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20/06/2024 | FRANCE | N°23/01995

France | France, Cour d'appel de Nancy, 2ème chambre, 20 juin 2024, 23/01995


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

------------------------------------

COUR D'APPEL DE NANCY

DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE



ARRÊT N° /24 DU 20 JUIN 2024



Numéro d'inscription au répertoire général :

N° RG 23/01995 - N° Portalis DBVR-V-B7H-FHVA



Décision déférée à la cour :

Jugement du juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Nancy, R.G. n° 23/00037, en date du 04 juillet 2023,



APPELANTS :

Monsieur [U] [V],

né le [Date naissance

2] 1956 à [Localité 7] (Nigeria), domicilié [Adresse 3]

Représenté par Me Marjorie TAILLON, avocat au barreau de NANCY



Madame [K] [W] épouse [V],

née le [D...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

------------------------------------

COUR D'APPEL DE NANCY

DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE

ARRÊT N° /24 DU 20 JUIN 2024

Numéro d'inscription au répertoire général :

N° RG 23/01995 - N° Portalis DBVR-V-B7H-FHVA

Décision déférée à la cour :

Jugement du juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Nancy, R.G. n° 23/00037, en date du 04 juillet 2023,

APPELANTS :

Monsieur [U] [V],

né le [Date naissance 2] 1956 à [Localité 7] (Nigeria), domicilié [Adresse 3]

Représenté par Me Marjorie TAILLON, avocat au barreau de NANCY

Madame [K] [W] épouse [V],

née le [Date naissance 1] 1962 à [Localité 7] (Nigeria), domiciliée [Adresse 3]

Représentée par Me Marjorie TAILLON, avocat au barreau de NANCY

INTIMÉES :

La SA COFIDIS,

Société à directoire et conseil de surveillance, immatriculée au RCS de LILLE METROPOLE sous le n° 325 307 106 dont le siège social est sis [Localité 6], agissant poursuites et diligences de son représentant légal domicilié audit siège, venant aux droits de la SA GROUPE SOFEMO suite à une fusion absorption ayant effet au 1er octobre 2015

Représentée par Me Clarisse MOUTON de la SELARL LEINSTER WISNIEWSKI MOUTON LAGARRIGUE, avocat au barreau de NANCY

La SELARL [S] [N],

société d'exercice libéral à responsabilité limitée dont le siège social est [Adresse 4], ès qualité de mandataire ad'hoc de la société Philippe GIRAULT exerçant sous l'enseigne E.R.G, AFFAIRE PERSONNELLE COMMERCANT immatriculée au RCS de Lyon sous le n° 328 565 270 dont le siège social est [Adresse 5]), prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

Non représentée bien que la déclaration d'appel lui ait été signifiée à personne se déclarant habilitée par acte de Me [M] [T], commissaire de justice à LYON en date du 15 novembre 2023

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 23 Mai 2024, en audience publique devant la cour composée de :

Monsieur Francis MARTIN, président de chambre,

Madame Nathalie ABEL, conseillère,

Madame Fabienne GIRARDOT, conseillère, chargée du rapport

qui en ont délibéré ;

Greffier, lors des débats : Madame Christelle CLABAUX- DUWIQUET ;

A l'issue des débats, le président a annoncé que la décision serait rendue par mise à disposition au greffe le 20 Juin 2024, en application du deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;

ARRÊT : réputé contradictoire, rendu par mise à disposition publique au greffe le 20 Juin 2024, par Madame Christelle CLABAUX- DUWIQUET, greffier, conformément à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile ;

signé par Monsieur Francis MARTIN, président de chambre, et par Madame Christelle CLABAUX- DUWIQUET, greffier ;

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Copie exécutoire délivrée le à

