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25/06/2024 | FRANCE | N°24/00008

France | France, Cour d'appel de Nancy, Chambre sociale-1ère sect, 25 juin 2024, 24/00008


ARRÊT N° /2024

SS



DU 25 JUIN 2024



N° RG 24/00008 - N° Portalis DBVR-V-B7I-FJK6







Pole social du TJ de CHALONS-EN-

CHAMPAGNE

23/00160

15 décembre 2023











































COUR D'APPEL DE NANCY

CHAMBRE SOCIALE

SECTION 1









APPELANT :



Monsieur [D] [T]

Chez Madame [I]

[Adre

sse 1]

[Localité 4]

Comparant

Représenté par Me Emmanuel LUDOT, avocat au barreau de REIMS









INTIMÉE :



MDPH DE LA MARNE prise en la personne de son représentant légal pour ce domicilié au siège social

[Adresse 2]

[Adresse 5]

[Localité 3]

Ni comparante ni représentée









COMPOSITION DE LA COUR :



...

ARRÊT N° /2024

SS

DU 25 JUIN 2024

N° RG 24/00008 - N° Portalis DBVR-V-B7I-FJK6

Pole social du TJ de CHALONS-EN-

CHAMPAGNE

23/00160

15 décembre 2023

COUR D'APPEL DE NANCY

CHAMBRE SOCIALE

SECTION 1

APPELANT :

Monsieur [D] [T]

Chez Madame [I]

[Adresse 1]

[Localité 4]

Comparant

Représenté par Me Emmanuel LUDOT, avocat au barreau de REIMS

INTIMÉE :

MDPH DE LA MARNE prise en la personne de son représentant légal pour ce domicilié au siège social

[Adresse 2]

[Adresse 5]

[Localité 3]

Ni comparante ni représentée

COMPOSITION DE LA COUR :

Lors des débats, sans opposition des parties

Président : Monsieur BRUNEAU

Siégeant en conseiller rapporteur

Greffier : Madame PAPEGAY (lors des débats)

Lors du délibéré,

En application des dispositions de l'article 945-1 du Code de Procédure Civile, l'affaire a été débattue en audience publique du 14 Mai 2024 tenue par Monsieur BRUNEAU, magistrat chargé d'instruire l'affaire, qui a entendu les plaidoiries, les avocats ne s'y étant pas opposés, et en a rendu compte à la Cour composée de Guerric HENON, président, Dominique BRUNEAU et Catherine BUCHSER-MARTIN, conseillers, dans leur délibéré pour l'arrêt être rendu le 25 Juin 2024 ;

Le 25 Juin 2024, la Cour après en avoir délibéré conformément à la Loi, a rendu l'arrêt dont la teneur suit :

Faits, procédure, prétentions et moyens

Le 6 décembre 2022, M. [T] a sollicité de la maison départementale des personnes handicapées de la Marne (ci-après dénommée la MDPH) l'attribution de l'allocation aux adultes handicapés (AAH).

Par décision du 9 mars 2023, la commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées de la MDPH de la Marne (ci-après dénommée la CDAPH), après évaluation de sa situation, a rejeté sa demande, son taux d'incapacité ressortant à moins de 50 %.

M. [D] [T] a contesté cette décision par la voie amiable le 5 avril 2023 et, par décision du 10 juillet 2023, la CDAPH, après nouvelle évaluation de sa situation, a confirmé la décision initiale pour le même motif.

Le 5 septembre 2023, M. [D] [T] a contesté cette décision devant le pôle social du tribunal judiciaire de [Localité 6].

Le tribunal, par jugement du 15 décembre 2023, après consultation médicale réalisée à l'audience du 17 novembre 2023, a :

- reçu le recours formé le 5 septembre 2023 par M. [D] [T],

- dit qu'à la date du 6 décembre 2022, M. [D] [T], qui présentait un taux d'incapacité compris entre 50 et 79 % mais qui n'était pas atteint d'une restriction substantielle et durable pour l'accès à l'emploi, n'avait pas droit à l'allocation aux adultes handicapés,

- rappelé que les frais de la consultation médicale non compris dans les dépens restent à la charge de l'organisme social visé à l'article L 221-1 du Code de la sécurité sociale, à savoir la Caisse nationale de l'assurance maladie,

- laissé les éventuels dépens à la charge de l'organisme défendeur,

- ordonné l'exécution provisoire de la présente décision.

