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08/04/2008 | FRANCE | N°226

France | France, Cour d'appel de nîmes, Ct0014, 08 avril 2008, 226


ARRÊT No 226
1re Chambre B
R. G. : 00 / 00259
TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE MONTPELLIER 28 mars 1995 S / RENVOI CASSATION

X...
C /
Y... R. S. I.

COUR D'APPEL DE NIMES
CHAMBRE CIVILE 1re Chambre B SUR RENVOI DE CASSATION

ARRÊT DU 08 AVRIL 2008
APPELANT :
Monsieur Louis Vincent X... né le 04 Janvier 1944 à PARIS (75015)... 34380 ST MARTIN DE LONDRES

représenté par la SCP POMIES- RICHAUD- VAJOU, avoués à la Cour assisté de Me Benoist ANDRE, avocat au barreau de PARIS

INTIMÉS :
Monsieur Jean- Marc Y... chirurgie

n...... 34000 MONTPELLIER

représenté par la SCP P. PERICCHI, avoués à la Cour assisté de la SCP THEVENET- NOUGAR...

ARRÊT No 226
1re Chambre B
R. G. : 00 / 00259
TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE MONTPELLIER 28 mars 1995 S / RENVOI CASSATION

X...
C /
Y... R. S. I.

COUR D'APPEL DE NIMES
CHAMBRE CIVILE 1re Chambre B SUR RENVOI DE CASSATION

ARRÊT DU 08 AVRIL 2008
APPELANT :
Monsieur Louis Vincent X... né le 04 Janvier 1944 à PARIS (75015)... 34380 ST MARTIN DE LONDRES

représenté par la SCP POMIES- RICHAUD- VAJOU, avoués à la Cour assisté de Me Benoist ANDRE, avocat au barreau de PARIS

INTIMÉS :
Monsieur Jean- Marc Y... chirurgien...... 34000 MONTPELLIER

représenté par la SCP P. PERICCHI, avoués à la Cour assisté de la SCP THEVENET- NOUGARET- TOUR- POMES, avocats au barreau de MONTPELLIER

R. S. I. venant aux droits de la CAMULRAC (CAISSE REGIONALE DES ARTISANS ET COMMERCANTS DU LANGUEDOC ROUSSILLON) prise en la personne de ses représentants légaux en exercice, domiciliés ès qualités au siège social situé : 43 avenue Pont Juvénal 34000 MONTPELLIER

représentée par Me SCP POMIES- RICHAUD- VAJOU, avoué à la Cour assistée de Me Benoist ANDRE, avocat au barreau de PARIS

ORDONNANCE DE CLÔTURE rendue le 25 Janvier 2008
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :
M. Jean- Gabriel FILHOUSE, Président, Mme Isabelle THERY, Conseillère, Mme Nicole BERTHET, Conseillère,

GREFFIER :
Mme Sylvie BERTHIOT, Greffier, lors des débats et du prononcé de la décision.
DÉBATS :
à l'audience publique du 19 Février 2008, où l'affaire a été mise en délibéré au 08 Avril 2008. Les parties ont été avisées que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d'appel.

