ARRÊT No52
R. G. : 06/ 01413
IT/ CM
TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE CARPENTRAS 14 février 2006
X... X... Y...
C/
Z... A...
COUR D'APPEL DE NÎMES
CHAMBRE CIVILE 1ère Chambre B
ARRÊT DU 25 JANVIER 2011
APPELANTS :
Monsieur Jean-Stéphane Gilbert Bernard X... né le 11 Août 1968 à ORANGE (84100)... 30150 ROQUEMAURE
Rep/ assistant : la SCP POMIES-RICHAUD-VAJOU (avoués à la Cour) Rep/ assistant : la SCP GRAS-DIARD-ADJEDJ (avocats au barreau de CARPENTRAS)
Monsieur Jean-Christophe Elie Claude X... né le 11 Août 1968 à ORANGE (84100)... 30150 ROQUEMAURE
Rep/ assistant : la SCP POMIES-RICHAUD-VAJOU (avoués à la Cour) Rep/ assistant : la SCP GRAS-DIARD-ADJEDJ (avocats au barreau de CARPENTRAS)
Madame Paule Angèle Y... veuve X... née le 03 Avril 1935 à HAMMA BOU HADJAR (ALGÉRIE)... 30150 ROQUEMAURE
Rep/ assistant : la SCP POMIES-RICHAUD-VAJOU (avoués à la Cour) Rep/ assistant : la SCP GRAS-DIARD-ADJEDJ (avocats au barreau de CARPENTRAS)
INTIMÉS :
Monsieur Bernard Raymond Z... né le 06 Juillet 1948 à CARPENTRAS (84200)...... 84200 CARPENTRAS
Rep/ assistant : la SCP GUIZARD-SERVAIS (avoués à la Cour) Rep/ assistant : Me Dominique ROCHET (avocat au barreau de CARPENTRAS)
Madame Danielle Raymonde A... épouse Z... née le 24 Octobre 1949 à GRAVESON (13690)... 84260 SARRIANS
Rep/ assistant : la SCP GUIZARD-SERVAIS (avoués à la Cour) Rep/ assistant : Me Dominique ROCHET (avocat au barreau de CARPENTRAS)
Statuant sur renvoi après dépôt de rapport d'expertise
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS :
M. Gérard DELTEL, Président, et Mme Isabelle THERY, Conseiller, ont entendu les plaidoiries en application de l'article 786 du code de procédure civile, sans opposition des avocats, et en ont rendu compte à la Cour dans son délibéré.
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :
M. Gérard DELTEL, Président Mme Isabelle THERY, Conseiller M. Jacques TESTUD, Conseiller
GREFFIER :
Mme Sylvie BERTHIOT, Greffier, lors des débats et du prononcé de la décision.
DÉBATS :
à l'audience publique du 16 Novembre 2010, où l'affaire a été mise en délibéré au 25 Janvier 2011. Les parties ont été avisées que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d'appel.
ARRÊT :
Arrêt contradictoire, prononcé et signé par M. Gérard DELTEL, Président, publiquement, le 25 Janvier 2011, date indiquée à l'issue des débats, par mise à disposition au greffe de la Cour.
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FAITS et PROCÉDURE – MOYENS et PRÉTENTIONS DES PARTIES
Vu l'appel interjeté le 29 mars 2006 par Madame Paule Y... veuve X..., Messieurs Jean Stéphane et M. Jean-Christophe X... à l'encontre du jugement prononcé le 14 février 2006 par le tribunal de grande instance de Carpentras.
Vu l'arrêt avant dire droit de la Cour de céans du 13 janvier 2009,
Vu le dépôt du rapport d'expertise le 27 janvier 2010,
Vu les dernières conclusions déposées au greffe de la mise en état le 10 novembre 2010 par les consorts X..., appelants et le 30 août 2010 par M. Bernard Z... et Madame Danielle A... épouse Z..., intimés, auxquelles la Cour se réfère expressément pour un plus ample exposé du litige et des prétentions respectives.
* * * * * Suivant avant-contrat du 3 novembre 2004, Madame Paule Y... veuve X..., M. Jean Stéphane X... et M. Jean-Christophe X... se sont engagés à vendre à M. Bernard Z... et son épouse, née Danielle A... une parcelle de terre d'une surface de 15 a 32 ca située lieudit... à Sarrians (84) et figurant au cadastre de cette localité sous le no68 de la section AV, pour un prix de 1. 525 €.
