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08/11/2006 | FRANCE | N°1744

France | France, Cour d'appel de nîmes, Chambre sociale, 08 novembre 2006, 1744


ARRÊT No1744CHAMBRE SOCIALER. G. : 03 / 02515 RT / AG
Conseil de Prud'hommesde CANNES02 avril 1998Section : Activités DiversesCour d'Appel d'Aix en ProvenceArrêt 14 novembre 2000 S / RENVOI CASSATIONArrêt 04 mars 2003DUNANC / STE FERMIERE DU CASINO MUNICIPAL DE CANNESCOUR D'APPEL DE NIMESCHAMBRE SOCIALEARRÊT DU 08 NOVEMBRE 2006APPELANT : Monsieur Jacques X... 143 Chemin de la Traversière06250 MOUGINSreprésenté par la SCP GUIZARD- SERVAIS, avoués à la Cour et par Me Muriel RICORD, avocat au barreau de GRASSE
INTIMÉE : SOCIÉTÉ FERMIÈRE DU CASINO MUNICIPAL DE CANNES1 Jetée

Albert EdouardBP 28406406 CANNES CEDEXreprésentée par la SCP M. TARD...

ARRÊT No1744CHAMBRE SOCIALER. G. : 03 / 02515 RT / AG
Conseil de Prud'hommesde CANNES02 avril 1998Section : Activités DiversesCour d'Appel d'Aix en ProvenceArrêt 14 novembre 2000 S / RENVOI CASSATIONArrêt 04 mars 2003DUNANC / STE FERMIERE DU CASINO MUNICIPAL DE CANNESCOUR D'APPEL DE NIMESCHAMBRE SOCIALEARRÊT DU 08 NOVEMBRE 2006APPELANT : Monsieur Jacques X... 143 Chemin de la Traversière06250 MOUGINSreprésenté par la SCP GUIZARD- SERVAIS, avoués à la Cour et par Me Muriel RICORD, avocat au barreau de GRASSE
INTIMÉE : SOCIÉTÉ FERMIÈRE DU CASINO MUNICIPAL DE CANNES1 Jetée Albert EdouardBP 28406406 CANNES CEDEXreprésentée par la SCP M. TARDIEU, avoués à la Cour et par Me Luc GASTALDI, avocat au barreau de GRASSECOMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ : Monsieur Régis TOURNIER, Président, Monsieur Philippe DE GUARDIA, Conseiller, Monsieur Yves ROUQUETTE- DUGARET, Vice Président Placé, GREFFIER : Mademoiselle Séverine DENOUILLE, Adjoint Administratif faisant fonction de Greffier, lors des débats, et Madame Annie GAUCHEY, Greffier, lors du prononcé, DÉBATS : à l'audience publique du 06 Juillet 2006, où l'affaire a été mise en délibéré au 06 Septembre, prorogée au 8 Novembre 2006, les parties ayant été régulièrement convoquées par lettre recommandée avec avis de réception ARRÊT : Arrêt contradictoire, rendu en dernier ressort, prononcé et signé par Monsieur Régis TOURNIER, Président, publiquement, le 08 Novembre 2006, sur renvoi de la Cour de Cassation,
FAITS PROCÉDURE PRÉTENTIONS DES PARTIESJacques X... a été embauché le 5 septembre 1957 par la société et a été licencié le 4 octobre 1989 pour faute lourde aux motifs que : " Nous avons eu à déplorer de votre part un agissement constitutif d'une faute lourde. En effet, vous avez été inculpé et mis en détention pour escroquerie, votre
conduite a mis ainsi en cause la bonne marche de notre entrepriseàCompte tenu de la gravité des agissements fautifs qui vous sont reprochés, votre maintien dans notre établissement s'avère impossible. En l'état actuel vous comprendrez que la confiance nécessaire à la poursuite de nos relations contractuelles n'existe plus à " Il saisissait la juridiction prud'homale le 6 décembre 1989 afin de contester son licenciement laquelle ordonnait un sursis à statuer le 20 décembre 1990. Le Tribunal Correctionnel de Grasse, le 28 août 1992 les relaxait et la Chambre des appels correctionnels de la Cour d'appel d'Aix en Provence confirmait cette décision par arrêt du 19 février 1997. Jacques X... saisissait à nouveau la même juridiction demandant :- le rejet de l'irrecevabilité invoquée par l'employeur,- l'annulation de son licenciement qui avait porté atteinte à son droit à la présomption d'innocence et au droit d'obtenir un emploi,- sa réintégration,- la réparation de son préjudice inhérent à sa perte de revenus entre le moment de la rupture du contrat le 4 octobre 1989 et celui de sa réintégration définitive soit 1. 225. 029 francs, et des dommages intérêts de 2. 000. 000 francs à titre de réparation de ses préjudices matériels et moraux,- des congés payés et des indemnités de licenciement et de préavisPar jugement, en formation de départage, du 2 avril 1998, le juge prud'homal de Cannes estimait le licenciement régulier et fondé sur une cause réelle et sérieuse et :- déboutait Jacques X... de sa demande en dommages intérêts pour licenciement abusif ou irrégulier ainsi que de sa demande de réintégration ;- condamnait la société à lui verser les sommes suivantes : * 7. 641 francs à titre d'indemnité de congés payés (avec intérêt légal à compter du jour de la demande en justice) ; * 142. 666 francs à titre d'indemnité conventionnelle d'ancienneté (avec intérêt légal à compter du jour de la demande en justice) ; * 10. 000 francs au titre de l'article 700 du nouveau Code de

