ARRÊT N°
N° RG 20/01259 - N° Portalis DBVH-V-B7E-HWVV
CG
TRIBUNAL D'INSTANCE DE NIMES
05 mai 2020 RG :19-000940
[E]
[E]
C/
S.C.I. SCI CELESTE
Grosse délivrée
le
SCP Laïck...
Selarl Agnus
COUR D'APPEL DE NÎMES
CHAMBRE CIVILE
2ème chambre section A
ARRÊT DU 19 MAI 2022
APPELANTS :
Madame [U] [E]
née le 09 Juin 1982 à [Localité 6] (77)
[Adresse 1]
[Adresse 1]
[Localité 3]
Représentée par Me Pauline GARCIA de la SCP LAICK ISENBERG JULLIEN SAUNIER GARCIA, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de NIMES
(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2020/004887 du 22/07/2020 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de Nîmes)
Monsieur [P] [E]
né le 04 Septembre 1985 à MAROC
[Adresse 1]
[Localité 3]
Représenté par Me Pauline GARCIA de la SCP LAICK ISENBERG JULLIEN SAUNIER GARCIA, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de NIMES
(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2020/004887 du 22/07/2020 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de Nîmes)
INTIMÉE :
S.C.I. CELESTE, immatriculée au RCS de Nîmes sous le n° 507784205, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège
[Adresse 2]
[Localité 4]
Représentée par Me Cécile AGNUS de la SELARL AGNUS & ASSOCIES, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de NIMES
ORDONNANCE DE CLÔTURE rendue le 10 Février 2022
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS :
Mme Catherine Ginoux, conseillère, a entendu les plaidoiries en application de l'article 805 du code de procédure civile, sans opposition des avocats, et en a rendu compte à la cour lors de son délibéré.
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :
Mme Marie-Agnès Michel, présidente de chambre
Mme Catherine Ginoux, conseillère
Madame Laure Mallet, conseillère
GREFFIER :
Mme Véronique Laurent-Vical, greffière, lors des débats et du prononcé de la décision
DÉBATS :
à l'audience publique du 28 février 2022, où l'affaire a été mise en délibéré au 05 mai 2022 prorogé à ce jour
Les parties ont été avisées que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d'appel ;
ARRÊT :
Arrêt contradictoire, prononcé publiquement et signé par Mme Marie-Agnès Michel, présidente de chambre, et Mme Véronique Laurent-Vical, greffière, le 19 mai 2022, par mise à disposition au greffe de la cour
Expose du litige
Suivant contrat en date du 18 octobre 2016, la SCI Celeste a donné à bail à Mme [U] [E] et M. [P] [E] (les époux [E]) un logement sis [Adresse 5], moyennant un loyer mensuel de 500 euros ainsi que 40 euros de provision sur charges, étant précisé que ce bail constituait la régularisation d'un bail conclu le 15 septembre 2014 au seul nom de Mme [E], alors Mme [O].
Estimant que le logement n'était pas conforme aux normes de décence, par acte du 23 mai 2019, les époux [E] ont fait assigner la SCI Celeste devant le tribunal d'instance de Nîmes aux fins principales de condamnation à réparer le préjudice subi du chef de l'occupation d'un logement indécent.
Les époux [E] ont quitté le logement le 2 juillet 2019 après un état des lieux de sortie rédigé contradictoirement.
Par jugement rendu le 5 mai 2020, le tribunal judiciaire de Nîmes a :
- condamné la SCI Celeste à verser aux époux [E] :
* une somme de 400 euros du chef des conditions d'occupation du logement pris à bail le 18 octobre 2016,
* une somme de 100 euros en réparation de leur préjudice moral,
* une somme totale de 800 euros au titre de la restitution du dépôt de garantie, ce montant tenant compte de la majoration prévue à l'article 22 de la loi n°89-462 du 6 juillet 1989,
- débouté les parties du surplus de leurs demandes,
- condamné la SCI Celeste à verser à Maître Garcia une somme totale de 500 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile sous réserve de la renonciation de ce dernier à percevoir la part contributive de l'Etat,
- condamné la SCI Celeste aux dépens.
Par déclaration enregistrée le 26 mai 2020, les époux [E] ont interjeté appel.
Suivant conclusions notifiées le 21 août 2020, les époux [E] demandent à la cour de :
- confirmer le jugement sauf en ce qui concerne le quantum des dommages et intérêts prononcés en leur faveur
- condamner la SCI Celeste, à leur payer la somme de 10 410 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice de jouissance et du préjudice moral subis
- condamner la SCI Celeste au paiement d'une indemnité de 1 500 euros au titre des frais irrépétibles, sous réserve de la renonciation au bénéfice de l'aide juridictionnelle,
- la condamner aux entiers dépens.
Les appelants soutiennent que les désordres constatés caractérisent l'état d'indécence du logement. Ils prétendent qu'il convient de retenir comme date du point de départ du trouble de jouissance le 5 décembre 2014, date à laquelle ils ont informé la bailleresse du problème d'humidité du logement. Ils font valoir que la SCI Celeste n'est intervenue que le 20 mars 2019 et que cette dernière ne peut leur reprocher leur indisponibilité pour la réalisation des travaux, un délai minimum de prévenance devant être respecté. Ils exposent, à l'appui d'un diagnostic qu'ils ont fait réaliser le 14 avril 2019, que le plomb est présent tant à l'extérieur qu'à l'intérieur du logement, que la cheminée n'a pas été ramonée, que les conduits sont en mauvais état,. Ils estiment que le préjudice qu'ils ont subi doit être évalué sur la valeur locative du bien et non sur le loyer résiduel qu'ils avaient à verser après déduction des sommes versées par la CAF. Ils prétendent qu'ils étaient dispensés de respecter un délai de préavis dans la mesure où le logement est indécent.
