La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

12/05/2022 | FRANCE | N°20/01251

France | France, Cour d'appel de Nîmes, 2ème chambre section a, 12 mai 2022, 20/01251


ARRÊT N°



N° RG 20/01251 - N° Portalis DBVH-V-B7E-HWU2



MAM



TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE NIMES

21 février 2020 RG :16/01926



[Z]

[H]

[P]

[P]

[P]



C/



[U]

[N]

[J]









Grosse délivrée

le

à SCP Isenberg....

SCP Reche....

SCP Sergent Delran















COUR D'APPEL DE NÎMES



CHAMBRE CIVILE

2ème chambre section A



ARRÊT DU 12 MAI 2022







APPELANTS :



Madame [T] [Z] épouse [H]

née le 12 Août 1944 à [Localité 20]

Chez Mme [L] [M] [Adresse 16]

[Localité 10]



Représentée par Me Henri-Laurent ISENBERG de la SCP LAICK ISENBERG JULLIEN SAUNIER GARCIA, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de NIMES


...

ARRÊT N°

N° RG 20/01251 - N° Portalis DBVH-V-B7E-HWU2

MAM

TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE NIMES

21 février 2020 RG :16/01926

[Z]

[H]

[P]

[P]

[P]

C/

[U]

[N]

[J]

Grosse délivrée

le

à SCP Isenberg....

SCP Reche....

SCP Sergent Delran

COUR D'APPEL DE NÎMES

CHAMBRE CIVILE

2ème chambre section A

ARRÊT DU 12 MAI 2022

APPELANTS :

Madame [T] [Z] épouse [H]

née le 12 Août 1944 à [Localité 20]

Chez Mme [L] [M] [Adresse 16]

[Localité 10]

Représentée par Me Henri-Laurent ISENBERG de la SCP LAICK ISENBERG JULLIEN SAUNIER GARCIA, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de NIMES

Monsieur [E] [H]

né le 15 Décembre 1940 à [Localité 17]

Chez Mme [L] [M] [Adresse 16]

[Localité 10]

Représenté par Me Henri-Laurent ISENBERG de la SCP LAICK ISENBERG JULLIEN SAUNIER GARCIA, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de NIMES

Madame [D] [P]

née le 06 Novembre 1948 à [Localité 15]

[Adresse 1]

[Localité 9]

Représentée par Me Henri-Laurent ISENBERG de la SCP LAICK ISENBERG JULLIEN SAUNIER GARCIA, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de NIMES

Madame [O] [P]

née le 23 Décembre 1939 à [Localité 12]

[Adresse 1]

[Localité 9]

Représentée par Me Henri-Laurent ISENBERG de la SCP LAICK ISENBERG JULLIEN SAUNIER GARCIA, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de NIMES

Madame [V] [P] épouse [W]

née le 01 Août 1941 à [Localité 15]

[Adresse 11]

[Localité 13] USA

Représentée par Me Henri-Laurent ISENBERG de la SCP LAICK ISENBERG JULLIEN SAUNIER GARCIA, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de NIMES

INTIMÉS :

Monsieur [G] [U]

né le 07 Octobre 1971 à [Localité 18]

Le Mole

[Localité 4]

Représenté par Me Philippe RECHE de la SELARL GUALBERT RECHE BANULS, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de NIMES

Monsieur [S] [N]

né le 26 Juin 1966 à [Localité 19]

[Adresse 8]

[Localité 5]

Représenté par Me Sylvie SERGENT de la SCP DELRAN-BARGETON DYENS-SERGENT- ALCALDE, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de NIMES

Madame [R] [J] épouse [N]

née le 03 Août 1965 à [Localité 19]

[Adresse 8]

[Localité 5]

Représentée par Me Sylvie SERGENT de la SCP DELRAN-BARGETON DYENS-SERGENT- ALCALDE, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de NIMES

ORDONNANCE DE CLÔTURE rendue le 17 Février 2022

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS :

Mme Marie-Agnès Michel, présidente de chambre, a entendu les plaidoiries, en application de l'article 805 du code de procédure civile, sans opposition des avocats, et en a rendu compte à la cour lors de son délibéré.

