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02/07/2024 | FRANCE | N°23/00467

France | France, Cour d'appel de Nancy, 1ère chambre, 02 juillet 2024, 23/00467


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

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COUR D'APPEL DE NANCY

Première Chambre Civile



ARRÊT N° /2024 DU 02 JUILLET 2024





Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 23/00467 - N° Portalis DBVR-V-B7H-FEHX



Décision déférée à la Cour : jugement du tribunal judiciaire d'EPINAL,

R.G.n° 21/01064, en date du 31 janvier 2023,



APPELANT :

Monsieur [E] [U]

né le 17 mars 1972 à [Localité 3] (88)

domicilié [Ad

resse 1]

Représenté par Me François VALLAS, avocat au barreau d'EPINAL



INTIMÉE :

Madame [S] [X]

née le 23 octobre 1968 à [Localité 3] (88)

domiciliée chez Madame [J...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

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COUR D'APPEL DE NANCY

Première Chambre Civile

ARRÊT N° /2024 DU 02 JUILLET 2024

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 23/00467 - N° Portalis DBVR-V-B7H-FEHX

Décision déférée à la Cour : jugement du tribunal judiciaire d'EPINAL,

R.G.n° 21/01064, en date du 31 janvier 2023,

APPELANT :

Monsieur [E] [U]

né le 17 mars 1972 à [Localité 3] (88)

domicilié [Adresse 1]

Représenté par Me François VALLAS, avocat au barreau d'EPINAL

INTIMÉE :

Madame [S] [X]

née le 23 octobre 1968 à [Localité 3] (88)

domiciliée chez Madame [J] [H] [C] - [Adresse 2]

Représentée par Me Gérard WELZER de la SELARL WELZER, avocat au barreau d'EPINAL

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 16 Avril 2024, en audience publique devant la Cour composée de :

Madame Nathalie CUNIN-WEBER, Président de Chambre,

Monsieur Jean-Louis FIRON, Conseiller, chargé du rapport,

Madame Claude OLIVIER-VALLET, Magistrat honoraire,

qui en ont délibéré ;

Greffier, lors des débats : Madame Céline PERRIN ;

A l'issue des débats, le Président a annoncé que l'arrêt serait rendu par mise à disposition au greffe le 17 Juin 2024, en application de l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile. Puis, à cette date, le délibéré a été prorogé au 2 Juillet 2024.

ARRÊT : contradictoire, rendu par mise à disposition publique au greffe le 2 Juillet 2024, par Madame PERRIN, Greffier, conformément à l'article 450 alinéa 2 du Code de Procédure Civile ;

signé par Monsieur FIRON, Conseiller, en remplacement de Madame CUNIN-WEBER, Président, régulièrement empêchee, et par Madame PERRIN, Greffier ;

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Copie exécutoire délivrée le à

Copie délivrée le à

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EXPOSÉ DU LITIGE

Monsieur [E] [U] et Madame [S] [X] ont vécu en concubinage de 2013 à 2020 dans une maison dont Monsieur [U] est propriétaire.

Par acte signifié le 29 juin 2021, Madame [X] a fait assigner Monsieur [U] devant le tribunal judiciaire d'Épinal aux fins d'indemnisation au titre des travaux qu'elle a réalisés dans la maison de ce dernier.

Par jugement contradictoire du 31 janvier 2023, le tribunal judiciaire d'Épinal a :

- condamné Monsieur [U] à payer à Madame [X] la somme de 24090 euros avec intérêts au taux légal à compter du 19 août 2020,

- débouté Madame [X] du surplus de ses demandes,

- condamné Monsieur [U] à payer à Madame [X] la somme de 1500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,

- rappelé que le jugement est de droit exécutoire à titre provisoire,

- condamné Monsieur [U] aux dépens.

Pour statuer ainsi, le tribunal a relevé que l'article 555 du code civil n'était pas applicable en l'absence de construction de gros 'uvre sur un fonds voisin. Il a rejeté la demande de Madame [X] sur ce fondement.

Il a accueilli sa demande sur le fondement de l'article 1303 du code civil dès lors que le financement exclusif des travaux de second 'uvre par Madame [X] à hauteur de 24090 euros, ajouté au financement des travaux à hauteur de 74438,68 euros, constituait une dépense excédant par sa nature et son montant la participation normale d'un concubin aux charges de la vie commune. Il a précisé que cette dépense ne relevait pas d'une intention libérale et avait appauvri Madame [X] tout en enrichissant Monsieur [U] qui en a conservé le bénéfice.

