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09/01/2001 | FRANCE | N°1999/1898

France | France, Cour d'appel de nîmes, Chambre sociale, 09 janvier 2001, 1999/1898


FAITS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES : Mme Michelle X... a été embauchée le 22 décembre 1997 par l'Association "La Maison Saint-Vincent" à Courthezon (84350), en qualité d'agent hospitalier, suivant contrat de travail à durée déterminée à temps partiel, à effet du 2 janvier 1998, dont le terme était fixé au 15 février suivant et qui fixait une période d'essai d'une semaine. Le 22 décembre 1997 les parties ont aussi signé un autre contrat de travail, pour un emploi qualifié d'aide aux personnes âgées, conclu dans le cadre de la législation sur les contrats Emploi-Solidarité,

d'une durée d'un an, devant prendre effet le 17 février 1998, qui prév...

FAITS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES : Mme Michelle X... a été embauchée le 22 décembre 1997 par l'Association "La Maison Saint-Vincent" à Courthezon (84350), en qualité d'agent hospitalier, suivant contrat de travail à durée déterminée à temps partiel, à effet du 2 janvier 1998, dont le terme était fixé au 15 février suivant et qui fixait une période d'essai d'une semaine. Le 22 décembre 1997 les parties ont aussi signé un autre contrat de travail, pour un emploi qualifié d'aide aux personnes âgées, conclu dans le cadre de la législation sur les contrats Emploi-Solidarité, d'une durée d'un an, devant prendre effet le 17 février 1998, qui prévoyait une période d'essai d'un mois. Le 19 janvier 1998, la convention entre l'Etat et l'employeur, relative à ce contrat Emploi-Solidarité était signée. Le 11 mars 1998, l'Association notifiait par lettre recommandée avec accusé de réception à Mme X... la rupture de ce contrat de travail à compter du 15 mars suivant, en visant l'article 4 du contrat, prévoyant la période d'essai. Contestant la validité de cette rupture, la salariée a saisi le conseil de prud'hommes d'Avignon le 26 mars 1998. Par jugement prononcé le 8 décembre 1998, cette juridiction a : - Condamné l'Association "La Maison Saint-Vincent" à payer à Mme Michelle X... les sommes de : 6.000,00 F par application des dispositions de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, - Ordonné l'exécution provisoire à concurrence de 30.000,00 F sur les dommages et intérêts en application de l'article 515 du nouveau Code de procédure civile, - Débouté Mme X... du surplus de ses demandes et l'Association "La Maison Saint-Vincent" de sa demande reconventionnelle, - Condamné l'Association "La Maison Saint-Vincent" aux éventuels dépens. Le 9 février 1999 l'Association "La Maison

Saint-Vincent" a relevé appel de la décision du Conseil de prud'hommes qui lui avait été notifiée le 3 février précédent. Elle a ensuite obtenu, en référé, la suspension de l'exécution provisoire attachée à la décision du conseil de prud'hommes d'Avignon, suivant ordonnance du Premier Président de la Cour d'appel de Nîmes en date du 21 mai 1999. L'Association "La Maison Saint-Vincent" sollicite le rejet des demandes de Mme X..., considérant que la rupture du contrat de travail a valablement eu lieu durant la période d'essai convenue et réclame en outre le paiement de la somme de 18.000,00 francs pour les frais de procédure prévus par l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, Mme Michelle X... demande la confirmation de la décision entreprise.Elle forme appel incident pour obtenir l'allocation d'une somme supplémentaire de 30.000,00 F à titre de dommages et intérêts pour préjudice moral et celle de 2.500,00 F par application des dispositions de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile. Pour une plus ample relation des faits, de la procédure et des moyens des parties, il y a lieu de se référer au jugement du Conseil de prud'hommes et aux écritures déposées, reprises oralement par les parties. * * * * * * * * * * * SUR CE : SUR LA RUPTURE DU CONTRAT DE TRAVAIL : Attendu que Mme Michelle X... soutient que la période d'essai convenue dans le contrat Emploi-Solidarité doit être considérée comme nulle puisque s'ajoutant à un précédent contrat à durée déterminée d'un mois, dans le même emploi polyvalent, bien que dénommé différemment, qu'elle avait occupé à la satisfaction de son employeur, après une première période d'essai d'une semaine ; Attendu que la période d'essai, prévue par les dispositions des articles L.122-3-2 et L.322-4-8 du Code du travail, respectivement applicables aux contrats de travail à durée déterminée et aux contrats Emploi-Solidarité, ne peut être imposée à un salarié au cours de l'exécution de son contrat de

