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04/11/2008 | FRANCE | N°1512

France | France, Cour d'appel de nîmes, Chambre sociale, 04 novembre 2008, 1512


COUR D'APPEL DE NÎMES
CHAMBRE SOCIALE
ARRÊT DU 04 NOVEMBRE 2008
ARRÊT No 1512CHAMBRE SOCIALE
R.G. : 06/04359
RT/AG
CONSEIL DE PRUD'HOMMES DE CARCASSONNE 20 janvier 2004
S/RENVOI CASSATION
SA PROTEUS HELICOPTERES

C/
X...
APPELANTE :
SA PROTEUS HELICOPTERESprise en la personne de son représentant légal en exerciceRCS B394 246 417Centre Hermès Ilot3, Parc Valgora83160 LA VALETTE DU VAR
représentée par la SCP GUIZARD-SERVAIS, avoués à la Cour, et par la SCP SOCIETE BRUMM et ASSOCIES, plaidant par Maître BRIATTA, avocat au barreau de LYON

INTIMÉ :
Monsieur Yves X...né le 20 Juin 1958 à PARIS 18 (75018) ... 11000 CARCASSONNE
représenté par l...

COUR D'APPEL DE NÎMES
CHAMBRE SOCIALE
ARRÊT DU 04 NOVEMBRE 2008
ARRÊT No 1512CHAMBRE SOCIALE
R.G. : 06/04359
RT/AG
CONSEIL DE PRUD'HOMMES DE CARCASSONNE 20 janvier 2004
S/RENVOI CASSATION
SA PROTEUS HELICOPTERES