La vente ayant été réitérée en la forme authentique par acte passé le 1er février 2005 devant Maître Jean-Paul B..., notaire à Sarrians, les consorts X... ont fait assigner les époux Z... en rescision pour lésion et en paiement de dommages et intérêts devant le Tribunal de Grande Instance de Carpentras qui, par jugement du 14 février 2006, a :- débouté les consorts X... de leurs demandes ;- débouté les époux Z... de leur demande reconventionnelle en dommages et intérêts ;- condamné les consorts X... aux dépens sans faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
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Les consorts X... ont régulièrement relevé appel de ce jugement pour voir :- prononcer la rescision pour lésion de la vente intervenue le 1er février 2005 entre les parties ;- leur donner acte de ce que les époux Z... seraient tenus de verser aux consorts X... un supplément de prix de 140. 954 euros, s'ils décidaient de garder le bien et de racheter la lésion.
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Par arrêt du 13 janvier 2009, la cour d'appel de Nîmes a reçu les appels en la forme et avant dire droit au fond : – a autorisé les consorts X... à rapporter la preuve de la lésion dans les formes de l'article 1678 du Code civil, – a commis à cette fin un collège de trois experts et renvoyé l'affaire à l'audience du 15 décembre 2009 en réservant les dépens et frais irrépétibles de l'instance.
Messieurs C..., D... et E..., experts désignés ont déposé leur rapport le 27 janvier 2010.
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Les consorts X... en se prévalant du rapport d'expertise concluent à l'infirmation du jugement déféré et demandent à la Cour de juger que la vente intervenue par acte authentique du 1er février 2005 pour le prix de 1525 € est lésionnaire de plus des 7/ 12ème et de renvoyer les parties à conclure sur l'application de l'article 1681 du Code civil. Ils réclament la condamnation in solidum des époux Z... à leur payer la somme de 2000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
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Les époux Z... concluent à la confirmation du jugement entrepris considérant en substance que les conditions de l'article 1675 du Code civil ne sont pas réunies et sollicitent la condamnation des appelants à leur payer les sommes de 2000 € à titre de dommages-intérêts pour procédure abusive et la même somme en application de l'article 700 du code de procédure civile.
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Il est fait expressément référence aux conclusions des parties pour un plus ample exposé du litige et des prétentions respectives.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Il doit être rappelé pour appréhender le litige que l'action des consorts X... a été initiée sur le fondement des articles 1674 et suivants du Code civil relatifs à la rescision de la vente pour cause de lésion et que la preuve de cette lésion ne peut être admise que par jugement lorsque les faits articulés sont assez vraisemblables et assez graves pour la faire présumer.
Le bien fondé de cette action en l'état des développements des intimés sur l'opportunité d'un autre fondement ne doit donc être apprécié que sur ce seul fondement.
En l'occurrence la Cour pour ordonner l'expertise dans les formes de l'article 1678 du Code civil, a considéré dans son arrêt du 13 janvier 2009 que les potentialités du terrain et la modicité du prix de vente de la parcelle constituaient des faits suffisamment vraisemblables et graves permettant aux appelants de rapporter la preuve de la lésion dans les formes susvisées.
Les intimés considèrent que les conditions de l'article 1675 ne sont pas remplies soulignant d'une part qu'à la date du compromis aussi bien qu'à la date de la vente la parcelle n'avait pas de vocation de terrain à bâtir compte tenu de sa superficie (1500m2) et en présence d'éléments d'équipement insuffisants pour construire et d'autre part qu'il a été fourni au notaire rédacteur de l'acte toutes les informations quant à la potentialité non acquise de la constructibilité de la parcelle considérée.
Néanmoins la lésion des 7/ 12èmes ouvrant droit à l'action en rescision doit s'apprécier à la date de signature du compromis de vente soit au 3 novembre 2004 et non postérieurement.