Par déclaration reçue au greffe de la cour, sous la forme électronique, le 6 mars 2023, Monsieur [U] a relevé appel de ce jugement.

Au dernier état de la procédure, par conclusions reçues au greffe de la cour d'appel sous la forme électronique le 30 mai 2023, auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé des prétentions et moyens, Monsieur [U] demande à la cour, sur le fondement de l'article 1303 du code civil, de :

- infirmer le jugement rendu le 31 janvier 2023 par le tribunal judiciaire d'Épinal en ce qu'il l'a condamné à verser à Madame [X] :

* 24090 euros avec intérêt au taux légal à compter du 19 août 2020,

* 1500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

* le montant des dépens,

Statuant à nouveau,

- débouter Madame [X] de l'ensemble de ses demandes,

- condamner Madame [X] à lui verser les sommes de 3000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile (1500 euros au titre de la première instance et 1500 euros au titre de la procédure en appel), outre l'intégralité des dépens qui seront mis à sa charge,

- condamner Madame [X] aux entiers dépens de première instance et d'appel.

Monsieur [U] fait valoir que le tribunal s'est fondé sur un calcul erroné pour retenir que le montant mensuel des dépenses effectuées par Madame [X] dépassait celui d'une participation normale du concubin aux charges de la vie commune.

Par ailleurs, il relève que Madame [X] doit démontrer, en plus de son appauvrissement, l'enrichissement corrélatif dont il aurait bénéficié. Selon lui, elle ne prouve pas que les travaux ont directement augmenté la valeur de sa maison.

Il rappelle ensuite qu'au titre de l'article 1303 du code civil, l'indemnité due à l'appauvri est égale à la moindre des deux valeurs de l'enrichissement et de l'appauvrissement. Il soutient alors que l'enrichissement n'était pas sans cause puisque Madame [X] avait un intérêt à la réalisation des travaux. Il précise qu'il a non seulement hébergé Madame [X] pendant la durée de leur concubinage, mais qu'il a aussi hébergé ses enfants pendant plusieurs mois.

Il demande ensuite que la somme de 12000 euros, correspondant à la somme que Madame [X] a prélevée sur le compte dédié aux travaux après le sinistre, soit déduite de la somme de 24090 euros retenue par le tribunal. Ainsi, il divise le montant obtenu de 12090 euros par les 84 mois de concubinage et établit la dépense mensuelle de Madame [X] à 143,92 euros, somme qui selon lui, n'excède pas le montant d'une participation normale aux charges de la vie commune.

Au dernier état de la procédure, par conclusions reçues au greffe de la cour d'appel sous la forme électronique le 8 mars 2024, auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé des prétentions et moyens, Madame [X] demande à la cour, sur le fondement des articles 1303 et suivants du code civil, de :

- confirmer le jugement du 31 janvier 2023 en ce qu'il a déclaré recevable et bien fondée son action en paiement pour enrichissement sans cause ainsi que sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- l'infirmer sur le montant des sommes allouées,

Et statuant à nouveau,

- condamner Monsieur [U] à lui verser la somme de 76960 euros,

- condamner Monsieur [U] à lui verser la somme de 3000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile pour la procédure d'appel et aux entiers dépens.

Madame [X] fait valoir que Monsieur [U] s'est enrichi à son détriment dès lors qu'elle a financé les travaux de la maison de ce dernier avec le produit de la vente de son propre appartement. Elle soutient que cet enrichissement est injustifié puisqu'il ne résultait ni de l'accomplissement d'une obligation ni d'une intention libérale. Elle produit des factures et relevés que Monsieur [U] a co-signés et souligne le temps qu'elle a passé à réaliser elle-même les travaux.

Madame [X] soutient que ces dépenses excèdent sa participation à la vie commune dès lors qu'elle prenait en charge les courses. Elle justifie son appauvrissement en indiquant qu'elle n'a pu réaliser aucune économie puisque son revenu mensuel était de 495 euros et qu'elle a dépensé 886,17 euros par mois pendant la durée de leur concubinage.

La clôture de l'instruction a été prononcée par ordonnance du 12 mars 2024.

L'audience de plaidoirie a été fixée le 16 avril 2024 et le délibéré au 17 juin 2024, délibéré prorogé au 2 juillet 2024.

MOTIFS DE LA DÉCISION

SUR LES DEMANDES PRINCIPALES

L'article 1303 du code civil dispose : 'En dehors des cas de gestion d'affaires et de paiement de l'indu, celui qui bénéficie d'un enrichissement injustifié au détriment d'autrui doit, à celui qui s'en trouve appauvri, une indemnité égale à la moindre des deux valeurs de l'enrichissement et de l'appauvrissement'.

