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10/09/2015 | FRANCE | N°12/03640

France | France, Cour d'appel de nîmes, Chambre civile, 10 septembre 2015, 12/03640


ARRÊT No
R. G. : 12/ 03640
AJ/ CJ
TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE PRIVAS 05 juillet 2012 RG : 11/ 02389

Y...
C/
X...
S. C. I. LE PARC

COUR D'APPEL DE NÎMES

CHAMBRE CIVILE 1ère Chambre A

ARRÊT DU 10 SEPTEMBRE 2015

APPELANTE :

Madame Monique Y... divorcée X...Née le 16 Mai 1954 à ARCENS (07310) ... 07160 SAINT BARTHÉLÉMY LE MEIL

Représentée par Me Anne CURAT de la SCP CURAT ANNE AVOCAT, Postulant, avocat au barreau de NIMES, Représentée par Me Gérard VAILLER, Plaidant, avocat au barreau de VALENCE.
>INTIMÉS :
Monsieur Roger X...Né le 21 Avril 1950 à ST BARTHELEMY LE MEIL (07160) 07160 SAINT BARTHÉLÉMY LE MEIL

Représenté ...

ARRÊT No
R. G. : 12/ 03640
AJ/ CJ
TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE PRIVAS 05 juillet 2012 RG : 11/ 02389

Y...
C/
X...
S. C. I. LE PARC

COUR D'APPEL DE NÎMES

CHAMBRE CIVILE 1ère Chambre A

ARRÊT DU 10 SEPTEMBRE 2015

APPELANTE :

Madame Monique Y... divorcée X...Née le 16 Mai 1954 à ARCENS (07310) ... 07160 SAINT BARTHÉLÉMY LE MEIL

Représentée par Me Anne CURAT de la SCP CURAT ANNE AVOCAT, Postulant, avocat au barreau de NIMES, Représentée par Me Gérard VAILLER, Plaidant, avocat au barreau de VALENCE.

INTIMÉS :
Monsieur Roger X...Né le 21 Avril 1950 à ST BARTHELEMY LE MEIL (07160) 07160 SAINT BARTHÉLÉMY LE MEIL

Représenté par Me Marion GUIZARD de la SCP MARION GUIZARD PATRICIA SERVAIS, Plaidant/ Postulant, avocat au barreau de NÎMES, Représenté par Me Annie DAVID, Plaidant, avocat au barreau de LYON.

S. C. I. LE PARC Prise en la personne de ses gérants en exercice domiciliés en cette qualité au siège social sis, 07160 SAINT BARTHÉLÉMY LE MEIL

Représentée par Me Marion GUIZARD de la SCP MARION GUIZARD PATRICIA SERVAIS, Plaidant/ Postulant, avocat au barreau de NÎMES, Représentée par Me Annie DAVID, Plaidant, avocat au barreau de LYON.

ORDONNANCE DE CLÔTURE rendue le 15 Mai 2015.

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

M. André JACQUOT, Président, Mme Anne-Marie HEBRARD, Conseiller, Monsieur Philippe SOUBEYRAN, Conseiller.

GREFFIER :

Mme Cécile JEANSELME, Greffier lors des débats, et Mme Carole MAILLET, Greffier lors du prononcé.

DÉBATS :

A l'audience publique du 26 Mai 2015, où l'affaire a été mise en délibéré au 10 Septembre 2015 ; Les parties ont été avisées que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d'appel.

ARRÊT :

Arrêt contradictoire, prononcé et signé par M. André JACQUOT, Président, publiquement, le 10 Septembre 2015, par mise à disposition au greffe de la Cour.
* * *

FAITS PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Par arrêt en date du 10 octobre 2013 auquel le présent se réfère expressément pour plus ample exposé des faits, de la procédure et des prétentions initiales des parties, la Cour de ce siège a infirmé le jugement du tribunal de grande instance de Privas en date du 5 juillet 2012 et statuant à nouveau :- dit que M. Roger X...a commis une faute de gestion dans la passation du bail commercial consenti le 5 décembre 2008 par la SCI Le Parc à la SAS Roger X...Group,- avant dire droit sur le l'existence et le montant du préjudice éventuellement subi par la SCI Le Parc, ordonné une mesure d'expertise et commis M. Alain A...pour y procéder-réservé les frais et les dépens au fond.

