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02/06/2022 | FRANCE | N°20/01784

France | France, Cour d'appel de Nîmes, 2ème chambre section a, 02 juin 2022, 20/01784


ARRÊT N°



N° RG 20/01784 - N° Portalis DBVH-V-B7E-HYFD



LM



TJ HORS JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP DE PRIVAS

02 juillet 2020 RG :18/00522



[V] [F]

[V] [F] NEE [B]



C/



S.A.R.L. DEMEURES ET TRADITIONS

S.A. AXA FRANCE IARD

















Grosse délivrée

le

à Selarl Lexavoue

Me Bifeck

SCP BCEP















COUR D'APPEL DE NÎMES



CHAMBRE CIV

ILE

2ème chambre section A



ARRÊT DU 02 JUIN 2022





APPELANTS :



Monsieur [H] [V] [F]

né le 29 Janvier 1966 à [Localité 8] (VAR)

[Adresse 4]

[Localité 1]



Représenté par Me Emmanuelle VAJOU de la SELARL LEXAVOUE NIMES, Postulant, avocat au barreau de NIMES

Représenté p...

ARRÊT N°

N° RG 20/01784 - N° Portalis DBVH-V-B7E-HYFD

LM

TJ HORS JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP DE PRIVAS

02 juillet 2020 RG :18/00522

[V] [F]

[V] [F] NEE [B]

C/

S.A.R.L. DEMEURES ET TRADITIONS

S.A. AXA FRANCE IARD

Grosse délivrée

le

à Selarl Lexavoue

Me Bifeck

SCP BCEP

COUR D'APPEL DE NÎMES

CHAMBRE CIVILE

2ème chambre section A

ARRÊT DU 02 JUIN 2022

APPELANTS :

Monsieur [H] [V] [F]

né le 29 Janvier 1966 à [Localité 8] (VAR)

[Adresse 4]

[Localité 1]

Représenté par Me Emmanuelle VAJOU de la SELARL LEXAVOUE NIMES, Postulant, avocat au barreau de NIMES

Représenté par M. Bruno METRAL, plaidant, avocat au barreau de LYON

Madame [K] [V] [F] Née [B]

née le 14 Janvier 1970 à [Localité 7] (ARDECHE)

[Adresse 4]

[Localité 1]

Représentée par Me Emmanuelle VAJOU de la SELARL LEXAVOUE NIMES, Postulant, avocat au barreau de NIMES

Représenté par M. Bruno METRAL, plaidant, avocat au barreau de LYON

INTIMÉES :

S.A.R.L. DEMEURES ET TRADITIONS immatriculée au RCS de AUBENAS sous le N° B 489 518 191 prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 3]

[Localité 2]

Représentée par Me Célestine BIFECK, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de NIMES

S.A. AXA FRANCE IARD prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié ès qualités au siège social sis

[Adresse 5]

[Localité 6]

Représentée par Me Geoffrey PITON de la SCP B.C.E.P., Plaidant/Postulant, avocat au barreau de NIMES

ORDONNANCE DE CLÔTURE rendue le 27 Janvier 2022

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS :

Madame Laure Mallet, conseillère, a entendu les plaidoiries en application de l'article 805 du code de procédure civile, sans opposition des avocats, et en a rendu compte à la cour lors de son délibéré.

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Mme Marie-Agnès Michel, présidente de chambre

Mme Catherine Ginoux, conseillère

Madame Laure Mallet, conseillère

GREFFIER :

Mme Céline Delcourt, greffière, lors des débats et Mme Véronique Laurent-Vical, greffière, lors du prononcé de la décision

DÉBATS :

à l'audience publique du 17 février 2022, où l'affaire a été mise en délibéré au 21 avril 2022 prorogé à ce jour

Les parties ont été avisées que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d'appel ;

ARRÊT :

Arrêt contradictoire, prononcé publiquement et signé par Mme Marie-Agnès Michel, présidente de chambre,et par Mme Véronique Laurent-Vical, greffière, le 02 juin 2022, par mise à disposition au greffe de la Cour

EXPOSE DU LITIGE

M. [H] [V] [F] et Mme [K] [B], épouse [V] [F], ont confié à la société Demeures et traditions des travaux d'extension de leur maison d'habitation sise [Adresse 4] (Ardèche) selon devis en date du 29 février 2012, et de réaménagement de bâtiments existants (pool house, salle de bains et chambre).

