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25/06/2024 | FRANCE | N°23/02546

France | France, Cour d'appel de Nancy, Chambre sociale-1ère sect, 25 juin 2024, 23/02546


ARRÊT N° /2024

SS



DU 25 JUIN 2024



N° RG 23/02546 - N° Portalis DBVR-V-B7H-FI36







Pole social du TJ de NANCY

21/239

09 novembre 2023











































COUR D'APPEL DE NANCY

CHAMBRE SOCIALE

SECTION 1









APPELANTE :



Madame [N] [B]

demeurant [Adresse 1]

[Localité 2]


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INTIMÉE :



CPAM DE MEURTHE ET MOSELLE prise en la personne de son représentant légal pour ce domicilié au siège social

ayant son siège [Adresse 3]

[Localité 2]



Représentée par Madame [H] [E], régulièrement munie d'un pouvoir de...

ARRÊT N° /2024

SS

DU 25 JUIN 2024

N° RG 23/02546 - N° Portalis DBVR-V-B7H-FI36

Pole social du TJ de NANCY

21/239

09 novembre 2023

COUR D'APPEL DE NANCY

CHAMBRE SOCIALE

SECTION 1

APPELANTE :

Madame [N] [B]

demeurant [Adresse 1]

[Localité 2]

Représentée par Monsieur [T] [B], régulièrement muni d'un pouvoir de représentation

INTIMÉE :

CPAM DE MEURTHE ET MOSELLE prise en la personne de son représentant légal pour ce domicilié au siège social

ayant son siège [Adresse 3]

[Localité 2]

Représentée par Madame [H] [E], régulièrement munie d'un pouvoir de représentation

COMPOSITION DE LA COUR :

Lors des débats, sans opposition des parties

Président : Madame Catherine BUCHSER-MARTIN

Siégeant en conseiller rapporteur

Greffier : Madame Céline PAPEGAY (lors des débats)

Lors du délibéré,

En application des dispositions de l'article 945-1 du Code de Procédure Civile, l'affaire a été débattue en audience publique du 15 Mai 2024 tenue par Madame BUCHSER-MARTIN, magistrat chargé d'instruire l'affaire, qui a entendu les plaidoiries, les avocats ne s'y étant pas opposés, et en a rendu compte à la Cour composée de Guerric HÉNON, président, Dominique BRUNEAU et Catherine BUCHSER-MARTIN, conseillers, dans leur délibéré pour l'arrêt être rendu le 25 Juin 2024 ;

Le 25 Juin 2024, la Cour après en avoir délibéré conformément à la Loi, a rendu l'arrêt dont la teneur suit :

FAITS ET PROCÉDURE

Madame [N] [B] a le statut de travailleur indépendant et perçoit une pension d'invalidité.

Elle a bénéficié d'un arrêt de travail du 26 novembre 2020 au 15 décembre 2020.

Par décision du 20 mai 2021, la caisse a refusé d'indemniser son arrêt de travail au motif que son statut de travailleur indépendant ne lui permet pas de cumuler pension d'invalidité et indemnités journalières.

Le 3 juin 2021, madame [N] [B] a contesté cette décision devant la commission de recours amiable de la caisse.

Par décision du 2 juillet 2021, ladite commission a rejeté son recours.

Le 30 août 2021, madame [N] [B] a contesté cette décision devant le pôle social du tribunal judiciaire de Nancy.

Par jugement du 26 octobre 2022, le pôle social du tribunal judiciaire de Nancy a transmis à la Cour de cassation la question prioritaire de constitutionnalité soulevée par madame [N] [B] dans ces termes : « Plaise au Conseil d'Etat de prendre acte de la question prioritaire de constitutionnalité portant sur les dispositions de l'article D. 622-2 du code de la sécurité sociale pour violation du principe d'égalité et du principe de non-discrimination ».

Par arrêt du 12 janvier 2023, la Cour de cassation a déclaré la question prioritaire de constitutionnalité irrecevable, s'agissant d'une disposition réglementaire.

Par courrier du 4 août 2023, le défenseur des droits, saisi par madame [N] [B], après contact avec la Caisse nationale d'assurance maladie, lui a indiqué que les éléments du dossier n'étaient pas de nature à lui permettre d'intervenir plus, les dispositions de l'article D. 622-2 1° du code de la sécurité sociale ne paraissant pas être fondées sur des critères prohibés par des normes législatives, européennes ou internationales.

