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28/03/2001 | FRANCE | N°1999/2748

France | France, Cour d'appel de nîmes, Chambre sociale, 28 mars 2001, 1999/2748


FAITS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES : Monsieur Didier X... a été embauché le 2 juillet 1996 en qualité de chauffeur de tracteur par la S.A.R.L. LOCATION TRANSPORTS PROVENCE à Noves (13550), par contrat de travail à durée déterminée saisonnier, au coefficient 170 de la convention collective nationale étendue des tracteurs, machines et ma- tériels agricoles et de matériels de travaux publics, en date du 30 octobre 1969. Un second contrat de travail à durée déterminée, motivé comme le premier "en raison de la saison d'été" a été signé entre les parties le 7 octobre 1996 et s'e

st achevé le 8 novembre 1996. Il a été suivi d'une troisième conventio...

FAITS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES : Monsieur Didier X... a été embauché le 2 juillet 1996 en qualité de chauffeur de tracteur par la S.A.R.L. LOCATION TRANSPORTS PROVENCE à Noves (13550), par contrat de travail à durée déterminée saisonnier, au coefficient 170 de la convention collective nationale étendue des tracteurs, machines et ma- tériels agricoles et de matériels de travaux publics, en date du 30 octobre 1969. Un second contrat de travail à durée déterminée, motivé comme le premier "en raison de la saison d'été" a été signé entre les parties le 7 octobre 1996 et s'est achevé le 8 novembre 1996. Il a été suivi d'une troisième convention, conclue le 3 mars 1997, motivée de la même façon et faisant aussi référence à la durée du chantier. Le 18 septembre 1997, l'employeur a notifié au salarié la rupture du contrat de travail le 19 septembre suivant, invoquant la date de la fin du chantier. Après intervention de l'inspection du travail, saisie par M. X..., l'employeur a adressé, le 7 octobre 1997, une convocation au salarié, pour qu'il se rende à un entretien préalable de licenciement, puis lui a notifié, par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 23 octobre 1997, son licenciement, moti- vé par la fermeture du chantier sur lequel il était affecté depuis le 3 mars 1997. Contestant cette décision, Monsieur Didier X... a saisi le Conseil de prud'hommes d'Avignon (84000) le 12 décembre 1997. Par jugement prononcé le 9 décembre 1998, cette juridiction a : - Requalifié le contrat de travail de M. X... en contrat de travail à durée indéterminée, - Condamné la S.A.R.L. L.T.P. à lui payer les sommes de : 5.647,00 F à titre de rappel de salaire, - Débouté la S.A.R.L. L.T.P. De ses demandes reconventionnelles et condamné celle-ci aux dépens éventuels de l'instance. Le 17 mars 1999 M. Didier X... a relevé appel de la décision du Conseil de prud'hommes qui lui avait

été notifiée le 1er mars précédent. M. Didier X... sollicite que la S.A.R.L. L.T.P. Soit condamnée à lui payer les sommes suivantes : 10.000,00 F à titre d'indemnité de requalification du contrat de travail à durée déterminée en contrat de travail à durée indéterminée, SUR CE : SUR LE RAPPEL DE SALAIRE :

Attendu qu'il n'est formulé aucune critique de ce chef de la décision du Conseil de prud'hommes d'Avignon qui avait alloué à Monsieur Didier X... la som- me de 5.647,00 F à ce titre, dont chacune des parties sollicite la confirmation ; Qu'il convient en conséquence de confirmer le jugement entrepris ; SUR LA REQUALIFICATION DU CONTRAT DE TRAVAIL : Attendu que conformément aux dispositions de l'article L.122-1 du Code du travail, un contrat de travail à durée déterminée ne peut avoir ni pour objet ni pour effet de pourvoir durablement un emploi lié à l'activité normale et permanente de l'entreprise et que le recours à celui-ci doit être motivé par un cas énuméré à l'article L.122-1-1 du Code du travail ; Attendu qu'en l'espèce il apparaît que Monsieur Didier X... a travaillé comme chauffeur tracteur pour le compte