Les travaux ont démarré le 20 juillet 2012 pour s'achever le 29 avril 2013.

M.et Mme [V] [F] ont fait établir un constat d'huissier le 30 mai 2012 pour dresser un état des lieux de la propriété avant l'engagement des travaux.

Ils ont fait intervenir l'huissier une deuxième fois, le 2 août 2012 et une troisième fois, le 12 mars 2013, pour procéder à certaines constatations sur le chantier de l'agrandissement.

Un quatrième procès-verbal de constat a été établi à leur demande le 13 juin 2013, concernant les désordres affectant le chantier d'agrandissement constitués par des remontées d'humidité sur les murs.

En septembre 2013, ils ont fait appel au Cabinet Sassoulas, consultant en technique du bâtiment, pour constater les travaux d'isolation réalisés par la société Demeures et traditions donner un avis sur la conformité de l'exécution, constater les désordres liés aux remontées d'humidité et en rechercher l'origine. Les rapports ont été déposés les 19 novembre 2013 et 15 avril 2014.

Le 26 juin 2014, les époux [V] [F] ont saisi le juge des référés du tribunal de grande instance de Privas en désignation d'un expert judiciaire.

Par ordonnance en date du 25 juillet 2014, M. [R] [U] a été désigné.

Il a déposé son rapport le 17 juin 2015.

Par actes d'huissier délivrés les 9 et 10 septembre 2015, les époux [V] [F] ont fait assigner la SARL Demeures et traditions ainsi que son assureur décennal la compagnie Axa France Iard devant le juge des référés du tribunal judiciaire de Privas afin d'obtenir à titre provisionnel leur condamnation solidaire à leur payer la somme de 10 050 euros hors taxes outre la TVA au titre des travaux de reprise préconisés par l'expert judiciaire.

Par ordonnance du 15 octobre 2015, le juge des référés a constaté l'existence de contestations sérieuses et a renvoyé l'affaire au fond par application de l'article 811 du code de procédure civile.

Par ordonnance du 16 juin 2016, le juge de la mise en état a ordonné un complément d'expertise et désigné Mme [Y] pour y procéder.

L'expert a déposé son rapport le 3 août 2017.

Par jugement contradictoire du 2 juillet 2020, le tribunal judiciaire de Privas a :

- dit qu'aucune réception tacite des travaux commandés à la société Demeures et traditions n'est intervenue,

- débouté les époux [V] [F] de l'ensemble de leurs demandes à l'encontre de la société Demeures et traditions sur le fondement de la garantie décennale,

- débouté les époux [V] [F] et la société Demeures et traditions de leurs demandes en garantie de la Compagnie Axa France Iard sur le fondement de la responsabilité décennale,

- déclaré l'action en paiement de la société Demeures et traditions prescrite,

- dit n'y avoir lieu à ordonner l'exécution provisoire de la décision,

- dit n'y avoir lieu à faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné in solidum les époux [V] [F] et la société Demeures et traditions aux dépens, qui seront partagés par moitié entre eux.

Par déclaration du 22 juillet 2020, M. et Mme [V] [F] ont relevé appel de ce jugement.

Dans leurs dernières conclusions remises et notifiées le 15 mars 2021, auxquelles il est expressément référé, M. et Mme [V] [F] demandent à la cour de :

Vu l'article 373 du code de procédure civile,

Vu les articles 1792 et suivants et 1147 ancien du code civil,

Vu l'article L 137-2 du code de la consommation,

Vu le rapport d'expertise judiciaire de M. [U] du 17 juin 2015,

Vu le rapport d'expertise judiciaire de Mme [Y] du 1er août 2017,

Vu les pièces communiquées sous bordereau annexé aux présentes,

Statuant sur l'appel formé par M. et Mme [V] [F], à l'encontre de la décision rendue le 2 juillet 2020 par le tribunal judiciaire de Privas,

