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04/03/2008 | FRANCE | N°137

France | France, Cour d'appel de nîmes, Ct0014, 04 mars 2008, 137


ARRÊT No137
R. G : 05 / 04815
IT / CM
TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE PRIVAS 03 novembre 2005

SCI CÉVENNES EXPANSION
C /
SAS GENEDIS SCP PERON AMSELLEM BLAVIT

COUR D'APPEL DE NIMES
CHAMBRE CIVILE 1ère Chambre B

ARRÊT DU 04 MARS 2008
APPELANTE :
SCI CÉVENNES EXPANSION poursuites et diligences de son Gérant en exercice, domicilié en cette qualité au siège social Quartier de Larnac 1196 Route d'Uzès 30100 ALES

représentée par la SCP GUIZARD-SERVAIS, avoués à la Cour assistée de Me Michel ALBISSON, avocat au barreau de M

ONTPELLIER

INTIMÉES :
SAS GENEDIS prise en la personne de son Président en exercice, domicilié en cette qua...

ARRÊT No137
R. G : 05 / 04815
IT / CM
TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE PRIVAS 03 novembre 2005

SCI CÉVENNES EXPANSION
C /
SAS GENEDIS SCP PERON AMSELLEM BLAVIT

COUR D'APPEL DE NIMES
CHAMBRE CIVILE 1ère Chambre B

ARRÊT DU 04 MARS 2008
APPELANTE :
SCI CÉVENNES EXPANSION poursuites et diligences de son Gérant en exercice, domicilié en cette qualité au siège social Quartier de Larnac 1196 Route d'Uzès 30100 ALES

représentée par la SCP GUIZARD-SERVAIS, avoués à la Cour assistée de Me Michel ALBISSON, avocat au barreau de MONTPELLIER

INTIMÉES :
SAS GENEDIS prise en la personne de son Président en exercice, domicilié en cette qualité au siège social Zone Industrielle Route de Paris 14127 MONDEVILLE

représentée par la SCP M. TARDIEU, avoués à la Cour assistée de la SCP SAUTIER GUILLEMIN, avocats au barreau de PARIS

SCP PERON AMSELLEM BLAVIT titulaire d'un Office d'Huissier de Justice, prise en la personne de ses représentants légaux en exercice, domiciliés ès qualités au siège social situé : 8 rue Michelet 30100 ALES

représentée par la SCP FONTAINE-MACALUSO JULLIEN, avoués à la Cour assistée de la SCP COSTE-BERGER-PONS, avocats au barreau de MONTPELLIER

ORDONNANCE DE CLÔTURE rendue le 11 Janvier 2008
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS :
Mme Isabelle THERY, Conseillère, a entendu les plaidoiries en application de l'article 786 du Nouveau Code de Procédure Civile, sans opposition des avocats, et en a rendu compte à la Cour lors de son délibéré.
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :
M. Jean-Gabriel FILHOUSE, Président Mme Muriel POLLEZ, Conseillère Mme Isabelle THERY, Conseillère

GREFFIER :
Mme Sylvie BERTHIOT, Greffier, lors des débats et du prononcé de la décision.
DÉBATS :
à l'audience publique du 14 Janvier 2008, où l'affaire a été mise en délibéré au 04 Mars 2008. Les parties ont été avisées que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d'appel.

ARRÊT :
Arrêt contradictoire, prononcé et signé par M. Jean-Gabriel FILHOUSE, Président, publiquement, le 04 Mars 2008, date indiquée à l'issue des débats, par mise à disposition au greffe de la Cour.
****
FAITS et PROCÉDURE MOYENS et PRÉTENTIONS DES PARTIES
Vu l'appel interjeté le 25 novembre 2005 par la SCI Cévennes expansion à l'encontre du jugement prononcé le 3 novembre 2005 par le tribunal de grande instance de Privas.
Vu les dernières conclusions déposées au greffe de la mise en état : – le 14 mars 2006 par la SCI Cévennes expansion, appelante, – le 4 juillet 2006 par la SCP Noël Peron, Ghislain Amsellem, Christophe Blavit et le 18 juillet 2006 par la SAS Genedis, intimées, auxquelles la cour se réfère expressément pour un plus ample exposé du litige et des prétentions respectives.