L'expert A...a déposé son rapport le 13 août 2014.
Dans leurs dernières conclusions en date du 23 février 2015 auxquelles il convient de se référer pour plus ample exposé de leurs prétentions, M. Roger X...et la SCI Le Parc demandent à la cour de :
" Vu l'article 1843-5 du Code Civil, Vu l'arrêt de la Cour en date du 10 octobre 2013,

Sur les demandes principales
Constater que le rapport d'expertise comporte des erreurs, et qu'il ne tire pas les conséquences de la situation défavorable des lieux,
En conséquence,
Refuser d'homologuer le rapport d'expertise de Monsieur A....
Dire et juger que Monsieur X...n'a pas agi au détriment de I'intérêt social en concluant, pour la SCI LE PARC, le bail litigieux,
Dire et juger que la seule faute établie de Monsieur X...a été de ne pas informer Madame Y... de la conclusion dudit bail,
Dire et juger que cette faute n'a pu entraîner aucun préjudice pour la SCI LE PARC, dont l'intérêt social n'a pas été méconnu.
Dire et juger qu'en toute hypothèse la SCI LE PARC n'a subi aucun préjudice,
En conséquence,
Débouter Madame Y... de l'ensemble de ses demandes.
Subsidiairement, Dire et juger que le préjudice par la SCI LE PARC ne pourrait consister qu'en une perte de chance de contracter un bail dans des conditions plus avantageuses,

Dire et juger que compte tenu de la situation du bien, cette perte de chance ne saurait excéder 5 % de la somme réclamée par Madame Y....
A titre reconventionnel Dire et juger que l'action engagée par Madame Y... constitue un abus du droit d " agir en justice.

En conséquence,
Condamner Madame Y... au versement d'une somme de 15. 000 ¿ à titre de dommages et intérêts, au bénéfice de la SCI LE PARC, et de 15. 000 ¿ au bénéfice de Monsieur X....
Condamner Madame Y... au versement d'une indemnité de 10. 000 ¿ au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile. La condamner aux entiers dépens dont distraction au profit de la SCP GUIZARD SERVAIS sur son affirmation de droit. "