- le déclarant recevable et bien fondé,

- y faisant droit,

- infirmer la décision entreprise en ce qu'elle a :

* dit qu'aucune réception tacite des travaux commandés à la société Demeures et traditions n'est intervenue,

* débouté les époux [V] [F] de l'ensemble de leurs demandes à l'encontre de la société Demeures et traditions sur le fondement de la garantie décennale,

* débouté les époux [V] [F] et la société Demeures et traditions de leurs demandes en garantie de la compagnie Axa France Iard sur le fondement de la responsabilité décennale,

* dit n'y avoir lieu à faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

* condamné in solidum les époux [V] [F] et la société Demeures et traditions aux dépens, qui seront partagés par moitié entre eux.

En ce qu'elle n'a pas statué sur les demandes des époux [V] [F] aux fins de voir :

- condamner solidairement la société Demeures et traditions et son assureur la société Axa France Iard à payer aux époux [V] [F] la somme de 3 025 euros TTC au titre des travaux extérieurs,

- condamner solidairement la société Demeures et traditions et son assureur la société Axa France Iard à payer aux époux [V] [F] la somme de 14 000 euros à titre d'indemnisation du trouble de jouissance subi depuis 29 avril 2013.

Statuant à nouveau,

- condamner solidairement la société Demeures et traditions et son assureur la société Axa France Iard à payer aux époux [V] [F] la somme de 19 690 euros TTC, au titre des travaux de reprises intérieures des désordres,

- condamner solidairement la société Demeures et traditions et son assureur la société Axa France Iard à payer aux époux [V] [F] la somme de 3 025 euros TTC au titre des travaux extérieurs,

- condamner solidairement la société Demeures et traditions et son assureur la société Axa France Iard à payer aux époux [V] [F] la somme de 14 000 euros à titre d'indemnisation du trouble de jouissance subi depuis 29 avril 2013,

- débouter la société Demeures et traditions de ses demandes contre M. et Mme [V] [F], outre appel incident,

- débouter la société Axa de ses demandes contre M. et Mme [V] [F], outre appel incident,

- rejeter toutes fins, demandes et prétentions formulées contre M. et Mme [V] [F], outre appel incident,

- condamner solidairement la société Demeures et traditions et son assureur la société Axa France Iard à payer aux époux [V] [F] la somme de 10 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner les mêmes aux dépens de l'instance qui comprendront les frais des expertises judiciaires de M. [U] de 4 513,13 euros et de Mme [Y] de 4 366,53 euros.

Dans ses dernières conclusions remises et notifiées le 16 décembre 2020, auxquelles il est expressément référé, la SARL Demeures et traditions demande à la cour de :

Vu les articles 1792 et suivants du code civil,

Vu les rapports d'expertise,

Vu les pièces versées aux débats,

- infirmer le jugement déféré en ce qu'il a dit qu'aucune réception tacite des travaux n'est intervenue avec ses conséquences de droit,

- jugeant à nouveau :

à titre principal,

- dire et juger qu'il y a bien eu une réception tacite des travaux par les époux [V] [F],

- condamner la compagnie Axa France Iard à relever et garantir la société Demeures et traditions de toutes les condamnations prononcées à son encontre, en sa qualité d'assureur décennal,

à titre subsidiaire,

- dire et juger que les désordres imputables à la société Demeures et traditions engagent sa responsabilité de droit commun,

en conséquence,

- condamner la compagnie Axa France Iard à relever et garantir la société Demeures et traditions de toutes les condamnations prononcées à son encontre, au titre de la responsabilité de droit commun,

en tout état de cause,

- constater que les experts judiciaires ont conclu à une pluralité de faits générateurs des désordres imputables pour partie aux demandeurs et pour partie à la société Demeures et traditions

- constater que les experts judiciaires n'ont pas pu déterminer les parts de responsabilité incombant aux demandeurs et à la société Demeures et traditions dans la réalisation des désordres et leur ampleur,

- dire et juger que les désordres de nature décennale affectant l'extension ont des causes multiples imputables tant aux demandeurs qu'à la société Demeures et traditions,

en conséquence,

- juger au partage de responsabilité entre les époux [V] [F] et la société Demeures et traditions à hauteur de 50% chacun, soit 9 460 euros TTC chacun pour les travaux de remise en état.