procédure civile. Sur appel de Jacques X..., par arrêt du 14 novembre 2000, la Cour d'appel d'Aix en Provence réformait le jugement et déclarait irrecevables les demandes en application de l'article R 516-1 du Code du travail aux motifs que : le fondement de la présente instance réside dans un licenciement du 4 octobre 1989 qui était connu antérieurement au 16 septembre 1998 date de la clôture des débats devant la Cour encore saisie d'une première instance sur laquelle elle a statué par arrêt du 28 octobre 1998 En effet il avait existé à l'époque une première instance prud'homale introduite au mois de juin 1988 par Jacques X..., et d'autres salariés, instance tendant à obtenir des rappels de salaires et des congés payés fondés sur l'interprétation des accords conventionnels et qui a été clôturée par arrêt du 28 octobre 1998. Sur pourvoi de Jacques X..., par arrêt du 4 mars 2003, la Cour de cassation cassait et annulait l'arrêt dans toutes ses dispositions au visa des articles R. 516-1 et R. 516-2 du Code du travail et renvoyait devant la Cour d'appel de ce siège aux motifs que il résulte de ces textes que ne heurte pas le principe de l'unicité de l'instance une seconde demande introduite devant le conseil de prud'hommes avant qu'il ne soit dessaisi d'une première instance ; qu'il appartient dans ce cas au conseil de prud'hommes de joindre les deux instances ; Attendu que, selon la procédure, plusieurs salariés, dont MM. X..., Y... et Z... ont introduit à l'encontre de la société Fermière du casino municipal de Cannes (la société Fermière) une instance en interprétation d'accords d'entreprise, sur laquelle il a été statué par jugements du 25 juin 1992, après clôture des débats le 28 avril 1992, puis, sur appel de la société Fermière, par arrêt rendu le 28 octobre 1998, après clôture des débats le 16 septembre 1998 ; que MM. X... et Y..., licencié le 4 octobre 1989, ainsi que M. Z..., licencié le 25 novembre 1989, ont saisi le 29 novembre 1989 la juridiction

