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04/03/2008 | FRANCE | N°135

France | France, Cour d'appel de nîmes, Ct0014, 04 mars 2008, 135


ARRÊT N° 135
R. G. : 05 / 03093
TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE NÎMES 09 février 2005

X...
C /
Y... SA CRÉDIT AGRICOLE SUISSE

COUR D'APPEL DE NIMES
CHAMBRE CIVILE 1re Chambre B

ARRÊT DU 04 MARS 2008
APPELANTE :
Madame Monique X... née le 05 Décembre 1948 à FRIBOURG (SUISSE) ...

représentée par la SCP POMIES-RICHAUD-VAJOU, avoués à la Cour assistée de Me Emery REINAUD, avocat au barreau de NÎMES

INTIMES :
Monsieur Marcel Y... né le 30 Juin 1944 à ESTAVAYER LE LAC (SUISSE) ...

représenté par la SCP G

UIZARD-SERVAIS, avoués à la Cour assisté de la SCP SCHEUER-VERNHET et ASSOCIES, avocats au barreau de MONTPELLIER

SA CRÉDIT ...

ARRÊT N° 135
R. G. : 05 / 03093
TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE NÎMES 09 février 2005

X...
C /
Y... SA CRÉDIT AGRICOLE SUISSE

COUR D'APPEL DE NIMES
CHAMBRE CIVILE 1re Chambre B

ARRÊT DU 04 MARS 2008
APPELANTE :
Madame Monique X... née le 05 Décembre 1948 à FRIBOURG (SUISSE) ...

représentée par la SCP POMIES-RICHAUD-VAJOU, avoués à la Cour assistée de Me Emery REINAUD, avocat au barreau de NÎMES

INTIMES :
Monsieur Marcel Y... né le 30 Juin 1944 à ESTAVAYER LE LAC (SUISSE) ...

représenté par la SCP GUIZARD-SERVAIS, avoués à la Cour assisté de la SCP SCHEUER-VERNHET et ASSOCIES, avocats au barreau de MONTPELLIER

SA CRÉDIT AGRICOLE SUISSE nouvelle dénomination du CRÉDIT LYONNAIS SUISSE poursuites et diligences de son représentant légal en exercice, domicilié en cette qualité au siège social 4 Quai Général Guisan 1204 GENÈVE (SUISSE)

représentée par la SCP P. PERICCHI, avoués à la Cour assistée de la SCP SARLIN CHABAUD MARCHAL, avocats au barreau de NÎMES

ORDONNANCE DE CLÔTURE rendue le 11 Janvier 2008

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS :
M. Jean-Gabriel FILHOUSE, Président, a entendu les plaidoiries, en application de l'article 786 du Code de Procédure Civile, sans opposition des avocats, et en a rendu compte à la Cour lors de son délibéré.
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :
M. Jean-Gabriel FILHOUSE, Président Mme Muriel POLLEZ, Conseillère Mme Isabelle THERY, Conseillère

GREFFIER :
Mme Sylvie BERTHIOT, Greffier, lors des débats et du prononcé de la décision.
DÉBATS :
à l'audience publique du 17 Janvier 2008, où l'affaire a été mise en délibéré au 04 Mars 2008. Les parties ont été avisées que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d'appel.

ARRÊT :