- fixer à la somme de 4 750 euros le préjudcie de jouissance des époux [V] [F],

- dire et juger qu'il y a lieu au partage des dépens, en ceux compris les frais d'expertises judiciaires, pour moitié à charge des époux [V] [F] et de la société Demeures et traditions

- condamner les époux [V] [F] à payer à la société Demeures et traditions la somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Dans ses dernières conclusions remises et notifiées le 18 janvier 2021, auxquelles il est expressément référé, la SA Axa France Iard demande à la cour de :

Vu les articles 1792 et suivants du code civil,

Vu les pièces versées aux débats,

- dire et juger l'appel interjeté par les consorts [V] [F] recevable en la forme mais infondé,

- dire et juger l'appel incident interjeté par la société Demeures et traditions recevable en la forme mais infondé,

- confirmer le jugement dont appel en toutes ses dispositions,

Par conséquent :

à titre principal :

- dire et juger que l'ouvrage n'a pas été réceptionné,

- débouter toutes les parties de leurs demandes, fins et conclusions, et appel incident à l'encontre de la compagnie Axa,

à titre subsidiaire,

- dire et juger que les prétendus désordres étaient tous apparents, connus et réservés lors d'une éventuelle réception,

- dire et juger que la compagnie Axa n'a pas à garantir la responsabilité contractuelle de la société Demeures et traditions,

- débouter toutes les parties de leurs demandes, fins et conclusions, et appel incident à l'encontre de la compagnie Axa,

en tout état de cause :

- rejeter toutes demandes contraires aux présentes,

- condamner solidairement les époux [V] [F] et la société Demeures et traditions à payer à la compagnie Axa une somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens de première instance et d'appel.

La clôture de la procédure est intervenue le 27 janvier 2022.

MOTIFS DE LA DECISION

Il ne ressort pas des pièces du dossier d'irrecevabilité de l'appel que la cour devrait relever d'office et les parties n'élèvent aucune discussion sur ce point.

En préliminaire, il y lieu de constater qu'aucun appel n'est formulé à l'encontre du jugement déféré en ce qu'il a déclaré l'action en paiement de la société Demeures et Traditions prescrite.

Sur la réception,

L'article 1792-6 du code civil n'exclut pas la possibilité d'une réception tacite .

Mais pour se prévaloir d'une réception tacite des travaux ouvrant droit à garantie décennale conformément aux dispositions des articles 1792 et suivants du code civil, il appartient à ceux qui l'invoquent de prouver que le maître d'ouvrage a manifesté une volonté non équivoque d'accepter l'ouvrage, même avec réserves.

La prise de possession de l'ouvrage et le paiement des travaux font présumer la volonté non équivoque du maître de l'ouvrage de le recevoir avec ou sans réserve.

En l'espèce, il résulte du rapport d'expertise judiciaire de M. [U] que le solde restant dû est de 1 463.22 € TTC correspondant donc à moins de 6% du marché « partie extension », ouvrage objet des désordres.

Dès lors, les travaux ont été quasiment intégralement payés, le solde restant dû s 'assimilant en réalité à la retenue de garantie pour la levée des réserves qui ont effectivement été constatées par le procès-verbal de constat d'huissier le 12 mars 2013, quelques jours avant la facture du 29 avril 2013 marquant l'achèvement des travaux avec façades.

L'huissier mandaté constate :

- interrupteur de la porte fenêtre manquant,

-porte wc ne ferme pas ; les gonds ne portent pas sur ceux du cadre,

-trou de l'escalier au niveau de la dalle du premier étage n'est pas rond,

-dans la chambre chinoise, le radiateur est installé sur le côté et non sous le mur, le mur extérieur côté fenêtre qui n'est pas droit, ceci est visible au sol car le carrelage n'est pas régulier,

-dans le couloir du premier étage, la trappe d'accès aux combles a été bricolée, mal réalisée et le placoplâtre du mur côté dressing est bombé.

