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09/04/2015 | FRANCE | N°14/03691

France | France, Cour d'appel de nîmes, 1ère chambre a, 09 avril 2015, 14/03691


ARRÊT No
R. G. : 14/ 03691
AJ/ VC
JUGE DE L'EXECUTION D'AVIGNON 15 juillet 2014 RG : 13/ 02744

X... X... Née Y...

C/
Société LYONNAISE DE BANQUE

COUR D'APPEL DE NÎMES

CHAMBRE CIVILE 1ère Chambre A

ARRÊT DU 09 AVRIL 2015
APPELANTS :
Monsieur Bernard Jean Roger X... né le 18 Mars 1953 à VALENCE (26)... 84470 CHATEAUNEUF DE GADAGNE

Représenté par Me Marion GUIZARD de la SCP MARION GUIZARD PATRICIA SERVAIS, Postulant, avocat au barreau de NÎMES Représenté par Me Jacques TARTANSON, Plaidant, avocat au barreau d'AV

IGNON

Madame Marie-Hélène X... Née Y... née le 30 Janvier 1960 à ZAHLE (LIBAN)... 84470 CHATEAUNEUF DE GADAGNE

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ARRÊT No
R. G. : 14/ 03691
AJ/ VC
JUGE DE L'EXECUTION D'AVIGNON 15 juillet 2014 RG : 13/ 02744

X... X... Née Y...

C/
Société LYONNAISE DE BANQUE

COUR D'APPEL DE NÎMES

CHAMBRE CIVILE 1ère Chambre A

ARRÊT DU 09 AVRIL 2015
APPELANTS :
Monsieur Bernard Jean Roger X... né le 18 Mars 1953 à VALENCE (26)... 84470 CHATEAUNEUF DE GADAGNE

Représenté par Me Marion GUIZARD de la SCP MARION GUIZARD PATRICIA SERVAIS, Postulant, avocat au barreau de NÎMES Représenté par Me Jacques TARTANSON, Plaidant, avocat au barreau d'AVIGNON

Madame Marie-Hélène X... Née Y... née le 30 Janvier 1960 à ZAHLE (LIBAN)... 84470 CHATEAUNEUF DE GADAGNE

Représentée par Me Marion GUIZARD de la SCP MARION GUIZARD PATRICIA SERVAIS, Postulant, avocat au barreau de NÎMES Représentée par Me Jacques TARTANSON, Plaidant, avocat au barreau d'AVIGNON

INTIMÉE :
Société LYONNAISE DE BANQUE, au capital de 260 840 262 euros, inscrite au RCS de Lyon sous le no 954 507 976, agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux, domiciliés en cette qualité audit siège 8 rue de la République 69001 LYON

Représentée par Me Sonia HARNIST de la SCP REINHARD-DELRAN ET ASSOCIES, Postulant, avocat au barreau de NIMES Représentée par Me ROUSSEL de la SCP ROUSSEL CABAYE ROUSSEL, Plaidant/ Postulant, avocat au barreau de MARSEILLE

Statuant sur appel d'un jugement rendu par le Juge de l'Exécution

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :
M. André JACQUOT, Président, Mme Anne-Marie HEBRARD, Conseiller, Monsieur Philippe SOUBEYRAN, Conseiller,

GREFFIER :
Madame Vanessa CHRISTIAN, Greffier, lors des débats et du prononcé de la décision
DÉBATS :
à l'audience publique du 24 Février 2015, où l'affaire a été mise en délibéré au 09 Avril 2015 Les parties ont été avisées que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d'appel ;

ARRÊT :
Arrêt contradictoire, prononcé et signé par M. André JACQUOT, Président, publiquement, le 09 Avril 2015, par mise à disposition au greffe de la Cour * * *