C/
X...
APPELANTE :
SA PROTEUS HELICOPTERESprise en la personne de son représentant légal en exerciceRCS B394 246 417Centre Hermès Ilot3, Parc Valgora83160 LA VALETTE DU VAR
représentée par la SCP GUIZARD-SERVAIS, avoués à la Cour, et par la SCP SOCIETE BRUMM et ASSOCIES, plaidant par Maître BRIATTA, avocat au barreau de LYON
INTIMÉ :
Monsieur Yves X...né le 20 Juin 1958 à PARIS 18 (75018) ... 11000 CARCASSONNE
représenté par la SCP PERICCHI, avoué au barreau de NIMES, Maître Jean Pierre MARTY, avocat au barreau de CARCASSONNE
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :
Monsieur Régis TOURNIER, Président,Madame Brigitte OLIVE, Conseiller,Monsieur Yves ROUQUETTE-DUGARET, Conseiller,
GREFFIER :
Monsieur Loïc RAGUSA, Adjoint administratif exerçant les fonctions de greffier, lors des débats, et Madame Patricia SIOURILAS, Greffier, lors du prononcé,
DÉBATS :à l'audience publique du 01 Octobre 2008, où l'affaire a été mise en délibéré au 04 Novembre 2008,
ARRÊT:
Arrêt contradictoire, rendu en dernier ressort, prononcé et signé par Monsieur Régis TOURNER, Président, publiquement, le 04 Novembre 2008, date indiquée à l'issue des débats, sur renvoi de la Cour de Cassation,
FAITS PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES
Statuant sur renvoi de la Cour de cassation, par arrêt du 22 juillet 2008 auquel le présent se réfère pour un exposé complet des faits du litige, la Cour a :
- infirmé le jugement déféré,
- statuant à nouveau,
- rejeté les demandes à titre de rappel de salaire pour heures supplémentaires, de treizième mois, d'indemnités de congés payés et d'indemnités pour repos compensateur,
- pour le surplus, ordonné la réouverture des débats, et invité les parties à s'expliquer, au regard de l'article L 120- 2 du Code du travail, sur le respect de la proportionnalité devant exister entre :
* d'une part le choix de l'organisation obligeant Monsieur X... à rester en permanence dans un local, sauf heures de vol, d'une amplitude hebdomadaire de 168 heures en 1995 et 1996 une semaine sur deux,
* d'autre part des justifications pour recourir à ce seul choix, enfin sur l'application en la cause de l'obligation de l'employeur quant à l'organisation du travail et à des mesures qui auraient eu pour objet ou pour effet de compromettre la santé et la sécurité de ce salarié,
- renvoyé la cause et les parties à une nouvelle audience.
En cet état la société appelante soutient que :
- elle n'a pas apporté de restriction injustifiée ou même disproportionnée à la vie personnelle ou familiale de Monsieur X... dans l'organisation de son travail ou même dans l'exercice de ses droits,
- elle n'a pas méconnu les dispositions de l'article L 120-2 devenu L 1121 du Code du travail,
- elle a satisfait à son obligation contractuelle de sécurité à l'égard de son salarié.
Elle demande donc :
- le rejet des dommages intérêts réclamés,
- la restitution des sommes versées au titre de l'exécution de l'arrêt confirmatif cassé soit la somme de 277.262 euros,
- la somme de 25.000 euros pour ses frais exposés sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile,
- la condamnation de Monsieur X... à payer les dépens comprenant les frais d'expertises.
Monsieur X... expose que :
- la rareté des postes a pesé de tout son poids pour lui faire accepter des conditions de travail en deçà des limites du tolérable, pour l'amener à voler dans des conditions où la sécurité du pilote, mais également du patient et de l'équipe médicale pouvait être compromise,
- il demande une réparation causée par les atteintes à la jouissance à sa vie privée, à même hauteur que l'ensemble des 8.055 heures effectuées, puisqu'il aurait dû disposer d'une parfaite liberté et autonomie durant ces périodes,
- il a perçu la somme de 231.190,17 euros ce qui est attesté par Maître C... huissier à Nice.
Il demande donc une indemnisation à hauteur des sommes réclamées antérieurement et le paiement de 25.000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.
MOTIFS
Attendu que la Cour a rejeté, dans son arrêt précédent, les demandes à titre de rappel de salaire pour heures supplémentaires, de treizième mois, d'indemnités de congés payés et d'indemnités pour repos compensateur ; que Monsieur X... ne peut demander actuellement les mêmes sommes sous la forme de dommages intérêts.
Attendu que dès lors il sera ordonné le remboursement des sommes perçues au titre de l'exécution de l'arrêt cassé ; qu'il n'existe pas d'attestation de l'huissier instrumentaire comme il est prétendu, et Monsieur X..., intimé, étant débiteur d'une obligation de restitution, le titre ayant disparu, doit démontrer qu'il a commencé à rembourser ; qu'à défaut il doit être condamné au paiement des sommes payées et actuellement réclamées ;
Attendu que les parties ont été invitées à s'expliquer, au regard de l'article L 120-2 du Code du travail, sur le respect de la proportionnalité devant exister entre :
* d'une part le choix de l'organisation obligeant Monsieur X... à rester en permanence dans un local, sauf heures de vol, d'une amplitude hebdomadaire de 168 heures en 1995 et 1996 une semaine sur deux,
* d'autre part des justifications pour recourir à ce seul choix, enfin sur l'application en la cause de l'obligation de l'employeur quant à l'organisation du travail et à des mesures qui auraient eu pour objet ou pour effet de compromettre la santé et la sécurité de ce salarié,