Dans ses dernières conclusions en date du 20 avril 2015 auxquelles il convient de se référer pour plus ample exposé de ses prétentions, Mme Monique Y... demande de :
" Procéder à l'homologation du rapport d'expertise judiciaire de M. A...et de fixer à la somme de 29 700 euros HT l'an le loyer du bail commercial consenti le 5 décembre 2008 par la SCI Le Parc à la SAS Roger X...Group,
Statuer à nouveau et condamner M. Roger X...à payer à la SCI Le Parc la somme de 90 282, 83 euros arrêtée au 31/ 12/ 2014, sauf à parfaire, outre intérêts au taux légal
Condamner M. Roger X...à lui payer la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens de première instance et d'appel qui comprendront les frais d'expertise de M. A..., distraits au profit de la SCP Curat. "
MOTIFS
Sur la faute
La cour, dans son arrêt du 10 octobre 2013, a retenu l'existence d'une faute de gestion commise par M. X...pour n'avoir pas tenu Mme Y..., cogérante, informée de la passation du bail du 5 décembre 2008 entre la SCI Le Parc et la SAS Roger X...Group moyennant un loyer annuel de 15 000 euros.
M. X...conteste avoir agi au détriment de l'intérêt social de la SCI, la seule faute étant un défaut d'information de la cogérante qui ne démontre pas qu'elle se serait opposée à la conclusion du bail, pas plus qu'elle ne démontre que son opposition aurait préservé l'intérêt de la SCI Le Parc, le loyer ayant été fixé sur la base d'un rapport d'expertise du cabinet Roux.
Or, selon les statuts de la SCI Le Parc (article 11 pouvoirs des gérants), un gérant doit informer le ou les autres gérants de la prochaine intervention d'un acte ou engagement et s'en réserver la preuve. Le ou les autres gérants peuvent s'opposer à l'accomplissement de tout acte ou engagement avant qu'il ne soit conclu.
Il s'en infère que l'information à donner au cogérant est prévue dans l'intérêt social puisque le cogérant est à même ainsi d'apprécier s'il doit ou non s'opposer à l'opération projetée compte tenu de l'éventuel atteinte que l'acte est susceptible de porter aux intérêts de la SCI ; le manquement de M. X...à son devoir d'information est d'autant plus important au regard de la nature de l'acte passé, le prix du bail conclu au profit de sa société commerciale étant susceptible de favoriser celle-ci au détriment de la SCI propriétaires des locaux. Cette faute est dès lors directement à l'origine du préjudice que peut subir la SCI par la fixation d'un loyer inférieur à la valeur locative des locaux au bénéfice exclusif de la société commerciale de M. X...qui confond sur sa tête les qualités de bailleur et de locataire.
Sur le préjudice
Pour contester l'estimation de la valeur locative réalisée par l'expert A..., M. X...soulève deux difficultés :
- une erreur de calcul dans la méthode de la valeur de l'investissement à but lucratif : après reprise des chiffres énoncés au rapport et considérant que les deux rapports Roux et Tracol ont fourni l'un et l'autre une valeur vénale de l'immeuble dont il s'agit à hauteur de 303 000 euros, c'est bien une moyenne de 316 694 euros qu'il convient de retenir pour la valeur vénale de l'immeuble et non 323 000 euros comme retenue par l'expert. La détermination de la valeur locative est donc de 316 694 x 9 % = 28 502, 46 euros, arrondie à 28 500 euros. Après application du coefficient minorant de 20 % tenant compte des critères négatifs, c'est une valeur locative de 22 800 euros à laquelle cette méthode aboutit. La moyenne arithmétique des trois méthodes d'évaluation (valeurs comparatives ou statistiques : 30 579 euros ; valeur par la méthode des surfaces pondérées : 29 877, valeur de l'investissement locatif : 22 800) aboutit dès lors à la somme de 27 752 euros, arrondie à 27 750 euros.

- la situation défavorable des locaux : il est clair que les locaux sont situés dans le village isolé de St Barthélemy le Meil et que seules des raisons historiques et personnelles aux ex-époux Descours-Y...expliquent cette implantation en ce lieu.

L'expert A...a justement recensé les éléments négatifs (éloignement des centres d'activités ; situation géographique en zone de montagne ; accès par des routes étroites et sinueuses ; difficulté d'envisager une activité commerciale différente au vu de la conception spécifique des locaux et du peu d'importance de la taille de la commune ; bail monovalent à usage commercial lié au négoce et à la transformation de fruits et préparation liée à l'alimentation). Or, ces éléments négatifs prévalent sur les quelques éléments positifs recensés par l'expert que sont la qualité du bâti et des aménagements intérieurs et extérieurs avec un grand parking à disposition du personnel et des visiteurs. Le coefficient de réduction arbitré par l'expert à hauteur de 20 % apparaît insuffisant pour tenir compte de la prévalence des éléments négatifs tout en excluant l'argumentation de M. X...selon lequel les locaux ne seraient pas loués s ¿ ils ne l'étaient à la SA Roger X...Group, contraire à la réalité de la situation.