ARRÊT :
Arrêt contradictoire, prononcé et signé par M. Jean- Gabriel FILHOUSE, Président, publiquement, le 08 Avril 2008, date indiquée à l'issue des débats, sur renvoi de la Cour de Cassation, par mise à disposition au greffe de la Cour.
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I /- FAITS et PROCÉDURE
Monsieur Louis X... a été opéré le 6 janvier 1989 d'une tumeur spinale bénigne, appelée méningiome, par le Docteur Jean- Marc Y..., chirurgien, avec le concours du Docteur Danièle A..., anesthésiste, à la clinique RECH à MONTPELLIER.
Une seconde intervention a été pratiquée le 7 janvier 1989 par le Docteur Y..., à la suite de la perte de mobilité des membres inférieurs du patient survenue dans la nuit ; il était alors découvert un hématome épidural ; aucune récupération neurologique n'est intervenue, malgré l'intervention et les soins apportés et Monsieur X... est demeuré paraplégique.
Par jugement du 28 mars 1995, le Tribunal de Grande Instance de MONTPELLIER, statuant sur l'action en responsabilité engagée par Monsieur X..., et après plusieurs expertises judiciaires, a débouté Monsieur X... des fins poursuivies à l'encontre du Docteur Y..., mis hors de cause le Docteur Danièle A... et la SA d'exploitation de la clinique RECH de MONTPELLIER, débouté les défenderesses de leurs prétentions au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.
Par arrêt rendu le 15 octobre 1997, la Cour d'Appel de MONTPELLIER a confirmé ce jugement en ce qu'il a débouté Louis X... de sa demande d'indemnisation fondée sur une faute technique mais l'a infirmé pour le surplus en considérant que le Docteur Y... ne lui avait pas donné une information complète lui permettant de prendre une décision éclairée et, avant dire droit sur le lien de causalité entre le défaut d'information et le préjudice allégué, a ordonné une consultation complémentaire pour être mieux informé sur ce point.
Par arrêt rendu le 9 novembre 1999 par la première chambre civile, la Cour de Cassation a cassé et annulé l'arrêt rendu le 15 octobre 1997 mais seulement en ce qu'il a débouté Monsieur X... de sa " demande basée sur la faute technique " et a renvoyé les parties devant la Cour d'Appel de NÎMES.
Par arrêt du 5 juillet 2000, la Cour d'Appel de MONTPELLIER a sursis à statuer sur le défaut d'information.
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La Cour d'Appel de NÎMES saisie à la suite de l'arrêt de la Cour de Cassation a, par arrêt du 18 septembre 2001, avant dire droit, ordonné un complément d'expertise et désigné le Professeur B... en qualité d'expert, remplacé par le Docteur C... qui a déposé le 29 novembre 2002 son rapport.
Un complément d'expertise médicale était ordonné le 19 juin 2003 par le Conseiller de la mise en état pour analyser le compte rendu de l'IRM pratiquée le 3 février 2003 et fixer les besoins en tierce personne de Monsieur X..., confié au Docteur C..., qui déposait son complément de rapport d'expertise le 20 juillet 2004.
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II /- PRÉTENTIONS et MOYENS des PARTIES
Par conclusions du 21 janvier 2008, Monsieur Louis X... soutient que le Docteur Y... ne démontre pas avoir rempli l'obligation de moyens qui était mise à sa charge, puisque le compte- rendu opératoire du 5 janvier 1989, preuve objective, ne mentionne pas la réalisation d'une hémostase à la cire ; que cette absence de précaution constitue bien un manquement à cette obligation.
A titre subsidiaire, Monsieur X... invoque l'insuffisance de l'hémostase, puisqu'elle n'a pas empêché le saignement et la formation d'un hématome.
Monsieur X... fait valoir que le compte rendu opératoire du 5 janvier 1989 n'a jamais fait mention d'une hémostase à la cire alors que le compte- rendu de la deuxième intervention la mentionne.
Il reproche au Docteur C... de s'être fondé sur les dires du Docteur Y... pour conclure que même si elle n'avait pas été indiquée sur le compte- rendu opératoire, l'hémostase à la cire avait été faite lors de la première intervention.
Sur son préjudice, Monsieur X... estime qu'il doit être intégralement indemnisé, et non seulement au titre d'une perte de chance, puisque dans les suites normales d'une intervention pratiquée dans les règles de l'art, il n'aurait conservé aucune séquelle.
Monsieur X... demande en conséquence à la Cour de :
" Dire et arrêter, en application des dispositions des articles 1147 et 1315 du Code Civil, que le Docteur Y... est entièrement responsable du préjudice subi par Monsieur Louis X..., et le condamner à en réparer toutes les conséquences,
Fixer la réparation du préjudice patrimonial de Monsieur Louis X... à la somme de 3. 790. 255, 92 euros,
Condamner le Docteur Y... à payer à Monsieur Louis X... cette somme à hauteur de 2. 341. 815, 45 euros sous forme de capital et le solde sous forme d'une rente annuelle viagère d'un montant de 117. 598, 20 euros au titre de la tierce personne, payable trimestriellement, indexée selon les dispositions prévues par le Code de la Sécurité Sociale, suspendue en cas d'hospitalisation à compter du 46ème jour, et ce avec effet à compter de la date du 19 février 2008,