Copie délivrée le à

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EXPOSE DU LITIGE

Suivant bon de commande signé le 17 septembre 2009, M. [U] [V] a confié à la société APC Philippe Girault exerçant sous l'enseigne E.R.G., dans le cadre d'un démarchage à domicile, la fourniture et l'installation avec mise en service d'un système solaire photovoltaïque avec intégration en toiture, aux fins de revente de l'électricité produite, comprenant dix modules solaires d'une puissance totale de 2 300 watts-crêtes, pour un montant de 21 833 euros TTC, financé à hauteur de 20 000 euros au moyen d'un contrat de prêt consenti à M. [U] [V] et Mme [K] [W] épouse [V] (ci-après les époux [V]) par la SA Groupe SOFEMO aux droits de laquelle vient la SA COFIDIS, suivant offre préalable signée le même jour, prévoyant un remboursement sur une durée de 180 mois au taux de 6,48 % l'an après un différé de paiement de huit mois.

Le 15 décembre 2009, M. [U] [V] a signé une attestation de livraison mentionnant que 'le bien ou la prestation objet de l'offre préalable de 20 000 euros référencée ci-dessus a été livré ou exécuté, conformément aux références portées sur l'offre préalable, sur le bon de commande et/ou la facture', et demandant que 'SOFEMO procède au décaissement de ce crédit après expiration des délais convenus'.

La première échéance du prêt est intervenue le 5 août 2010.

Les époux [V] ont produit des factures de rachat de l'électricité produite par l'installation émises par EDF sur la période du 9 avril 2014 au 8 avril 2022, correspondant à une première facture en date du 8 avril 2015.

Une procédure de liquidation judiciaire a été ouverte à l'égard de la société APC Philippe Girault par jugement du tribunal de commerce de Lyon du 22 mars 2012 et clôturée pour insuffisance d'actifs le 6 janvier 2015. La SELARL [S] [N] a été désignée en qualité de mandataire ad hoc de la société APC Philippe Girault.

Le prêt a été remboursé totalement par anticipation le 21 août 2018.

-o0o-

Par actes de commissaire de justice délivrés les 17 et 25 août 2022, les époux [V] ont fait assigner devant le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Nancy la SELARL [S] [N], ès qualités, ainsi que la SA COFIDIS venant aux droits de la SA SOFEMO, afin de voir prononcer la nullité du contrat de vente (pour dol sur la rentabilité prévisible de l'installation et irrégularités du bon de commande) et du contrat de prêt affecté, de voir priver le prêteur du remboursement du capital emprunté et de le voir condamné à leur restituer l'ensemble des sommes versées, soit 25 833 euros au titre de l'intégralité du prix de vente, outre 22 485,40 euros au titre des intérêts conventionnels et frais payés, ainsi qu'à leur verser la somme de 10 000 euros au titre de l'enlèvement de l'installation et de la remise en état de leur bien, et 5 000 euros en réparation de leur préjudice moral.

La SA COFIDIS a conclu à titre principal à l'irrecevabilité des demandes des époux [V] pour cause de prescription (l'action étant engagée plus de cinq ans après la signature du contrat et après réception des premières factures de rachat d'électricité, ainsi qu'après la signature de l'attestation de livraison et la première échéance de remboursement du prêt) et au débouté, et subsidiairement, à la restitution uniquement des intérêts perçus.

La SELARL [S] [N], ès qualités, n'a pas été représentée en première instance.

Par jugement en date du 4 juillet 2023, le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Nancy a :

- constaté la prescription de l'action en nullité des époux [V],

En conséquence,

- déclaré irrecevable ladite action en nullité,

- condamné in solidum les époux [V] à payer à la SA COFIDIS venant aux droits de la SA SOFEMO la somme de 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- débouté les époux [V] de leur demande formée au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné in solidum les époux [V] aux dépens de l'instance,

- dit n'y avoir lieu à exécution provisoire de la décision.

Le juge a retenu que les emprunteurs étaient en mesure au jour de la signature du bon de commande de connaître les irrégularités l'affectant, et que la date du 17 septembre 2009 représentait le point de départ du délai quinquennal de prescription de l'action en nullité sur ce fondement. Il a jugé que le point de départ de l'action en nullité fondée sur le dol devait être fixé au jour de la première facture de rachat de l'électricité produite par les époux [V], soit à compter du 8 avril 2015.