prud'homale d'une demande en paiement d'indemnités de rupture et de diverses sommes ; Attendu que pour déclarer irrecevable cette dernière demande, en application de la règle de l'unicité de l'instance, l'arrêt attaqué retient que les salariés avaient la faculté de formuler leurs nouvelles prétentions lors de la précédente instance devant la cour d'appel dont les débats n'ont été clos que le 16 septembre 1998 ;
Qu'en statuant ainsi, alors qu'il résultait de ses propres constatations et de la procédure que le conseil de prud'hommes ne s'était pas encore dessaisi de la première instance, dont les débats ont été clos le 28 avril 1992, lorsque le salarié a introduit devant lui sa demande nouvelle le 29 novembre 1989, la cour d'appel a violé par fausse application les textes susvisés ; Jacques X... avait soutenu devant la Cour d'appel d'Aix en Provence que la fin de non recevoir tirée de l'unicité de l'instance est ici inapplicable. Il soutient que :- le jugement doit être infirmé en ce qu'il a retenu une cause réelle et sérieuse,- à titre principal en application des dispositions des articles 8, 13, 19 et 20 du décret 59-1489 du 22 décembre 1959, l'annulation de la procédure de licenciement car il n'a pas été licencié par sa seule personne qui avait compétence pour le faire à savoir le directeur responsable du casino mais par le directeur des ressources humaines,- l'annulation de ce licenciement qui a porté atteinte à sa présomption d'innocence, d'ordonner la
remise en état et de l'indemniser pour la période entre la notification du licenciement et le jour de sa réintégration effective,- en application de l'article 11 de la convention collective des employés de jeux une indemnité de licenciement qui ne peut inférieure à 30. 505 ç,- la somme de 38. 876 ç à titre de dommages intérêts,- celle de 6. 480 ç à titre d'indemnité compensatrice de préavis et les congés payés y afférents,- en réparation des ses divers préjudices distincts subis à savoir des conditions vexatoires et humiliantes, sa présentation comme coupable, la somme de 304. 898 ç à titre de dommages intérêts,- outre la somme de 5. 000 ç sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile. La société Fermière du Casino municipal de Cannes :- invoque l'irrecevabilité de la demande tirée du principe de l'unicité de l'instance,- subsidiairement demande de réduire le montant des réclamations au titre du préavis, des congés payés et de l'indemnité de licenciement, de ramener à de plus justes proportions les dommages et intérêts demandés,- en tout état de cause sollicite le paiement de la somme de 2. 000 ç au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile. MOTIFSSur la fin de non recevoir tirée de l'unicité de l'instance Attendu qu'il résulte d'une jurisprudence constante que lorsque le fondement de la nouvelle demande est connu du demandeur à un moment où l'instance prud'homale est en cours, il doit former une demande additionnelle devant la même juridiction laquelle demande est recevable jusqu'à la clôture des débats ; que peu important qu'en l'espèce le demandeur ait déposé un nouvel acte introductif d'instance au lieu de présenter une demande additionnelle dans la mesure où la demande a été formalisée à une date antérieure au dessaisissement de la juridiction ; Attendu que d'ailleurs, à la suite d'un arrêt de la Cour de cassation du 24 novembre 1998 (No 97-43670) statuant sur des demandes de divers salariés contre la société SA

Cannes Balnéaire Palm Beach Casino, par arrêt de la Cour d'appel de ce siège en date du 1er avril 2004, prononcé par sa formation solennelle après renvoi, cette argumentation a été maintenue Attendu que dès lors la fin de non recevoir n'est pas fondée et la demande est recevable ; Sur le licenciementAttendu que selon les énonciations figurant à la page 35 du jugement du tribunal correctionnel de Grasse du 29 juillet 1994 il résulte que Jacques X... a d'emblée réfuté toute implication et a toujours persisté dans es dénégations ; que s'il était présent à la table lors de l'opération de double change effectuée par Glise au profit de Toledano, l'enregistrement vidéo révèle que le prévenu, qui compte tenu de la personnalité du joueur n'avait pas à surveiller spécialement l'opération, était occupé à d'autres taches et que par suite celle- ci a pu lui échapper ; qu'enfin Glise est revenu sur ses mises en cause ; que sa relaxe s'impose ; Attendu que l'arrêt confirmatif de la Cour d'appel d'Aix en Provence énonce que le jugement doit être confirmé en l'absence de démonstration d'un quelconque acte positif de participation de cet employé de jeux à des malversations au préjudice du casino ; Attendu que la lettre de licenciement énonce que l'employeur a eu à déplorer un agissement constitutif d'une faute lourde car Jacques X... a été inculpé et écroué pour escroquerie, et sa conduite a ainsi mis en cause la bonne marche de l'entreprise ; Attendu, cependant, que la société ne saurait invoquer des faits ayant entraîné des poursuites et un placement d'un salarié en détention provisoire, alors que Jacques X... est présumé innocent, ce qui entraîne la suspension du contrat de travail sauf d'une part si le comportement incriminé du salarié est intervenu à l'intérieur du travail, d'autre part si le comportement a un lien avec l'activité professionnelle, enfin si l'incarcération du salarié entraîne un trouble dans l'organisation et le fonctionnement de l'entreprise ; Attendu qu'en l'espèce tant le