Vu l'ordonnance de clôture de la procédure en date du 11 janvier 2008.

* * * * *

La SCI Cévennes expansion a loué à la société Genedis des locaux à usage commercial situés 1196 route d'Uzès à Alès suivant acte sous seing privé du 4 juillet 1991. Ce bail a fait l'objet d'un renouvellement à compter du 1er juillet 2000 selon avenant sous seing privé du 30 septembre 2000.

Par acte du 2 décembre 2002, délivré par la SCP Peron Amsellem Blavit, huissiers de justice à Alès, la société Genedis a dénoncé ce bail pour l'échéance de la première période triennale au 30 juin 2003.
* * * * *

Par acte du 24 juillet 2003, la SCI Cévennes expansion a fait assigner la société Genedis devant le tribunal de grande instance d'Alès aux fins de voir déclarer nul le congé délivré le 2 décembre 2002 et obtenir le paiement des loyers durant la période triennale.
Suivant acte du 1er octobre 2003, la SAS Genedis a appelé en cause l'huissier de justice afin d'être relevée et garantie de toute condamnation pouvant être mis à sa charge.
Par ordonnance du 16 décembre 2003, le juge de la mise en état du tribunal de grande instance d'Alès a fait application de l'article 47 du nouveau code de procédure civile et a renvoyé la cause devant le tribunal de grande instance de Privas.
* * * * *

Par jugement du 3 novembre 2005, le tribunal a débouté la SCI Cévennes expansion de l'ensemble de ses demandes et l'a condamnée à payer à chacune des défenderesses la somme de 1000 euros sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.
* * * * *

La SCI Cévennes expansion a régulièrement interjeté appel de ce jugement en vue de son infirmation au visa de l'article 654 du nouveau code de procédure civile demandant d'annuler le congé à titre subsidiaire, au visa de l'article 117 du nouveau code de procédure civile et de condamner la société Genedis à lui verser les sommes de 54. 027,30 euros et 5000 euros pour ses frais irrépétibles.
Elle considère que le congé est affecté d'une irrégularité de fond pour avoir été notifié à M. Serge Z..., préposé de la société Genedis sans qu'il soit nécessaire d'établir un grief et qu'en tout état de cause le grief est évident puisqu'elle n'a pas eu connaissance du départ de son locataire n'ayant jamais reçu la lettre simple ce qui ne lui a pas permis de rechercher un éventuel successeur.
* * * * *

La société Genedis conclut à la confirmation du jugement entrepris et à la condamnation de l'appelante à lui payer la somme de 5000 euros sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile. À titre subsidiaire, elle sollicite d'être relevée et garantie par la SCP Peron Amsellem Blavit des condamnations prononcées contre elle.
Elle réplique que le congé a été délivré conformément aux articles 654 et 655 du nouveau code de procédure civile et qu'il appartenait au gérant de transférer le lieu de son siège social ou de prévoir dans le bail une élection de domicile en son domicile personnel s'il souhaitait recevoir de tels actes. Elle affirme que le gérant disposait bien d'une boîte aux lettres ainsi que l'a constaté l'huissier dans son procès-verbal d'état des lieux dressé le 30 juin 2003. Elle soutient l'absence de grief, l'appelante ayant eu connaissance dès le mois de décembre 2002 de l'existence du congé. Elle estime que l'huissier a commis une faute en s'abstenant de signifier l'acte au domicile personnel du gérant alors qu'il avait été précisément mandaté à cette fin.

* * * * *

La SCP Peron Amsellem Blavit conclut également la confirmation du jugement déféré et demande que la SCI Cévennes expansion et la société Genedis soient condamnées in solidum à lui payer la somme de 2000 euros pour ses frais irrépétibles ainsi qu'aux dépens.
Elle fait principalement valoir que l'article 649 du nouveau code de procédure civile renvoie, pour la nullité des actes d'huissier de justice aux dispositions qui gouvernent la nullité des actes de procédure ce qui nécessite de démontrer l'existence d'un grief, que l'acte a été délivré au siège social de la SCI et que celle-ci a nécessairement été informée de la délivrance du congé par la lettre simple prévue à l'article 658 du nouveau code de procédure civile. Elle rappelle qu'elle a parfaitement respecté les dispositions légales pour la délivrance du congé.

MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur l'appel principal
Sur la validité du congé
Pour critiquer la décision déférée, la SCI Cévennes expansion soutient que le congé est affecté d'une irrégularité de fond qui n'a pas été examinée par le premier juge et subsidiairement d'une irrégularité de forme, l'existence d'un grief n'étant pas contestable à défaut d'avoir reçu la lettre simple prévue par l'article 658.
Si l'article 117 énumère limitativement les irrégularités de fond affectant la validité de l'acte qui ne peuvent porter que sur le défaut de capacité d'ester en justice, le défaut de pouvoir d'une partie, le défaut de capacité ou de pouvoir d'une personne assurant la représentation d'une partie en justice, l'article 119 dispose que les exceptions de nullité fondées sur l'inobservation des règles de fond relatives aux actes de procédure doivent être accueillies sans que celui qui les invoque ait à justifier d'un grief et alors même que la nullité ne résulte d'aucune disposition expresse.
Il est observé qu'en l'espèce, le but du congé était d'informer le bailleur de la volonté du locataire de mettre fin au bail en respectant un délai légalement prévu de nature à permettre au bailleur de rechercher un autre locataire. La signification de l'acte doit permettre d'atteindre le but recherché à savoir l'information du bailleur.

Il est constant : – au vu des énonciations du bail initial et de l'extrait du registre du commerce et des sociétés que la SCI Cévennes expansion a son siège social à Alès au no1196 route d'Uzès qui se trouve être le lieu de l'immeuble donné en location à la société Genedis et que les parties ont dans le bail fait élection de domicile en leur domicile respectif, – au vu du congé du 2 décembre 2002, que ce dernier a été délivré à « la société civile immobilière Cévennes expansion 1196 route d'Uzès 30100 Alès représentée par M. X...Léon demeurant et domicilié ... 30100 Alès », que l'acte a été signifié selon les modalités de l'article 654 du nouveau code de procédure civile et remis « à M. Z... Serge, directeur ainsi déclaré qui a déclaré être habilité à recevoir l'acte » et qu'il est mentionné que la lettre prévue par l'article 658 du nouveau code de procédure civile a été adressée le 2 décembre 2002.

Il s'avère que M. Z... n'avait aucune qualité au sein de la SCI pour recevoir l'acte, étant directeur de l'établissement dépendant de la société Genedis, locataire.
Il résulte de ces énonciations que si la signification au visa de l'article 654 est en apparence régulière puisque la personne a déclaré à l'huissier être habilitée à recevoir l'acte, le congé est dépourvu d'effet dès lors que le locataire par l'intermédiaire de son préposé, s'est substitué au destinataire du congé.
A cet égard, la circonstance que la lettre ait été adressée conformément à l'article 658 est inopérante alors même que Monsieur Z... reconnaît dans son attestation du 11 septembre 2003 " qu'il était dans ses habitudes de réceptionner tous les courriers recommandés adressés au 1196 routes d'Uzès à Alès... Que les clés de la boîtes aux lettres de la SCI étaient détenues à l'accueil du magasin et que la récupération du courrier dans la boîte se faisait par lui-même ou un membre désigné de l'équipe ", éléments qui ne permettent pas d'établir que le gérant de la SCI ait été avisé de l'existence du congé dans le délai légal.
En l'état de ces éléments, le congé doit être déclaré nul et le jugement déféré sera infirmé.
Sur le préjudice
La nullité du congé a pour conséquence la poursuite du bail pour une nouvelle période triennale expirant le 30 juin 2006. Il s'avère que les locaux ont finalement été reloués à compter du 1er juin 2004.
La somme réclamée par la SCI Cévennes expansion qui n'est pas discutée par la société Genedis correspond au montant des loyers TTC sur une période de 11 mois, soit 54. 027,30 euros.
Le préjudice subi correspond effectivement au montant des loyers non versés jusqu'au 1er juin 2004 ce qui justifie de faire droit à la demande de la SCI Cévennes expansion.
Sur l'appel en garantie
La société Genedis expose au soutien de son appel en garantie que l'huissier en s'abstenant de réitérer la signification au domicile personnel du gérant alors qu'il avait été expressément mandaté à cette fin selon courrier du 22 novembre 2002 a commis une faute.
Néanmoins, la SCP Peron Amsellem Blavit a été mandatée pour signifier un congé à une personne morale, bailleur de son mandant. Comme l'indique exactement l'huissier, la seule notification régulière d'un acte délivré à une personne morale est aux termes de l'article 690 nouveau code de procédure civile son établissement. L'huissier de justice n'avait donc pas l'obligation de signifier un acte au domicile du représentant de la société alors qu'en l'espèce, la signification de l'acte avait été valablement effectuée au siège social de la SCI à une personne qui s'est déclarée habilitée à le recevoir. Par ailleurs, il n'appartient pas à l'huissier de justice de vérifier l'exactitude des déclarations qui lui ont été faites concernant l'habilitation de la personne à recevoir l'acte alors que l'acte a été régulièrement signifié au siège social de la SCI.