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Mme Marie-Agnès Michel, présidente de chambre

Mme Catherine Ginoux, conseillère

Madame Laure Mallet, conseillère

GREFFIER :

Mme Véronique Laurent-Vical, greffière, lors des débats et du prononcé de la décision

DÉBATS :

à l'audience publique du 07 mars 2022, où l'affaire a été mise en délibéré au 05 mai 2022 prorogé à ce jour

Les parties ont été avisées que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d'appel ;

ARRÊT :

Arrêt contradictoire, prononcé publiquement et signé par Mme Marie-Agnès Michel, présidente de chambre, et Mme Véronique Laurent-Vical, greffière le 12 Mai 2022, par mise à disposition au greffe de la cour

EXPOSE DU LITIGE

Mme [Z] épouse [H], M. [E] [H], Mme [D] [P], Mme [O] [P] et Mme [V] [P] épouse [W] (les consorts [H] [P]) sont propriétaires d'une maison d'habitation élevée d'un étage sur rez-de-chaussée, avec petite cour, située au [Adresse 7], sur la commune du [Localité 5] (Gard), cadastré section BL n°[Cadastre 2], venant aux droits des époux [Z] qui avaient acquis cet immeuble suivant acte de vente du 28 septembre 1923.

Cet acte contient la clause désignation suivante:

« Une maison sise au [Adresse 14], élevée d'un premier étage sur rez-de-chaussée, ayant trois portes fenêtres au rez-de-chaussée et trois fenêtres au premier étage donnant sur le canal, à détacher d'un plus grand immeuble appartenant aux vendeurs et portant le n°32 du quai d'Azur, la partie d'immeuble présentement vendue a une façade de 10 mètres 90 centimètres et une profondeur de 16 mètres 50 centimètres comprenant au levant une cour, confronte dans son ensemble, du midi le quoi du canal dit quai d'Azur, du couchant et nord, le restant du corps appartenant aux vendeurs et du levant la maison [A] et a une superficie de 214 mètres ² environ....

Mme [Z] s'engage entre autre à faire à ses frais les réparations ci-après destinées à séparer l'immeuble vendu du restant du corps, savoir: une cloison fermant l'entrée actuelle du salon dans le couloir d'entrée de M. et Mme [F], vendeurs, une cloison à un mètre de hauteur aux fenêtres du rez-de-chaussée donnant sur le restant du corps avec grilles à ces fenêtres, grilles aux fenêtres du rez-de-chaussée donnant sur le jardin des vendeurs, une cloison séparant au premier étage la partie vendue de la partie restante au vendeur, des grilles aux deux chambres du premier étage portant les numéros 10 et 12 et donnant sur le balcon intérieur restant la propriété des vendeurs..

Les vendeurs s'interdisent de leur coté, pour eux et leurs ayants droits, d'une façon expresse, d'élever sur le restant de leur immeuble conservé par eux, aucune construction pouvant enlever du jour aux fenêtres et ouvertures de l'immeuble vendu prenant jour sur le restant de l'immeuble, à moins d'y avoir été autorisés expressément et par écrit par Mme [Z], acquéreuse ou ses ayants droits... ».

Par acte notarié du 6 décembre 2006, M. [G] [U] a acquis l'immeuble voisin situé au numéro [Adresse 6], cadastré section BL n° [Cadastre 3] d'une superficie de 1 are 37 centiares, composé « d'un étage sur rez- de-chaussée pour partie à usage d'habitation et pour partie à usage commercial avec cour comprenant : sur l'avant, au rez-de-chaussée, un local commercial et au premier étage un appartement de type II et sur l'arrière, au rez-de-chaussée, un studio et au premier étage un autre studio ».

