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02/06/2022 | FRANCE | N°21/04187

France | France, Cour d'appel de Nîmes, 2ème chambre section a, 02 juin 2022, 21/04187


ARRÊT N°



N° RG 21/04187 - N° Portalis DBVH-V-B7F-IIF5



CG



TJ HORS JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP DE CARPENTRAS

23 septembre 2021 RG :20/01292



Société CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL ALPES-P ROVENCE



C/



[M]

S.A. CNP ASSURANCES













Grosse délivrée

le

à Me Alliez

Selarl Biscarrat

Selarl Pyxix

















COUR D'APPEL DE NÎMES


>CHAMBRE CIVILE

2ème chambre section A



ARRÊT DU 02 JUIN 2022







APPELANTE :



SOCIETE CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL ALPES-PROVENCE immatriculée au RCS d'Aix-en-Provence sous le n° 381 976 448 Prise en la personne de son représentant légal domicilié ès...

ARRÊT N°

N° RG 21/04187 - N° Portalis DBVH-V-B7F-IIF5

CG

TJ HORS JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP DE CARPENTRAS

23 septembre 2021 RG :20/01292

Société CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL ALPES-P ROVENCE

C/

[M]

S.A. CNP ASSURANCES

Grosse délivrée

le

à Me Alliez

Selarl Biscarrat

Selarl Pyxix

COUR D'APPEL DE NÎMES

CHAMBRE CIVILE

2ème chambre section A

ARRÊT DU 02 JUIN 2022

APPELANTE :

SOCIETE CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL ALPES-PROVENCE immatriculée au RCS d'Aix-en-Provence sous le n° 381 976 448 Prise en la personne de son représentant légal domicilié ès qualités audit siège social

[Adresse 2]

[Localité 1]

Représentée par Me Delphine DURANCEAU de la SELARL DURANCEAU PARTENAIRES & ASSOCIES, Plaidant, avocat au barreau de GRASSE

Représentée par Me Camille ALLIEZ, Postulant, avocat au barreau de NIMES

INTIMÉS :

Monsieur [F] [M]

né le 11 Décembre 1961 à [Localité 6]

[Adresse 8]

[Localité 5]

Représenté par Me Emile-henri BISCARRAT de la SELARL EMILE-HENRI BISCARRAT, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de CARPENTRAS

S.A. CNP ASSURANCES, immatriculée au RCS de Paris sous le N° 341 737 062, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège social

[Adresse 3]

[Localité 4]

Représentée par Me Lionel FOUQUET de la SELARL PYXIS AVOCATS, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de CARPENTRAS

Affaire fixée en application des dispositions de l'article 905 du code de procédure civile avec ordonnance de clôture rendue le 03 Mars 2022

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS :

Mme Catherine Ginoux, conseillère, a entendu les plaidoiries en application de l'article 805 du code de procédure civile, sans opposition des avocats, et en a rendu compte à la cour lors de son délibéré.

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Mme Marie-Agnès Michel, présidente de chambre

Mme Catherine Ginoux, conseillère

Madame Laure Mallet, conseillère

GREFFIER :

Mme Véronique Laurent-Vical, greffière, lors des débats et du prononcé de la décision

DÉBATS :

à l'audience publique du 14 mars 2022, où l'affaire a été mise en délibéré au 19 mai 2022 prorogé à ce jour

Les parties ont été avisées que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d'appel ;

ARRÊT :

Arrêt contradictoire, prononcé publiquement et signé par Mme Marie-Agnès Michel, présidente de chambre, et Mme Véronique Laurent-Vical, greffière, le 02 juin 2022, par mise à disposition au greffe de la cour

Expose du litige

Selon acte sous seing privé du 30 juin 2000, M. [F] [M], domicilié à [Adresse 7]), a contracté deux prêts immobiliers auprès de la Caisse Régionale de Crédit Agricole Alpes Provence, afin de financer 1'acquisition d'une parcelle de terrain à bâtir ainsi que la construction d'une maison d'habitation et a souscrit au contrat d'assurance collective pour garantir les risques décès, invalidité absolue et définitive, incapacité temporaire totale et, à titre facultatif, perte d'emploi, garantis en coassurance par la CNP assurances et Predica SA.