-o0o-

Le 20 septembre 2023, les époux [V] ont formé appel du jugement tendant à son annulation sinon à son infirmation en tous ses chefs critiqués.

Dans leurs dernières conclusions transmises le 19 décembre 2023, auxquelles il convient de se reporter pour l'exposé détaillé de leurs prétentions et moyens, les époux [V], appelants, demandent à la cour sur le fondement de l'article liminaire du code de la consommation, des anciens articles 1109 et 1116 du code civil, de l'article 16 de la loi n° 2012-354 du 14 mars 2012 de finance rectificative pour 2012, des articles L. 121-23 à L. 121-26 du code de la consommation, dans leur rédaction issue de la loi n° 93-949 du 26 juillet 1993 ainsi que de l'article L. 121-28, tel qu'issu de la loi n°2008-776 du 4 août 2008 :

- d'infirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions et en ce qu'il :

* a constaté la prescription de l'action en nullité des époux [V],

* en conséquence, a déclaré irrecevable ladite action en nullité,

* a condamné in solidum les époux [V] à payer à la SA COFIDIS venant aux droits de la SA SOFEMO la somme de 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

* a débouté les époux [V] de leur demande formée au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

* a condamné in solidum les époux [V] aux dépens de l'instance,

Statuant à nouveau et y ajoutant,

- de déclarer leurs demandes recevables et bien fondées,

- de prononcer la nullité du contrat de vente conclu avec la société APC Philippe GIRAULT exerçant sous l'enseigne E.R.G,

- de prononcer en conséquence la nullité du contrat de prêt affecté conclu avec la SA COFIDIS, venant aux droits de la SA GROUPE SOFEMO,

- de constater que la SA COFIDIS, venant aux droits de la SA GROUPE SOFEMO, a commis une faute dans le déblocage des fonds et doit être privée de sa créance de restitution du capital emprunté, et de la condamner à procéder au remboursement de l'ensemble des sommes qu'ils ont versées, au titre de l'exécution normale du contrat de prêt litigieux,

- de condamner la SA COFIDIS, venant aux droits de la SA GROUPE SOFEMO, à leur verser l'intégralité des sommes suivantes :

- 21 833 euros correspondant à l'intégralité du prix de vente de l'installation,

- 22 485,40 euros correspondant aux intérêts conventionnels et frais qu'ils ont payés à la SA COFIDIS, venant aux droits de la sa GROUPE SOFEMO, en exécution du prêt souscrit,

- 10 000 euros au titre de l'enlèvement de l'installation litigieuse et de la remise en état de l'immeuble,

- 5 000 euros au titre du préjudice moral,

- 6 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

En tout état de cause,

- de prononcer la déchéance du droit aux intérêts contractuels à l'encontre de la société SA COFIDIS, venant aux droits de la société SA GROUPE SOFEMO,

- de débouter la SA COFIDIS, venant aux droits de la SA GROUPE SOFEMO, et la société APC Philippe GIRAULT exerçant sous l'enseigne E.R.G de l'intégralité de leurs prétentions, fins et conclusions contraires,

- de condamner la SA COFIDIS, venant aux droits de la SA GROUPE SOFEMO, à supporter les dépens de l'instance.

Au soutien de leurs demandes, les époux [V] font valoir en substance :

- que le point de départ du délai de prescription doit être reporté à une date qui n'est pas celle des faits eux-mêmes fondant l'action en justice, mais celle où le titulaire du droit d'agir les a connus ou aurait dû les connaître ; que pour fixer le point de départ de la prescription d'une action en responsabilité d'un consommateur pour faute de sa banque, il convient d'observer à quel moment le créancier titulaire du droit d'agir a eu effectivement connaissance non seulement du préjudice subi - et dans toute son ampleur- ou de son aggravation (après plusieurs années de production et après la lecture du rapport d'expertise remis le 15 novembre 2021), mais encore de surcroît du fait générateur de responsabilité, à savoir le manquement du banquier à son devoir d'information et d'alerte ; que lorsque le fait générateur réside dans la méconnaissance d'une obligation d'information, de conseil ou d'alerte, la connaissance parfaite du dommage, à la supposer établie, ne saurait faire présumer celle de la faute ; que le principe d'efficacité et d'effectivité des sanctions a été consacré en droit européen de la consommation et par la Cour européenne des droits de l'Homme, et commande d'écarter un régime de prescription qui serait basé sur une présomption de connaissance parfaite par le consommateur des irrégularités renfermées dans le contrat dès sa signature ; qu'ils ont légitimement ignoré les faits leur permettant d'agir, et notamment la faute commise par la banque, et ce n'est que lorsqu'ils ont saisi un avocat que leur attention a été attirée à cet égard ;