Aux fins d'aménager les lieux pour l'exploitation de son restaurant, M. [U] a fait procéder à la rénovation de la façade et a déposé en ce sens auprès de la commune une déclaration de travaux le 26 septembre 2007. Suivant arrêté municipal du 26 novembre 2007 (numéro DT 3013307Y0080) l'autorisation lui a été accordée.

Par ordonnance du 24 février 2010 le juge des référés du tribunal de grande instance de Nîmes, a:

- condamné M. [U] à supprimer sur l'immeuble des consorts [H]-[P] des briques de siporex par lui posées obstruant les portes fenêtres et fenêtres du rez-de-chaussée, 1er étage et à la remise en place des grilles de protection existantes avant l'enlèvement par lui, sous astreinte de 200 euros passé un délai de quinze jours à compter de la signification de la décision et au paiement de la somme de 1 500 euros au titre des frais irrépétibles, outre les entiers dépens,

- constaté que M. [G] [U] a fait procéder à l'enlèvement de la descente d'eaux pluviales empiétant sur la façade des demandeurs,

- dit n'y avoir lieu à référé sur les demandes reconventionnelles présentées par M. [G] [U].

Se plaignant d'empiètements persistants sur leur fonds, notamment sur la façade d'une dimension de 10 mètres 80 selon leur acte, les consorts [H]-[P] ont, par acte d'huissier du 31 août 2010, assigné M. [G] [U] devant le tribunal de grande instance de Nîmes aux fins principalement de le voir condamné à rétablir les lieux en leur état d'origine, outre le paiement de dommages et intérêts.

Par jugement du 24 février 2011, le tribunal de grande instance de Nîmes a ordonné une expertise et a désigné M. [X] [K] géomètre-expert, avec pour mission principalement de vérifier si les empiètements allégués existent, dans l'affirmative, en préciser l'importance et l'étendue, réunir tous renseignements utiles à la détermination des responsabilités et donner son avis technique sur existence ou non d'une servitude de vue et sur le caractère mitoyen ou non de la cloison séparative au premier étage.

L'expert a déposé son rapport le 9 juillet 2013.

A la suite de la vente de l'immeuble litigieux par M. [U] intervenue le 3 novembre 2011, les consorts [H] [P] ont assigné en intervention forcée par acte du 15 novembre 2016 (RG 16/4767) les nouveaux propriétaires de l'immeuble en cause, M. [S] [N] et Mme [R] [J] épouse [N], devant le tribunal de grande instance de Nîmes sur le fondement des articles 66, 325 et 331 du code de procédure civile afin de voir dire et juger recevable et fondé leur appel en intervention forcée dans l'instance pendante devant le tribunal de grande instance de Nîmes entre les consorts [H] [P] et M. [U] enrôlée sous le numéro RG 16/01926 ' 1ère chambre et voir déclarer commun et opposable le jugement à intervenir.

Par ordonnance du 9 mars 2017, le juge de la mise en état a ordonné la jonction de la procédure enrôlée sous le numéro de répertoire général RG 16/4767 avec la procédure RG 16/01926.

Par jugement du 21 février 2020, le tribunal judiciaire de Nîmes a statué comme suit :

- rejette la demande de rabat de clôture,

- déboute les consorts [H] [P] de l'ensemble de leurs demandes,

- rejette la demande reconventionnelle de M. [U] relative à la pose d'enduit,

- déboute M. [U] et M. et Mme [N] de leurs demandes indemnitaires au titre de la procédure abusive,

- condamne les consorts [H] [P] à payer à M. [U] la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamne les consorts [H] [P] à payer à M. et Mme [N] la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- déboute les consorts [H] [P] de leur demande formée au titre des frais irrépétibles,

- condamne les consorts [H] [P] aux dépens,

- dit n'y avoir lieu à exécution provisoire.

Par déclaration du 22 mai 2020, les consorts [H] [P] ont relevé appel de ce jugement.