A compter du 1er octobre 2012, M. [M] a été placé en arrêt de travail en raison d'une hernie discale.

Il a alors sollicité de son assureur une demande d'indemnisation au titre de la garantie incapacité temporaire totale.

Après un premier refus, la compagnie CNP assurances a accepté, par courrier du 1er décembre 2014, la prise en charge des échéances des prêts à l'issue d'une période de franchise de 180 jours, à compter du 3 mars 2013.

La compagnie CNP assurances a ensuite cessé cette prise en charge en raison du fait que M. [M] bénéficiait d'une pension d'invalidité de « catégorie 1 » depuis le 1er juillet 2015, laquelle est accordée aux assurés sociaux dont l'état de santé leur permet de garder une capacité à travailler, alors que la garantie n'est mobilisable que si l'emprunteur bénéficie d'une pension d'invalidité de « catégorie 2 ou 3 » de l'article L 341.4 du code de la sécurité sociale.

M. [M], faisant état de ce que la compagnie CNP assurances lui a opposé les conditions générales du contrat d'assurance prévoyant en particulier comme cas d'exclusion de garantie les « lombalgie, sciatalgie, dorsalgie, cervicalgie ou autre mal de dos » et se plaignant de l'absence de perception d'une quelconque indemnisation depuis le 30 juin 2015 a, par actes introductifs d'instance délivrés respectivement le 14 octobre 2020 et le 20 novembre 2020, a, saisi le tribunal judiciaire de Carpentras d'une demande dirigée à l'encontre de la compagnie CNP assurances, et du Crédit Agricole,aux fins principalement de les voir condamner solidairement ces derniers à prendre en charge les échéances du prêt à compter du 30 juin 2015 à hauteur de 16 830 euros.

La Caisse régionale de Crédit agricole mutuel (CRCAM) Alpes Provence a, par conclusions du 22 février 2021, saisi « in limine litis » le juge de la mise en état d'une fin de non-recevoir aux fins de voir constater la prescription de l'action intentée par M. [M].

Par ordonnance rendue le 23 septembre 2021, le juge de la mise en état du tribunal judiciaire de Carpentras a :

- déclaré irrecevable, comme prescrite, l'action engagée par M. [F] [M] pour obtenir la prise en charge des échéances des prêts portant sur la période comprise entre le 30 juin 2015 et le 14 octobre 2015, s'agissant de la compagnie CNP assurances, et sur celle comprise entre le 30 juin 2015 et le 20 novembre 2015, s'agissant de la CRCAM Alpes Provence,

- déclaré recevable l'action de M. [F] [M] s'agissant de la prise en charge des échéances de prêt postérieures au 14 octobre 2015, s'agissant de la compagnie CNP assurances, et au 20 novembre 2015, s'agissant de la CRCAM Alpes Provence,

- rejeté présentement les réclamations respectives des parties au titre des frais irrépétibles,

- dit que chacune des parties conservera à sa charge les frais et dépens par elle exposés dans le cadre de la présente procédure d'incident,

Par déclaration enregistrée le 24 novembre 2021, la société Caisse régionale de Crédit agricole mutuel (CRCAM) Alpes-Provence a interjeté appel.

Suivant conclusions notifiées le 2 mars 2022, la société Caisse régionale de Crédit agricole mutuel (CRCAM) Alpes Provence demande à la cour de :

- réformer l'ordonnance du juge de la mise en état du tribunal judiciaire de Carpentras du 23 septembre 2021 en ce qu'elle a :

* déclaré recevable l'action de M. [F] [M] s'agissant de la prise en charge des échéances de prêt postérieures au 20 novembre 2015 s'agissant de la CRCAM Alpes Provence,

* rejeté les réclamations au titre des frais irrépétibles,

* dit que chacune des parties conservera à sa charge les frais et dépens par elle exposés dans le cadre de la procédure d'incident,

et, statuant de nouveau,

- juger prescrites les demandes de M. [M],

en conséquence,

- juger irrecevables les demandes formulées par M. [M] contre le Crédit agricole,

- rejeter l'appel incident formé par M. [M],

en tout état de cause,

- débouter M. [M] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,

- condamner M. [M] à verser au Crédit agricole la somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner M. [M] aux entiers dépens de première instance et d'appel.