Arrêt contradictoire, prononcé et signé par M. Jean-Gabriel FILHOUSE, Président, publiquement, le 04 Mars 2008, date indiquée à l'issue des débats, par mise à disposition au greffe de la Cour.
****
EXPOSÉ
Vu l'appel interjeté le 15 juillet 2005 par Monique X... à l'encontre du jugement prononcé le 9 février 2005 par le Tribunal de Grande Instance de Nîmes.
Vu les dernières conclusions déposées au greffe de la mise en état le 26 avril 2006 par l'appelante, et le bordereau de pièces qui y est annexé.
Vu les dernières conclusions déposées au greffe de la mise en état le 4 mai 2006 par Marcel Y..., intimé, et le bordereau de pièces qui y est annexé.
Vu les dernières conclusions déposées au greffe de la mise en état le 15 mars 2006 par la s. a. « Crédit Agricole Suisse » (anciennement dénommée « Crédit Lyonnais Suisse »), intimée, et le bordereau de pièces qui y est annexé.
Vu l'ordonnance de clôture de la procédure en date du 11 janvier 2008.
* * *
Suivant acte passé le 21 octobre 1982 devant maître Maurice A..., notaire à Cornillon (30), les consorts B... – Y... ont vendu à Monique X..., épouse de Marcel Y..., une maison d'habitation située dans le village de Montclus (30) et figurant au cadastre de cette commune sous les n° 349 et 352 de la section AN, respectivement pour une contenance de 4 a 93 ca et de 10 a 57 ca.
Selon jugement de divorce du 27 mars 1986, Le Tribunal Civil d'Arrondissement de La Sarine Fribourg (Suisse) a ratifié la convention signée les 4 et 5 décembre 1985 entre Marcel Y... et Monique X... qui, réglant entre eux les effets du divorce, stipulait plus particulièrement en son § 8 : « Madame Monique Y... reconnaît que l'achat et l'aménagement de l'immeuble de Montclus (France), inscrit à son seul nom, ont été financés par son époux ; en conséquence, elle s'engage à signer un acte de donation de cet immeuble à son époux ou, pour le cas où elle ne pourrait ou ne voudrait pas comparaître personnellement audit acte, toutes procurations nécessaires en faveur d'un tiers. »

Par ordonnance d'exequatur du 1er août 1997, le Président du Tribunal de Grande Instance de Nîmes a conféré à ce jugement force exécutoire sur le territoire français.
Suivant actes passés, respectivement le 22 octobre 2001 et le 19 septembre 2003, devant maître Yves C..., notaire à Annemasse (74), la s. a. « Crédit Lyonnais Suisse » a consenti deux prêts à Monique X... :- le premier de 134. 228, 18 euros, remboursable sur 10 années, garanti par une hypothèque conventionnelle inscrite sur l'immeuble précité et publiée à la Conservation des Hypothèques de Nîmes le 17 décembre 2001 (volume 5483) ;- le deuxième de 108. 280, 25 euros, remboursable sur 8 années, garanti par une hypothèque conventionnelle inscrite sur ledit immeuble et publiée à la Conservation des Hypothèques de Nîmes le 18 novembre 2003 (volume D 16061).

Par exploit du 4 août 2004, Marcel Y... a fait assigner Monique X... et la s. a. « Crédit Lyonnais Suisse » en attribution de l'immeuble en pleine propriété et en annulation des inscriptions hypothécaires prises par la banque, devant le Tribunal de Grande Instance de Nîmes qui, par jugement du 9 février 2005, a :- dit que Marcel Y... est devenu propriétaire de l'immeuble litigieux à compter du 12 mai 1986 ;- ordonné la publication de la décision à la Conservation des Hypothèques de Nîmes ;- débouté Marcel Y... de sa demande d'annulation des inscriptions d'hypothèques prises par la s. a. « Crédit Lyonnais Suisse » en vertu des actes du 22 octobre 2001 et du 19 septembre 2003.

Monique X... a relevé appel de ce jugement pour voir :- dire que Marcel Y... ne pouvait recevoir en paiement un bien dont la valeur excédait le montant de sa créance ;- ordonner, au visa de l'article 1634 du code civil, une expertise à l'effet de déterminer le montant des dépenses exposées par Marcel Y..., la valeur actuelle de l'immeuble et les dépenses qu'elle a elle-même exposées pour l'entretien de l'immeuble ;- condamner subsidiairement Marcel Y... à lui payer : · 200. 000 euros au titre de la plus-value de l'immeuble, · 150. 000 euros au titre des impenses qu'elle a réalisées ;- déclarer l'arrêt opposable à la s. a. « Crédit Agricole Suisse » ;- condamner Marcel Y... aux dépens et au paiement de 2. 000 euros en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ;

Marcel Y... conclut à l'irrecevabilité des demandes de Monique X... en l'état de l'autorité qui s'attache au jugement de divorce du 27 mars 1986, et en tout état de cause à la confirmation du jugement sauf à y ajouter en condamnant Monique X... à :- faire lever sous astreinte définitive les inscriptions d'hypothèques prises par le « Crédit Lyonnais Suisse » ;- lui payer : · 50. 000 euros de dommages et intérêts pour comportement abusif, · 15. 000 euros en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.

