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12/05/2022 | FRANCE | N°20/01022

France | France, Cour d'appel de Nîmes, 1ère chambre, 12 mai 2022, 20/01022


ARRÊT N°



N° RG 20/01022 -

N° Portalis DBVH-V-B7E-HWAS



MPF - NR



TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE D'AVIGNON

08 janvier 2019

RG:18/01618



S.C.I. LA MAISON BLANCHE ET L'ARLESIENNE



C/



S.A.R.L. DECOR ET TRADITION





















Grosse délivrée

le 12/05/2022

à Me Emmanuelle VAJOU

à Me Philippe PERICCHI

















COUR D'APPEL DE NÎMESr>


CHAMBRE CIVILE

1ère chambre



ARRÊT DU 12 MAI 2022







APPELANTE :



S.C.I. LA MAISON BLANCHE ET L'ARLESIENNE

Poursuites et diligences de son gérant en exercice domicilié en cette qualité en son siège social

[Adresse 3]

[Localité 4]



Représentée par Me Emmanuelle VAJOU ...

ARRÊT N°

N° RG 20/01022 -

N° Portalis DBVH-V-B7E-HWAS

MPF - NR

TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE D'AVIGNON

08 janvier 2019

RG:18/01618

S.C.I. LA MAISON BLANCHE ET L'ARLESIENNE

C/

S.A.R.L. DECOR ET TRADITION

Grosse délivrée

le 12/05/2022

à Me Emmanuelle VAJOU

à Me Philippe PERICCHI

COUR D'APPEL DE NÎMES

CHAMBRE CIVILE

1ère chambre

ARRÊT DU 12 MAI 2022

APPELANTE :

S.C.I. LA MAISON BLANCHE ET L'ARLESIENNE

Poursuites et diligences de son gérant en exercice domicilié en cette qualité en son siège social

[Adresse 3]

[Localité 4]

Représentée par Me Emmanuelle VAJOU de la SELARL LEXAVOUE NIMES, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de NIMES

INTIMÉE :

S.A.R.L. DECOR ET TRADITION

inscrite au RCS d'AVIGNON sous le n°393 941 703, représentée par sa gérante [E] [T] [L] domiciliée [Adresse 1] et au siège social sis

[Adresse 5]

[Localité 4]

Représentée par Me Philippe PERICCHI de la SELARL AVOUEPERICCHI, Postulant, avocat au barreau de NIMES

Représentée par Me Géraldine FERRANDIS, Plaidant, avocat au barreau de MARSEILLE

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

Mme Marie-Pierre FOURNIER, Présidente,

Mme Elisabeth TOULOUSE, Conseillère,

Mme Séverine LEGER, Conseillère,

GREFFIER :

Mme Nadège RODRIGUES, Greffière, lors des débats et du prononcé de la décision

DÉBATS :

À l'audience publique du 15 Février 2022, où l'affaire a été mise en délibéré au 14 Avril 2022, et prorogé au 12 Mai 2022,

Les parties ont été avisées que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d'appel ;

ARRÊT :

Arrêt contradictoire, prononcé publiquement et signé par Mme Marie-Pierre FOURNIER, Présidente, le 12 Mai 2022, par mise à disposition au greffe de la Cour

EXPOSE DU LITIGE

Le 23 avril 1996, un compromis de vente a été conclu entre la SCI Les Iscles et la SCI Les Banquets devenue la SCI La Maison Blanche et l'Arlésienne portant sur la parcelle cadastrée section AT [Cadastre 2].

La venderesse avait déjà cédé cinq autres parcelles attenantes à la parcelle [Cadastre 2] à la SCI Les Iscles, laquelle les avait données à bail à la sarl Décor et Tradition qui exploitait un commerce de matériaux anciens.

La mairie de [Localité 4] ayant exercé son droit de préemption la société Les Iscles a renoncé à l'acquisition de la parcelle cadastrée section AT n° [Cadastre 2], laquelle a été vendue par acte du 17 juin 2004 à la société La Paz.