Dans leurs dernières conclusions remises et notifiées le 24 décembre 2020, auxquelles il est expressément référé, les consorts [H] [P] demandent à la cour de :

- dire l'appel des consorts [H] [P] régulier en la forme et bien fondé,

y faisant droit,

- réformer le jugement du 21 février 2020 en ses dispositions querellées,

quoi faisant,

ayant tels égards que de droit pour le rapport d'expertise déposé par M. [K] le 4 juillet 2013,

Vu l'acte reçu le 28 septembre 1923 par Me [C], notaire à [Localité 19], publié à la conservation des hypothèques de Nîmes le 5 octobre 1923 volume 2086 n°24,

Vu l'article 1134 du code civil applicable en l'espèce,

Vu l'article 30 du décret n° 55-22 du 4 janvier 1955,

- dire et juger qu'il résulte du contrat de vente du 28 septembre 1923 que la façade de l'immeuble acquis par les auteurs des consorts [H] [P] sur le quai Général de Gaulle a une longueur de 10m80,

- dire et juger le titre de propriété des consorts [H] [P] opposable à M. [U] et aux époux [N].

Subsidiairement,

Vu l'article 2272 du code civil,

- dire et juger qu'ils ont acquis la propriété de la façade sur la longueur de 10m80 par prescription trentenaire,

en conséquence,

Vu l'article 544 du code civil,

- dire et juger que M. [U], et les époux [N] depuis leur acquisition par acte du 3 novembre 2011, s'est indûment approprié une partie de la façade de l'immeuble des consorts [H] [P] en implantant une descente d'eau pluviale, une tente avec son système d'ouverture, un panneau d'affichage, une applique avec son cadre d'alimentation, une guirlande lumineuse, une séparation en fer forgé et en procédant au remplacement du revêtement préexistant par un enduit d'une teinte similaire à la façade de son immeuble ainsi qu'à l'occupation en terrasse et à l'enlèvement d'une borne métallique anti-stationnement et l'avoir remplacée par deux tables de restaurant et des chaises,

- condamner solidairement M. [U] et les époux [N] à rétablir les lieux en leur état d'origine en procédant à l'enlèvement de ces divers éléments, à la réfection de l'enduit et en cessant toute occupation au droit de l'immeuble des requérants, le tout dans les 8 jours de la signification à partie du jugement à intervenir et passé ce délai, sous astreinte de 200 euros par jour de retard,

Vu l'article 1382 du code civil devenu 1240 du code civil,

- condamner M. [U] seul à porter et payer aux consorts [H] [P] la somme de 35 200 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice consécutif à l'atteinte à leur droit de propriété pour les années 2008 à 2011,

- condamner M. [U] solidairement avec les époux [N] au paiement de la somme de 61 600 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice consécutif à l'atteinte a leur droit de propriété pour les années 2012 à 2018.

Subsidiairement,

Vu les articles 546, 547 et 550 du code civil,

- condamner M. [U] seul à porter et payer aux consorts [H] [P] la somme de 35 200 euros à titre de restitution des loyers indument perçus pour les années 2008 à 2011,

- condamner M. [U] solidairement avec les époux [N] au paiement de la somme de 61 600 euros à titre à titre de restitution des loyers indument perçus pour les années 2012 à 2018,

Vu l'article 690, 692 et 693 du code civil,

- dire et juger que l'immeuble des consorts [H] [P] bénéficie d'une servitude de vue et d'aération sur le fonds de M. [U] et désormais des époux [N] par prescription acquisitive et/ ou destination du père de famille ; le fonds dominant étant l'immeuble sis [Adresse 7] au [Localité 5], cadastré section BL n° [Cadastre 2] et le fonds servant étant l'immeuble sis [Adresse 6] au [Localité 5], cadastré section BL n° [Cadastre 3],

- dire et juger que l'immeuble des consorts [H] [P] bénéficie d'une servitude d'égout des toits sur le fonds de M. [U] et désormais des époux [N] par prescription acquisitive et/ ou destination du père de famille, le fonds dominant étant l'immeuble des concluants sis [Adresse 7] au [Localité 5], cadastré section BL n° [Cadastre 2] et le fonds servant étant l'immeuble sis [Adresse 7] au [Localité 5], cadastré section BL n° [Cadastre 3],

