DEUXIEME CHAMBRE Section B- COMMERCIALE
ARRET DU 21 FEVRIER 2008
ARRET No 90
Magistrat Rédacteur : Mme BRISSY- PROUVOST / DDP
R. G : 06 / 03663
TRIBUNAL DE COMMERCE DE NIMES Jugement du 29 juin 2006
X... C / Société FONDATION PROJETS FUTURS
APPELANT :
Maître Pierre X..., mandataire judiciaire, pris en sa qualité de liquidateur à la liquidation judiciaire de la SA NEMOSOFT,.........
représenté par la SCP CURAT- JARRICOT, avoués à la Cour assisté de la SCP LOBIER MIMRAN GOUIN LEZER, avocats au barreau de NIMES
INTIMEE :
Société FONDATION PROJETS FUTURS, prise en la personne de ses représentants légaux en exercice domiciliés en cette qualité audit siège, TREUHAND ANSALT VADUZ LICHTENSTEIN
représentée par la SCP FONT AINE- MAC ALUSO JULLIEN, avoués à la Cour assistée de Me Patrick BENCHETRIT, avocat au barreau de PARIS
ORDONNANCE DE CLÔTURE rendue le 11 Janvier 2008
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DEBATS :
Madame Catherine BRISSY- PROUVOST, Conseiller, a entendu les plaidoiries en application de l' article 786 du NCPC, sans opposition des avocats, et en a rendu compte à la Cour lors de son délibéré.
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DELIBERE :
Monsieur Raymond ESPEL, Président Monsieur Bruno BERTRAND, Conseiller Madame Catherine BRISSY- PROUVOST, Conseiller
GREFFIER :
Mme Dominique RI VOALLAN, Greffier, lors des débats et du prononcé de la décision
MINISTERE PUBLIC :
Auquel l' affaire a été régulièrement communiquée.
DEBATS :
à l' audience publique du 21 Janvier 2008, où l' affaire a été mise en délibéré au 21 Février 2008, Les parties ont été avisées que l' arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d' appel ;
ARRET :
Arrêt contradictoire, prononcé et signé par Monsieur Raymond ESPEL, Président, publiquement, le 21 Février 2008, date indiquée à l' issue des débats, par mise à disposition au greffe de la Cour
DONNEES DU LITIGE
Le litige
La sa Nemosoft (siège social : Nimes- président du conseil d' administration : Rémi C...)) est une société anonyme ayant pour objet la création et le développement de logiciels de jeux vidéo et / ou informatiques. Elle a pour actionnaire la sa Eurexa (directeur général : Bachar Y...).
La Fondation Projets Futurs (représentant : Bachar Y...), constituée au Liechtenstein le 27 septembre 1994, a pour objet l' investissement de capitaux dans diverses sociétés.
La société Fluent solution est une société de droit américain spécialisée dans le développement de logiciels informatiques et plus spécialement de jeux informatiques pour PC et consoles de jeux.
Courant juin 2002, la sa Nemosoft, connaissant d' importantes difficultés financières (première procédure d' alerte le 22 octobre 2001- deuxième procédure d' alerte le 12 juin 2002) est entrée en relations avec Fondation Projets Futurs. Le 17 juillet 2002, celle- ci a proposé d' investir 500 000 € dans la société Nemosoft et de la faire racheter au prix de 2 millions et demi d' euros par la société Fluent solution.
Ce projet n' a pas abouti.
Le 5 novembre 2002, la sa Nemosoft a déclaré la cessation de ses paiements.
Le 21 novembre 2002, le tribunal de commerce de Nîmes a prononcé la liquidation judiciaire immédiate de la sa Nemosoft, Pierre X... étant désigné en qualité de liquidateur judiciaire. Le passif définitif au 2 décembre 2005 s' élève à 1 676 258, 08 €.
La procédure devant le tribunal de commerce
Par actes en date du 28 janvier, 31 janvier et 11 février 2003, la sa Nemosoft a assigné Bachar Y..., Fondation Projets Futurs et la sa Eurexa devant le Tribunal de commerce de Nîmes pour obtenir leur condamnation solidaire à paiement de la somme de :
- 500 000 € hors taxes à titre de dommages et intérêts pour rupture de leurs engagements,- 200 000 € à titre de dommages- intérêts pour comportement abusif et vexatoire,- 15 000 € sur le fondement de l' article 700 du nouveau code de procédure civile, ainsi que des dépens, la décision à intervenir devant être assortie de l' exécution provisoire.