Après avoir mis en demeure la société Décor et Tradition de lui régler 69 535 euros au titre de l'indemnité d'occupation de la parcelle [Cadastre 2] due pour la période du 30 juillet 1996 au 30 juin 2004, la société La Maison Blanche et l'Arlésienne par acte du 26 février 2018 l'a assignée devant le tribunal de grande instance d'Avignon en règlement de ladite indemnité.

Par jugement réputé contradictoire du 8 janvier 2019, le tribunal a débouté la société La Maison Blanche de l'ensemble de ses demandes au motif qu'il n'était pas établi que la société Décor et Tradition, entité juridique différente de la SCI Les Iscles, avait occupé la parcelle [Cadastre 2] et s'était engagée à verser au propriétaire une indemnité d'occupation en attendant la vente définitive.

Par déclaration du 25 mars 2020, la SCI La Maison Blanche et l'Arlésienne a interjeté appel de cette décision.

Dans ses dernières conclusions déposées et notifiées par voie électronique le 31 janvier 2022, l'appelante demande à la cour de

- rejeter les exceptions tirées de l'autorité de la chose jugée et de la prescription soulevées par l'intimée ;

- d'infirmer le jugement et de condamner la société Décor et Tradition à lui payer la somme de 69 535,06 euros, outre les intérêts au taux légal à compter du 5 novembre 2005 date de la mise en demeure ou subsidiairement à compter de l'exploit introductif de 1ère instance ;

En tout état de cause,

- condamner la société Décor et Tradition à lui payer 5 000 euros de dommages et intérêts ;

-condamner la société Décor et Tradition à lui payer 6 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

La SCI La Maison Blanche et l'Arlésienne estime que les trois conditions de l'autorité de la chose jugée posées par l'article 1355 du code civil ne sont pas remplies et que le délai de prescription n'a jamais commencé à courir, l'intimée ayant retenu par fraude la convention du 12 février 2004 dont il a été découvert par la production de sa pièce 16 qu'elle était en sa possession. qu'à titre subsidiaire, il y aurait lieu de tenir compte des interruptions de prescription liées à la mise en demeure adressée le 20 avril 2011, à la reconnaissance du droit d'occupation onéreux par l'acte du 19 mai 2006 puis par le décès de M. [T] le 11 août 2016 plaçant la société dans une impossibilité temporaire d'agir, enfin par la procédure aux fins de saisie conservatoire objet de la requête du 14 décembre 2017.

Sur le fond elle considère que la société Décor et Tradition a reconnu aux termes de la convention signée le 12 février 2004 avoir bénéficié et utilisé la parcelle [Cadastre 2], que le procès-verbal de saisie-vente dressé le 26 octobre 2010 a confirmé cette occupation et que le caractère onéreux de l'occupation du terrain est prouvé par la production en original de ladite convention.

Aux termes de ses dernières conclusions déposées et notifiées par voie électronique le 28 janvier 2022, la société Décor et Tradition demande à la cour de :

À titre principal,

- déclarer irrecevables les demandes de la SCI La Maison Blanche et l'Arlésienne ;

À titre subsidiaire,

- confirmer purement et simplement le jugement

- écarter la pièce adverse n° 6 (convention du 12 février 2004) des débats;

- ordonner la mainlevée de la saisie conservatoire des créances effectuées le 30 janvier 2018,

- condamner la SCI La Maison Blanche et l'Arlésienne au paiement de la somme de 30 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi par elle sur le fondement de l'article 1240 du code civil;

- condamner la SCI La Maison Blanche et l'Arlésienne au paiement d'une somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

L'intimée soutient que les décisions rendues par le tribunal de grande instance d'Avignon le 7 septembre 2010 et par la cour d'appel de Nîmes le 11 septembre 2012 ont l'autorité de la chose jugée de sorte que les demandes formulées par l'appelante sont irrecevables. Elle estime que la demande en paiement de l'appelante selon assignation du 26 février 2018 est prescrite.