travail, et doit se situer au commencement de l'exécution du contrat de travail, les parties ne pouvant convenir de différer le début de l'essai après le début de l'exécution du contrat ; Attendu qu'il apparaît que Mme Michelle X... a, le même jour, 22 décembre 1997, signé avec son employeur, l'Association "La Maison Saint-Vincent", deux contrats de travail : l'un à durée déterminée d'un mois et demi, comportant une période d'essai d'une semaine, prenant effet à compter du 2 janvier 1998 et l'autre, dans le cadre du dispositif Emploi-Solidarité, d'une durée d'un an, prévu pour débuter à la fin du premier contrat, le 17 février 1998, qui prévoyait une nouvelle période d'essai d'un mois à partir de cette date ; Attendu qu'il s'ensuit que la période d'essai d'un mois prévue à compter du 17 février 1998 s'avère illicite en ce qu'elle était ainsi imposée à une salariée qui avait déjà exécuté une première période d'essai de façon satisfaisante et se trouvait avoir aussi exécuté son contrat de travail à durée déterminée à ce moment ; que ces conventions avaient aussi pour effet de différer l'exécution de la période d'essai d'un mois après six semaines d'exécution du contrat de travail, ce qui est contraire aux dispositions susvisées; qu'en outre la combinaison des deux conventions conduisait à imposer à la salariée une période d'essai d'une durée totale de 5 semaines, en violation des dispositions de l'article L.322-4-8 du Code du travail, fixant un maximum d'un mois ; Attendu que c'est vainement que l'employeur allègue, pour échapper à l'application de la réglementation de l'exécution de la période d'essai qu'il s'agissait de contrats distincts, l'un relevant du dispositif des contrats de travail à durée déterminée et l'autre des contrats Emploi-Solidarité ; Attendu en effet que les contrats de travail ont été conclus afin de se succéder immédiatement, ce qui interdit à l'employeur d'imposer à l'issue d'un premier contrat une nouvelle période d'essai à la

salariée ; Que contrairement à ce que soutient l'Association "La Maison Saint-Vincent", les contrats de travail concernaient le même emploi polyvalent non qualifié affecté à des tâches ménagères, prévoyaient la même durée de travail à temps partiel par la salariée (20 heures hebdomadaires), le même lieu d'exécution de la prestation de celle-ci et un salaire similaire (1.588,15 F brut pour 40 heures en janvier et 1.577,20 F brut pour 40 heures en mars 1998) ; Que seule l'intervention d'une aide de l'Etat fournie à l'employeur distinguait le contrat Emploi-Solidarité du contrat de travail à durée déterminée précédent, conclu à des conditions identiques ; Que l'identité des fonctions salariées confiées à Mme X... se trouve au demeurant confirmée par les bulletins de salaire délivrés à celle-ci par l'employeur, la qualifiant d'agent de service, tant en janvier et février 1998, qu'en mars 1998, malgré le changement de cadre contractuel ; que l'employeur lui a également fait passer une seule visite médicale d'aptitude préalable à l'embauche, le 22 janvier 1998, et, dans l'attestation destinée à l'ASSEDIC remise après la rupture du contrat de travail, indique une période de travail, du 2 janvier au 15 mars 1998, dans le même emploi d'agent de service ; Que dès lors il s'agissait d'une seule et même relation de travail entre les parties et non d'un changement de poste, exigeant des qualités ou compétences différentes ; Attendu que c'est aussi à tort que l'employeur soutient que les parties auraient convenu d'une novation du premier contrat de travail, alors que la novation d'un contrat de travail ne peut être convenue avant même le début de l'exécution de celui-ci et simultanément à sa conclusion, tout en laissant subsister la convention existante, mais uniquement pendant son exécution dont les parties souhaitent modifier les conditions, en application des dispositions de l'article 1271 du Code civil ; Attendu également qu'il ne résulte nullement des termes du contrat de