Par nouvelles assignations, Pierre X..., ès qualités, a repris la procédure introduite par la sa Nemosoft. Dans ses conclusions récapitulatives devant le tribunal, il a abandonné les demandes présentées à rencontre de la société Eurexa ainsi que de Bachar Y... et a sollicité paiement par Fondation Projets Futurs de la somme de 500 000 € à titre de dommages- intérêts outre intérêts au taux légal à compter du 2 juillet 2003 ainsi que des dépens, la décision intervenir devant être assortie de l' exécution provisoire.
Par jugement du 25 juin 2006, le tribunal de commerce de Nimes, après avoir ordonné la jonction des procédures,
au visa des articles 1315, 1134 et suivants du Code civil :
- a donné acte à Pierre X..., ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Nemosoft, de ce qu' il se désistait de l' instance introduite à l' encontre de la société Eurexa et de Bachar Y...,- a débouté Pierre X..., ès qualités, de sa demande à l'' encontre de la société Fondation Projets Futurs,- a débouté la société Fondation Projets Futurs de sa demande reconventionnelle,- a rejeté toute autre demande,- a condamné Pierre X..., ès qualités, aux dépens.
Pierre X..., ès qualités, a interjeté appel de cette décision par acte du 20 septembre 2006.
Les prétentions et moyens des parties devant la Cour
Par conclusions et bordereau de pièces déposés à la mise en état le 10 avril 2007, auxquels il est fait expressément référence,
Pierre X..., ès qualités, conclut à la réformation de ce jugement en ce qu' il l' a débouté de ses prétentions à l' égard de Fondation projets futurs et prie la Cour de condamner celle- ci à paiement :
- de la somme de 500 000 euros avec intérêts au taux légal à compter de l' assignation du 2 juillet 2003,- de la somme de 4000 euros au titre des frais irrépétibles,- des entiers dépens de première instance et d' appel, dont distraction pour ces derniers au profit de la SCP d' avoués Curat- Jarricot.
Par conclusions et bordereau de pièces déposés à la mise en état le 28 mars 2007, auxquels il est fait expressément référence,
" la société de droit du Lichtenstein Fondation Projets Futurs " conclut à la confirmation de la décision déférée excepté en ce qu' elle l' a déboutée de sa demande reconventionnelle et prie la juridiction d' appel, au visa des articles 1134, 1135, 1147, 1382 du Code civil, de :- débouter Pierre X..., ès qualités, de l' ensemble de ses demandes,- constater qu' elle a respecté les engagements souscrits à l' égard de la sa Nemosoft,- dire que la rupture des relations contractuelles est imputable à la société Nemosoft,- condamner Pierre X..., ès qualités, à payer la somme de 50 000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive outre celle de 15 000 euros au titre des frais irrépétibles ainsi que les entiers dépens.
L' ordonnance de clôture a été rendue le 11 janvier 2008.
La procédure a été communiquée au ministère public qui l' a visée sans avis.