EXPOSE DU LITIGE
Les époux X... et Marie-Hélène Y... ont souscrit selon acte authentique du 17 juillet 2006 un prêt immobilier d'un montant de 97 718 ¿ auprès de la SA Lyonnaise de banque aux fins d'acquérir en l'état futur d'achèvement un lot de copropriété destiné à la location et situé dans un ensemble immobilier à Colomiers (Haute-Garonne). Les échéances du prêt n'étant plus remboursées, la SA lyonnaise de banque a fait pratiquer le 13 juin 2013 une saisie attribution des loyers dus par la société Park and Suites pour obtenir paiement de la somme de 116 530, 35 ¿ et dont les époux X.../ Y... ont sollicité mainlevée auprès du juge de l'exécution du tribunal de grande instance d'Avignon qui par jugement contradictoire du 15 juillet 2014 a rejeté leur demande.
Ils ont relevé appel de ce jugement et soutiennent dans leurs dernières écritures en date du 13 janvier 2015 auxquelles il est fait expressément référence pour plus ample exposé des demandes et moyens que : ¿ ils sont victimes des agissements frauduleux de la société Apollonia qui leur a fait acquérir huit lots pour un montant total de 961 909 ¿ financés en intégralité par des emprunts et ont engagé une action pénale et civile devant le tribunal de grande instance de Marseille ; ¿ de nombreuses irrégularités affectent le prêt qui ne sont pas ratifiées dans les termes de l'article 1338 du code civil par sa seule exécution durant 3 ans ; ¿ l'exception de nullité peut être opposée comme moyen de défense à une action en paiement et le défaut de représentation à l'acte de prêt qu'ils invoquent est insusceptible de régularisation ; ¿ les graves irrégularités affectant l'acte authentique le privent également de son caractère exécutoire ; ¿ les dispositions d'ordre public en matière d'emprunts immobiliers n'ont pas été respectées ; ¿ c'est en vain que la banque invoque le statut de loueur de meublé professionnel alors que les documents imprimés d'offre de prêt font expressément référence à la loi Scrivener ; ¿ le délai de l'action en déchéance du droit aux intérêts n'est pas prescrit, contrairement à l'action de la banque au visa des articles L 312-1, L 312-2 et L 137-2 du code de la consommation qui leur bénéficient s'agissant en l'espèce de l'acquisition d'un immeuble d'habitation et de l'absence d'effet interruptif des conclusions signifiées à titre reconventionnel par la banque le 8 juin 2010 dans le cadre de la procédure en responsabilité engagée à son encontre ; ¿ la banque qui n'ignore pas « le caractère toxique des dossiers Apollonia » n'a pas hésité pourtant à les poursuivre en paiement ce qui caractérise un comportement abusif. Les époux X.../ Y... concluent à la nullité de la procédure de saisie attribution et au paiement par la SA Lyonnaise de banque des sommes de 10 000 ¿ à titre de dommages-intérêts et de 5 000 ¿ en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Cette dernière, par conclusions récapitulatives et en réplique du 9 février 2015 auxquelles il est fait ici expressément référence pour plus ample exposé de ses prétentions et moyens, fait valoir que : ¿ les époux X.../ Y... ayant réalisé l'acquisition de huit biens dans le cadre d'une opération d'investissement importante d'un montant de 961 909 ¿ n'ont pas la qualité de consommateurs et d'ailleurs le statut de loueur de meublés professionnel est incompatible avec cette qualification ; ¿ ayant été tenue dans l'ignorance de l'ensemble des prêts souscrits, elle n'a pu volontairement se soumettre au code de la consommation ; ¿ quand bien même tel serait le cas, la signification de conclusions le 19 avril 2010 par la Lyonnaise de banque aux emprunteurs réclamant le remboursement immédiat du prêt du 16 mai 2006 dans l'instance pendante devant la juridiction marseillaise a interrompu utilement le délai biennal, le premier impayé datant de juin 2009 ; ¿ l'article L 137-2 du code de la consommation n'étant que la transposition de l'ancien article 2272 du Code civil repose sur une présomption de paiement et les époux X.../ Y... qui reconnaissent avoir cessé tout paiement ne peuvent en revendiquer le bénéfice ; ¿ ils ont remboursé sans réserve les échéances du prêt jusqu'en 2009 dont ils ne sollicitent pas la nullité mais entendent conserver la propriété de l'immeuble et en percevoir les loyers ; ¿ ils ne peuvent prétendre à la nullité du prêt par voie d'exception en l'état de cette exécution ; ¿ l'irrégularité de la procuration qu'ils allèguent est sans incidence sur le caractère exécutoire de l'acte notarié ; ¿ subsidiairement, l'offre de crédit dont ils ont d'ailleurs sollicité la prorogation et son acceptation ont été effectuées en conformité avec le code de la consommation ; ¿ il n'est pas abusif pour un établissement bancaire de vouloir récupérer des sommes prêtées alors que les époux X.../ Y... ont eux-mêmes « participer activement au système Apollonia ». La SA Lyonnaise de banque conclut au rejet de l'intégralité de leurs demandes et à la confirmation du jugement de première instance sauf à préciser le caractère de loueur professionnel des intimés ; la banque sollicite également paiement d'une indemnité de 3 000 ¿ pour frais de procédure.