- que le bon de commande comporte des irrégularités qui emportent l'annulation tant du contrat principal que du prêt, et qui caractérisent la faute commise par la SA COFIDIS dans le déblocage des fonds ; que le bon de commande est entaché d'un vice qui résulte de la méconnaissance des règles spéciales et d'ordre public du droit de la consommation ; que le bon de commande omet de mentionner la désignation précise des caractéristiques des biens ou services (dimensions, poids, surface occupée et technologie -mono ou polycristallins- des panneaux photovoltaïques, puissance et dimensions de l'onduleur, et prix unitaire des biens commandés), le délai et les modalités de livraison des biens et des prestations de services (la livraison étant prévue pour novembre 2009), ainsi que les modalités de financement (le bon de commande ne mentionnant pas le nom de l'établissement bancaire, la durée totale du crédit et l'existence d'un report, le montant de l'assurance emprunteur et le coût total du crédit avec assurance), en violation de l'article L. 121-23 du code de la consommation dans sa rédaction issue de la loi n°93-949 du 26 juillet 1993 ; que le bordereau de rétractation ne respecte pas le formalisme prévu par le code de la consommation à peine de nullité aux articles R. 121-4 et R. 121-5 du code de la consommation, et ne peut être détaché sans altérer l'intégrité du bon de commande ;

- que le contrat a été conclu sur la base de pratiques commerciales trompeuses constitutives d'un dol ; qu'ils ont donné leur consentement à l'opération sur la considération d'une promesse d'autofinancement de l'installation, ou à tout le moins d'une économie d'énergie, de sorte que cette promesse est incontestablement entrée dans le champ contractuel, tel que résultant des documents contractuels ( la conclusion du contrat est intervenue après la présentation par le vendeur de toute une série de documents commerciaux et de promesses, et que le report de paiement de la première échéance de crédit a été prévu afin de permettre un retour sur investissement), et en tout état de cause de la nature de la chose vendue (la rentabilité est un élément objectif du contrat de vente conclu entre le consommateur et le vendeur d'installations productrices d'énergies renouvelables) ; que la promesse de rentabilité s'est en réalité avérée mensongère et qu'ils ont donc été victimes d'un dol dont la banque s'est d'ailleurs rendue complice (la revente d'électricité leur procurant un gain moyen de 118,92 euros par mois qui ne permet pas de s'acquitter des échéances de prêt de 236,03 euros par mois) ; que c'est au prix de man'uvres et en tout état de cause d'une réticence dolosive, ayant provoqué une erreur déterminante, que leur consentement au crédit affecté comme au contrat principal a été obtenu ;

- que les irrégularités dénoncées relèvent d'un manquement à l'ordre public et la nullité qui en résulte s'analyse en une nullité absolue, insusceptible de confirmation ; que l'absence dans le bon de commande de plusieurs mentions obligatoires prévues par le code de la consommation empêche les consommateurs profanes d'avoir connaissance du vice et aucun acte postérieur à la signature du contrat ne saurait être interprété comme une confirmation tacite des irrégularités ; que le remboursement intégral du crédit par les consommateurs ne saurait être analysé en une volonté de confirmer l'acte nul ;