- ordonner la publication de l'arrêt à intervenir auprès du service de la publicité foncière Nîmes 1 aux frais de M. [U] et des époux [N] sous astreinte de 200 euros par jour de retard dans les huit jours du jugement ayant acquis autorité de chose jugée,

- dire et juger que la cloison séparative au premier étage est privative et non mitoyenne,

- dire et juger commun et opposable aux époux [N] l'arrêt à intervenir,

- débouter M. [U] et les époux [N] de leur appel incident respectif comme étant non fondé ainsi que de l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions comme étant non fondées,

- condamner M. [U] à porter et payer aux consorts [H] [P] la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- le condamner aux entiers dépens, comprenant notamment le coût de l'expertise [K] et le coût des procès-verbaux de constat dressés par la SCP Combe-Laget, huissiers de justice associés à Aimargues, le 18 juillet 2008, 27 août 2008 ainsi que les 14 avril et 22 juillet 2010.

Dans ses dernières conclusions remises et notifiées le 20 novembre 2020, auxquelles il est expressément référé, M. [U] demande à la cour de :

Vu le rapport de l'expert [K],

- déclarer l'appel des consorts [H] [P] recevable mais infondé,

- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a :

* débouté les consorts [H] [P] de l'ensemble de leurs demandes,

* rejeté la demande reconventionnelle de M. [U] relative à la pose d'enduit,

* condamné les consorts [H] [P] à payer à M. [U] la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

* condamné les consorts [H] [P] à payer à M. et Mme [N] la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

* débouté les consorts [H] [P] de leur demande formée au titre des frais irrépétibles,

* condamné les consorts [H] [P] aux dépens de première instance en ce compris les frais d'expertise,

- l'infirmer pour le surplus,

statuant à nouveau,

- condamner solidairement les consorts [H] [P] à payer à M. [U] la somme de 10 000 euros à titre de dommages-intérêts en réparation de son préjudice moral ayant pour origine le caractère abusif de la procédure,

- les condamner solidairement aux entiers dépens d'appel ainsi qu'à la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Dans leurs dernières conclusions remises et notifiées le 24 septembre 2020, auxquelles il est expressément référé, M. et Mme [N] demandent à la cour de :

- accueillir l'appel interjeté mais le déclarer mal fondé,

- accueillir l'appel incident,

à titre principal,

Vu l'article 1134 du code civil, dans sa version antérieure au 1er octobre 2016,

Vu l'acte authentique du 3 novembre 2011,

Vu le comportement des consorts [H] [P] ,

- confirmer le jugement querellé en toutes ses dispositions sauf en ce qu'il a débouté les époux [N] de leur demande de condamnation au titre de la procédure abusive,

- débouter les consorts [H] [P] de l'ensemble de leurs demandes fins et prétentions dirigées contre les époux [N],

- constater la litanie procédurale mise en oeuvre par les consorts [H] [P],

- constater le préjudice subi par les époux [N] depuis leur acquisition,

- réformer le jugement en ce qu'il a débouté les époux [N] de leur demande de dommages et intérêts,

- condamner les consorts [H] [P] au paiement de 5 000 euros à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice moral des époux [N],

- condamner les consorts [H] [P] au paiement des entiers frais et dépens de première instance et d'appel outre 5 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

à titre subsidiaire,

si la cour venait à reformer le jugement entrepris :

Vu l'article 1134 du code civil, dans sa version antérieure au 1er octobre 2016,

Vu l'acte authentique du 3 novembre 2011,

- débouter les consorts [H] [P] de l'ensemble de leurs demandes fins et prétentions dirigées contre les époux [N],

- condamner M. [U] à relever et garantir les époux [N] de l'ensemble des condamnations qui seraient prononcées à leur encontre,

- condamner les consorts [H]-[P] aux entiers frais et dépens de l'instance outre 2 000 euros au titre de l'article 700 du code procédure civile.