MOTIFS DE L' ARRET
Sur la procédure
Attendu qu' au vu des pièces produites, la recevabilité de l' appel n' est ni contestée ni contestable ;
Sur les circonstances du litige
Attendu qu' au vu des explications et pièces fournies par les parties, les circonstances du litige s' établissent ainsi :
- le 22 octobre 2001, le commissaire aux comptes de la jeune sa Nemosoft a déclenché une 1ère procédure d' alerte (besoin en trésorerie) qu' il a arrêtée au vu de la prévision d' apport en trésorerie par la sa Eurexa évoquée lors de la réunion du conseil d' administration en date du 23 novembre 2001,
- suite à un mail de la sa Nemosoft (en date du 12 juin 2002) lui annonçant qu' elle envisageait une cessation des paiements pour la fin du mois, le commissaire aux comptes a mis en place une deuxième procédure d' alerte pour le même motif,
- en l' état de négociations menées à partir de juillet 2002 afin d' assurer la continuité de l' exploitation grâce à un apport de fonds : 1) la sa Nemosoft a accepté un financement de 500 000 € réalisé par Fondation Projets Futurs de la façon suivante : + participation à l' augmentation du capital de la sa Nemosoft à hauteur de 90 200 € et à la date du 22 août 2002, ce qui la rendait associée majoritaire, + apport au compte courant associé de la sa Nemosoft de la somme de 409 800 €, 2) les actionnaires de la sa Nemosoft ont signé un pacte relatif à l' option d' achat, par la société de droit américain Fluent solution, au prix de 5 millions d' €, de 100 % du capital, ladite option d' une durée de 24 mois devant être réalisée au plus tard 90 jours après le 31 juillet 2002, 3) la sa Nemosoft a décidé de souscrire auprès de Fondation Projets Futurs un prêt de 77 500 € portant intérêts au taux de 6 % et remboursable le 15 août 2002 ainsi qu' un emprunt de 500 000 € au taux de 6 % l' an et remboursable le 31 décembre 2002 (décision AGE du 25 juillet 2002),
- Fondation Projets Futurs reconnaît qu' au titre de l' opération de cession à la société Fluent solution elle devait percevoir notamment la somme de 2 545 000 €,
- le 31 juillet 2002, Fondation Projets Futurs a remis la somme 400 000 € à la sa Nemosoft qui devait lui rembourser 90 200 € le 22 août 2002,
- par acte séparé du même jour, Rémi C... s' est engagé à cautionner et garantir la somme de 500 000 € au profit de Bachar Y... ou toutes sociétés qu' il se substituerait dans le cadre du prêt à la sa Nemosoft, étant précisé que « cet engagement de caution prendra fin après réalisation de l' augmentation de capital de la sa Nemosoft prévue le 22 août 2002, si celle- ci intervient dans les conditions fixées aux termes du protocole d' accord régularisé par les actionnaires de la sa Nemosoft le 31 juillet 2002 »,
- le 22 août 2002, l' assemblée générale extraordinaire de la sa Nemosoft, tenue en présence de Fondation Projets Futurs et de Bachar Y..., a décidé notamment de procéder à un remboursement anticipé du prêt de 500 000 € dans l' attente de la formalisation de la procédure d' augmentation du capital ; toutefois le virement de 90 200 € émis par la sa Nemosoft en remboursement partiel du prêt a été crédité le 10 septembre 2002 sur le compte de Fondation Projets Futurs,
- fin août / début septembre 2002, le représentant de la société Fluent solution, laquelle avait manifesté sa volonté de lever l' option d' achat (mail non traduit en date du 6 août 2002), s' est rendu dans les locaux de la sa Nemosoft à Belgrade puis Paris,
- après cette date. Fondation Projets Futurs n' a plus de contact avec la société Fluent,
- par lettre des 16 et 25 septembre 2002, Bachar Y... a informé la sa Nemosoft du retrait de la société Fluent solution ainsi que du retrait de Fondation Projets Futurs, laquelle sollicitait le remboursement du solde du prêt, soit la somme de 309 800 €,
- par lettres des 17 et 24 septembre 2002, la sa Nemosoft a mis fin à la mission de Dominique D... (consultant de la société Fluent solutions) en lui faisant injonction de cesser immédiatement toutes relations commerciales au nom de la sa Nemosoft,
- le 4 octobre 2002, le commissaire aux comptes de la sa Nemosoft a indiqué que la situation de celle- ci lui semblait quasi irrémédiablement compromise,
- le 5 novembre 2002, la sa Nemosoft a déclaré la cessation de ses paiements,
- le 21 novembre 2002, le tribunal de commerce de Nîmes a prononcé sa liquidation judiciaire immédiate, a fixé la date de cessation des paiements au 15 septembre 2002, a désigné Pierre X... ès qualités de liquidateur,
- le 17janvier 2003, Fondation Projets Futurs a déclaré sa créance à hauteur de 309 800 €,- par lettre du 15 mai 2003, Pierre X..., ès qualités, lui a répondu que sa créance était contestée,
- par ordonnance réputée contradictoire du 15 février 2005, le juge commissaire de la liquidation judiciaire de la sa Nemosoft a sursis à statuer,
- à la date du 2 décembre 2005, le passif définitif de la sa Nemosoft a été chiffré à 1 676258, 586.