- que la SA COFIDIS a participé au dol dont ils ont été victimes (en mettant à disposition des démarcheurs ses imprimés types et en aménageant un report des échéances de remboursement augmentant le coût du crédit et confortant l'autofinancement de l'installation) et a commis une faute dans le déblocage des fonds ; que les irrégularités du bon de commande auraient dû conduire la banque à ne pas se libérer des fonds entre les mains de l'APC Philippe Girault avant de s'être assurée que ses clients étaient parfaitement informés concernant l'absence de validité du contrat principal ; que l'attestation de livraison-demande de financement présente un caractère ambigü et imprécis de sorte qu'il est impossible d'affirmer que le déblocage des fonds a été effectué après la vérification par la banque de l'exécution complète de la prestation ;

- que les fautes de la SA COFIDIS sont sanctionnées par l'impossibilité de la banque d'obtenir sa créance de restitution du capital emprunté, et par conséquent, par sa condamnation à leur rembourser l'ensemble des sommes qu'ils ont versées (soit 21 833 euros correspondant au prix de l'installation et 22 485,40 euros au titre des intérêts, assurance et frais), ainsi qu'à réparer le préjudice qu'ils ont subi résultant de la prise de conscience d'avoir été dupés par le vendeur et de s'être engagés dans un système qui les contraint sur de nombreuses années compte tenu de la non réalisation des performances et du rendement annoncés par le vendeur ; que la banque a directement concouru à la nullité des contrats litigieux et ne peut donc faire valoir aucun droit à restitution, et ce indépendamment d'un quelconque préjudice ; qu'ils perdent de l'argent à cause de cette opération ce qui leur cause un nécessaire préjudice, qui est aggravé par la liquidation judiciaire du vendeur en ce qu'ils ne pourront pas recouvrer le prix de vente malgré le jeu des restitutions consécutif aux nullités ;

- qu'en tout état de cause, la banque doit être privée de son droit aux intérêts contractuels, en ce qu'elle a manqué à son obligation de conseil et à son devoir de mise en garde ressortant des dispositions de l'article L. 312-14 du code de la consommation en ne vérifiant pas leurs capacités financières et en leur accordant un prêt excessif au regard de leurs facultés contributives ; qu'en finançant une installation dont elle ne pouvait pas ignorer le caractère ruineux, la société COFIDIS a manqué nécessairement à son obligation de conseil et à son devoir de mise en garde quant à l'opportunité économique du projet ; qu'il appartiendra à la SA COFIDIS d'apporter la preuve que le crédit a été distribué par un professionnel qualifié, compétent, donc formé et dont elle est responsable ; que la consultation et la réponse obligatoire du FICP, comme analyse complète de la solvabilité de l'emprunteur, doit aussi être apportée par la banque et doit avoir été effectuée préalablement à la décision d'octroi du crédit.

Dans ses dernières conclusions transmises le 5 mars 2024, régulièrement signifiées à la SELARL [S] [N] ès qualités le 12 mars 2024, auxquelles il convient de se reporter pour l'exposé détaillé de ses prétentions et moyens, la SA COFIDIS, intimée, demande à la cour :

A titre principal,

- de confirmer le jugement en ce qu'il a déclaré les demandes des emprunteurs irrecevables, sur le fondement de la prescription, subsidiairement sur le fondement de l'absence de mise en cause du vendeur et en tout état de cause, sur le fondement de la présentation d'une demande nouvelle en cause d'appel,

A titre subsidiaire,

- de déclarer ses demandes, fins et conclusions recevables et bien fondées,

Y faisant droit,

- de déclarer les époux [V] mal fondés en leurs demandes, fins et conclusions et de les en débouter,

A titre infiniment subsidiaire,

- de la condamner au remboursement des seuls intérêts, conformément à l'historique versé aux débats, le capital remboursé par anticipation lui restant définitivement acquis en l'absence de faute, et en toute hypothèse en l'absence de préjudice et de lien de causalité,

En tout état de cause,

- de débouter les époux [V] de leurs demandes de condamnation de la SA COFIDIS à leur payer la somme de 10 000 euros au titre de l'enlèvement des travaux,

- de débouter les époux [V] de leur demande de condamnation de la SA COFIDIS à leur payer la somme de 5 000 euros au titre d'un prétendu préjudice moral,

- de condamner solidairement les époux [V] à payer à la SA COFIDIS la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- de condamner solidairement les époux [V] aux entiers dépens.