DISCUSSION
Sur la prescription :
Si la loi de procédure du 17 juin 2008 portant réforme de la prescription des droits et actions en matière civile a aménagé à son article 4 une prescription abrégée pour les biens et prestations fournis par les professionnels, elle n'en a pas fait pour autant une prescription exceptionnelle soumise à un régime dérogatoire, la loi précisant seulement dans l'article L 137-1 nouvellement créé que les parties au contrat ne pouvaient la modifier ni dans sa durée ni dans ses causes d'interruption ou de suspension. Pour faire échec aux dispositions de l'article L 137-2 du code de la consommation imposant à l'établissement bancaire d'agir dans un délai de deux ans à compter de la défaillance des emprunteurs, la SA Lyonnaise de banque leur conteste la qualité de consommateurs en invoquant d'une part leur inscription au régime des loueurs de meublés professionnels et d'autre part un investissement immobilier incompatible avec la notion de consommateur. Cet argumentaire ne peut prospérer ; en effet : ¿ il ressort des pièces communiquées par la banque elle-même que seul M. Bernard X... est inscrit en cette qualité au registre du commerce et des sociétés et qu'ainsi l'argument n'est pas opposable à l'épouse qui a la qualité de co-emprunteur ; ¿ il est admis que l'acquisition en l'état futur d'achèvement a été réalisée par les appelants dans le cadre d'une option fiscale, ouverte à tout contribuable, exigeant une telle immatriculation sans que pour autant l'activité professionnelle réelle des époux X.../ Y... en ait été modifiée, le mari exerçant la profession de kinésithérapeute, l'épouse étant sans profession et leur participation à l'exploitation de la résidence où est situé l'appartement étant elle même limitée à la signature de baux soumis par le gestionnaire ; ¿ ils ont acquis un immeuble à usage d'habitation ou à usage professionnel et d'habitation, au sens de l'article L 312-2 du code de la consommation, le prêt ayant financé un appartement situé dans une résidence hôtelière et la portée générale de ces dispositions, tant dans leur ancienne rédaction (loi du 13 juillet 1979) que postérieure à la modification législative du 1er juillet 2010 la rend applicable non pas au seul consommateur au sens strict du terme, mais à tout particulier souscrivant un emprunt pour acquérir un immeuble de cette nature, la loi ne distinguant pas entre des acquisitions destinées à une habitation effective et celles destinées à un investissement. C'est donc à tort que le premier juge a écarté l'application de ces dispositions.