Sur la demande de Pierre X..., ès qualités. en paiement de la somme de 500 000 € par Fondation Projets Futurs
1) sur le fondement de la demande en paiement de dommages- intérêts
Attendu que Pierre X..., ès qualités, fonde sa demande sur les dispositions de l' article 1382 du Code civil en reprochant à Fondation Projets Futurs de n' avoir pas exécuté ses obligations contractuelles ; que Fondation Projets Futurs lui oppose que la prétendue inexécution d' une obligation contractuelle ne constitue pas une faute de nature délictuelle ;
Mais attendu en droit que le tiers à un contrat peut, sur le fondement de la responsabilité délictuelle, demander réparation du dommage que lui a causé l' inexécution dudit contrat ; que dans la présente instance, Pierre X..., en sa qualité de liquidateur judiciaire de la sa Nemosoft, agit dans l' intérêt des créanciers de cette société, lesquels sont étrangers aux relations contractuelles ayant existé entre la sa Nemosoft et Fondation Projets Futurs ; qu' il invoque un manque à gagner subi par lesdits créanciers en raison de la prétendue inexécution de ses obligations contractuelles par Fondation Projets Futurs ; qu' en conséquence, l' action est valablement fondée sur les dispositions de l' article 1382 du Code civil ;
2) sur les obligations contractuelles respectives des parties et leur exécution
Attendu que pour légitimer son défaut de participation à l' augmentation du capital de la sa Nemosoft, Fondation Projets Futurs fait valoir :
- que le prêt consenti à la sa Nemosoft devait lui être remboursé pour lui permettre de procéder à l' opération capitalistique,- que les opérations d' apport de capitaux à la sa Nemosoft et de cession de la sa Nemosoft à la société Fluent solution étaient liées et que l' article 1. 4 du pacte d' actionnaires du 31 juillet 2002 disposait qu' en cas de défaut de levée de l' option d' achat par la société américaine, la sa Nemosoft devrait lui rembourser les sommes versées,- que les fautes répétées de la sa Nemosoft et de ses dirigeants (attitude de la sa Nemosoft à l' égard du dirigeant de la société Fluent solution lors de son déplacement à Belgrade et Paris- attitude de la sa Nemosoft envers Dominique D... de la société Fluent solution- défaut de remboursement de la somme de 90 200 € à la date prévue du 22 août 2002) sont à l' origine tant de son retrait que de celui de la société Fluent solution ;
Attendu que Pierre X..., ès qualités, répond que :
- en l' absence d' écrit, la participation capitalistique de Fondation Projets Futurs doit être considérée comme totalement indépendante du remboursement du prêt de 400 000 € par elle consenti,- lors de l' assemblée générale du 22 août 2002, le commissaire aux comptes s' est opposé à l' établissement d' un jeu d' écritures comptables entre le remboursement de la somme de 90 200 € par la sa Nemosoft à Fondation Projets Futurs et le règlement de cette même somme par Fondation Projets Futurs à la sa Nemosoft au titre de l' augmentation du capital, d' où l' ordre donné par la sa Nemosoft pendant l' assemblée générale de virer la somme de 90 200 € au profit de Fondation Projets Futurs (cf fax),- dans sa lettre en date du 16 septembre 2002, Fondation Projets Futurs n' a justifié son refus ni par la tardiveté du remboursement du prêt, ni par le détournement d' actif reproché à Dominique D... mais uniquement par les conditions dans lesquelles le responsable de la société Fluent solution a été reçu les 5 et 6 septembre 2002 (préposé de la sa Nemosoft en état d' ébriété- improvisation), lesquelles ne sont pas justifiées, étant précisé que ledit responsable devait être reçu le 18 et 19 septembre 2002 à Belgrade ;