Par ordonnance du 29 octobre 2021, la procédure a été clôturée le 1er février 2022 et l'affaire a été fixée à l'audience du 15 février 2022.

MOTIFS:

Sur la fin de non-recevoir tirée de la chose jugée:

Par jugement du 7 septembre 2010 rendu sur assignation du 2 janvier 2008, le tribunal de grande instance d'Avignon a condamné la société Décor et Tradition à verser à la Sci La Maison Blanche et l'Arlésienne à titre d'indemnité d'occupation la somme de 13 127,70 euros.

Ce jugement a été infirmé par arrêt de la cour d'appel de Nîmes du 11 septembre 2012, laquelle, statuant à nouveau, a condamné la société Décor et Tradition à payer à la Sci La Maison Blanche et l'Arlésienne à titre d'indemnité d'occupation la somme de 2917,70 euros.

Par arrêt du 11 mars 2014, la cour de cassation a cassé l'arrêt précité seulement en ce qu'il a condamné la société Décor et Tradition à payer à la Sci La Maison Blanche et l'Arlésienne à titre d'indemnité d'occupation la somme de 2917,70 euros et renvoyé la cause devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence.

Aucune des parties n'a saisi la cour de renvoi.

Selon l'intimée, les présentes demandes de la Sci La Maison Blanche et l'Arlésienne tendant au règlement d'une indemnité en contrepartie de l'occupation de la parcelle [Cadastre 2] par la sarl Décor et Tradition se heurtent à l'autorité de la chose jugée.

L'appelante estime au contraire qu'il n'y a pas identité de cause entre la procédure engagée par l'assignation du 2 janvier 2008 et la présente procédure engagée par l'assignation du 26 février 2018. Selon elle, la présente demande en paiement d'indemnité d'occupation a pour cause une convention du 12 Février 2004 conclue entre les parties tandis que la demande précédente ne visait pas la convention du 12 février 2004 mais était fondée sur une reconnaissance de dette et un chèque de 79 000 euros.

Aux termes de l'article 1355 du code de procédure civile, l'autorité de la chose jugée n'a lieu qu'à l'égard de ce qui a fait l'objet du jugement: elle s'oppose donc à ce qu'un second procès soit engagé entre les mêmes parties, pour le même objet et une cause identique.

La fin de non-recevoir ne peut toutefois être opposée à une nouvelle procédure lorsque des événements postérieurs au premier jugement sont venus modifier la situation antérieurement reconnue en justice.

Les deux procédures opposent les mêmes parties et ont le même objet à savoir l'indemnité dont la sarl Décor et Tradition serait redevable à l'égard de la propriétaire de la parcelle [Cadastre 2] en contrepartie de son occupation entre le 30 juillet 1996 et le 30 juin 2004.

Si dans la première instance, la Sci La Maison Blanche l'Arlésienne fondait sa demande sur une reconnaissance de dette et un chèque de 79 000 euros, dans la seconde instance elle a fondé sa demande sur une convention conclue le 12 février 2004 entre la Sci des Iscles, la Sci La Maison Blanche l'Arlésienne et la sarl Décor et Tradition aux termes de laquelle cette dernière se reconnait utilisatrice de la parcelle litigieuse depuis juillet 1996 et s'engage à régler les loyers dus au prix de 4000 francs HT par mois.

Contrairement à ce qu'affirme l'appelante, la production de la convention du 12 février 2004, qu'elle explique avoir été récemment retrouvée après avoir été égarée, n'est pas une circonstance nouvelle venue modifier la situation antérieurement reconnue en justice mais seulement un nouveau moyen de preuve de la créance d'indemnité d'occupation dont elle s'est prévalue tant dans son assignation du 2 janvier 2008 que dans celle du 26 février 2018.