Aucune faute ne pouvant être retenue à l'encontre de la SCP Peron Amsellem Blavit, l'appel en garantie ne peut prospérer.
Sur les frais de l'instance
L'équité commande de n'allouer aucune somme à la SCP Peron Amsellem Blavit sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.
La société Genedis qui succombe devra supporter les dépens de l'instance et payer à la SCI CÉVENNES expansion une somme équitablement arbitrée à 1. 200 euros en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La Cour, après en avoir délibéré conformément à la loi, statuant publiquement, par arrêt contradictoire, en matière civile et en dernier ressort,
Infirme le jugement en toutes ses dispositions
Statuant à nouveau,
Déclare nul le congé délivré le 2 décembre 2002,
Condamne la SAS Genedis à payer à la SCI Cévennes expansion la somme de 54. 027,30 euros à titre de dommages et intérêts et la somme de 1. 200 euros sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile,
Rejette les prétentions des parties plus amples ou contraires,
Condamne la SAS Genedis aux dépens de première instance et d'appel dont distraction conformément à l'article 699 du nouveau code de procédure civile au profit des avoués de la cause qui en ont fait la demande.
Arrêt signé par M. FILHOUSE, Président et par Madame BERTHIOT, greffier présent lors du prononcé


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de nîmes
Formation : Ct0014
Numéro d'arrêt : 137
Date de la décision : 04/03/2008

Analyses

BAIL COMMERCIAL - Congé - Forme - Acte d'huissier de justice - Nullité - / JDF

Si l'article 117 du code de procédure civile énumère limitativement les irrégularités de fond affectant la validité d'un acte de procédure, l'article 119 dispose que les exceptions de nullité fondées sur l'inobservation des règles de fond doivent être accueillies sans que celui qui les invoque ait à justifier d'un grief et alors même que la nullité ne résulterait d'aucune disposition expresse. Ainsi, dans l'hypothèse où le but d'un congé est d'informer le bailleur de la volonté du locataire de mettre fin au bail, la signification de ce congé doit permettre d'atteindre le but recherché, à savoir l'information du bailleur dans le respect du délai légalement prévu. Mais ce but n'est pas atteint lorsque le siège social du bailleur se trouvant être le lieu de l'immeuble donné en location, le congé a été signifié selon les modalités de l'article 654 du code de procédure civile, à une personne qui a déclaré être habilitée à recevoir l'acte alors qu'elle n'avait aucune qualité à cet effet, s'agissant d'un directeur de la société locataire. Par ailleurs, la circonstance qu'une lettre simple ait été adressée conformément à l'article 658 du code de procédure civile est inopérante sachant que le courrier du bailleur était habituellement réceptionné par la société locataire de sorte qu'il n'est pas établi que le bailleur ait eu connaissance du congé dans le délai légal. Dès lors, même si la signification est en apparence régulière, le congé est dépourvu d'effet et doit être déclaré nul, le locataire s'étant, par l'intermédiaire de son préposé, substitué au bailleur, destinataire de ce congé


Références :

ARRET du 28 octobre 2009, Cour de cassation, civile, Chambre civile 3, 28 octobre 2009, 08-15.506, Publié au bulletin
articles 117, 119, 654 et 658 du code de procédure civile


Décision attaquée : Tribunal de grande instance de Privas, 03 novembre 2005


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.nimes;arret;2008-03-04;137 ?
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