Mais attendu tout d' abord que les obligations contractuelles des parties doivent s' analyser dans le contexte d' urgence de la 2 éme procédure d' alerte déclenchée le 12 juin 2002 par le commissaire au compte de la sa Nemosoft, laquelle envisageait de déposer le bilan fin juin 2002 en l' état d' un besoin de trésorerie de 294 000 € à cette date (cf pièce 6 de l' appelant) ; que la sa Nemosoft devait faire face au paiement des échéances en date du 30 juin, 31 juillet et 31 août 2002 alors que la date de réalisation de la première opération capitalistique proposée par Fondation Projets Futurs était celle du 22 août 2002 ; qu' il convient de souligner que dans son assignation (page 5), la sa Nemosoft indique qu' elle avait un " besoin urgent de trésorerie de 500 000 € " ; que Fondation Projets Futurs a consenti à la sa Nemosoft un prêt de 500 000 € " dans l' attente de la formalisation de la procédure d' augmentation du capital " (cf AGE du 22 août 2002) ; qu' il n' est pas contesté que la seule somme de 400 000 € a été débloquée ; que ce prêt devait être remboursé le 22 août 2002 à hauteur de 902000 € ; que l' engagement de caution souscrit par Rémi C... devait prendre fin " après réalisation de l' augmentation de capital de la sa Nemosoft " prévue le 22 août 2002 (cf engagement de caution) ; que Pierre X..., ès qualités, ne justifie pas que lors de l' assemblée générale du 22 août 2002, le commissaire aux comptes s' est opposé à rétablissement d' un jeu d' écritures comptables ; qu' il existe une correspondance de date et de montant entre le remboursement d' une partie du prêt et la participation de Fondation Projets Futurs à l' augmentation du capital de la sa Nemosoft ; que dans sa lettre en date du 5 septembre 2002 à l' adresse de BNP Paribas (pièce 26 de l' appelant), la sa Nemosoft explique que « (..) dès que le bénéficiaire sera crédité de ce montant, il nous adressera en retour sans délai, d' une part, un virement du même montant de 90 200 € avec comme libellé " souscription libération à l' augmentation du capital ", d' autre part un virement de 100 000 € en apports en compte courant complémentaire à l' augmentation de capital (...). Nous vous demandons ce service pour pouvoir clôturer notre opération capitalistique (...) » ; que de l' ensemble de ces éléments et de l' urgence pour la sa Nemosoft de trouver de la trésorerie, il ressort que les parties ont entendu lier les opérations de prêt et de capitalisation en faisant précéder la 2ème opération par la première ;
Attendu qu' il convient de se placer à la date du 22 août 2002 pour apprécier l' exécution des obligations contractuelles ; que force est de constater que la sa Nemosoft, qui ne produit qu' un récipissé illisible de l' envoi d' un ordre de virement prétendument adressé le 22 août 2002, n' a pas respecté la date de remboursement du prêt puisqu' elle reconnait que son ordre de virement n' a pas été exécuté et qu' elle a du le réitérer en septembre 2002 ; qu' en tout état de cause et à tenir pour exacte la thèse de la sa Nemosoft quant à l' envoi de ce document, il lui appartenait, compte tenu de l' importance capitale de l' opération, de vérifier que cette somme avait été régulièrement transmise à Fondation Projets Futurs ; que la faute ainsi commise par la sa Nemosoft a rendu caduques les engagements pris par Fondation Projets Futurs ;
Attendu ensuite que de la lecture de l' article 1. 4 du pacte d' actionnaires, il ressort que l' opération capitalistique proposée par Fondation Projets Futurs était liée à la " cession du capital en bloc " à la société Fluent solutions ; que, comme déjà indiqué, la société Fluent solutions s' est retirée après avoir levé l' option d' achat ; que dès lors, Fondation Projets Futurs était fondée à se retirer également, étant observé que Pierre X..., ès qualités, ne recherche pas la responsabilité de la société Fluent solution ;
Attendu en conséquence que Pierre X..., ès qualités, auquel appartient la charge de la preuve, n' établit pas que Fondation Projets Futurs a commis une faute dans l' exécution de ses obligations contractuelles ;
3) sur la cause de la cessation des paiements de la sa Nemosoft
Attendu que, dans le souci de répondre à l' ensemble des moyens, la Cour examinera, à titre superfétatoire, la cause de la cessation des paiements de la sa Nemosoft ;
Attendu qu' en l' état de la rédaction de ses écritures, la Cour considère que Pierre X..., ès qualités, invoquant la théorie jurisprudentielle de l' équivalence des conditions, soutient que le refus opposé par Fondation Projets Futurs a compromis la continuité de l' exploitation de la sa Nemosoft ;
