La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

22/04/2022 | FRANCE | N°21/02511

France | France, Cour d'appel de Nîmes, 2ème chambre section b, 22 avril 2022, 21/02511


ARRÊT N°



N° RG 21/02511 - N° Portalis DBVH-V-B7F-IDDC



CJP/CG



TRIBUNAL DE COMMERCE D'AVIGNON

08 juin 2021

RG :2021 0258



S.A. RAFFIN MEDICAL



C/



S.A.S. MNV MEDICAL



Grosse délivrée

le

à















COUR D'APPEL DE NÎMES



CHAMBRE CIVILE

2ème chambre section B



ARRÊT DU 22 AVRIL 2022





APPELANTE :



S.A. RAFFIN MEDICAL

immatricul

ée au RCS de VILLEFRANCHE-TARARE sous le n° 725 880 579, poursuites et diligences de ses représentants légaux en exercice domiciliés en exercice domiciliés en cette qualité en son siège social

[Adresse 3]

[Localité 2]



Représentée par Me Emmanuelle VAJOU de la SELARL LEXAVOU...

ARRÊT N°

N° RG 21/02511 - N° Portalis DBVH-V-B7F-IDDC

CJP/CG

TRIBUNAL DE COMMERCE D'AVIGNON

08 juin 2021

RG :2021 0258

S.A. RAFFIN MEDICAL

C/

S.A.S. MNV MEDICAL

Grosse délivrée

le

à

COUR D'APPEL DE NÎMES

CHAMBRE CIVILE

2ème chambre section B

ARRÊT DU 22 AVRIL 2022

APPELANTE :

S.A. RAFFIN MEDICAL

immatriculée au RCS de VILLEFRANCHE-TARARE sous le n° 725 880 579, poursuites et diligences de ses représentants légaux en exercice domiciliés en exercice domiciliés en cette qualité en son siège social

[Adresse 3]

[Localité 2]

Représentée par Me Emmanuelle VAJOU de la SELARL LEXAVOUE NIMES, Postulant, avocat au barreau de NIMES

Représentée par Me Luc-marie AUGAGNEUR de la SELARL CVS, Plaidant, avocat au barreau de LYON, substitué par Me Jacqueline BRUNELET, avocat au barreau de LYON

INTIMÉE :

S.A.S. MNV MEDICAL

immatriculée au RCS d'AVIGNON sous le n° 509 157 368

prise en la personne de son représentant légal, Mme [K] [L] domiciliée ès qualité audit siège

[Adresse 1]

[Localité 4]

Représentée par Me Jacques TARTANSON, Plaidant/Postulant, avocat au barreau d'AVIGNON, substitué par Me Sandrine MOIROUD-BESSE, avocat au barreau d'AVIGNON

Statuant sur appel d'une ordonnance de référé

Ordonnance de clôture rendue le 28 février 2022

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS :

Mme Chantal JACQUOT-PERRIN, Conseillère, a entendu les plaidoiries en application de l'article 805 du code de procédure civile, sans opposition des avocats, et en a rendu compte à la cour lors de son délibéré.

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Madame Nicole GIRONA, Présidente de Chambre

Mme Chantal JACQUOT-PERRIN, Conseillère

Mme Elisabeth GRANIER, Conseillère

GREFFIER :

Madame Véronique PELLISSIER, Greffière, lors des débats et du prononcé de la décision

DÉBATS :

à l'audience publique du 07 Mars 2022, où l'affaire a été mise en délibéré au 20 Avril 2022, prorogé au 22 avril 2022.

Les parties ont été avisées que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d'appel ;

ARRÊT :

Arrêt contradictoire, prononcé publiquement et signé par Madame Nicole GIRONA, Présidente de Chambre, le 22 Avril 2022, par mise à disposition au greffe de la Cour.

Par acte d'huissier du 21 décembre 2020, la SA Raffin Médical a assigné la SAS MNV Médical devant le président du tribunal de commerce d'Avignon, statuant en référé, aux fins de voir, en substance, condamner la partie défenderesse à lui payer la somme provisionnelle de 37 564,60€ avec intérêts au titre de commandes passées au cours des mois de juin et juillet 2020 et non réglées, outre la somme de 150 € à titre de dommages-intérêts pour les frais de stockage de la marchandise indûment retournée et d'une indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile. Elle sollicite, également, la condamnation de la SAS MNV Médical à récupérer sous astreinte les 46 cartons de masques chirurgicaux entreposés dans ses lieux de stockage.

Par ordonnance contradictoire du 8 juin 2021, le président du tribunal de commerce d'Avignon a constaté l'existence de contestations sérieuses faisant obstacle aux pouvoirs du juge des référés, renvoyé les parties à mieux se pourvoir, dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et laissé à la SA RAFFIN Médical la charge des dépens dont ceux de greffe liquidés à la somme de 42,79 euros TTC.

Par déclaration du 29 juin 2021, la SA Raffin Médical a interjeté appel de cette ordonnance en toutes ses dispositions.