Au soutien de ses demandes, la SA COFIDIS fait valoir en substance :

- que la prescription de l'action des époux [V] est acquise ; que le point de départ de la prescription de l'action en annulation du contrat de vente fondée sur les irrégularités du bon de commande se situe au jour où l'emprunteur est en mesure de déceler les erreurs qu'il allègue, s'agissant de la date de l'acceptation de l'offre de prêt dont la teneur leur permettait d'en avoir connaissance ; que le point de départ de la prescription de l'action en annulation du contrat de vente fondée sur le dol se situe au jour où les emprunteurs ont établi la première facture de vente d'électricité au profit d'EDF qui est antérieure à celle du 8 avril 2015 mentionnant un ancien relevé au 8 avril 2014 (déterminant l'expiration du délai de prescription au 8 avril 2019), et que compte tenu d'une production annuelle de l'ordre de 2 000 KWh, la première facture a été établie en 2010 ; que le point de départ de la prescription de l'action en responsabilité fondée sur l'absence de vérification de la complète exécution des obligations du vendeur se situe à la date de signature de l'attestation de livraison, de sorte que le délai a expiré au 15 décembre 2014 ; que le point de départ de la prescription de l'action en responsabilité fondée sur le financement d'un bon de commande nul se situe au jour de la signature du bon de commande, de sorte que le délai a expiré au 17 décembre 2014 ; qu'en toute hypothèse, les emprunteurs ne pouvaient ignorer lors du prélèvement de la première échéance du 5 août 2010 que les fonds avaient été libérés et que le bon de commande avait été financé à cette date, au regard de la prise d'effet de leurs obligations, de sorte que le délai de prescription de l'action en responsabilité expirait au 5 août 2015 sur tout fondement ;

- qu'il n'est pas justifié de la désignation et de l'assignation du mandataire ad'hoc tant en première instance qu'en appel, et qu'il appartient à la cour de considérer que le vendeur n'est pas en cause, de sorte que les emprunteurs sont irrecevables à solliciter la nullité du bon de commande et du prêt affecté ;

- que la déchéance du droit aux intérêts sollicitée pour la première fois par les appelants à hauteur de cour est manifestement irrecevable ;

- que la demande de nullité pour dol est uniquement fondée sur un rapport d'expertise privée non contradictoire qui, à lui seul, ne peut emporter la conviction de la cour ; que l'origine du prétendu problème de rendement n'est ni déterminée ni déterminable ; que l'intention dolosive du vendeur n'est certainement pas prouvée ; que les époux [V] ont obtenu un crédit d'impôt d'environ 8 000 euros en 2009 et qu'il est erroné de prétendre que l'installation n'est pas rentable alors que le contrat avec EDF est de vingt ans renouvelable ;

- que la reproduction des articles du code de la consommation dans les conditions générales de vente permet à l'emprunteur de prendre connaissance du vice et qu'une telle connaissance jointe à l'exécution volontaire du contrat par l'intéressé emporte la confirmation de l'acte nul ;

- que les articles visés au soutien de la demande en déchéance du droit aux intérêts n'étaient pas applicables avant le 1er mai 2011 ;