Attendu que Fondation Projets Futurs répond que Pierre X..., ès qualités, ne saurait valablement invoquer la théorie de l' équivalence des conditions alors que la liquidation de la sa Nemosoft, en situation financière précaire lors des négociations critiquées, est due à son absence de compétitivité dans le développement des projets et des logiciels, laquelle a abouti à la rupture de ses relations avec la société Infogrammes et a entraîné le défaut de paiement des dettes fiscales et sociales (URSSAF) ;
Mais attendu que la théorie jurisprudentielle invoquée par Pierre X..., ès qualités, vise les sanctions prises contre les dirigeants d' une entreprise en procédure collective ; que dans la lettre du 18 septembre 2002 évoquée par Pierre X..., ès qualités, le commissaire aux comptes indique seulement que, compte tenu de la situation financière de la sa Nemosoft, le refus de procéder au déblocage de capital est de nature à compromettre la continuité de l' exploitation de la société ; que comme déjà indiqué, l' opération capitalistique envisagée constituait la seule solution de nature à permettre la survie de la sa Nemosoft qui avait subi une première procédure d' alerte et qui, après avoir envisagé elle- même un dépôt de bilan en juin 2002, avait subi une deuxième procédure d' alerte ; que, comme déjà indiqué. dans son assignation (page cinq), la sa Nemosoft indique qu' elle avait un « besoin urgent de trésorerie de 500 000 € » ; que dans son jugement prononçant la liquidation judiciaire de la sa Nemosoft, le tribunal a indiqué : « (...) Il ressort des débats que la recapitalisation de la société promise par un des associés n' a pas été réalisée. En outre, la résiliation d' un gros accord de développement et le détournement de la clientèle par des manoeuvres frauduleuses ont entraîné des dettes salariales importantes ainsi que des incidents bancaires » ; qu' il est établi en effet qu' en septembre 2002, la société Infogrammes, dont il n' est pas soutenu qu' elle connaissait l' opération conclue entre Fondation Projets Futurs et la sa Nemosoft dont elle était un partenaire économique important, a rompu ses relations commerciales et a sollicité le remboursement d' une somme totale de 619 000 € ; que le passif définitif de la sa Nemosoft s' établit à la somme de 1 676 258, 58 € au 2 décembre 2005, et ce, en dépit du prêt consenti par Fondation Projets Futurs ; qu' il existe des créances déclarées par les créanciers institutionnels ;
Attendu que de l' ensemble de ces éléments il ressort que l' échec de l' opération capitalistique n' aurait pas été de nature à éviter le dépôt de bilan, étant souligné que la sa Nemosoft reconnaît (cf assignation- page 4) avoir bénéficié « d' une avance en trésorerie » par le biais du prêt consenti par Fondation Projets Futurs ; qu' en réalité, la sa Nemosoft a trop tardé après la 1ère procédure d' alerte ;
Attendu en définitive que le jugement déféré sera confirmé ;
Sur la demande reconventionnelle formulée par Fondation Projets Futurs en paiement de dommages intérêts pour procédure abusive
Attendu qu' en l' état de la rédaction de ses écritures, la Cour considère que Fondation Projets Futurs réclame paiement de la somme de 50 000 € à titre de dommages- intérêts pour procédure abusive en raison de la mauvaise foi de la sa Nemosoft ;
Mais attendu que Fondation Projets Futurs ne rapporte la preuve qui lui incombe que Pierre X..., ès qualités, a agi à son encontre dans l' intention de lui nuire et qu' il en est résulté pour elle un préjudice ;
Attendu en définitive que le jugement déféré sera confirmé en ce qu' il a rejeté la demande reconventionnelle formée par Fondation Projets Futurs ;
Sur les dépens ainsi que les frais irrépétibles
Attendu que les circonstances de l' espèce ne commandent pas de laisser les dépens à la charge de Pierre X..., ès qualités ; qu' ils seront considérés comme frais privilégiés de la procédure collective ;
Attendu qu' il ne s' avère pas équitable de faire application des dispositions de l' article 700 du nouveau code de procédure civile au profit de Fondation Projets Futurs ;
PAR CES MOTIFS
La Cour, statuant par arrêt contradictoire, publiquement, en matière commerciale et en dernier ressort
- déclare l' appel recevable,
- confirme la décision déférée,
- rejette le surplus des demandes,
- déclare les dépens de première instance et d' appel frais privilégiés de la procédure collective.
Arrêt signé par M. Espel, président, et par Mme Rivoallan, greffier, présente lors du prononcé.