Selon l'article 1303-1 de ce code, 'L'enrichissement est injustifié lorsqu'il ne procède ni de l'accomplissement d'une obligation par l'appauvri ni de son intention libérale'.

En l'espèce, le tribunal a jugé à bon droit que les travaux d'embellissement financés, voire réalisés par Madame [X] dans le bien immobilier appartenant à Monsieur [U] constituent sa participation normale aux charges de la vie commune dès lors qu'elle a bénéficié d'un logement pendant 7 années sans devoir supporter la charge d'un loyer ni le remboursement d'un crédit immobilier.

Il en va différemment du financement par Madame [X] des travaux concernant la cheminée à hauteur de 8940 euros (et non 8490 euros comme indiqué par Monsieur [U]), ainsi que de ceux concernant des portes et fenêtres pour un montant de 15600 euros, soit un montant total de 24540 euros (et non 24090 euros comme retenu par Monsieur [U]).

En réglant ces sommes, Madame [X] s'est appauvrie. Quant à Monsieur [U], il a bénéficié d'un enrichissement du fait de l'amélioration de son bien immobilier et de l'augmentation corrélative de sa valeur.

Il résulte des écritures des parties et des pièces produites que cet enrichissement de Monsieur [U], lequel est évalué au regard des éléments du dossier à la somme de 24540 euros, ne procédait pas d'une intention libérale de Madame [X].

En outre, il ne procède pas davantage de l'accomplissement d'une obligation par Madame [X] en ce que de telles dépenses excèdent tant par leur nature que par leur montant la participation normale d'un concubin aux charges de la vie commune.

Il n'y a pas lieu de tenir compte du coût de la cuisine équipée et des meubles de salle de bains, Madame [X] faisant état de leur retrait dans son courrier du 19 août 2020.

Cependant, il convient de déduire du montant de 24540 euros la somme de 12000 euros que Madame [X] reconnaît avoir prélevé sur le compte dédié aux travaux après sinistre.

En conséquence, le jugement sera infirmé en ce qu'il a condamné Monsieur [U] à payer à Madame [X] la somme de 24090 euros avec intérêts au taux légal à compter du 19 août 2020. Statuant à nouveau, Monsieur [U] sera condamné à payer à Madame [X] la somme de 12540 euros avec intérêts au taux légal à compter du 19 août 2020.

SUR LES DÉPENS ET L'ARTICLE 700 DU CODE DE PROCÉDURE CIVILE

Monsieur [U] succombe dans son recours en ce qu'il sollicitait le rejet total des demandes de Madame [X].

En conséquence, le jugement sera confirmé en ce qu'il l'a condamné aux dépens et à payer à Madame [X] la somme de 1500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Y ajoutant, Monsieur [U] sera condamné aux dépens d'appel, à payer à Madame [X] la somme de 1500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile pour la procédure d'appel et il sera débouté de sa propre demande présentée sur ce même fondement.

PAR CES MOTIFS,

LA COUR, statuant par arrêt contradictoire et en dernier ressort, prononcé publiquement, par mise à disposition au greffe,

Infirme le jugement rendu par le tribunal judiciaire d'Épinal le 31 janvier 2023 en ce qu'il a condamné Monsieur [E] [U] à payer à Madame [S] [X] la somme de 24090 euros avec intérêts au taux légal à compter du 19 août 2020 ;

Statuant à nouveau de ce chef et y ajoutant,

Condamne Monsieur [E] [U] à payer à Madame [S] [X] la somme de 12540 euros (DOUZE MILLE CINQ CENT QUARANTE EUROS) avec intérêts au taux légal à compter du 19 août 2020 ;

Condamne Monsieur [E] [U] à payer à Madame [S] [X] la somme de 1500 euros (MILLE CINQ CENTS EUROS) au titre de l'article 700 du code de procédure civile pour la procédure d'appel ;

Déboute Monsieur [E] [U] de sa demande formée sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne Monsieur [E] [U] aux dépens d'appel.

Le présent arrêt a été signé par Monsieur FIRON, Conseiller, en remplacement de Madame CUNIN-WEBER, Présidente de la première chambre civile de la Cour d'Appel de NANCY, régulièrement empêchée, et par Madame PERRIN, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Signé : C. PERRIN.- Signé : J.-L. FIRON.-

Minute en cinq pages.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Nancy
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 23/00467
Date de la décision : 02/07/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 08/07/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-07-02;23.00467 ?
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