Suivant conclusions notifiées le 25 novembre 2020, la SCI Celeste demande à la cour de :
- réformer le jugement
Statuant à nouveau,
- condamner les consorts [E]-[O] au paiement d'une somme de 1 500 euros au titre des frais irrépétibles,
-les condamner aux entiers dépens d'appel et de première instance.
L'intimée fait valoir que les manquements qui lui sont reprochés par les locataires résultent du fait de ces derniers et que ce n'est que le 8 février 2019 que les locataires ont matérialisé leurs réclamations. Elle expose que le diagnostic établi par la Maison de l'Expert, le 4 juin 2008, révèle la présence de plomb à l'extérieur du logement mais pas à l'intérieur de celui-ci, et souligne que le ramonage de la cheminée incombe au locataire. Elle explique que Mme [E] n'était jamais disponible pour la réalisation des travaux, que l'état des lieux d'entrée n'établit pas que le logement était indécent. Elle indique que les locataires n'ont pas respecté un délai de préavis. Elle estime que les demandes de ces derniers n'étant pas fondées, la procédure qu'ils ont engagée est abusive justifiant des dommages et intérêts.
La clôture de la procédure a été fixée au 10 février 2022.
Motifs
Il importe de rappeler qu'en application des dispositions de l'article 954 du code de procédure civile, la cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif des conclusions.
Selon l'article 6 de la loi du 6 juillet 1989, le bailleur est tenu de remettre au locataire un logement décent ne laissant pas apparaître de risques manifestes pouvant porter atteinte à la sécurité physique ou à la santé.
En l'espèce, les époux [E] ont sollicité la société Urbanis afin de réaliser un diagnostic du logement. Une visite à domicile est intervenue le 16 janvier 2019.
Ce rapport a constaté divers désordres liés notamment à la présence d'une humidité anormale dans la salle de bain, à la présence de revêtement de sols inadéquats ou mal posés.
Les services municipaux de prévention des risques ont constaté, quant à eux, le 25 mars 2019, une humidité anormale, une ventilation générale et permanente non conforme et des désordres liés aux conduits d'évacuation des fumées.
Il résulte des écritures des époux [E] que le bailleur a fait effectuer les travaux propres à remédier à ces anomalies le 20 mars 2019.
Les échanges de courriers démontrent que le bailleur a été informé de la majorité de ces désordres le 16 juillet 2018.
Les courriers antérieurs dont il est justifié ne font pas état des problèmes d'indécence, de sorte qu'il y a lieu de retenir un préjudice de jouissance d'une durée de huit mois (couvrant la période de juillet 2018 à mars 2019).
Le préjudice sera évalué par rapport au montant du loyer (500 €) et non de la part résiduelle restant à charge du locataire .
Compte tenu de la nature des désordres, de leur ampleur et du comportement peu facilitateur des locataires pour laisser exécuter les travaux,dès lors qu'il est établi qu'ils exigeaient des artisans des délais de prévenance, le préjudice de jouissance des locataires sera fixé à la somme mensuelle de 100 €, soit un total de 800 € (8 X100€).
En revanche, les conditions ne sont pas réunies pour allouer aux époux [E] une indemnisation au titre d'un préjudice moral.
S'agissant du remboursement du dépôt de garantie, c'est par une juste appréciation des faits de la cause que le premier juge a fixé à 800 € le montant à rembourser par la SCI Celeste incluant les intérêts de retard justifiés par le dépassement du délai d'un mois suivant l'état des lieux de sortie.
En définitive, le jugement sera infirmé en son quantum des condamnations prononcées au profit des époux [E] en réparation de leurs préjudices résultant de l'état d'indécence du logement donné à bail
Statuant à nouveau,
il y a lieu de condamner la SCI Celeste à verser aux époux [E] la somme de 800 € à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice de jouissance subi par les époux [E] et de débouter ces derniers de leur demande de dommages et intérêts au titre d'un préjudice moral.
Sur les dommages et intérêts pour procédure abusive
L'admission confirmée en appel des demandes d'indemnisation des époux [E] rend sans objet la demande reconventionnelle de la Sci Celeste visant à obtenir des dommages et intérêts pour procédure abusive.
Sur les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et les dépens
Le jugement sera confirmé en ce qui concerne l'indemnité accordée sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et la charge des dépens .
En cause d'appel, l'équité commande de ne pas faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile .
La SCI Celeste sera condamnée aux dépens d'appel qui seront recouvrés comme en matière d'aide juridictionnelle .
PAR CES MOTIFS,
LA COUR :
Après en avoir délibéré conformément à la loi,
Statuant publiquement, contradictoirement, en matière civile et en dernier ressort,
Confirme le jugement déféré sauf en ce qui concerne le quantum des condamnations au profit des époux [E] en réparation de leurs préjudices résultant de l'état d'indécence du logement donné à bail
Statuant des chefs infirmés
Condamne la SCI Celeste à payer à Mme [U] [E] et M. [P] [E] la somme de 800 € à titre de dommages et intérêts en réparation de leur préjudice de jouissance
Déboute Mme [U] [E] et M. [P] [E] de leur demande de dommages et intérêts en réparation de leur préjudice moral
Y ajoutant
Déboute la SCI Celeste de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive
Dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile
Condamne la SCI Celeste aux dépens d'appel
Arrêt signé par la présidente de chambre et par la greffière.
La greffière, La présidente,