Il est constant d'une part, que la parcelle litigieuse d'une superficie de 1532 m ² se situait en zone 2 NB correspondant à une zone partiellement desservie par des équipements qu'il n'est pas prévu de renforcer, dans laquelle des constructions étaient déjà été édifiées, et dont l'urbanisation est prévue avec une densité faible et d'autre part, que la superficie minimum pour construire était de 2500 m ².
Il s'agissait donc d'un terrain en situation privilégiée.
Il apparaît en outre qu'antérieurement à la date de signature de l'avant-contrat le 3 novembre 2004, le président du tribunal administratif de Marseille a décidé le 11 octobre 2004 à la requête du maire de Sarrians de désigner un commissaire enquêteur pour conduire une enquête publique en vue de la modification du plan local d'urbanisme de la commune, le maire ayant lui-même pris l'arrêté portant ouverture de l'enquête publique le 4 novembre 2004, soit le lendemain de l'avant-contrat.
Il s'avère par la suite que le plan d'occupation des sols a été modifié le 26 avril 2005 ce qui a permis à la parcelle litigieuse de devenir constructible.
L'attestation du maire de la commune délivrée le 11 février 2010 confirme l'antériorité de la procédure de modification du plan d'occupation des sols par rapport à la signature du compromis de vente puisqu'il indique que la mairie a engagé dès le mois de juillet 2004 avec un atelier d'architecture et d'urbanisme la procédure de modification et qu'elle a saisi dès le 27 septembre 2004 le tribunal administratif de Marseille afin de solliciter la désignation du commissaire enquêteur qui est intervenu le 11 octobre 2004.
Il s'évince de ces éléments que lors de la conclusion de l'avant-contrat les potentialités offertes par la parcelle permettaient d'envisager une valorisation de son prix et que la modicité de celui-ci rendait vraisemblable l'existence d'une lésion de sorte que l'argumentation des intimés doit être écartée.
L'existence de cette lésion est d'ailleurs mise en évidence par le rapport d'expertise.
Les trois experts désignés confirment que le terrain, avant la modification du plan d'occupation des sols, était situé en zone privilégiée étant desservi par une voie d'accès, situé à proximité des différents réseaux et dans une zone constructible. La valeur vénale de l'immeuble à la date du 3 novembre 2004 a été chiffrée à 46. 000 €.
Il existe donc bien une lésion de plus des sept douzièmes puisque la différence entre le prix payé et la valeur réelle demeure supérieure à sept douzièmes, la lésion étant de 44. 475 €.
Il s'ensuit que le jugement qui a écarté la lésion doit être infirmé en toutes ses dispositions et que la rescision de la vente doit être prononcée.
Les intimés seront invités à conclure sur les dispositions de l'article 1681 du Code civil et il sera sursis à statuer sur les autres demandes.
Il est rappelé pour l'application des dispositions de l'article 1681 que le complément du juste prix dû par l'acquéreur doit correspondre non à la valeur vénale de l'immeuble au moment où il est vendu mais à sa valeur réelle à l'époque où doit intervenir ce règlement complémentaire et que le 10e du prix total qui vient en déduction du supplément se calcule sur le prix total résultant des deux versements initial et complémentaire c'est-à-dire sur le prix effectivement perçu augmenté du complément du juste prix. Il convient donc pour ces valeurs de se référer précisément au seul rapport d'expertise.
Sur les frais de l'instance
S'agissant d'une décision partiellement avant dire droit, les dépens et frais seront réservés.
PAR CES MOTIFS
La Cour, après en avoir délibéré conformément à la loi, statuant publiquement, par arrêt contradictoire, en matière civile et en dernier ressort,
Infirme le jugement déféré en toutes ses dispositions,
Statuant à nouveau,
Prononce la rescision de la vente consentie le 1er février 2005 par les consorts X... aux époux Z...,
Invite les époux Z... à conclure sur l'application de l'article 1681 du Code civil avant le 1er mars 2011 et les appelants à répliquer si besoin avant le 4 avril 2011,
Sursoit à statuer sur les autres demandes,
Renvoie l'affaire à l'audience du mardi 19 avril 2011 à 8 h 30,
Dit que le présent arrêt vaut convocation des parties,
Réserve les frais et dépens.
Arrêt signé par Monsieur DELTEL, Président et par Madame BERTHIOT, greffier présent lors du prononcé.