Réserver l'indemnisation du chef du logement adapté,
Condamner le Docteur Y... à payer à Monsieur Louis X... la somme de 446. 840 euros en réparation de son préjudice extra- patrimonial, outre une indemnité de 10. 000 euros au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile,
Condamner le Docteur Y... en tous les dépens, tant de première instance que d'appel, dont distraction pour ces derniers au profit de la SCP POMIES RICHAUD VAJOU, avoués, conformément aux dispositions de l'article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile. "
Le Docteur Jean- Marc Y... a conclu le 25 janvier 2008 demandant à la Cour de :
" Dire et juger qu'il n'a commis aucune faute technique dans les actes médicaux pratiqués, les examens prescrits et les opérations effectuées, qui l'ont été conformément aux règles de l'art, aux données acquises de la science et la pratique de la médecine,
Débouter en conséquence Monsieur X... de toutes ses fins, demandes et conclusions de ce chef et confirmer le jugement déféré,
Condamner Monsieur X... au paiement d'une somme de 5. 000 euros sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile, ainsi qu'aux entiers dépens qui comprendront les frais des expertises ordonnées, le tout avec application de l'article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile au profit de la SCP d'avoués soussignée. "
Le Docteur Y... rappelle qu'il appartient à Monsieur X... de rapporter la preuve de l'existence d'une faute, et fait état des différents rapports d'expertise, notamment celui du Docteur C... qui confirme les analyses précédentes des Professeurs Z...et D....
Il soutient, que comme l'a noté le Docteur C..., même si ce n'est pas signalé dans le compte- rendu opératoire, une hémostase à la cire a été faite lors de la première intervention, qu'il s'agit d'une opération aussi banale que la stérilisation des instruments ; que cette hémostase n'est d'ailleurs pas obligatoire.
Il explique qu'on ne peut fonder la responsabilité d'un chirurgien sur une affirmation péremptoire selon laquelle si une indication opératoire n'est pas mentionnée, c'est qu'elle n'est pas faite, alors que le corps médical confirme qu'il s'agit d'une opération banale, en plus non nécessaire. Il indique que l'expert C... a été très clair : il s'agit d'un aléa thérapeutique.
La RSI venant aux droits de la CAMULRAC a conclu le 23 janvier 2008 et sollicite la condamnation du Docteur Y... à :
- lui payer en tant que subrogée dans les droits de son assuré, Monsieur Louis X..., la somme de 417. 089, 80 euros représentant l'ensemble des prestations avancées, ainsi qu'une indemnité forfaitaire de 760 euros et la somme de 700 euros au titre des dispositions de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile,
- aux dépens, tant de première instance que d'appel, dont distraction pour ces derniers au profit de la SCP POMIES RICHAUD VAJOU, conformément aux dispositions de l'article 5699 du Nouveau Code de Procédure Civile.
L'ordonnance de clôture a été prononcée le 25 janvier 2008.
III /- MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur la responsabilité
La Cour de renvoi est saisie de la demande de Monsieur X... fondée sur la faute technique commise par le Docteur Y..., en particulier en raison de l'absence de l'hémostase à la cire lors de la première intervention.
En application de l'article 1147 du Code Civil, il appartient à Monsieur X... de prouver la faute du chirurgien, à l'origine du préjudice qu'il invoque, étant rappelé que le chirurgien est tenu à une obligation de moyens.
Monsieur X... reproche au Docteur Y... de ne pas avoir pratiqué une hémostase à la cire, et subsidiairement si elle a été pratiquée, d'avoir été insuffisante.
Il résulte du rapport du Docteur C... que même si ce n'est pas signalé dans le compte- rendu opératoire de la première intervention, une hémostase à la cire a été réalisée ; l'expert précise que cette hémostase à la cire est faite de façon routinière lorsque on réalise une laminectomie.
Le fait que la réalisation de l'hémostase à la cire n'ait pas été mentionnée sur le compte- rendu opératoire de la première intervention n'est pas la preuve qu'elle n'a pas été effectivement pratiquée et rien ne démontre qu'elle ne l'a pas été, et il ne peut être déduit de la mention portée sur le compte- rendu opératoire de la deuxième intervention " hémostase à la cire " la confirmation de son absence lors de l'opération précédente.
Au demeurant, le Docteur C..., comme les Professeurs D... et Z...précédemment, ont indiqué que l'hémostase à la cire n'est pas obligatoire.
La complication survenue, consistant en un hématome extra- dural post- opératoire est une complication connue, même si elle est rare ; elle peut survenir sans aucun élément fautif, et en l'espèce rien ne prouve :- ni que l'hémostase à la cire n'a pas été réalisée,- ni qu'elle a été insuffisante,- ni que l'hématome post- opératoire ait pour cause l'absence ou l'insuffisance de cette opération. Aucun lien de causalité direct et certain n'est établi.