La clôture de la procédure a été fixée au 17 février 2022.

MOTIFS DE LA DECISION

Il ne ressort pas des pièces de la procédure de moyen d'irrecevabilité de l'appel que la cour devrait relever d'office et les parties n'élèvent aucune discussion sur ce point.

Sur les empiètements,

S'emparant des termes de leur titre selon lequel la partie vendue à leurs auteurs a une façade de 10m90 sur le quai, les appelants contestent le jugement déféré en ce qu'il les a déboutés de ces chefs sur le fondement des conclusions de l'expert qui a retenu une limite séparative ne respectant pas, selon eux, la longueur de façade précise figurant sur leur acte, soit 10m90.

Afin de statuer sur les empiètements allégués implantés sur la façade de leur immeuble selon les appelants, il est nécessaire, ainsi que l'a fait l'expert, sans outre passer les termes de sa mission, de s'interroger sur la limite entre les deux propriétés, provenant d'un même auteur, divisées en 1923. A l'examen des lieux, l'expert a constaté que l'immeuble comporte un mur existant du rez-de-chaussée jusqu'à la toiture (qu'il dénomme ouvrage mitoyen ancestral), présent bien avant la division, et que les cloisons prévues à l'acte de 1923 ont seulement consisté à fermer des passages entre les pièces situées dans ce mur. Il a également constaté en mesurant l'immeuble que la longueur de 10m86, correspond à la distance, à l'intérieur, au premier étage, entre l'immeuble situé à l'Est et l'axe du mur mitoyen ci-dessus, alors qu'entre les mêmes points au rez-de-chaussée, à l'extérieur, la distance est de 10m03 (plan 5). Cette différence s'explique par le fait que le mur n'est pas parfaitement vertical et fait un décroché au niveau du rez-de-chaussée.

Devant ces constatations, c'est à juste titre que l'expert conclut qu'il n'est pas possible de considérer la façade sur quai vendue en 1923, autrement qu'entre les deux ouvrages mitoyens ancestraux intérieurs dans lesquels les portes ont été fermées, la façade, partie intégrante de l'immeuble, ne pouvant suivre un sort différent de celui-ci.

Dès lors, en retenant une limite à l'axe de l'ouvrage, manifestement mitoyen, qui sépare les immeubles, il résulte des conclusions de l'expert que (cf plan 7):

- la gouttière sur la façade dépasse de 0,21 m de largeur et 3m98 de hauteur,

- le store sur la façade dépasse de 0,07 m de largeur et 0, 11 de hauteur,

- la peinture sur la façade dépasse de 0,06 m de largeur et 3m25 de hauteur,

- le panneau sur la façade ne dépasse pas.

Nonobstant le simple constat mentionné dans l'ordonnance de référé du 24 février 2010, il est établi, notamment par le constat d'huissier des 14 avril et 22 juillet 2010, que la descente d'eaux pluviales, d'ailleurs toujours présente lors des opérations d'expertise, sans que M. [U], qui a déclaré à cette occasion l'avoir déplacée avec un coude lorsqu'il a refait la façade, n'en impute la présence à ses voisins, il convient de faire droit à la demande des appelants de ce chef et ordonner son enlèvement.

S'agissant du store, au vu des photographies du constat du 9 mai 2016 et la photographie n°5, il est établi que le dépassement de 7 cms est constitué par le système qui permet de coulisser la bâche, lequel non ancré dans le mur, se trouve en surplomb du quai, et donc du domaine public. En conséquence, en l'absence d'empiètement, le jugement sera confirmé en ce qu'il a débouté les appelants de ce chef.

Sur le panneau d'affichage et l'enduit de façade, il est établi que le premier n'empiète pas sur la propriété [H] [P]. Quant à l'enduit de façade, le dépassement de 6 cms, étant établi, il convient de faire droit à cette demande.