- que les emprunteurs ayant remboursé le prêt par anticipation, la SA COFIDIS sera subsidiairement condamnée au remboursement des seuls intérêts conformément à l'historique versé aux débats (le contrat ne s'étant pas poursuivi jusqu'à son terme), dès lors que les emprunteurs n'apportent la preuve d'aucune faute (la banque ne s'étant pas engagée contractuellement à vérifier la mise en service ou le raccordement et l'obtention des autorisations administratives, et les fonds ayant été libérés au vu d'une attestation de livraison suffisamment précise pour rendre compte de la complexité de l'opération et de la mise en service du matériel, qui n'est pas contestée ; qu'elle n'avait pas à vérifier la régularité du bon de commande consenti avant le 1er mai 2011, date à laquelle la notion d'opération commerciale unique est apparue), ni d'aucun préjudice et encore moins d'un lien de causalité (aucun lien n'existant entre la prétendue faute d'avoir financé un bon de commande entaché de causes de nullité et la liquidation judiciaire du vendeur avant la clôture pour insuffisance d'actif, de même qu'avec le prétendu problème de rentabilité non démontré) ; que les contestations relatives au contenu de l'attestation de travaux deviennent inopérantes dès lors que l'emprunteur ne conteste pas bénéficier d'une installation fonctionnelle, en état de marche, qui produit de l'électricité et qu'il conservera en l'absence de déclaration de créance, et qu'elle ne saurait être privée de sa créance pour un simple décalage temporel entre la signature d'une attestation de livraison et la mise en service effective du matériel ; que l'absence de retour sur investissement ne peut en aucun cas être opposé à un organisme de crédit qui n'a fait que financer l'opération ;

- qu'il ne peut être prétendu que la banque, qui n'est pas le mandataire du vendeur, a participé au dol ; qu'elle n'a pas à s'immiscer dans les affaires de son client ;

- qu'elle n'est pas partie au bon de commande et ne peut être condamnée au paiement de dommages et intérêts pour enlever l'installation ; que les époux [V] ne démontrent pas l'existence d'un préjudice moral en lien avec les prétendues fautes du prêteur.

-o0o-

Régulièrement assignée le 15 novembre 2023 par acte de commissaire de justice remis à personne se déclarant habilitée à le recevoir, la SELARL [S] [N], ès qualités, n'a pas constitué avocat.

La clôture de l'instruction a été prononcée le 3 avril 2024.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur la prescription de l'action en annulation du contrat de vente pour dol

L'article 1304 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, prévoit que l'action en nullité d'un contrat fondée sur le dol se prescrit par un délai de cinq ans courant à compter du jour où le contractant a découvert le vice qu'il allègue.

S'agissant de l'erreur sur la rentabilité économique et l'autofinancement de l'installation photovoltaïque provoquée par le dol dont se prévalent les époux [V], il y a lieu de considérer que la réception de la première facture annuelle du rachat de l'électricité produite par l'installation leur permettait d'appréhender la réalité de sa rentabilité ainsi que les conséquences financières sur le paiement des échéances du crédit affecté.

En l'espèce, les époux [V] ont versé en procédure une facture annuelle établie par EDF le 8 avril 2015 portant sur le rachat de l'électricité produite depuis le précédent relevé effectué le 8 avril 2014 pour un montant de 1 243,68 euros, soit 103,64 euros par mois.

Or, le contrat de crédit affecté a prévu le paiement d'échéances mensuelles de 236,03 euros.

Dans ces conditions, il en ressort que les époux [V] ont découvert au jour de la réception de la facture de rachat de l'électricité du 8 avril 2015 les faits leur permettant d'exercer une action en annulation du contrat de vente pour dol au regard du prix perçu résultant de la vente d'électricité.

Aussi, le délai de prescription de cinq ans a commencé à courir à compter de la réception par les époux [V] de cette facture, de sorte que leur action fondée sur le dol du vendeur était prescrite à la date de son introduction le 25 août 2022, et doit être déclarée irrecevable sur ce fondement, de même que les demandes y afférentes.

Dès lors, le jugement déféré sera confirmé sur ce point.

Sur la prescription de l'action en annulation du contrat de vente pour irrégularités du bon de commande

La prescription quinquennale de droit commun est prévue à l'article 2224 du code civil, qui dispose que ' les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer. '

En l'espèce, il y a lieu de constater que les conditions générales du contrat de vente, figurant au verso du bon de commande signé par M. [U] [V], reproduisent les articles du code de la consommation L. 121-23 à L. 121-26 applicables au démarchage à domicile, dans leur version en vigueur à la date de signature du bon de commande.

Néanmoins, la reproduction même lisible des dispositions du code de la consommation prescrivant le formalisme applicable à un contrat conclu hors établissement ne permet pas au consommateur d'avoir une connaissance effective du vice résultant de l'inobservation de ces dispositions.