de la S.A.R.L. LOCATION TRANSPORTS PROVENCE, du 2 juillet au 4 octobre 1996, puis du 10 octobre au 8 novembre 1996 et enfin du 2 mars au 18 septembre 1997, soit plus de 10 mois dans le cadre de 3 contrats de travail à durée déterminée successifs, à terme imprécis, dont le motif indiqué par l'employeur était " la saison d'été" ; Attendu que la location d'engins avec chauffeur à des entreprises participant à des chantiers de travaux publics, en l'espèce le T.G.V. Sud, invoqué par l'employeur, qui est fermé en période hivernale, ne constitue pas une activité de caractère saisonnier ; Attendu en effet que le caractère saisonnier d'un emploi concerne des tâches normalement appelées à se répéter chaque année à des dates à peu près fixes en fonction du rythme des saisons ou des modes de vie collectifs, ce qui n'est pas le cas en l'occurrence d'un chantier exceptionnel de travaux publics, fut-il prévu pour plusieurs années ; Que ce motif ne permettait donc pas de recourir à un contrat de travail à durée déterminée plutôt qu'un contrat de travail à durée indéterminée, au sens des dispositions légales susvisées, pour le chauffeur de l'engin loué ; Attendu en outre que la "saison d'été" visée au contrat de travail du 3 mars 1997 ne saurait être comprise comme incluant une période hivernale (3 au 20 mars), la totalité du printemps (21 mars au 20 juin), en sus de l'été (21 juin-20 septembre), voire une partie de l'automne comme en 1996, où le salarié a travail- lé jusqu'au 8 novembre ; Attendu au surplus que la location d'engins de travaux publics ne relève pas des secteurs d'activités énumérés par l'article D.121-2 du Code du travail ou par un accord collectif étendu, dans lesquels des contrats de travail à durée déterminée peuvent être conclu pour les emplois pour lesquels il est d'usage const- ant de ne pas recourir au contrat de travail à durée indéterminée, en raison de la nature de l'activité exercée et du caractère par nature temporaire de ces emplois ; Attendu qu'il

convient donc de confirmer le jugement entrepris ayant requalifié les contrats de travail à durée déterminée signés entre les parties en un seul contrat de travail à durée indéterminée, conformément aux dispositions de l'article L.122-3-13 du Code du travail ; Attendu qu'en application de l'alinéa 2 de l'article L.122-3-13 du Code du travail il y a lieu de réformer le jugement du Conseil de prud'hommes d'Avignon en ce qu'il a omis d'allouer au salarié l'indemnité de requalification à laquelle il avait droit ; Que compte tenu des éléments de la cause, et notamment du montant du salaire de Monsieur X... s'élevant à 6.763,67 F pour 149,48 heures de travail dans un mois, son indemnité de requalification doit être fixée à la somme de 7.500,00 F ; SUR LE LICENCIEMENT : Attendu qu'après une première tentative de l'employeur de rompre unilatéralement le contrat de travail de Monsieur Didier X..., le 18 septembre 1997, la re- lation salariale s'est poursuivie entre les parties jusqu'au licenciement notifié par lettre recommandée avec accusé de réception le 23 octobre 1997, motivé comme suit : " Nous vous informons de notre décision de vous licencier en raison de la fermeture du chantier auquel vous étiez affecté depuis le 3 mars 1997. En effet, malgré notre souhait, nous n'avons pu vous reclasser sur un autre chantier, compte-tenu de leur fermeture imminente en raison de l'arrivée de l'hiver." ; Que cette lettre faisait suite à une précédente correspondance adressée le 7 octobre 1997 au salarié, dans laquelle l'employeur lui faisait savoir que le chanti- er du T.G.V. Sud, à Cavaillon et Lambesc, sur lequel il était affecté depuis le 3 mars 1997 avait pris fin, puis le convoquait à un entretien préalable de licen- ciement ; Mais attendu que le contrat de travail signé le 3 mars 1997, s'il faisait bien référence, comme durée de l'engagement du salarié à la durée du chantier, n'indiquait pas de quel chantier il s'agissait ; Qu'il s'ensuit que pour valablement se prévaloir de

ce motif de licenciement il appartient à l'employeur d'établir, d'une part que le chantier sur lequel avait été affecté Monsieur X... était effectivement achevé le 23 octobre 1997, et, d'autre part, qu'il son réemploi ne pouvait être assuré, en l'état de la fin de ce chantier et compte-tenu de l'activité de son entreprise par ailleurs ; Attendu qu'en l'espèce il est versé aux débats un seul document, une télécopie en date du 18 septembre 1997, émanant de Monsieur Y..., de l'entreprise RAZEL, faisant partie du Groupement T.G.V. Méditerranée à Lambesc (13410), aux termes duquel la S.A.R.L. L.T.P. Est informée de ce que le tracteur et la citerne arroseuse de 15.000 litres, loués depuis le 31 juillet 1997, sont remis à sa disposition à compter du 19 septembre suivant, étant libéré de leur chantier ; Attendu qu'il ressort de cet élément qu'en réalité la S.A.R.L. LOCATION TRANSPORTS PROVENCE ne participait pas directement au chantier susvisé mais louait du matériel, avec un chauffeur, à une entreprise y participant et qu'elle entendait faire co'ncider la fin du contrat de travail de son salarié avec celle de la restitution du matériel loué ; que cette hypothèse ne constitue nullement la fin de chantier prévue par l'article L.321-12 du Code du travail ; Attendu en outre que si Monsieur X..., comme le soutient l'employeur était affecté exclusivement à cette tâche, il lui appartenait de justifier aussi que ce matériel avait été loué pour la période antérieure au 31 juillet 1997, depuis le 3 mars 1997, date d'embauche du salarié, ce qui n'est pas établi en l'espèce ; Attendu enfin que la S.A.R.L. L.T.P. ne fournit aucune indication et aucun élément sur son activité commerciale et ses effectifs, de nature à justifier qu'elle était dans l'impossibilité d'assurer le réemploi de Monsieur Didier X... après la restitution du véhicule loué par la société RAZEL le 19 septembre 1997, et que ce véhicule n'a pas non plus été loué après cette date, pour d'autres chantiers ; Attendu qu'il