Comme l'a pertinemment relevé le premier juge, il ne ressort pas des éléments du dossier que le chantier extension aurait été abandonné comme le soutient l'assureur.

En effet, le procès-verbal de constat dressé le 12 mars 2013 met en évidence que s'il reste à l'extérieur deux tonneaux et quelques objets, l'intérieur est terminé.

L'expert [U] indique d'ailleurs dans son rapport, reprenant les propos de M. [V], que le 20 mars 2013 correspond à la « fin des travaux » sans procès-verbal de réception hors façades. Il précise que le terme « abandon de chantier » apparaît « totalement inadapté pour définir un chantier entièrement réalisé y compris enduits de façades ».

Les prestations commandées ont été entièrement réalisées et les travaux achevés, de sorte que l'abandon de chantier n'est pas caractérisé.

Quant à la prise de possession des lieux, celle-ci a bien eu lieu le 29 avril 2013.

En effet, la manifestation des premiers désordres est apparue le 13 juin 2013, date à laquelle les maîtres de l'ouvrage ont fait dresser un procès-verbal par un huissier qui a constaté des remontés d'humidité de couleur noire apparaissant sur la périphérie des murs ainsi que dans le wc.

Dès lors, les époux [V] [F] ont bien pris possession des lieux plus d'un mois avant l'apparition des premiers désordres en soldant à plus de 90% la facture de fin de chantier présentée par la SARL Demeures et traditions, en émettant quelques réserves.

Ainsi, la prise de possession des lieux avec le paiement quasi intégral du prix caractérise une réception tacite au 29 avril 2013 avec les réserves émises dans le procès verbal de constat d'huissier du 12 mars 2013.

Les diligences postérieures consistant à consulter un technicien puis à solliciter des expertises judiciaires n'avaient pour objet que de déterminer l'origine des désordres apparus postérieurement à la réception.

En conséquence, infirmant le jugement déféré, il y lieu de constater qu'une réception tacite avec réserves mentionnées dans le procès verbal de constat d'huissier du 12 mars 2013 est intervenue le 29 avril 2013 entre les époux [V] et la SARL Demeures et traditions.

Sur les responsabilités,

Selon l'article 1792 du code civil «Tout constructeur d'un ouvrage est responsable de plein droit, envers le maître ou l'acquéreur de l'ouvrage, des dommages, même résultant d'un vice du sol, qui compromettent la solidité de l'ouvrage ou qui, l'affectant dans l'un de ses éléments constitutifs ou l'un de ses éléments d'équipement, le rendent impropre à sa destination.

Une telle responsabilité n'a point lieu si le constructeur prouve que les dommages proviennent d'une cause étrangère.»

Il ressort des rapports d'expertise judiciaire que l'agrandissement est atteint de traces importantes de moisissures sur les plaques de plâtre du doublage sur une hauteur de 40 à 60 cm avec une humidité importante sur les parois et sous carrelage par infiltration, rendant l'extension de habilitation impropre à sa destination.

Contrairement à ce que soutient l'assureur décennal, ces désordres n'étaient pas apparents à la réception puisqu'ils sont apparus postérieurement et n'ont fait l'objet d'aucune réserve.

En conséquence le caractère décennal des désordres est établi.

Il ressort du rapport d'expertise de Mme [Y] que l'origine des désordres est due à une accumulation d'eau importante en pied de mur ou au niveau des fondations et sous l'emprise de l'extension avec une remontée à travers les cloisons et que cette remontée d'eau est rendue possible voire favorisée par :

-une mise en 'uvre non conforme en pied de cloisons de doublage (dispositif visant à empêcher la remontée de l'eau compte tenu du contexte),

-l'absence ou l'inefficacité de la coupure de capillarité au niveau des murs périphériques du local

-un dispositif d'étanchéité des murs de soubassement, non protégé par une nappe à excroissance par exemple, donc facilement altérable,

-une mise en 'uvre non conforme du dallage et du hérisson de gravier,

-une superposition de dallages et isolant (emprisonnant l'eau accumulée),

-l'absence de drains périphériques .