Afin d'assurer l'effectivité de ces condamnations, il convient de les assortir d'une astreinte suivant les modalités précisées au dispositif. Elles ne peuvent qu'être mises à la charge des propriétaires actuels, M. et Mme [N], lesquels seront relevés et garantis par M. [U], conformément aux clauses de l'acte de vente du 3 novembre 2011.

Les appelants sollicitent également l'enlèvement d'une applique avec son cadre d'alimentation, une guirlande lumineuse, une séparation en fer forgé et la condamnation des intimés à faire cesser toute occupation au droit de leur immeuble. Cependant, aucune pièce probante n'établit que lesdits éléments empiètent sur leur propriété. Quant à l'occupation indue des lieux, elle relève de la responsabilité de l'exploitant du restaurant, lequel au demeurant a été condamné à la requête des consorts [H]-[P] par ordonnance de référé du 5 octobre 2016. Ces demandes seront rejetées.

Sur les demandes de dommages et intérêts,

Les appelants sollicitent le paiement de dommages et intérêts en réparation de l'atteinte à leur droit de propriété, qu'ils fixent sur la base du profit indu qu'ont retiré les intimés de l'exploitation de la terrasse, soit, selon eux, pour M. [U], seul au titre des années 2008 à 2011: 35 200 € (8800 € x4) et solidairement avec les époux [N], de 2012 à 2018: 61 600 €, représentant 20 % du loyer. Ce faisant, ils ne caractérisent nullement un préjudice indemnisable direct et certain, en lien avec les empiètements reconnus ci-dessus. Ils seront déboutés de leurs demandes à ce titre présentées tout à la fois, à titre principal et subsidiaire.

La cour n'est pas saisie de la demande de dommages et intérêts au titre du préjudice moral et d'agrément qui n'est pas reprise au dispositif des dernières conclusions des consorts [H]-[P].

Sur la servitude de vue,

L'expert a constaté:

- une ouverture au rez-de-chaussée qui était une ancienne porte fenêtre de liaison transformée en fenêtre avec l'édification d'une allège, l'ancienne menuiserie, qui s'étend jusqu'au sol est toujours en place,

- à l'étage deux ouvertures qui étaient d'anciennes portes de liaison qui ont été transformées en fenêtres avec l'édification d'une allège, les anciennes menuiseries sont toujours en place,

- ces fenêtres sont équipées de menuiseries ouvrantes et de verres translucides.

Elles constituent des vues irrégulières comme implantées en limite immédiate de la propriété voisine. Les ouvertures irrégulières constituant de véritables vues peuvent permettre l'acquisition d'une servitude de vue par prescription. Par ailleurs, selon l'article 692 du code civil la destination du père de famille vaut titre à l'égard des servitudes continues et apparentes. L'article 693 dispose qu'il y a destination du père de famille lorsqu'il est prouvé que les deux fonds actuellement divisés ont appartenu au même propriétaire et que c'est par lui que les choses ont été mises dans l'état duquel résulte la servitude.

Au vu des clauses de l'acte de division de 1923 rappelées in limine, il est établi que ces ouvertures ont été aménagées (rajout d'allèges) lors de la division des fonds par l'auteur commun des parties, aucune disposition n'a été prise pour supprimer les vues entre les fonds créés par leur division.

En conséquence, le jugement sera infirmé de ce chef et la cour reconnaîtra une servitude de vue et d'aération de ces trois fenêtres de la parcelle BL [Cadastre 2] ([H]-[P]), fonds dominant, sur la parcelle BL [Cadastre 3] ([U] devenue [N]), fonds servant.

Sur la servitude d'égout des toits,

Les appelants affirment que l'eau de pluie provenant de leur toiture recouvrant l'entier faîtage du mur séparatif, privatif, s'écoule dans la cour de la propriété [U], que cette configuration existe depuis 1923, qu'en conséquence, ils peuvent prétendre au bénéfice d'une servitude par prescription trentenaire ou par destination du père de famille.