comportement du salarié que les faits imputés à l'intérieur du travail ne pouvaient être retenus, selon le juge pénal, car ils n'étaient pas matériellement établis ; que dès lors ces faits ne pouvaient constituer une cause réelle et sérieuse de licenciement, la relaxe pour les mêmes faits par le juge pénal s'imposant au juge civil ; Attendu que le jugement déféré doit donc être réformé ; Sur les demandes d'annulation du licenciementAttendu que Jacques X... soutient qu'en application des dispositions des articles 8, 13, 19 et 20 du décret 59-1489 du 22 décembre 1959 la seule personne qui avait compétence pour le licencier à savoir le directeur responsable du casino n'est pas intervenu et que le directeur des ressources humaines ne pouvait le licencier ; que selon ce texte le directeur responsable du casino engage, rémunérée et licencie directement, en dehors de toute ingérence étrangère, toutes les personnes employées à un titre quelconque dans les salles de jeux ; Attendu que, toutefois, si ce décret interdit toute ingérence étrangère dans l'embauche, le paiement des salariés et la rupture des relations contractuelles, destinée à éviter toute intrusion de tiers il n'interdit pas une délégation interne au directeur des ressources humaines pour la gestion du personnel ; Attendu qu'également ce n'est pas le licenciement qui a porté atteinte à sa présomption d'innocence, mais la plainte pénale et ses conséquences ; que cette atteinte étant seulement susceptible d'être indemnisée, elle ne saurait, en l'absence de disposition légale particulière, entraîner l'annulation du licenciement, une réintégration par la remise en état et une indemnisation salariale automatique pour la période entre la notification du licenciement et le jour de sa réintégration effective ; Attendu que la demande de réintégration n'est donc pas fondée ; Sur le préjudiceAttendu qu'en l'état de 32 ans d'ancienneté de ce salarié au sein de la même entreprise, de sa date de naissance en 1940, de

son salaire de 2. 892, 11 ç, de l'importance et de l'étendue de son préjudice moral, économique et du fait du manque à gagner sur ses droits à retraite, dont une expertise n'est pas indispensable, il convient de lui allouer la somme de 120. 000 ç à titre d'indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse ; Sur les indemnités Attendu qu'il convient en l'état des pièces produites de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a alloué une indemnité de congés payés et de fixer l'indemnité conventionnelle de licenciement à la somme de 12. 802, 34 ç avec intérêts au taux légal à compter du 18 janvier 1990 date de l'audience de conciliation, ceci compte tenu des décomptes produits et du montant des sommes figurant sur l'attestation destinée à l'ASSEDIC laquelle a été délivrée le 21 novembre 1989 ; Attendu qu'en effet, selon l'article 11 de la Convention collective, l'indemnité de licenciement est calculée en prenant pour base le douzième de la rémunération des douze derniers mois précédent le licenciement et est égale aux droits acquis au titre de chacune des périodes s'additionnant pour chacune des six première années d'ancienneté à 1 / 6 de mois par année d'ancienneté, et à partir de la 7ème année d'ancienneté à 1 / 8ème de mois par année d'ancienneté avec un plafond de 10 mois ; Attendu qu'il sera alloué aussi la somme de 5. 784, 22 ç au titre de l'indemnité de préavis et les congés payés y afférents soit 578, 42 ç ; Attendu qu'il parait équitable que la société participe à concurrence de 3. 000 ç aux frais exposés par Jacques X... en cause d'appel et non compris dans les dépens en application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ; Vu l'article 696 du nouveau Code de procédure civile ;
PAR CES MOTIFS
LA COUR
Vu l'arrêt de cassation du 4 mars 2003,
Rejette la fin de non recevoir,
Confirme le jugement déféré en ce qu'il a alloué une indemnité de congés payés,
Le réforme pour le surplus,
Statuant à nouveau,
Dit que l'indemnité de congés payés allouée par le jugement portera intérêts au taux légal à compter du 18 janvier 1990 date de l'audience de conciliation,
Dit le licenciement sans cause réelle et sérieuse,
Condamne la société FERMIÈRE DU CASINO MUNICIPAL DE CANNES à payer à Jacques X... les sommes de :-5. 784, 22 ç bruts d'indemnité compensatrice de préavis et la somme 578, 42 ç correspondant aux congés payés y afférents,-12. 802, 34 ç au titre de l'indemnité conventionnelle de licenciement ces trois sommes portant intérêts au taux légal à compter du 18 janvier 1990 date de l'audience de conciliation,-120. 000 ç à titre d'indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse,
Condamne la société FERMIÈRE DU CASINO MUNICIPAL DE CANNES à payer à Jacques X... la somme de 3. 000 ç pour ses frais en application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.
La condamne aux dépens de première instance et d'appel.
Arrêt qui a été signé par Monsieur TOURNIER Président et par Madame GAUCHEY, Greffier, présente lors du prononcé.
LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de nîmes
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 1744
Date de la décision : 08/11/2006
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.nimes;arret;2006-11-08;1744 ?
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