Par acte du 28 décembre 2023, M. [D] [T] a relevé appel de ce jugement.

Suivant ses conclusions notifiées par RPVA le 22 février 2024, M. [D] [T] demande à la cour :

- le juger recevable et bien fondé en son appel,

- infirmer le jugement rendu entre les parties par le pôle social du tribunal judiciaire de [Localité 6] en date du 15 décembre 2023 en toutes ses dispositions, soit en ce qu'il a :

- Reçu le recours formé le 5 septembre 2023 par M. [D] [T],

- Dit qu'à la date du 6 décembre 2022, M. [D] [T], qui présentait un taux d'incapacité compris entre 50 et 79 % mais qui n'était pas atteint d'une restriction substantielle et durable pour l'accès à l'emploi, n'avait pas droit à l'allocation aux adultes handicapés,

- Rappelé que les frais de la consultation médicale non compris dans les dépens restent à la charge de l'organisme social visé à l'article L 221-1 du Code de la sécurité sociale, à savoir la Caisse nationale de l'assurance Maladie,

- Laissé les éventuels dépens à la charge de l'organisme défendeur,

- Ordonné l'exécution provisoire de la présente décision.

Et statuant à nouveau,

- annuler la décision de rejet de la réclamation de M. [D] [T] du 6 décembre 2022 et la décision de rejet de son recours administratif préalable, en ce qu'elles sont entachées tant d'un vice de forme que d'un vice de fond,

- lui octroyer un taux d'incapacité supérieur ou égal à 80 % et ce, avec toutes conséquences de droit, telles que relatives, notamment à la perception de l'AAH,

- condamner la MDPH de [Localité 6] aux entiers dépens, dont distraction est requise au profit de Me Emmanuel LUDOT, Avocat aux offres de droit,

- débouter la MDPH de [Localité 6] de toutes ses demandes, fins et conclusions.

Suivant ses conclusions reçues au greffe le 2 avril 2024, la MDPH demande à la cour de confirmer la décision rendue la 31 octobre 2023 par le tribunal judiciaire de Reims.

Pour l'exposé des moyens des parties, il convient de faire référence aux conclusions sus mentionnées, reprises oralement à l'audience ou invoquées par les parties dispensées de comparution.

Motifs

1/ Sur le moyen pris de vide de forme et de fond entachant les décisions administratives et de rejet de recours préalables

L'intéressé fait valoir que la CDAPH et la MDPH ont tout simplement omis de mentionner les voies et délais de recours contre leurs décisions aux termes de celles-ci et que cela constitue un vice de forme non négligeable, puisque cette obligation d'indication des voies et délais de recours contre de telles décisions fait office de garantie de transparence et participe du respect des principes généraux de bonne administration de la justice et du droit d'accès au juge.

Cependant l'absence de mention des voies de recours à la supposer établie a pour seule conséquence de ne pas faire courir ces délais et ne saurait entrainer l'annulation de ces décisions qui ne se confondent pas avec les conditions de notifications de celles-ci.

L'intéressé fait encore valoir que les décisions de la CDAPH et de la MDPH critiquées, procèdent d'une motivation particulièrement lacunaire, tant en droit qu'en fait, mais également, tout à fait injustifiée au regard des pièces médicales produites aux termes du présent recours et ce, au mépris des dispositions des articles L. 211-2 et suivants du Code des relations entre le public et l'administration, aux termes desquelles cette obligation de motivation est exigée en la matière.

Cependant, le moyen est en tout état de cause inopérant dès lors qu'il n'est pas dans l'office de la présente juridiction de se prononcer sur la régularité des décisions prises mais bien sur le litige qui lui est soumis et qu'à supposer même l'hypothèse d'une annulation des décisions de rejet contestées, celle-ci ne saurait avoir pour effet de justifier du bien fondé de la demande formée par l'intéressé, laquelle procède de l'examen de la réunion des conditions de fait et de droit qui lui sont applicables.