L'appelante soutient que l'action de M. [M] est prescrite dès lors que sa découverte du prétendu manquement à l'obligation de conseil qu'il lui reproche se situe au plus tard le 1er juillet 2015, coincidant avec l'interruption de la prise en charge du remboursement du crédit par l'assurance, soit plus de cinq ans avant l'assignation.

Suivant conclusions notifiées le 2 février 2022, M. [M] demande à la cour :

- d'infirmer l'ordonnance rendue par le juge de la mise en état près le tribunal judiciaire de Carpentras le 23 septembre 2021 en ce qu'elle a :

* déclaré irrecevable, comme prescrite, l'action qu'il a engagée pour obtenir la prise en charge des échéances des prêts portant sur la période comprise entre le 30 juin 2015 et le 14 octobre 2015, s'agissant de la compagnie CNP assurances, et sur celle comprise entre le 30 juin 2015 et le 20 novembre 2015, s'agissant de la CRCAM Alpes Provence,

et statuant à nouveau :

- de prononcer la recevabilité de l'ensemble des demandes qu'il a formulées à l'encontre de la compagnie CNP assurances et de la CRCAM Alpes Provence par acte en date du 14 octobre 2020 aux fins d'obtenir la prise en charge des échéances de prêt à compter du 30 juin 2015 à hauteur de 16 830 euros, devant le tribunal judiciaire de Carpentras,

- débouter la compagnie CNP assurances et le CRCAM Alpes Provence de sa demande de fin de non-recevoir tirée de la prescription,

à titre subsidiaire : dans l'hypothèse où la cour de céans devait considérer que la prescription de l'action de M. [M] devait être retenue :

- limiter l'irrecevabilité aux seules demandes relatives aux absences de prise en charge des échéances de prêt antérieures au 14 octobre 2015 pour la CNP assurances et le 20 novembre 2015 pour le Crédit agricole Alpes Provence,

- prononcer la recevabilité des demandes de prise en charge des échéances de prêts à compter du 14 octobre 2015 pour la CNP assurances et à compter du 20 novembre 2015 pour le CRCAM Alpes Provence,

en tout état de cause,

- condamner le Crédit agricole à lui payer la somme de 1 500 euros au titre des frais irrépétibles outre les entiers dépens de l'instance.

M. [M] prétend qu'il n'a été informé du refus de prise en charge par le CNP qu'à compter du courrier de la CNP en date du 1er mars 2019, de sorte que le délai de prescription tant à l'égard de la CNP que de la banque, n'a pu courir qu'à compter de cette date, s'agissant d'une obligation à termes successifs.

Suivant conclusions notifiées le 7 janvier 2022, la SA CNP Assurances demande à la cour de :

- déclarer recevable son appel incident, le dire juste et bien fondé,

- réformer l'ordonnance du juge de la mise en état du tribunal judiciaire de Carpentras du 23 septembre 2021,

Statuant à nouveau

Vu l'article L114-1 du code des assurances,

- juger prescrite l'action de M. [M],

- juger irrecevables les demandes formulées par M. [M] contre elle,

- débouter M. [M] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,

- condamner M. [M] à lui payer la somme de 1 500 euros au titre des frais irrépétibles,

- condamner M. [M] aux entiers dépens.

La CNP prétend qu'il appartenait à M. [M] d'agir dès la fin de la prise en charge des échéances de prêt , soit dès le 1er juillet 2015, de sorte que la prescription biennale de l'article L 114-1 du code des assurances était acquise lors de la délivrance de l'assignation.

La clôture de la procédure a été fixée au 3 mars 2022.

Motifs de la décision

Sur la prescription

Il convient de distinguer l'action de M. [M] à l'encontre de son assureur - la société CNP- de celle formée à l'encontre de la banque - le CRCAM Alpes Provence , la première étant soumise aux dispositions dérogatoires de l'article L114-1 du code des assurances, tandis que la seconde obéit à la prescription quinquennale de droit commun prévue à l'article 2224 du code civil.

Sur l'action à l'encontre de la CNP

Aux termes de l'article L. 114-1, alinéa 1er, du Code des assurances, toutes actions dérivant d'un contrat d'assurance sont prescrites par deux ans à compter de l'événement qui y donne naissance.

