prise de titre.
Elle invoque l'irrecevabilité de la demande de déchéance du droit aux intérêts conventionnels pour TAEG erroné et absence de bordereau de rétractation formée par M. [N] pour la première fois dans le cadre de son opposition qui est prescrite au regard du délai prévu à l'article L.110-4 du code de commerce, M. [N] étant en capacité de déceler les irrégularités qu'il allègue dès l'acceptation du contrat de crédit le 1er août 2013, et l'assignation délivrée à son encontre n'étant pas de nature à interrompre ce délai.
Subsidiairement, elle soutient au surplus que M. [N] ne rapporte par la preuve qui lui incombe d'une erreur dans la régularité du taux indiqué sur le contrat, ni que cette erreur serait supérieure à la décimale.
Par ordonnance du 28 janvier 2022, la procédure a été clôturée le 21 mars 2022 et l'affaire a été fixée à l'audience du 4 avril 2022.
Par avis de déplacement d'audience, l'affaire a été déplacée à l'audience du 11 avril 2022 puis, par avis du 24 février 2022, à l'audience du 14 avril 2022.
Il est fait renvoi aux écritures susvisées pour un plus ample exposé des éléments de la cause, des moyens et prétentions des parties, conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.
MOTIFS DE LA DECISION
1- Sur la prise en compte du régime matrimonial de M.[N]
Il sera rappelé que la cour n'est saisie que des demandes figurant au dispositif des dernières écritures. A ce titre, M.[N] ne forme aucune demande concernant les biens de la communauté et la Sa Crédipar ne demande la condamnation que de M.[N] de sorte qu'il n'y pas lieu de statuer sur l'irrecevabilité de ce point qui au surplus ne constitue nullement une demande.
2- Sur la demande de déchéance du droit aux intérêts
La demande opposée par un emprunteur défendeur à l'action en paiement avec intérêts contractuels d'un organisme de crédit tendant à voir prononcer la déchéance du droit aux intérêts du prêteur est une défense au fond et non une demande reconventionnelle.
M.[N] dans le cadre de son opposition soutient que le jugement déféré doit être confirmé en ce qu'il a prononcé la déchéance du droit aux intérêts dés lors que la Sa Crédipar ne s'est pas assuré de sa solvabilité comme retenu par le premier juge mais également parce qu'il n'a pas été informé de son droit à rétractation et que le TAEG mentionné était erroné, moyens qu'il n'avait pas développés en première instance.
Ce faisant, il ne fait que s'opposer à la créance réclamée par l'organisme de crédit et ne fait que développer des moyens différents sur l'absence de bordereau de rétractation et d'information de l'emprunteur sur le délai de rétractation, et enfin sur la mention d'un TAEG erroné.
S'agissant de moyens de défense ils ne constituent pas des demandes nouvelles et n'encourent donc pas la prescription comme à tort soutenu par l'organisme de crédit.
Aux termes des dispositions de l'article L 311-9 du code de la consommation dans sa rédaction applicable au litige, le prêteur doit vérifier la solvabilité de l'emprunteur à partir d'un nombre suffisant d'informations et procéder à la consultation du fichier des incidents de crédits des particuliers avant la consultation du contrat de crédit.
M.[N] aux termes de ses dernières écritures n'indique pas en quoi l'organisme de crédit avait failli à son obligation de vérifier sa solvabilité et il ressort des pièces versées aux débats par la Sa Crédipar qu'elle a procédé à la consultation du Ficp à l'égard de l'emprunteur le 1er août 2013 qui ne mentionnait aucun incident de paiement.
Elle produit également la fiche de dialogue dont M.[N] a certifié l'exactitude des éléments mentionnés par sa signature le 1er août 2013.
Il en ressort que ce dernier bénéficiait d'un contrat de travail à durée indéterminée et d'un salaire mensuel de 1400 euros. Il ne déclarait aucune autre charge de crédit.
Par ailleurs, ces éléments étaient corroborés par la production de 3 bulletins de salaires attestant de salaire entre 1254 euros à 1411 euros.
Il s'en déduit que contrairement à ce qu'a affirmé le premier juge la Sa Crédipar a vérifié la solvabilité de M.[N] en capacité de faire face au remboursement de l'échance du prêt consenti.