2/ Sur le bien fondé de la demande d'attribution de l'AAH'

Il résulte de la combinaison des articles L.821-1, L.821-2 et D.821-1 du code de la sécurité sociale que le bénéfice d'une allocation à adulte handicapé (AHH) est reconnu à toute personne dont le taux d'incapacité permanente est au moins égal à 80 % ou dont le taux d'incapacité permanente est compris entre 50 et 79 % avec reconnaissance, compte tenu de son handicap, d'une restriction substantielle et durable d'accès à l'emploi (RSDAE). Le pourcentage d'incapacité est apprécié d'après le guide barème pour l'évaluation des déficiences et incapacités des personnes handicapées figurant à l'annexe 2-4 du code de l'action sociale et des familles, lequel définit trois classes de taux d'incapacité :

- un taux inférieur à 50 % correspond à une incapacité modérée n'entraînant pas d'entrave notable dans la vie quotidienne de la personne,

- un taux de 50% correspond à des troubles importants entraînant une gêne globale dans la vie sociale de la personne. L'entrave peut soit être concrètement repérée dans la vie de la personne, soit compensée afin que cette vie sociale soit préservée mais au prix d'efforts importants ou de la mobilisation d'une compensation spécifique. Toutefois, l'autonomie est conservée pour les actes élémentaires de la vie quotidienne,

- un taux d'au moins 80% correspond à des troubles graves entraînant une entrave majeure dans la vie quotidienne de la personne avec une atteinte de son autonomie individuelle. Cette autonomie individuelle est définie comme l'ensemble des actions que doit mettre en 'uvre une personne, vis-à-vis d'elle-même, dans la vie quotidienne. Dès lors qu'elle doit être aidée totalement ou partiellement ou surveillée dans leur accomplissement ou ne les assure qu'avec les plus grandes difficultés, le taux de 80% est atteint. C'est également le cas lorsqu'il y a déficience sévère avec abolition d'une fonction.

Si sans atteindre ce taux, il est reconnu une RSDAE à une personne dont le taux d'incapacité est situé entre 50 % et 79 %, cette dernière peut prétendre aux avantages consentis aux personnes handicapées présentant un taux supérieur.

L'article D.821-1-2 du code de la sécurité sociale précise que la RSDAE subie par une personne handicapée qui demande à bénéficier de l'AAH est appréciée ainsi qu'il suit :

1° La restriction est substantielle lorsque le demandeur rencontre, du fait de son handicap même, des difficultés importantes d'accès à l'emploi. A cet effet, sont à prendre en considération :

a) Les déficiences à l'origine du handicap ;

b) Les limitations d'activités résultant directement de ces mêmes déficiences ;

c) Les contraintes liées aux traitements et prises en charge thérapeutiques induits par le handicap ;

d) Les troubles qui peuvent aggraver ces déficiences et ces limitations d'activités.

Pour apprécier si les difficultés importantes d'accès à l'emploi sont liées au handicap, elles sont comparées à la situation d'une personne sans handicap qui présente par ailleurs les mêmes caractéristiques en matière d'accès à l'emploi.

2° La restriction pour l'accès à l'emploi est dépourvue d'un caractère substantiel lorsqu'elle peut être surmontée par le demandeur au regard :

a) Soit des réponses apportées aux besoins de compensation mentionnés à l'article L.114-1-1 du code de l'action sociale et des familles qui permettent de faciliter l'accès à l'emploi sans constituer des charges disproportionnées pour la personne handicapée ;

b) Soit des réponses susceptibles d'être apportées aux besoins d'aménagement du poste de travail de la personne handicapée par tout employeur au titre des obligations d'emploi des handicapés sans constituer pour lui des charges disproportionnées ;

c) Soit des potentialités d'adaptation dans le cadre d'une situation de travail.

3° La restriction est durable dès lors qu'elle est d'une durée prévisible d'au moins un an à compter du dépôt de la demande d'allocation aux adultes handicapés, même si la situation médicale du demandeur n'est pas stabilisée. La restriction substantielle et durable pour l'accès à l'emploi est reconnue pour une durée de un à cinq ans.

4° Pour l'application du présent article, l'emploi auquel la personne handicapée pourrait accéder s'entend d'une activité professionnelle lui conférant les avantages reconnus aux travailleurs par la législation du travail et de la sécurité sociale.

5° Sont compatibles avec la reconnaissance d'une RSDAE :

a) L'activité à caractère professionnel exercée en milieu protégé par un demandeur admis au bénéfice de la rémunération garantie mentionnée à l'article L.243-4 du code de l'action sociale et des familles ;

b) L'activité professionnelle en milieu ordinaire de travail pour une durée de travail inférieure à un mi-temps, dès lors que cette limitation du temps de travail résulte exclusivement des effets du handicap du demandeur ;

c) Le suivi d'une formation professionnelle spécifique ou de droit commun, y compris rémunérée, résultant ou non d'une décision d'orientation prise par la commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées mentionnée à l'article L.241-5 du code de l'action sociale et des familles.