En matière d'assurance de groupe souscrite par un établissement de crédit, et à laquelle adhère un emprunteur pour la couverture des risques pouvant avoir une incidence sur le remboursement de l'emprunt, la prescription de l'action de l'assuré contre l'assureur ne commence à courir qu'à compter du premier des deux événements suivants, soit le refus de garantie de l'assureur, soit la demande en paiement de l'établissement de crédit, bénéficiaire de l'assurance par l'effet de la stipulation faite à son profit.

En l'espèce, la CNP à qui incombe la charge de la preuve de la date à laquelle elle a refusé sa garantie, produit une copie du courrier adressé par son service en charge des réclamations le 1er mars 2019 au conseil de M. [M] et ce, en réponse à une contestation de l'assuré en date du 7 novembre 2018 concernant la cessation de la prise en charge des échéances d'emprunt en raison de l'admission de M. [M] au bénéfice d'une pension d'invalidité de type1, précisant qu'elle maintient son refus d'indemnisation à compter du 30 juin 2015.

Toutefois elle ne produit pas le refus de prise en charge initial ayant provoqué la réclamation de M. [M] de sorte qu'il y a lieu de retenir la date du 7 novembre 2018 comme la date à laquelle M. [M] a eu connaissance du refus de garantie de la CNP.

Il s'en déduit que l'assuré disposait d'un délai expirant le 7 novembre 2020 pour agir à l'encontre de la CNP et contester son refus de garantie.

En conséquence, l'action engagée par l'assignation délivrée à la société CNP le 14 octobre 2020, n'est pas atteinte par la prescription biennale.

Il y a donc lieu de déclarer recevable et non prescrite l'action de M. [M] à l'encontre de la CNP et d'infirmer l'ordonnance déférée qui l'a déclaré partiellement prescrite.

Sur l'action à l'encontre de la banque CRCAM Alpes Provence

M. [M] recherche la responsabilité de la banque pour ne pas l'avoir informé de l'existence d'une clause d'exclusion concernant les pathologies lombaires.

Or, dans un courrier adressé à M. [M] le 1er décembre 2014 que ce dernier ne conteste pas avoir reçu, en réponse à sa réclamation du 5 novembre 2014, la CNP indique qu'elle accepte de revoir sa position et de renoncer à appliquer la clause d'exclusion contractuelle, ce dont il peut être déduit que dès le 5 novembre 2014, M. [M] avait connaissance des faits lui permettant d'exercer une action en responsabilité à l'encontre de la banque pour manquement à son obligation de conseil.

Or, plus de cinq années se sont écoulées entre le point de départ de la prescription (5 novembre 2014) et l'assignation introductive d'instance formalisée le 20 novembre 2020, de sorte que l'action de M. [M] à l'encontre de la banque est prescrite.

Il y a donc lieu d'infirmer l'ordonnance déférée en ce qu'elle a déclaré partiellement prescrite l'action de M. [M] à l'encontre de la CRCAM Alpes Provence.

Sur les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et les dépens

La CNP qui succombe en ses prétentions, sera condamnée à verser à M. [M] la somme de 1.500 € sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens de première instance et d'appel.

L'équité commande de ne pas faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile au profit de la banque.

PAR CES MOTIFS,

LA COUR :

Après en avoir délibéré conformément à la loi,

Statuant publiquement, contradictoirement, en matière civile et en dernier ressort,

Infirme l'ordonnance déférée

Statuant à nouveau

Déclare recevable et non prescrite l'action de M. [F] [M] à l'encontre de la SA CNP Assurances

Déclare irrecevable comme prescrite l'action de M. [F] [M] à l'encontre de la société Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel Alpes Provence

Condamne la SA CNP Assurances à payer à M. [F] [M] la somme de 1.500 € au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile

Dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile au profit de la société Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel Alpes Provence

Condamne la société Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel Alpes Provence aux dépens d' instance (1ère instance et appel)

Arrêt signé par la présidente de chambre et par la greffière.

la greffière, la présidente,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Nîmes
Formation : 2ème chambre section a
Numéro d'arrêt : 21/04187
Date de la décision : 02/06/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-06-02;21.04187 ?
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