Par jugement RG 21/239 du 9 décembre 2023, le pôle social du tribunal judiciaire de Nancy a :

- débouté madame [N] [B] de ses demandes,

- confirmé la décision de la commission de recours amiable de la CPAM de Meurthe-et-Moselle du 2 juillet 2021,

- dit n'y avoir lieu à octroyer à madame [N] [B] le bénéfice des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné madame [N] [B] aux entiers frais et dépens.

Par acte du 4 décembre 2023, madame [N] [B] a interjeté appel à l'encontre de ce jugement.

L'affaire a été plaidée à l'audience du 15 mai 2024.

PRETENTIONS DES PARTIES

Madame [N] [B], dûment représentée, a repris ses écritures reçues au greffe les 4 décembre 2023 et 29 avril 2024, et a sollicité ce qui suit :

- déclarer recevable et bien fondée madame [B] [N] en son appel de la décision rendue le 9 novembre 2023 par le tribunal judiciaire de Nancy - contentieux de la sécurité sociale et de l'aide sociale

Y faisant droit,

- procéder à la réformation dans sa totalité du jugement sus énoncé et daté

Et statuant à nouveau,

1/- Confirmer qu'en l'absence de l'article D. 621-4 du code de la sécurité sociale, l'allégation de la CPAM, sans fondement, est nulle et invalide, que la CPAM n'a pas apporté à l'assurée tous les textes applicables

- constater, confirmer et sanctionner le non-respect de l'article D. 621-4 du code de la sécurité sociale

2/- dire, reconnaitre et confirmer le manquement d'information et l'impéritie de la CPAM, ainsi que l'ambiguïté et l'arbitraire du juge, confirmer et sanctionner l'usage de faux

3/- demander à la CPAM d'intervenir auprès du CPSTI en vue de la modification ou de l'adaptation du code de la sécurité sociale

4/- condamner la CPAM au remboursement des cotisations indûment perçues pour un montant de 3 030,45 6 + intérêts

5/- condamner la CPAM au paiement de dommages et intérêts

- 1200 € en réparation du préjudice économique

- 1500 € en réparation du préjudice moral

6/- condamner la CPAM à régler à l'assurée Mme [B] [N], la somme de 750 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile

7/- constater et confirmer le non-respect de l'article 5 du code de procédure civile.

La caisse primaire d'assurance maladie de Meurthe-et-Moselle, dument représentée, a repris ses conclusions reçues au greffe le 23 avril 2024 et a sollicité ce qui suit :

- déclarer irrecevable car sans objet le recours de madame [N] [B]

A défaut,

- le déclarer mal fondé

- confirmer en toutes ses dispositions le jugement rendu le 9 novembre 2023 par le pôle social du tribunal judiciaire de Nancy

- déclarer irrecevables les demandes de madame [N] [B]

A défaut,

- débouter madame [N] [B] de l'ensemble de ses demandes

En tout état de cause,

- condamner madame [N] [B] à verser à la CPAM de Meurthe-et-Moselle la somme de 500 euros au titre de dommages et intérêts

- condamner madame [N] [B] à verser à la CPAM de Meurthe-et-Moselle la somme de 750 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Pour l'exposé des moyens des parties, il convient de faire référence aux conclusions sus mentionnées, reprises oralement à l'audience.

L'affaire a été mise en délibéré au 25 juin 2024 par mise à disposition au greffe par application des dispositions de l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile.

SUR CE, LA COUR

Si le litige porte sur la question du non-cumul d'une pension d'invalidité et d'indemnités journalières, il résulte des conclusions de madame [N] [B], reprises à l'audience, qu'elle ne conteste plus le refus de versement d'indemnités journalières au titre de son arrêt de travail du 26 novembre 2020 au 15 décembre 2020, mais qu'elle sollicite :

- la condamnation de la caisse au remboursement de cotisation d'un montant de 3030,45 € en principal outre les intérêts + intérêts

- la condamnation de la caisse à lui verser la somme de 1 200 € au titre de son préjudice économique et la somme de 1500 € au titre de son préjudice moral

Si elle sollicite en outre de la cour qu'elle demande « à la CPAM d'intervenir auprès du CPSTI en vue de la modification ou de l'adaptation du code de la sécurité sociale », cette demande n'est à l'évidence pas une prétention au sens de l'article 4 du code de procédure civile et il n'y a pas lieu de statuer sur ce point.