L'intéressé fait valoir qu'il est atteint de Diabète sucré insulino-dépendant avec complications multiples (notamment un AVC et une gangrène humide), et a subi plusieurs interventions chirurgicales particulièrement lourdes telles que des amputations'; que les gestes du quotidien sont particulièrement pénibles (toilette, cuisine, impossibilité de porter des charges lourdes, difficulté à de saisir d'objets, marche douloureuse et instable, douleurs au pied gauche que ce soit en station debout et assise, nécessité de conduire un véhicule adapté, etc.)'; qu'il est dépendant d'aides techniques (notamment d'une canne/béquille et de chaussures orthopédiques), et se trouve en arrêt de travail depuis près d'un an à ce jour et qu'il ne pourra plus retravailler en raison de son état de santé particulièrement dégradé,'; qu'il s'est vu attribuer la Carte mobilité inclusion Mention priorité, la Carte mobilité inclusion Mention Stationnement, ainsi que la RQTH sans limitation de durée. Il précise que les pièces médicales et photographies jointes au présent recours, de même que l'ordonnance de référé du Tribunal administratif de [Localité 6], laquelle désigne un expert médical, confirment l'état de santé des plus précaires, ainsi que les traitements et soins médicamenteux, interventionnels et chirurgicaux, extrêmement lourds, que ce dernier a été ou est toujours contraint de subir, de même que les conséquences de cet état de santé sur son quotidien. Force est de constater, dans les circonstances sus rappelées et en l'état des pièces produites au soutien du présent recours, que l'état de santé de Monsieur [T], lequel influe de manière particulièrement importante sur sa vie quotidienne, n'a manifestement pas été examiné dans toute son ampleur, ni dans toutes ses composantes et conséquences, que la forme sévère ou majeure de handicap, correspondant au taux de 80 à 95 % (annexe 2-4 du Code de l'action sociale et des familles), est malheureusement atteinte le concernant.

Cependant, il convient de relever que le certificat médical joint à la demande, pour mettre en évidence de multiples pathologies invalidantes ne présentent pas un caractère d'importance tel qu'elle entraine une entrave majeure dans la vie quotidienne de la personne avec une atteinte de son autonomie individuelle dès lors que ces éléments permettent de mettre en évidence une autonomie pour les actes de la vie quotidienne pour l'entretien personnel, de gestion de soins, préparation des repas, exécution des tâches ménagères et que s'il relève une limitation dans les déplacements, avec un périmètre de marche de 100m, ceux-ci restent possibles. Cette appréciation s'est trouvée corroborée par les constatations et l'avis du médecin consultant désigné par le premier juge.

Il ne saurait en conséquence être considéré que l'état de l'intéressé justifiait d'un taux d'incapacité permanente au sens des dispositions précités d'au moins 80% à la date de la demande, les éléments médicaux postérieurs ne pouvant être pris en considération, de sorte que le taux retenu par le premier juge apparait justifié.

Il s'ensuit que dès lors qu'il n'est ni invoqué ni allégué d'éléments de nature à justifier d'une restriction substantielle et durable d'accès à l'emploi, il convient de confirmer le jugement entrepris.

3/ Sur les mesures accessoires

M.[T] qui succombe sera condamné aux dépens selon les conditions précisées au dispositif du présent arrêt par application combinée des articles 11 et 17 du décret n° 2018-928 du 29 octobre 2018 et 696 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La Cour, chambre sociale, statuant contradictoirement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, après débats en audience publique et après en avoir délibéré,

Confirme le jugement du pôle social du tribunal judiciaire de Châlons en Champagne du 15 décembre 2023';

Condamne M. [T] aux dépens.

Ainsi prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Et signé par monsieur Guerric HENON, président de chambre et par madame Laurène RIVORY, greffier.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT DE CHAMBRE

Minute en six pages


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Nancy
Formation : Chambre sociale-1ère sect
Numéro d'arrêt : 24/00008
Date de la décision : 25/06/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 01/07/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-06-25;24.00008 ?
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