La référence à l'expertise du Docteur B... invoquée par Monsieur X... concerne une intervention pratiquée par un autre chirurgien sur un autre patient ; elle ne fait pas la démonstration et ne constitue pas un indice d'une faute imputable au Docteur Y....
Les complications dont a été victime Monsieur X... relèvent de l'aléa thérapeutique, aucune faute n'étant démontrée à l'encontre du chirurgien le Docteur Y..., qui a apporté à son patient des soins attentifs, conformes aux règles de l'art et aux données acquises de la science et de la pratique de la médecine.
Monsieur X... sera donc débouté de son action en responsabilité fondée sur la faute et le jugement du Tribunal de Grande Instance de MONTPELLIER du 28 mars 1995 sera confirmé.
La RSI sera également déboutée de toutes ses demandes.
Sur l'article 700 du Code de Procédure Civile
Aucun motif d'équité ne commande l'octroi d'une indemnité à Monsieur Y... sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile.
Sur les dépens
Monsieur X..., qui succombe, supportera les dépens, comprenant ceux de première instance et ceux de l'arrêt cassé ainsi que les frais des expertises judiciaires.
PAR CES MOTIFS,
LA COUR, après en avoir délibéré conformément à la loi,
Statuant publiquement, contradictoirement, sur renvoi de la Cour de Cassation et en dernier ressort,
Déboute Monsieur Louis X... de son action en responsabilité à l'encontre du Docteur Y..., fondée sur la faute,
Confirme en conséquence de ce chef le jugement du Tribunal de Grande Instance de MONTPELLIER du 28 mars 1995,
Déboute la RSI de ses demandes,
Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du Code de Procédure Civile,
Condamne Monsieur X... aux dépens, ceux de première instance, et ceux de l'arrêt de la Cour d'Appel de MONTPELLIER du 15 octobre 1997 cassé ainsi que les frais des expertises judiciaires dont distraction au profit de la SCP PERICCHI, avoués, sur ses affirmations de droit.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de nîmes
Formation : Ct0014
Numéro d'arrêt : 226
Date de la décision : 08/04/2008

Références :

Décision attaquée : Tribunal de grande instance de Montpellier, 28 mars 1995


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.nimes;arret;2008-04-08;226 ?
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