S'agissant de l'absence de bordereau de rétractation et d'information du délai, il résulte de l'article L 311-12 du code de la consommation dans sa rédaction en vigueur à l'espèce, que le prêteur qui a accordé un crédit suivant une offre préalable doit remettre à l'emprunteur un formulaire détachable de rétractation et que l'emprunteur dispose d'un délai de 14 jours pour exercer son droit de rétractation en utilsant le formulaire détachable joint à son exemplaire du contrat de crédit. A défaut du respect de cette formalité il doit être déchu de son droit aux intérêts.
Ceci étant rappelé, il convient d'observer que la Sa Crédipar ne discute pas que l'exemplaire de l'offre de crédit dont elle est détentrice soit dépourvue d'un formulaire détachable à l'aide duquel l'emprunteur est mis à même d'exercer éventuellement son droit de rétractation.
La cour rappelle également que la clause type, figurant au contrat de prêt, selon laquelle les emprunteurs reconnaissent rester en possession d'un exemplaire de cette offre dotée d'un formulaire détachable de rétractation, est insuffisante à rapporter la preuve de la remise d'un bordereau détachable conforme sans autres éléments produits par le prêteur venant le corroborer.
Il suit que la signature de la mention d'une telle clause ne saurait, en ces conditions, être considérée en l'absence d'élément complémentaire de nature à prouver l'exécution par l'organisme de crédit de son obligation de joindre à l'exemplaire de l'offre de crédit remise à l'emprunteur un formulaire de rétractation régulier.
La société Crédipar n'a donc pas satisfait à l'obligation de joindre à l'offre préalable remise à l'emprunteur le formulaire détachable, à l'aide duquel l'emprunteur est mis à même d'exercer éventuellement son droit de rétractation, elle doit être déchue de son droit aux intérêts contractuels du prêt litigieux en totalité et le jugement de première instance mérite confirmation de ce chef sans qu'il soit besoin d'examiner le moyen tiré de l'irrégularité du TAEG.
3-Sur le montant de la créance de la Sa Crédipar
L'article L. 311-48 du code de la consommation dans sa version applicable à l'espèce, dispose qu'en cas de déchéance du droit aux intérêts en totalité ou dans la proportion prévue par le juge, l'emprunteur n'est tenu qu'au seul remboursement du capital suivant l'échéancier prévu.
Au regard des pièces produites aux débats et notamment du décompte de l'organisme de crédit et de l'historique du prêt c'est à juste titre que le premier juge a fixé la créance de ce dernier à la somme de 4 871,46 euros au titre du capital restant dû (capital emprunté - sommes versées par l'emprunteur).
Cette somme sera assortie des intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 15 septembre 2016.
Enfin, il sera rajouté qu'au regard de ce qui a été jugé ci-dessus l'indemnité de 8 % n'est pas due.
Le jugement de première instance mérite confirmation en ce qu'il a condamné M.[N] à payer à la Sa Crédipar la somme de 4 871,46 euros assortie des intérêts au taux légal à compter du 15 septembre 2016.
4-Sur la demande de délai
Au eagrd de la longueur de la procédure, M.[N] a déjà bénéficié de déais de paiement supéreiur à deux années. Il n'a durant cette période réalisé aucun versement en vue de résorber sa dette. Enfin, il a certes de revenus modestes mais n'est pas sans ressources puisqu'il perçoit des revenus fonciers et des revenus de son activité professionnelle. Sa demande de délai ne saurait ainsi prospérer.
5-Sur les demandes accessoires
M.[N] succombant à titre principal supportera la charge des dépens d'appel.
Aucun motif d'équité ne justifie qu'il soit fait droit aux demandes formées sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS,
LA COUR, après en avoir délibéré conformément à la loi,
Statuant publiquement par arrêt rendu par mise à disposition au greffe, contradictoirement et en dernier ressort,
Vu l'opposition recevable qui saisit à nouveau la cour de l'intégralité du litige ;
Juge que M. [U] [N] ne forme pas des demandes s'agissant de l'absence de bordereau de rétractation, d'information du délai de rétractatation, et de mention de TAEG erroné mais développe des moyens de défense à la demande en paiement ;
Déboute la Sa Crédipar de sa demande d'irrecevabilité des demandes de M.[N] ;
Confirme le jugement déféré en ses dispositions soumises à la cour ;
Y ajoutant,
Déboute M.[U] [N] de sa demande de délai ;
Déboute les parties de leurs demandes sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
Condamne M.[U] [N] aux dépens d'appel.
Arrêt signé par Mme TOULOUSE, Conseillère, par suite d'un empêchement du Président et par Mme RODRIGUES, Greffière.
LA GREFFIÈRE, LA PRÉSIDENTE,