Sur la demande de dommages-intérêts

Aux termes de l'article 1240 du code civil, tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer.

La mise en 'uvre de la responsabilité d'une personne suppose dès lors la preuve d'une faute à sa charge, d'un préjudice subi par la victime et l'existence d'un lien de causalité entre la faute et le préjudice.

Par ailleurs, aux termes de l'article R112-2 du code de la sécurité sociale, avec le concours des organismes de sécurité sociale, le ministre chargé de la sécurité sociale prend toutes mesures utiles afin d'assurer l'information générale des assurés sociaux.

Enfin, aux termes de l'article D622-2 du code de la sécurité sociale, dans sa version applicable au litige, sont exclues du bénéfice des prestations en espèces prévues à l'article L. 622-1 les assurés mentionnés au même article lorsqu'ils bénéficient : 1° D'une pension attribuée en cas d'invalidité totale ou partielle prévue à l'article L. 632-1 ; 2° D'une prestation d'assurance vieillesse prévue à l'article L. 634-2. 3° des indemnités journalières prévues, en cas de maternité, paternité, d'accueil de l'enfant et d'adoption, à l'article L. 623-1.

Aux termes de l'article D621-4 du même code, dans sa version applicable au litige, les cotisations prévues aux articles D. 621-1 et D. 621-2 cessent d'être dues : -pour les personnes qui entrent en jouissance d'une allocation ou pension de retraite, à compter de la date de la cessation définitive de toute activité non salariée non agricole ; -pour les personnes entrant en jouissance d'une pension d'invalidité, à compter de la date d'attribution de cet avantage.

En l'espèce, madame [N] [B] fait grief à la caisse de lui avoir demandé de lui fournir un bulletin de salaire alors qu'elle est travailleur indépendant, de n'avoir pas expliqué son refus de verser des indemnités journalières, de courriers faisant référence à des textes erronés ou d'allégations non accompagnées des textes applicables, de l'absence de réponse quant à l'interprétation de l'article D622-2 qui exclut les travailleurs indépendants, d'une présentation fausse de l'article D622-2 et de l'absence de communication de l'article D621-4 du code de la sécurité sociale. Elle ajoute que les organismes de sécurité sociale sont tenus d'une obligation d'information à l'égard des assurés, qui disposent d'un droit personnel à l'égard de la caisse en matière d'information. Elle précise que les trop nombreuses erreurs et l'absence de l'information demandée l'ont induite en erreur et l'ont conduite à engager des démarches lourdes, longues et inutiles.

La caisse fait valoir que lorsqu'un travailleur indépendant perçoit une pension d'invalidité attribuée au titre de cette activité, il ne cotise plus au risque maladie et n'a dès lors plus droit aux indemnités journalières du risque maladie, les textes à cet égard étant parfaitement clairs. Elle ajoute qu'elle n'a pas failli à son obligation d'information puisqu'elle a clairement motivé et explicité sa décision et n'a pas à porter à la connaissance de l'assurée des textes qui ne la concernent pas. Elle précise qu'elle n'a pas d'obligation de conseil et que les cotisations sociales relèvent de la compétence de l'URSSAF.

Si les organismes de sécurité sociale ont une obligation générale d'information, dont le manquement est de nature à engager leur responsabilité et justifier l'allocation de dommages intérêts, cette obligation ne leur impose que de répondre aux demandes qui leur sont soumises et non de prendre l'initiative de les renseigner ou de porter à leur connaissance des textes publiés au journal officiel de la République française.

Madame [B] fait principalement grief à la caisse de ne pas lui avoir suffisamment explicité sa décision de refus de versement des indemnités journalières et de ne pas avoir attiré son attention sur le texte de l'article D621-4.

Cependant, la décision de la caisse est suffisamment motivée puisqu'elle précise que l'assurée ne peut cumuler le versement d'indemnités journalières avec celui d'une pension d'invalidité versée au titre de son activité de travailleur indépendant.

Ce motif de refus est juridiquement exact et aucune disposition ne contraint la caisse à citer le texte sur lequel elle se fonde, à savoir en l'espèce l'article D622-2 du code de la sécurité sociale, qui a néanmoins été rappelé par la commission de recours amiable et dans divers mails adressés à l'assurée, et qui est disponible par simple consultation du code de la sécurité sociale.

Par ailleurs, madame [B] fait grief à la caisse de ne pas l'avoir informée des dispositions de l'article D621-4 du code de la sécurité sociale.