Demeure la question de savoir si la prescription biennale a été utilement interrompue puisque la banque ne conteste pas qu'elle bénéficie aux époux X.../ Y... sous les réserves qui précèdent liées à leur statut. En l'espèce, la déchéance du terme ayant été prononcée par courrier recommandé du 21 septembre 2009, la banque se devait d'agir au plus tard le 21 septembre 2011. Elle invoque ses conclusions reconventionnelles signifiées le 8 juillet 2010 dans le cadre de l'action en responsabilité et paiement de dommages-intérêts initiée par les emprunteurs à son encontre devant le tribunal de grande instance de Marseille mais ces derniers en contestent utilement le caractère interruptif. En effet, il est constant que la SA Lyonnaise de banque a fait pratiquer la saisie attribution contestée en application des articles L 111-3- 4o et L 211-1 du code des procédures civiles d'exécution, en vertu du titre exécutoire constitué par l'acte authentique de prêt et dont elle n'a cessé d'affirmer la validité ; elle devait en conséquence engager la mesure d'exécution forcée qui lui était ouverte dans le délai biennal précité et ne peut se prévaloir d'une demande en paiement dans le cadre d'une action distincte aux fins d'obtenir un autre titre exécutoire dont elle n'avait nul besoin. Cela est si vrai qu'elle motive sa demande reconventionnelle en ces termes : « attendu que les consorts X... ont sollicité le sursis à statuer dans l'attente de l'issue de la procédure pénale et que la Lyonnaise de banque n'a pas entendu s'y opposer ; mais attendu que la concluante, afin d'interrompre la prescription, entend formuler des demandes reconventionnelles en paiement ». Au visa de l'ensemble de ces éléments, la saisie-attribution pratiquée en 2013 soit plus de deux années après l'expiration du délai de l'article L 137-2 est donc prescrite et son annulation doit être prononcée sans qu'il y ait lieu d'examiner les autres moyens.

Sur les demandes annexes :
Des lors que le bien-fondé de la mesure a été admis par le premier juge, les époux X.../ Y... ne peuvent conclure à une action abusive de l'établissement bancaire qui ne résulterait finalement que de la seule admission de leur recours. Par ailleurs, au jour de l'intervention du prêt litigieux ils avaient déjà souscrit trois autres emprunts auprès d'établissements financiers différents ainsi qu'il ressort du tableau de surendettement produit en pièce 4 mais qui ne figurent pas sur les renseignements financiers communiqués à la SA Lyonnaise de banque sous leur signature (cf fiche patrimoniale en date du 24 janvier 2006 et fiche de renseignements bancaires du 12 janvier 2006) de telle sorte que leurs propos sur la mauvaise foi patente de l'appelante et leur bonne foi évidente mériteraient sans nul doute quelque modération. Quoi qu'il en soit, l'établissement bancaire plaide justement qu'il ne peut lui être fait grief de tenter de récupérer une somme d'argent prêtée ce qui conduit au rejet de la demande en paiement de dommages-intérêts.

Il n'apparaît pas inéquitable, au vu de ce qui précède, de laisser aux époux X.../ Y... la charge de leurs frais irrépétibles. Par contre, la SA Lyonnaise de banque qui succombe doit être condamnée aux dépens. Enfin, la cour n'étant pas en charge de l'exécution de ses propres décisions, il n'y a pas lieu de statuer sur l'application éventuelle de l'article 10 du décret modifié du 12 décembre 1996.

PAR CES MOTIFS

La Cour,
Statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort :
Infirme le jugement déféré et statuant à nouveau :
Annule la saisie attribution opérée le 13 juin 2013 par la SA Lyonnaise de banque auprès de la SAS Park et Suites et en ordonne mainlevée, aux frais s'il y a lieu de l'établissement bancaire ;
Déboute les époux X.../ Y... de leur demande en paiement de dommages-intérêts ;
Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile ;
Condamne la SA Lyonnaise de banque aux dépens de première instance et d'appel.
Arrêt signé par M. JACQUOT, Président et par Madame CHRISTIAN, Greffier.

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de nîmes
Formation : 1ère chambre a
Numéro d'arrêt : 14/03691
Date de la décision : 09/04/2015
Sens de l'arrêt : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Références :

ARRET du 12 octobre 2016, Cour de cassation, civile, Chambre civile 1, 12 octobre 2016, 15-19.670, Inédit

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.nimes;arret;2015-04-09;14.03691 ?
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