Aux termes de ses conclusions notifiées le 17 décembre 2021, auxquelles il est expressément renvoyé pour un exposé complet de ses moyens et prétentions,la SA Raffin Médical, appelante, demande à la cour, au visa des articles 873 alinéa 2, 491 et 700 du code de procédure civile, 1103, 1168, 1231-1, 1583 et 1650 du code civil, d'infirmer la décision entreprise et de :

-condamner la SAS MNV Médical à lui payer la somme provisionnelle de 37 564,60 €, avec intérêts au taux de refinancement de la Banque Centrale Européenne majorée de 8 points de pourcentage à compter du 31 août 2020 sur la somme de 63,60 euros et à compter du 30 septembre 2020 sur la somme de 37 501 €, outre indemnité forfaitaire de 40 €,

-condamner la SAS MNV Médical à lui payer la somme de 150 €, à titre provisionnel, à titre de dommages-intérêts pour les frais de stockage indûment exposés au titre des marchandises retournées,

-condamner la même à récupérer, sous astreinte de 200 € par jour de retard, les 46 cartons de masques chirurgicaux de très haute filtration à élastique de type II, entreposés dans les lieux de stockage sis [Adresse 5],

-débouter la SAS MNV Médical de toutes ses demandes, fins et conclusions plus amples ou contraires, outre appel incident,

-condamner la même à lui payer la somme de 10 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens de première instance et d'appel.

Au soutien de son appel, la SA Raffin Médical, rappelant être en relation d'affaires de longue date avec la société MNV, fait valoir, pour justifier qu'il n'existe aucune contestation sérieuse à sa demande de condamnation de la société MNV au paiement de la somme de 37 564,50 €, que les conditions d'application de l'article 1195 du code civil ne sont pas réunies, telles que l'imprévisibilité du changement de circonstances, eu égard à la date du contrat en juillet 2020 alors que la société MNV ne pouvait ignorer l'ampleur de la pandémie, à une période où un confinement avait déjà été instauré ; elle expose n'avoir jamais donné son accord à une reprise des masques correspondant à la facture du 24 juillet 2020 d'un montant de 36 925 € et qui lui ont été retournés par la Société MNV à la seule initiative de cette dernière.

Elle souligne que l'exécution excessivement onéreuse du contrat pour une des parties fait, en l'espèce, défaut, ce caractère visant l'exécution du contrat en lui même et non l'opération économique d'ensemble d'une seule des parties ; l'appelante ajoute que la société MNV Médical aurait dû continuer à exécuter ses obligations durant la renégociation du contrat, qui, au demeurant, n'a pas été engagée ; que la chute du prix des masques est étrangère au critère d'imprévisibilité exigé et qu'en réalité, la société MNV Médical a délibérément choisi de spéculer sur la forte demande en masques, ce qui l'a conduite à accepter implicitement le risque de ne pouvoir revendre ses produits au tarif auquel elle les avait achetés.

La société Raffin Médical fait encore valoir que la société MNV Médical ne démontre pas que son fournisseur aurait manqué à son obligation de bonne foi, subissant elle-même les conséquences financières de la chute du prix des masques, ce dont elle avait informé son co-contractant.

La SAS MNV Médical , en sa qualité d'intimée, par conclusions en date du 8 novembre 2021, auxquelles il convient de se reporter pour un plus ample exposé de ses prétentions et moyens, demande à la cour, au visa des articles 1103 et suivants, 1193 et suivants et notamment 1195 du Code civil, de débouter la SA RAFFIN Médical de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions et de confirmer l'ordonnance entreprise en tous points.

À titre subsidiaire, l'intimée souhaite voir la cour :

-constater qu'elle indique reconnaître devoir la somme de 639,90 euros TTC correspondant aux factures n°R012007FAC18765 du 17 juillet 2020 de 63,60 euros TTC, n°R012007FAC20235 du 29 juillet 2020 de 384 € TTC et n°R012007FAC20624 du 31 juillet 2020 de 292 € TTC,

-constater qu'elle reconnaît devoir la somme de 2 954 € TTC pour 4 cartons conservés par elle et relevant de la facture n°R012007FAC19743 du 24 juillet 2020 pour 100 000 masques chirurgicaux (50 cartons x 2000 masques),

-constater qu'elle reconnaît donc devoir la somme totale de 3 593,60 € TTC,

-faire application de la théorie de l'imprévision au visa de l'article 1195 du Code civil et au vu de la restitution de 46 des 50 cartons afférents à la facture n°R012007FAC19743 du 24 juillet 2020, annuler le surplus de la facture litigieuse pour 33 971 € TTC (36 925 € TTC -2 954 € TTC),

-constater au surplus la restitution de 46 des 50 cartons afférents à cette facture,

-en tout état de cause, condamner la SA RAFFIN Médical à lui payer la somme de 3 500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens, pour la procédure d'appel.