Pour autant, alors que le premier juge a rejeté leur demande de ce chef au motif de l'absence d'élément probant, la cour ne peut que constater que leurs conclusions ne contiennent aucune articulation de leurs moyens de fait et de droit venant au soutien de cette prétention.

Le jugement sera confirmé.

Sur la qualification de la cloison du premier étage,

Cette cloison séparative créée en 1923, conformément aux termes de l'acte, destinée à murer un passage existant précédemment, bien que située dans le mur mitoyen ancestral, réalisée avec des matériaux légers, aux frais de l'acquéreur, auteur des appelants, qui n'est pas un élément porteur, a un caractère privatif aux consorts [H]-[P].

Le jugement sera infirmé.

Sur les demandes de dommages et intérêts pour procédure abusive,

Dès lors que les appelants sont accueillis partiellement en leurs demandes, les demandes de dommages et intérêts des intimés pour procédure abusive ou préjudice moral ne peuvent prospérer.

Sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile,

Les demandes des consorts [H]-[P] ne sont que partiellement fondées, la cour n'ayant pas retenu leur moyen principal quant à la limite séparative, les empiètements relevés sont minimes et ne sont à l'origine d'aucun préjudice indemnisable, en conséquence, il convient de dire que les dépens de première instance et d'appel, qui comprennent les frais d'expertise, mais dans lesquels ne seront pas inclus les frais de constat, seront partagés par moitié entre les consorts [H]-[P] et M. [U].

L'équité ne commande pas de faire application de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS,

LA COUR :

Après en avoir délibéré conformément à la loi,

Statuant publiquement, contradictoirement, en matière civile et en dernier ressort,

Infirme partiellement le jugement déféré et statuant à nouveau sur le tout pour une meilleure compréhension,

Statuant à nouveau,

Condamne in solidum M. [S] [N] et Mme [R] [J] épouse [N] à procéder, dans les six mois de la signification de la présente décision, et passé ce délai sous astreinte de 50 € par jour de retard, pendant six mois,:

- à l'enlèvement de la descente d'eaux pluviales qui dépasse de 0,21 m de largeur et 3m98 de hauteur sur l'immeuble voisin cadastré section BL n°[Cadastre 2],

- à l'enlèvement de l'enduit de façade qui dépasse de 6 cms sur l'immeuble voisin cadastré section BL n°[Cadastre 2],

Dit que M. [G] [U] relèvera et garantira les époux [N] de cette condamnation,

Dit que la cloison séparative légère édifiée au premier étage en remplissage de l'ancienne porte est privative à Mme [Z] épouse [H], M. [E] [H], Mme [D] [P], Mme [O] [P] et Mme [V] [P] épouse [W],

Dit que la parcelle cadastrée section BL n°[Cadastre 3] ([N]), fonds servant, est débitrice d'une servitude de vue et d'aération, au profit de la parcelle cadastrée section BL [Cadastre 2] (consorts [H]-[P]), fonds dominant, s'agissant de la fenêtre sise au rez-de-chaussée et des deux fenêtres du premier étage,

Déboute Mme [Z] épouse [H], M. [E] [H], Mme [D] [P], Mme [O] [P] et Mme [V] [P] épouse [W] du surplus de leurs demandes,

Déboute M. [G] [U] et M. [S] [N] et Mme [R] [J] épouse [N] de leurs demandes de dommages et intérêts,

Déboute les parties du surplus de leurs demandes plus amples ou contraires,

Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile,

Fait masse des dépens de première instance et d'appel, qui comprennent les frais d'expertise et dit qu'ils seront supportés par moitié par Mme [Z] épouse [H], M. [E] [H], Mme [D] [P], Mme [O] [P] et Mme [V] [P] épouse [W] d'une part et M. [G] [U], d'autre part.

Arrêt signé par la présidente de chambre et par la greffière.

La greffière, La présidente,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Nîmes
Formation : 2ème chambre section a
Numéro d'arrêt : 20/01251
Date de la décision : 12/05/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-05-12;20.01251 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award