Si la responsabilité décennale est une responsabilité de plein droit ne nécessitant pas la démonstration d'une faute, elle implique en revanche d'établir un lien d'imputabilité, c'est à dire un lien de causalité entre la cause du dommage, le désordre, et la sphère d'intervention du constructeur.

Un même dommage peut néanmoins être imputable à un ou plusieurs intervenants dont les interventions se juxtaposent.

Il résulte du même rapport d'expertise que :

-sur les ouvrages réalisés par l'entreprise Demeures et traditions, il a été observé :

*la non-conformité ou un choix de mise en 'uvre de nature à piéger l'eau ou à l'empêcher de s'évacuer,

*le manque de précautions quant aux choix techniques compte tenu du contexte topographie et de l'existant (traitement en pied de cloisons, décaissement....).

-sur les ouvrages non inclus au marché on constate que :

*les terres n'ont pas été étalées de manière à les écarter des murs des façades,

*il n'a pas été réalisé de drain périphérique,

*le caniveau présente des défauts de mise en 'uvre,

Tout cela étant de nature à aggraver la situation en ce qui concerne la stagnation de l'eau en pied de mur et sous l'emprise de l'extension réalisée.

M. [U], dans son rapport de 2015, avait déjà mis en évidence que les trois conformités expliquant les causes des désordres étaient :

-l'absence d'étanchéité sur les éléments de jonction de l'extension,

-l'absence de drainage (voir complément de drainage),

-une non-conformité du doublage réalisé.

En conséquence, les désordres sont dus à des non conformités des travaux réalisés par l'entreprise mais l'absence de drain et les travaux extérieurs réalisés par les maîtres de l'ouvrage ont favorisé voire aggravé la situation.

Pour autant le constructeur, professionnel, n'a pas proposé au maître de l'ouvrage la prestation d'un drain.

Par ailleurs, l'entreprise avec ses compétences a accepté de travailler sur des plans fournis par le maître d'ouvrage et aurait dû prendre toutes les dispositions nécessaires qui s'imposaient pour assurer l'étanchéité de cet ouvrage.

En fonction de ces éléments, il y donc lieu d'opérer un partage de responsabilité à hauteur de 20% entre les maîtres de l'ouvrage et 80 % pour l'entreprise.

Sur les préjudices,

Sur les travaux de reprise,

Mme [Y] préconise des travaux intérieurs et extérieurs évalués à la somme de 18 920.00 € TTC ( 15 895 € + 3025 €).

Les solutions techniques proposées par l'expert ne sont pas discutées mais les appelants réclament la somme globale de 22 715 €, estimant que les travaux intérieurs doivent être chiffrés à la somme de 19 690 € selon devis de la société Léger.

Or, l'expert judiciaire dans le cadre de la réponse aux dires, a clairement expliqué la raison et la méthode de son chiffrage, ayant par ailleurs évalué le doublage à partir de deux devis.

En conséquence, la Sarl Demeures et traditions sera condamnée à payer aux appelants la somme de 15 136 € (80% de 18 920.00 €) au titre des travaux de reprise.

Sur le préjudice de jouissance,

Les époux [V] [F] sollicitent la somme de 14 000 €, soit 250 € X 56 mois, au titre de leur préjudice de jouissance.

Le préjudice de jouissance dans son principe n'est pas contesté et correspond à l'impossibilité d'utiliser l'extension eu égard aux moisissures et la forte humidité des lieux.

Le montant évalué par les deux experts à la somme mensuelle de 250 € correspondant à la location d'un local à usage professionnel pour une surface et une activité équivalente n'est pas discuté .

En revanche, il convient de rappeler que les désordres sont apparus seulement en juin 2013 et qu'ils se sont aggravés avec le temps et avec les saisons rendant progressivement et totalement inutilisables les lieux.

Par ailleurs, il n'est pas démontré de retard significatif dans les diligences accomplies par les appelants pour obtenir l'indemnisation leur permettant de procéder aux travaux.