La société MNV Médical rappelant avoir sollicité, au visa de l'article 131-15 du code de procédure civile, la mise en oeuvre d'une procédure de médiation, estime, à l'effet de voir confirmer l'ordonnance déférée, que l'imprévision, telle que définie à l'article 1195 du code civil, doit régir le présent litige dès lors que très rapidement après la commande des masques, les prix du marché se sont effondrés; elle fait valoir qu'elle a exposé cette difficulté à la société Raffin, qui lui a répondu que les cartons de masques pouvaient lui être retournés, ce qu'elle a fait en renvoyant 46 des 50 cartons, cette restitution n'étant pas contestée comme pourrait en attester le texte de la mise en demeure du 13 octobre 2020. Elle en conclut que c'est à juste titre que l'ordonnance déférée a retenu l'existence d'une contestation sérieuse de l'obligation à paiement compte tenu du retour des cartons de masques au fournisseur.

Subsidiairement , la société MNV persiste à considérer que l'imprévision, telle que prévue à l'article 1195 du code civil doit trouver application en l'espèce, les conditions énoncées par ce texte étant réunies, et reconnaît devoir la somme ci-dessus énoncée, soit 3593 € TTC, la facture de 33 971 € TTC étant annulée à la suite du retour de 46 cartons.

Sur ce

Selon l'article 873 du code de procédure civile, le président peut, dans les mêmes limites, et même en présence d'une contestation sérieuse, prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s'imposent, soit pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite.

Dans les cas où l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable, il peut accorder une provision au créancier, ou ordonner l'exécution de l'obligation même s'il s'agit d'une obligation de faire.

Le litige porte essentiellement sur le paiement de la livraison par la société Raffin à la société MNV de 50 cartons de 2000 unités chacun, soit 100 000 masques chirurgicaux destinés à lutter contre la propagation de l'épidémie, en 2020, de Covid 19, commandés le 15 juillet 2020 par la société MNV médical destinataire d'une facture de 36 925 €.

Les masques commandés et livrés ont été retournés, le 13 octobre 2020, à la société Raffin Médical par la société MNV Médical, sans que ce retour ait donné lieu à un accord écrit des parties en ce sens, de sorte que selon la société Raffin Médical l'obligation à paiement n'est pas contestable.

Or, pour justifier ce retour, partant l'existence d'une contestation sérieuse de son obligation à paiement de la facture de 36 925 €, la société MNV invoque les dispositions de l'article 1195 du code civil aux termes duquel si un changement de circonstances imprévisible lors de la conclusion du contrat rend l'exécution excessivement onéreuse pour une partie qui n'avait pas accepté d'en assumer le risque, celle-ci peut demander une renégociation du contrat à son cocontractant. Elle continue à exécuter ses obligations durant la renégociation.

En cas de refus ou d'échec de la renégociation, les parties peuvent convenir de la résolution du contrat, à la date et aux conditions qu'elles déterminent, ou demander d'un commun accord au juge de procéder à son adaptation. A défaut d'accord dans un délai raisonnable, le juge peut, à la demande d'une partie, réviser le contrat ou y mettre fin, à la date et aux conditions qu'il fixe.

Ainsi, la contestation par la société MNV Médical de son obligation à paiement repose tant sur la confiance des parties dans la parole de son co-contractant nouée du fait de l'ancienneté de leurs relations d'affaires, que sur l'offre de la société MNV de règlement, demeurée sans suite, de régler la moitié de la facture litigieuse, soit la somme de 18 162,50 € alors que ne peuvent être soumises à la juridiction des référés, juge de l'évidence, la discussion relative au caractère éventuellement spéculatif de l'achat des masques en cause, qui participe nécessairement du débat sur l'imprévisibilité, partant sur la révision du contrat.

Il y a lieu, en conséquence, de confirmer en toutes ses dispositions l'ordonnance de référé du tribunal de commerce d'Avignon du 8 juin 2021, tenant le caractère sérieusement contestable de l'obligation de la SA Raffin Médical.

La cour faisant droit à la demande principale de confirmation de la société MNV Médical, il n'y a pas lieu de statuer sur ses demandes subsidiaires.

L'équité commande de condamner la société Raffin Médical au paiement d'une indemnité de 1 000 € à la société MNV Médical au titre des frais irrépétibles d'appel, outre les dépens.

PAR CES MOTIFS :

Statuant publiquement, par arrêt contradictoire, en matière de référé, en dernier ressort et par mise à disposition au greffe,

Confirme l'ordonnance du 8 juin 2021 du tribunal de commerce d'Avignon en toutes ses dispositions,

Condamne la SA Raffin Médical à payer à la SAS MNV Médical une indemnité de procédure de 1 000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles d'appel,

Condamne la SA Raffin Médical aux dépens de la procédure d'appel.

Arrêt signé par Madame GIRONA, Présidente et par Madame PELLISSIER, Greffière.

LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Nîmes
Formation : 2ème chambre section b
Numéro d'arrêt : 21/02511
Date de la décision : 22/04/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-04-22;21.02511 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award