travail Emploi-Solidarité que les parties à cet acte avaient l'intention de nover le précédent contrat de travail à durée déterminée conclu entre elles, la seconde convention ne mentionnant même pas l'existence de la première, contrairement aux dispositions de l'article 1273 du Code civil ; Attendu qu'il convient donc de déclarer nulle la clause contractuelle prévoyant une période d'essai d'un mois à compter du 17 février 1998 ; qu'au surplus la salariée, à cette date avait accompli six semaines de travail jugées satisfaisantes par son employeur, au-delà des 4 semaines de période d'essai que son employeur pouvait lui imposer dans le cadre d'un contrat de travail Emploi-Solidarité ; Attendu que la rupture unilatéralement décidée par l'employeur, sans motivation indiquée, le 11 mars 1998, constitue donc une rupture anticipée du contrat de travail à durée déterminée hors des cas autorisés par l'article L.122-3-8 du Code du travail, faute grave de la salariée ou cas de force majeure ; Attendu qu'en conséquence l'Association "La Maison Saint-Vincent" est tenue de payer à Mme X... des dommages et intérêts d'un montant au moins égal aux rémunérations que celle-ci aurait perçues jusqu'au terme du contrat de travail Emploi-Solidarité, soit la somme de 37.730,00 F, allouée par le jugement déféré, dont la confirmation est demandée par la salariée ; que ce montant ne fait pas l'objet d'une contestation particulière quant à son mode de calcul de la part de l'employeur ; Attendu que l'attribution à Mme X... des salaires qu'elle aurait perçus durant 11 mois, sans contrepartie de prestation de travail, assure à celle-ci l'indemnisation de l'ensemble de son préjudice causé par cette rupture anticipée illicite de la part de son employeur, y compris le préjudice moral qu'elle invoque, eu égard aux conditions de l'espèce ; Qu'il convient donc de débouter Mme X... de son appel incident et de sa demande supplémentaire de ce chef ; SUR LES

FRAIS DE PROCÉDURE ET LES DÉPENS : Attendu qu'il y a lieu de d'allouer à Mme Michelle X... la somme de 2.500,00 francs sur le fondement des dispositions de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile que devra lui payer l'Association "La Maison Saint-Vincent", condamnés aux entiers dépens de première instance et d'appel, en sus des frais de procédure mis à sa charge par le jugement entrepris, confirmé de ce chef aussi ; PAR CES MOTIFS : LA COUR, Statuant en matière prud'homale, publiquement, par arrêt contradictoire et en dernier ressort, Reçoit les appels en la forme, Confirme le jugement du Conseil de prud'hommes d'Avignon prononcé le 8 décembre 1998 en toutes ses dispositions, Y ajoutant, Déboute Mme Michelle X... de sa demande de dommages et intérêts supplémentaires pour préjudice moral, Condamne l'Association "La Maison Saint-Vincent" aux dépens d'appel et à payer à Mme Michelle X... la somme de 2.500,00 francs sur le fondement des dispositions de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, Rejette toutes les autres demandes. Ainsi prononcé et jugé à N MES le 9 janvier 2001. Arrêt signé par Madame CUTTAT, Président et Madame Y..., greffier.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de nîmes
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 1999/1898
Date de la décision : 09/01/2001
Type d'affaire : Sociale

Analyses

CONTRAT DE TRAVAIL, DUREE DETERMINEE - Période d'essai

La période d'essai, prévue par les dispositions des articles L. 122-3-2 et L.322-4-8 du Code du travail, respectivement applicables aux contrats de travail à durée déterminée et aux contrats Emploi-Solidarité, ne peut être imposée à un salarié au cours de l'exécution de son contrat de travail, et doit se situer au commencement de l'exécution du contrat de travail, les parties ne pouvant convenir de différer le début de l'essai après le début de l'exécution du contrat. S'avère illicite la période d'essai d'un mois prévue à compter de la fin du premier contrat à durée déterminée, alors même que le salarié avait déjà exécuté une première période d'essai de façon satisfaisante et se trouvait avoir aussi exécuté son contrat de travail à durée déterminée à ce moment. En outre, la combinaison des deux conventions conduisait à imposer au salarié une période d'essai d'une durée totale de cinq semaines, en violation des dispositions de l'article L. 322-4-8 du Code du travail, fixant un maximum d'un mois. En conséquence, la rupture unilatéralement décidée par l'employeur constitue une rupture anticipée du contrat de travail à durée déterminée hors des cas autorisés par l'article L. 122-3-8 du Code du travail


Références :

Articles L 122-3-2, L 122-3-8, L 322-4-8 du Code du travail

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.nimes;arret;2001-01-09;1999.1898 ?
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