En effet, pour faire droit à sa demande d'indemnité d'occupation, le tribunal par jugement du 7 septembre 2010 a considéré que la reconnaissance de dette du 30 juillet 1996 portant le tampon de la sarl Décor et Tradition corroborée par un chèque de 79 000 francs émis par la Sci des Iscles constituait un commencement de preuve par écrit d'une convention relative à l'occupation à titre onéreux de la parcelle [Cadastre 2] par la sarl Décor et Tradition.

Dans le cadre de la présente procédure, pour justifier de sa créance d'indemnité d'occupation, la Sci La Maison Blanche l'Arlésienne produit une convention datée du 12 février 2004 aux termes de laquelle la sarl Décor et Tradition se reconnait utilisatrice de la parcelle [Cadastre 2] depuis juillet 1996 et s'engage à régler les loyers dus au prix de 4000 francs HT par mois.

La production de nouveaux moyens de preuve, alors que la cause du litige reste inchangée, n'empêche pas que l'exception de chose jugée soit utilement invoquée. En effet, se heurte à l'autorité de la chose jugée par le jugement du 7 septembre 2010 la présente demande laquelle a le même objet et se borne à invoquer comme élément nouveau une convention qui n'avait pas pu être produite lors du premier procès pour avoir été égarée aux dires de l'appelante.

Quant aux autres éléments nouveaux invoqués par l'appelante pour faire échec à la fin de non-recevoir tirée de l'autorité de la chose jugée, la reconnaissance implicite du caractère onéreux de l'occupation par les héritiers du gérant de la sarl Décor et Tradition ou les manoeuvres frauduleuses destinées à dissimuler l'existence de la convention du 12 février 2004, ils ne sont pas des circonstances nouvelles venus modifier la situation antérieurement reconnue en justice.

La demande en paiement de l'indemnité d'occupation sera donc déclarée irrecevable.

La demande tendant à réparer le préjudice moral découlant de la résistance de mauvaise foi à son obligation de paiement, déjà formée lors de la première procédure sera pareillement déclarée irrecevable comme se heurtant à l'autorité de la chose jugée. En effet, l'arrêt du 11 septembre 2012 a infirmé toutes les dispositions du jugement sauf en ce qu'il a rejeté la demande fondée sur la reconnaissance de dette. A donc été infirmée la disposition par laquelle le tribunal avait alloué la somme de 1000 euros à titre de dommages-intérêts à la Sci La blanche porte et l'arlésienne. L'arrêt n'a ensuite été cassé que sur le montant de l'indemnité d'occupation.

Sur les demandes de l'intimée:

L'existence et le montant de la créance d'indemnité d'occupation de la SCI La blanche porte et l'arlésienne n'est pas contestable en l'état du jugement du 7 septembre 2010 devenu irrévocable en application de l'article 1034 alinéa 2 du code de procédure civile.

La demande tendant à ordonner la mainlevée partielle de la saisie conservatoire relève de la compétence du juge de l'exécution en application de l'article 511-2 du code des procédures civiles d'exécution.

L'intimée ne rapporte pas la preuve que la procédure engagée par l'appelante procède d'un acharnement judiciaire inspiré par la seule mauvaise foi: sa demande d'indemnisation sera donc rejetée.

Il est équitable en revanche de condamner la Sci La Maison Blanche l'Arlésienne à payer à la sarl Décor et Tradition la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS,

LA COUR, après en avoir délibéré conformément à la loi,

Statuant publiquement, contradictoirement, en matière civile et en dernier ressort,

Déclare irrecevables les demandes de la Sci La Maison Blanche et l'Arlésienne,

Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions,

Y ajoutant,

Déboute la sarl Décor et Tradition de ses demandes de mainlevée de la saisie conservatoire et de dommages-intérêts,

Condamne la Sci La Maison Blanche l'Arlésienne à payer à la sarl Décor et Tradition la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

La condamne aux dépens.

Arrêt signé par Mme FOURNIER, Présidente et par Mme RODRIGUES, Greffière.

LA GREFFIÈRE, LA PRÉSIDENTE,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Nîmes
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 20/01022
Date de la décision : 12/05/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-05-12;20.01022 ?
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