La s. a. « Crédit Agricole Suisse » conclut à la confirmation du jugement en ce qu'il a débouté Marcel Y... de sa demande d'annulation des inscriptions hypothécaires.
Pour un plus ample exposé il convient de se référer au jugement déféré et aux conclusions visées supra.

DISCUSSION

Sur la fin de non-recevoir tirée de l'autorité de la chose jugée :
Attendu que la fin de non-recevoir est un moyen qui tend à faire déclarer l'adversaire irrecevable en sa demande, sans examen au fond ;
Attendu qu'en l'espèce la demande au fond est présentée par Marcel Y..., au vu du jugement du 27 mars 1986 dont il poursuit l'exécution, tandis que Monique X..., en contestant l'analyse qu'il fait dudit jugement, lui oppose en réalité une défense au fond, tout en formant une demande reconventionnelle pour la prise en compte des impenses qu'elle prétend avoir réalisées sur l'immeuble litigieux depuis le prononcé de ce jugement ;
Attendu qu'il convient donc de passer outre au moyen d'irrecevabilité et d'examiner le fond ;
Sur les demandes principales :
1. la demande de transfert de propriété :
Attendu que pour contester l'analyse du premier juge, Monique X... fait valoir que les investissements réalisés par Marcel Y... sur l'immeuble se sont élevés à 602. 882, 02 euros alors que ledit immeuble aurait une valeur actuelle de l'ordre de 800. 000 euros, de sorte que le paiement serait supérieur à la valeur de la créance à éteindre ;
Mais attendu qu'en premier lieu, à la suite d'une analyse rigoureuse de la convention des parties rendue exécutoire par les décisions 27 mars 1986 et du 1er août 1997, le premier juge a exactement retenu que la stipulation litigieuse, reproduite dans l'exposé supra, constituait une dation en paiement, avec effet translatif à la date à laquelle le jugement qui a ratifié la convention constatant l'échange des consentements, est passé en force de chose jugée ;
Et attendu que Monique X... ne peut soutenir que ce paiement excéderait la dette à éteindre, dès lors qu'il ressort de la convention des parties :- qu'à la date du paiement Marcel Y... avait financé seul, non seulement le prix initial de l'acquisition, mais également l'intégralité des dépenses d'amélioration dudit immeuble ;- qu'il n'est pas justifié qu'à la date de la dation en paiement, l'immeuble aurait eu une valeur sensiblement différente du montant de ces investissements ;

Et attendu que, quand bien même depuis lors le fonds immobilier aurait augmenté de valeur et Monique X... aurait effectué sur l'immeuble des investissements susceptibles d'avoir enrichi ledit fonds, ces circonstances ne sont pas de nature à remettre en cause le transfert de propriété réalisé en 1986 ;
Attendu qu'ainsi le jugement déféré doit être confirmé en ce qu'il a constaté ce transfert de propriété et ordonné la publication de la décision au bureau de la Conservation des Hypothèques de Nîmes ;
2. la demande de mainlevée des inscriptions hypothécaires :
Attendu que si Marcel Y... ne remet pas en cause le chef de décision qui l'a débouté à bon droit de sa demande d'annulation des inscriptions prises par la s. a. « Crédit Lyonnais Suisse », dès lors que la dation en paiement n'était pas opposable à la banque pour ne pas avoir fait l'objet de la publicité prévue par l'article 28 du décret n° 55-22 du 4 janvier 1955 avant la publication des inscriptions litigieuses, il demande néanmoins la condamnation de Monique X... à faire lever ces inscriptions ;
Mais attendu, d'une part, que la radiation des inscriptions hypothécaires est obtenue soit du consentement des parties intéressées, soit en vertu d'un jugement passé en force de chose jugée dans les cas prévus à l'article 2443 du code civil (ancien article 2160 du code civil), et d'autre part, que les causes d'extinction des hypothèques sont énumérées à l'article 2488 du code civil (ancien article 2180 du code civil) ;

Attendu qu'il s'ensuit que l'actuelle demande présentée à la Cour ne saurait prospérer, dès lors qu'elle fait abstraction de la nécessité d'obtenir le consentement de la s. a. « Crédit Agricole Suisse » en dehors des cas prévus par la loi ;