Ce texte est relatif aux cotisations et non aux prestations, et c'est à juste titre que la caisse n'en a pas fait état puisque ni le calcul, ni l'appel, ni la perception des cotisations ne relèvent de sa compétence. Là encore, ce texte est disponible par consultation du code de la sécurité sociale et la caisse n'avait aucune obligation de le communiquer à l'assurée.

Enfin, les autres griefs articulés par madame [B] à l'encontre de la caisse, notamment le fait de lui avoir demandé un bulletin de salaire alors qu'elle ne peut en disposer, sont sans emport, cette maladresse de la caisse n'étant en aucun cas fautive.

Au vu de ce qui précède, aucune faute ne peut être retenue à la charge de la caisse et madame [N] [B] sera déboutée de sa demande de dommages-intérêts.

Sur la demande de remboursement de cotisations

Madame [N] [B] sollicite de la caisse « ou de l'URSSAF » le remboursement des cotisations qu'elle aurait payées à tort puisqu'elle aurait dû en être exonérée par application de l'article D621-4 du code de la sécurité sociale.

Le remboursement de cotisations prétendument indues ne pouvant être sollicité qu'auprès de l'organisme qui les a perçues, et madame [B] n'ayant versé aucune cotisation à la caisse primaire d'assurance maladie de Meurthe et Moselle, elle sera déboutée de sa demande à l'égard de la caisse.

Par ailleurs, sa demande de remboursement diligentée, dans les motifs de ses conclusions, à l'encontre de l'URSSAF sera déclarée irrecevable, ledit organisme n'étant pas partie à la procédure

Sur la demande reconventionnelle en dommages-intérêts

Aux termes de l'article 559 du code de procédure civile, en cas d'appel principal dilatoire ou abusif, l'appelant peut être condamné à une amende civile d'un maximum de 10 000 euros, sans préjudice des dommages-intérêts qui lui seraient réclamés.

En l'espèce, la caisse fait valoir que la procédure est abusive puisque madame [B] ne conteste plus le refus initial opposé par la caisse, mais qu'elle ne l'accepte pas dans son principe. Elle ajoute que l'assurée demande à la cour de reconnaître l'impéritie de la caisse de telle sorte que la procédure est abusive compte tenu du but recherché.

Madame [N] [B] évoque « l'incurie évidente » de la caisse, son ressentiment et son indécence, et ses revenus.

Si l'appel de madame [B] était manifestement partiellement voué à l'échec, en ce qu'elle a pris prétexte de la procédure pour manifester son opposition à la législation en vigueur, sa mauvaise foi ou son intention de nuire ne sont pas démontrées, même si la virulence des termes qu'elle emploie à l'égard de la caisse, qui a parfaitement appliqué les dispositions légales en vigueur et rempli son devoir d'information, est pour le moins regrettable.

La caisse sera dès lors déboutée de sa demande de dommages-intérêts pour procédure abusive.

Sur les frais irrépétibles et les dépens

Madame [N] [B] qui succombe sera déboutée de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile et condamnée aux dépens de la procédure d'appel.

Par ailleurs, il n'est pas inéquitable de laisser à la charge de la caisse primaire d'assurance maladie de Meurthe et Moselle l'intégralité des frais irrépétibles qu'elle a exposés de telle sorte qu'elle sera déboutée de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Le jugement sera confirmé en ce qu'il a condamné madame [N] [B] aux dépens de première instance.

PAR CES MOTIFS

La Cour, chambre sociale, statuant par arrêt contradictoire mis à disposition au greffe, après débats en audience publique et après en avoir délibéré,

CONFIRME le jugement RG 21/239 du 9 novembre 2023 du pôle social du tribunal judiciaire de Nancy en toutes ses dispositions,

Y ajoutant,

DECLARE irrecevable la demande de madame [N] [B] formée à l'encontre de l'URSSAF,

DEBOUTE madame [N] [B] du surplus de ses demandes,

DEBOUTE les parties de leurs demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNE madame [N] [B] aux entiers dépens d'appel.

Ainsi prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Et signé par monsieur Guerric HÉNON, président de chambre et par Céline PAPEGAY, greffier.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT DE CHAMBRE

Minute en sept pages


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Nancy
Formation : Chambre sociale-1ère sect
Numéro d'arrêt : 23/02546
Date de la décision : 25/06/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 01/07/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-06-25;23.02546 ?
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