Attendu que si la société a bien expliqué le choix qui avait été effectué à l'époque en raison des contraintes imposées par les clauses du marché conclu avec l'hôpital public, il n'en demeure pas moins qu'il fut possible ensuite de trouver d'autres modalités, à l'intérieur de l'entreprise, afin d'adopter une organisation différente ; que dès lors ce choix pour les deux années 1995 et 1996 ne relevait pas d'une contrainte insurmontable ni de circonstances particulières venant le justifier ;
Attendu que, par ailleurs, pendant ces deux années Monsieur X... a été privé de la possibilité non seulement de vivre une vie personnelle et familiale normale, ne pouvant guère s'éloigner quelque peu de son lieu de travail, le départ devant être effectué dans les trois minutes de l'appel, mais aussi de congés pouvant dépasser une semaine ;
Attendu qu'il est donc établi, sur le premier point, une atteinte aux droits individuels de ce salarié rappelés par l'article L 120- 2 du Code du travail, sans justification d'une nécessaire proportionnalité ;
Attendu que, sur le second, à savoir la possibilité d'obtenir des congés pouvant excéder une semaine, il est certain que cette impossibilité méconnaît l'interdiction affirmée par l'article 4 de la Convention de l'OIT du 4 juin 1936 concernant les congés annuels payés, entrée en vigueur en France le 22 septembre 1939 et applicable selon le point C de l'article 1 aux entreprises de transport de personnes par air ;
Attendu qu'en effet cet article 4 frappe de nullité tout accord sur l'abandon du droit au congé annuel payé ou sur une renonciation audit congé, ce qui est le cas de l'espèce, le pilote ne pouvant se voir octroyer un congé annuel ;
Attendu qu'enfin il doit être précisé que toute méconnaissance des règles de congés payés annuels a une incidence sur la santé du salarié, l'absence de travail une semaine sur deux ans ne pouvant compenser le minimum de durée indispensable à la reconstitutions des forces corporelles et, pour un pilote, à la récupération d'un équilibre psychologique compromis par la forte tension accumulée quotidiennement ;
Attendu qu'en l'état de toutes ces circonstances, de l'étendue et de l'importance du préjudice subi il convient d'allouer à l'intimé la somme de 10.000 euros à titre de dommages intérêts en réparation pour les deux années en cause ;
Attendu qu'il parait équitable que :
- Monsieur X... succombant dans la plus grande partie de ses prétentions, doit supporter les 3/4 des dépens,
- le 1/4 restant étant à la charge de la société qui est, aussi, à l'origine d'une situation qui a crée le litige,
étant précisé que les dépens comprendront les frais d'expertise, Monsieur X... participe aux frais exposés par la société à hauteur de la somme de 3.000 euros ;
PAR CES MOTIFS
LA COUR,
Vu l'arrêt du 22 juillet 2008 de réouverture des débats,
Le complétant,
Condamne Monsieur X... à payer à la société SA PROTEUS HELICOPTERES la somme de 277.262 euros à titre de remboursement des sommes perçues au titre de l'exécution de l'arrêt cassé, avec intérêts au taux légal à compter du jour de la disparition du titre à savoir le prononcé de la cassation,
Condamne la société SA PROTEUS HELICOPTERES à payer à Monsieur X... la somme 10.000 euros à titre de dommages intérêts,
Ordonne la compensation des deux sommes ci-dessus,
Condamne Monsieur X... à payer à la société SA PROTEUS HELICOPTERES la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,
Le condamne aux dépens, qui comprendront les frais d'expertise, dans la proportion des trois quarts, le reste soit un quart étant à la charge de la société.
Arrêt signé par Monsieur TOURNIER, Président et par Madame SIOURILAS Greffier, présente lors du prononcé.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de nîmes
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 1512
Date de la décision : 04/11/2008
Type d'affaire : Sociale

Analyses

TRAVAIL REGLEMENTATION, DUREE DU TRAVAIL - Repos et congés - Congés payés - Droit au congé - / JDF

La privation d'un pilote d'hélicoptère de la possibilité d'obtenir des congés pouvant dépasser une semaine est constitutive d'une méconnaissance de l'interdiction affirmée par l'article 4 de la Convention de l'OIT du 4 juin 1936 concernant les congés annuels payés, entrée en vigueur en France le 22 septembre 1939 et applicable selon le point C de l'article 1 aux entreprises de transport de personnes par air. En effet, l'article 4 frappe de nullité tout accord sur l'abandon du droit au congé annuel payé ou sur une renonciation audit congé, étant précisé que toute méconnaissance des règles de congés payés annuels a une incidence sur la santé du salarié. En l'espèce, la compensation consistant en l'absence de travail une semaine sur deux rendait impossible la récupération d'un équilibre psychologique compromis par la forte tension accumulée quotidiennement par le pilote


Références :

Article 4 de la convention de l'OIT du 4 juin 1936

Décision attaquée : Conseil de prud'hommes de Carcassonne, 20 janvier 2004


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.nimes;arret;2008-11-04;1512 ?
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