Il y a, en conséquence, lieu de fixer le préjudice de jouissance à compter de septembre 2013 et pour 51 mois, soit 250 € X 51 mois, soit 12 750 €.

En conséquence, la Sarl Demeures et Traditions sera condamnée à payer aux appelants la somme de 10 200 € (80% de 12 750 €) au titre du préjudice de jouissance.

Sur la garantie de la SA Axa France Iard,

Pour les motifs exposés ci-avant, la SA Axa France Iard, assureur de la Sarl Demeures et Traditions, sera condamnée in solidum avec son assuré à payer le coût des travaux de reprise et du préjudice de jouissance.

En effet, s'agissant du préjudice de jouissance, l'assureur ne conteste pas devoir sa garantie à ce titre et ne produit pas les conditions particulières permettant à la cour de vérifier la prise en charge de ce préjudice immatériel consécutif au préjudice matériel garanti.

Sur l'appel en garantie de la Sarl Demeures et traditions à l'encontre de la SA Axa France Iard,

La Sarl Demeures et traditions demande à être relevée et garantie par la SA Axa France Iard de toutes les condamnations prononcées à son encontre, en sa qualité d'assureur décennal.

Eu égard à la présente décision, il sera fait droit à cette demande.

Sur les demandes accessoires:

En application de l'article 696 du code de procédure civile, il sera fait masse des dépens de première instance et d'appel, y compris les frais des deux expertises judiciaires, qui seront supportés in solidum par la Sarl Demeures et Traditions et la SA Axa France Iard à hauteur de 80 % et par M. [H] [V] [F] et Mme [K] [B] épouse [V] [F] à hauteur de 20%.

Il n'est pas équitable de laisser supporter aux appelants leurs frais irrépétibles de première instance et d'appel. Il lui sera alloué la somme de 4 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Il n'est pas inéquitable de laisser supporter aux intimés leurs frais irrépétibles de première instance et d'appel.

Il n'est pas inéquitable de laisser supporter à la Sarl Demeures et Traditions et la SA Axa France Iard leurs frais irrépétibles de première instance et d'appel.

PAR CES MOTIFS,

LA COUR :

Après en avoir délibéré conformément à la loi,

Statuant publiquement, contradictoirement, en matière civile et en dernier ressort,

Dans la limite de sa saisine,

Infirme le jugement déféré en l'ensemble de ses dispositions,

Statuant à nouveau sur le tout,

Constate qu'une réception tacite est intervenue le 29 avril 2013 avec les réserves contenues au procès verbal de constat d'huissier du 12 mars 2013,

Condamne in solidum la Sarl Demeures et traditions et la SA Axa France Iard à payer à M. [H] [V] [F] et Mme [K] [B] épouse [V] [F] la somme de 15 136 € au titre des travaux de reprise,

Condamne in solidum la Sarl Demeures et traditions et la SA Axa France Iard à payer à M. [H] [V] [F] et Mme [K] [B] épouse [V] [F] la somme de 10 200 € au titre du préjudice de jouissance,

Condamne la SA Axa France Iard à relever et garantir la Sarl Demeures et traditions des condamnations prononcées à son encontre au titre des travaux de reprise et du préjudice de jouissance,

Fait masse des dépens de première instance et d'appel y compris les frais des deux expertises judiciaires et condamne in solidum la Sarl Demeures et Traditions et la SA Axa France Iard d'une part à en supporter 80 % et d'autre part M. [H] [V] [F] et Mme [K] [B] épouse [V] [F] à en supporter 20%,

Condamne in solidum la Sarl Demeures et traditions et la SA Axa France Iard à payer à M. [H] [V] [F] et Mme [K] [B] épouse [V] [F] la somme de 4 000 € au titre des frais irrépétibles de première instance et d'appel,

Déboute la Sarl Demeures et Traditions et la SA Axa France Iard de leurs demandes au titre des frais irrépétibles de première instance et d'appel.

Arrêt signé par la présidente de chambre et par la greffière.

La greffière, la présidente,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Nîmes
Formation : 2ème chambre section a
Numéro d'arrêt : 20/01784
Date de la décision : 02/06/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-06-02;20.01784 ?
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