convient donc de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a déclaré sans cause réelle et sérieuse le licenciement de Monsieur Didier X... ; Attendu que le salarié ayant moins de deux années d'ancienneté dans l'entreprise, il doit être indemnisé en fonction de son préjudice justifié, conformément aux dispositions de l'article L.122-14-5 du Code du travail ; Attendu que Monsieur Didier X..., âgé de 36 ans lors de ce licenciement, justifie avoir été inscrit en qualité de demandeur d'emploi auprès de l'ASSEDIC de Val de Durance à compter du 23 septembre 1997 puis avoir demandé des allocations de chômage le 3 novembre 1997, n'avoir pas eu droit à l'allocation de solidarité spécifique, refusée le 25 mars 1999, avoir perçu une somme de 3.021,48 F au titre de l'allocation unique dégressive de l'ASSEDIC en février 1999 et percevoir le revenu minimum d'insertion (2.020,00 F) depuis le mois de mai 1999 ; Attendu qu'au vu de l'ensemble des éléments susvisés, il convient d'évaluer à la somme de 13.000,00 F le montant des dommages et intérêts dus par la S.A.R.L. L.T.P. au titre de ce licenciement sans cause réelle et sérieuse, toutes causes confondues; SUR LES FRAIS DE PROCÉDURE ET LES DÉPENS : Attendu qu'il y a lieu de d'allouer à M. Didier X... la somme de 1.500,00 francs sur le fondement des dispositions de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile que devra lui payer la S.A.R.L. LOCATION TRANSPORTS PROVENCE, condamnée aux entiers dépens de première instance et d'appel ; PAR CES MOTIFS : LA COUR, Statuant en matière prud'homale, publiquement, par arrêt contradictoire et en dernier ressort, Reçoit les appels en la forme, Réformant le jugement du Conseil de prud'hommes d'Avignon prononcé le 9 décembre 1998, Condamne la S.A.R.L. LOCATION TRANSPORTS PROVENCE à payer à Monsieur Didier X... les sommes suivantes : - 7.500,00 F à titre d'indemnité de requalification du contrat de travail, - 13.000,00 F à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans

cause réelle et sérieuse, - 1.500,00 F par application des dispositions de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, Condamne la S.A.R.L. L.T.P. aux dépens d'appel, Confirme le jugement entrepris pour le surplus, Rejette toutes les autres demandes. Ainsi prononcé et jugé à N MES le 28 mars 2001. Arrêt signé par Madame FILHOUSE, Président et Madame Z..., greffier.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de nîmes
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 1999/2748
Date de la décision : 28/03/2001
Type d'affaire : Sociale

Analyses

CONTRAT DE TRAVAIL - DUREE DETERMINEE - Cas de recours autorisés - Emploi à caractère saisonnier - Définition.

Conformément aux dispositions de l'article L.122-1 du Code du travail, un contrat de travail à durée déterminée ne peut avoir ni pour objet ni pour effet de pourvoir durablement un emploi lié à l'activité normale et permanente de l'entreprise et le recours à celui-ci doit être motivé par un cas énuméré à l'article L. 122-1-1 du Code du travail.La location d'engin avec chauffeur à des entreprises participant à des chantiers de travaux publics fermés en période hivernale, ne constitue pas une activité de caractère saisonnier. En effet, le caractère saisonnier d'un emploi concerne des tâches normalement appelées à se répéter chaque année à des dates à peu près fixes en fonction du rythme des saisons ou des modes de vie collectifs, ce qui n'est pas le cas en l'occurrence d'un chantier à caractère exceptionnel. Dès lors doivent être requalifiés en contrat à durée indéterminée les différents contrats de travail à durée déterminée conclus, conformément aux dispositions de l'article L. 122-3-13 du Code du travail

CONTRAT DE TRAVAIL - RUPTURE - Licenciement - Cause - Cause réelle et sérieuse - Défaut - Applications diverses.

Ne constitue pas un licenciement pour cause réelle et sérieuse le fait selon lequel la société de location de matériel de chantier, employeur du salarié conducteur d'engin, ne participait pas directement au chantier mais louait du matériel, avec un chauffeur, à une entreprise y participant et qu'elle entendait faire co'ncider la fin du contrat de travail de son salarié avec celle de la restitution du matériel loué. Cette hypothèse ne constitue nullement la fin de chantier prévue par l'article L. 321-12 du Code du travail


Références :

Articles L 122-1, L 122-1-1, L 122-3-13 et L 321-12 du Code du travail

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.nimes;arret;2001-03-28;1999.2748 ?
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