La Cour retiendra en conséquence un coefficient de réduction de 40 %, qui, appliqué à la valeur locative de 28 500 euros conduit à retenir au titre de la méthode par la valeur de l'investissement à but locatif un loyer annuel HT de 17 100 euros. La moyenne arithmétique des trois méthodes aboutit alors à la fixation d'un loyer annuel HT de 25 852 euros, arrondie à 25 800 euros, à comparer au loyer annuel de 15 000 euros fixé unilatéralement par M. X....
Toutefois, le préjudice subi par la SCI ne peut être constitué de la différence entre les loyers perçus et ceux qui auraient dus être perçus. Il s'agit d'une perte de chance de voir fixer les loyers dus par la SAS Roger X...à la valeur locative telle que ci-dessus déterminée, perte de chance que la cour arbitre à 70 % de la différence ainsi établie.
Les parties disposant de tous les éléments pour calculer les différences annuelles entre les loyers perçus et les loyers qui auraient dû être perçus en fonction de la valeur locative fixée par le présent arrêt entre le 5 décembre 2008 et la date du présent arrêt, avec application de l'indice trimestriel des loyers commerciaux puis de la perte de chance précédemment déterminée, il convient de les liquider sur état, la Cour se réservant la possibilité d'être saisie en cas de difficultés ou de désaccord sur cette liquidation, qui devra intervenir en tout état de cause dans les quatre mois de la signification du présent arrêt.
La détermination d'une valeur locative supérieure au prix du bail aboutit de facto à exclure tout caractère abusif à l'action de Mme X..., soucieuse des intérêts de la SCI, sans qu'il soit opportun pour la Cour d'entrer dans le détail des dits et non-dits liés aux conséquences patrimoniales du divorce des époux X.../ Y....
Aucune considération économique ou d'équité ne commande de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
M. X..., partie perdante au sens de l'article 696 du code de procédure civile, supportera les dépens de première instance et d'appel, qu'il serait contraire à l'intérêt de la SCI de laisser à sa charge en tout ou partie, en ceux compris les frais d'expertise, distraits pour les dépens d'appel au profit de la SCP Curat, sur son affirmation de droit.

PAR CES MOTIFS

La Cour
Statuant publiquement, contradictoirement, en dernier ressort.
Vu l'arrêt en date du 10 octobre 2013.
Dit n'y avoir lieu à homologuer le rapport de l'expert A...en ce qu'il a fixé la valeur locative à la somme de 29 700 euros.
Fixe la valeur locative des locaux objets du bail du 5 décembre 2008 à la somme annuelle HT de 25 800 euros après application d'un coefficient de minoration de 40 % sur la valeur locative déterminée par la valeur de l'investissement à but locatif.
Dit que le préjudice subi par la SCI Le Parc est constitué d'une perte de chance évaluée à hauteur de 70 % de voir fixer le prix du bail à la valeur locative ainsi déterminée.
Ordonne la liquidation sur état de ce préjudice, calculé sur 70 % de la différence entre les loyers perçus entre le 5 décembre 2008 et les loyers qui auraient dus l'être en considération de la valeur locative fixée par le présent arrêt, avec application de l'indice trimestriel des loyers commerciaux, qui devra intervenir au plus tard dans les quatre mois de la notification du présent arrêt et dit qu'en cas de difficultés sur cette liquidation, l'une ou l'autre des parties pourra saisir la Cour pour y mettre fin, et ceci, par simple requête préalablement notifiée à l'autre partie.
Déboute M. Roger X...et la SCI Le Parc de leurs demandes de dommages et intérêts.
Dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
Condamne M. Roger X...aux dépens de première instance et d'appel, en ceux compris les frais d'expertise, les dépens d'appel étant distraits au profit de la SCP Curat, avocat, sur son affirmation de droit.
Arrêt signé par M. JACQUOT, Président et par Mme MAILLET, Greffier.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de nîmes
Formation : Chambre civile
Numéro d'arrêt : 12/03640
Date de la décision : 10/09/2015
Sens de l'arrêt : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.nimes;arret;2015-09-10;12.03640 ?
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