3. la demande de dommages et intérêts : Attendu que Monique X... qui ne pouvait plus disposer librement de l'immeuble donné en paiement, a incontestablement commis une faute en affectant hypothécairement celui-ci par deux fois pour garantir des prêts immobiliers ;

Attendu que compte tenu des éléments soumis à l'appréciation de la Cour, les prêts apparaissant avoir pour objet des travaux concernant l'immeuble litigieux, le préjudice subi par Marcel Y... du fait de ces inscriptions hypothécaires sera compensé par une indemnité de 10. 000 euros ;
Attendu que par ailleurs, si Marcel Y... continue, dans les motifs de ses écritures d'appel, à demander de réserver ses droits quant aux conséquences de faits de détournements de biens mobiliers dont il aurait été victime, ce chef de demande sera rejeté dès lors qu'il ne ressort pas de la pièce produite à l'appui de cette prétention, la démonstration de la réalité des détournements allégués et leur imputabilité à Monique X... ;
Sur la demande reconventionnelle :
Attendu que Monique X..., soutient avoir exposer des impenses nécessaires et utiles au profit de l'immeuble litigieux ;
Attendu que si cet argument a été seulement évoqué dans ses conclusions de première instance, la demande reconventionnelle en indemnisation de ces impenses est régularisée devant la Cour au visa de l'article 1634 du code civil ;
Et attendu que si les pièces produites par Monique X... ne permettent pas de déterminer le montant des sommes qu'elle a effectivement investies dans l'immeuble depuis le jugement de divorce, ni l'enrichissement que Marcel Y... a pu en retirer, la lecture des actes de prêt souscrits auprès de la s. a. « Crédit Lyonnais Suisse » montre qu'au moins une partie de ces prêts était destinée à financer la réalisation de travaux concernant ledit immeuble ;
Mais attendu que, d'une part les dispositions de l'article 1634 du code civil qui concernent l'indemnisation d'un acquéreur évincé, ne sont pas applicables à l'espèce ;
Et attendu, d'autre part, que les pièces produites montrent également que cet appauvrissement de Monique X... est la conséquence de la faute délibérée de la demanderesse qui, malgré la dation en paiement, a continué à vouloir se comporter en propriétaire de l'immeuble malgré les réclamations de Marcel Y... pour entrer en possession de son bien ;

Attendu qu'il s'ensuit que la demande d'indemnisation de ses impenses doit être rejetée comme non fondée ;

Sur les frais de l'instance :
Attendu que Monique X... qui succombe devra supporter les dépens de l'instance ; qu'il convient cependant, en équité, de la dispenser de l'application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

PAR CES MOTIFS :

La Cour, statuant par arrêt contradictoire et en dernier ressort,
Reçoit l'appel en la forme.
Écarte le moyen d'irrecevabilité tiré de l'autorité de la chose jugée.
Au fond,
Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions,
Mais y ajoutant, sur les demandes additionnelles et reconventionnelle présentées devant la Cour,
Condamne Monique X... à payer à Marcel Y... 10. 000 euros de dommages et intérêts en réparation du préjudice causé par l'affectation hypothécaire de l'immeuble donné en paiement.
Déboute Marcel Y... du surplus de ses demandes.
Déboute Monique X... de sa demande reconventionnelle,
Dit que Monique X... supportera les dépens d'appel, sans qu'il y ait lieu de faire application de l'article 700 du code de procédure civile.
Dit que la SCP d'avoués GUIZARD / SERVAIS et la SCP d'avoués Philippe PERICCHI pourront recouvrer directement contre la partie ci-dessus condamnée, ceux des dépens dont elles auront fait l'avance sans en recevoir provision, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
La minute du présent arrêt a été signée par Monsieur FILHOUSE, président, et par Madame BERTHIOT, greffier présent lors de son prononcé.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de nîmes
Formation : Ct0014
Numéro d'arrêt : 135
Date de la décision : 04/03/2008

Références :

Décision attaquée : Tribunal de grande instance de Nîmes, 09 février 2005


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.nimes;arret;2008-03-04;135 ?
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