Aussi, la connaissance des faits permettant aux époux [V] d'exercer des droits résultant des irrégularités et omissions du bon de commande ne peut être établie à la date de sa signature.

Pour autant, l'article L. 121-23 du code de la consommation dans sa version applicable à la date du contrat (issue de la loi n°93-949 du 26 juillet 1993) dispose que les opérations visées à l'article L. 121-21 doivent faire l'objet d'un contrat dont un exemplaire doit être remis au client au moment de la conclusion de ce contrat et comporter, à peine de nullité, les mentions suivantes :

1° Noms du fournisseur et du démarcheur ;

2° Adresse du fournisseur ;

3° Adresse du lieu de conclusion du contrat ;

4° Désignation précise de la nature et des caractéristiques des biens offerts ou des services proposés ;

5° Conditions d'exécution du contrat, notamment les modalités et le délai de livraison des biens, ou d'exécution de la prestation de services ;

6° Prix global à payer et modalités de paiement ; en cas de vente à tempérament ou de vente à crédit, les formes exigées par la réglementation sur la vente à crédit, ainsi que le taux nominal de l'intérêt et le taux effectif global de l'intérêt déterminé dans les conditions prévues à l'article L. 313-1 ;

7° Faculté de renonciation prévue à l'article L. 121-25, ainsi que les conditions d'exercice de cette faculté et, de façon apparente, le texte intégral des articles L. 121-23, L. 121-24, L. 121-25 et L. 121-26.

Or, les époux [V] font valoir que le bon de commande comporte des irrégularités en ce qu'il omet de mentionner la désignation précise des caractéristiques des biens ou services (dimensions, poids, surface occupée et technologie des panneaux photovoltaïques, puissance et dimensions de l'onduleur, et prix unitaire des biens commandés), le délai et les modalités de livraison des biens et des prestations de services, ainsi que les modalités de financement.

Au préalable, il y a lieu de constater que les dispositions de l'article L. 121-23 dudit code n'exigent nullement la mention du prix unitaire des produits vendus mais un 'prix global à payer', de sorte que ce moyen est sans emport.

En outre, M. [U] [V] a signé une attestation de livraison le 15 décembre 2009 mentionnant la livraison et l'exécution des prestations commandées.

Aussi, il en résulte qu'à la date du 15 décembre 2009, les époux [V] avaient connaissance de la nature et des caractéristiques des biens effectivement livrés et des services fournis en exécution du bon de commande, de même que des conditions d'exécution du contrat ou d'exécution de la prestation de services, s'agissant de faits qui leur permettaient d'exercer leurs droits résultant d'éventuelles irrégularités ou omissions du bon de commande sur ces points.

En outre, à la date de prélèvement de la première échéance du prêt affecté le 5 janvier 2010, les époux [V] avaient connaissance des modalités de financement des prestations commandées par comparaison avec les mentions portées sur l'offre préalable de crédit qu'ils avaient signée le même jour que le bon de commande, s'agissant de faits qui leur permettaient d'exercer leurs droits résultant d'éventuelles irrégularités ou omissions du bon de commande sur ce point.

Dans ces conditions, les époux [V] ont découvert les 15 décembre 2009 et 5 janvier 2010 les faits leur permettant d'exercer une action en annulation du contrat de vente pour les omissions alléguées du bon de commande concernant la désignation précise des caractéristiques des biens ou services, le délai et les modalités de livraison des biens et des prestations de services, ainsi que les modalités de financement.

En effet, dès la connaissance desdits faits, ils pouvaient consulter un conseil afin d'envisager les éventuelles actions à entreprendre.

Aussi, le délai de prescription de cinq ans ayant respectivement commencé à courir à compter des 15 décembre 2009 et 5 janvier 2010, leur action en annulation du contrat de vente sur le fondement des irrégularités ou omissions concernées était prescrite à la date de son introduction le 25 août 2022, et doit être déclarée irrecevable, de même que les demandes y afférent.

Dès lors, le jugement déféré sera confirmé sur ce point.

Sur la régularité du bordereau de rétractation

Il ressort des dispositions combinées des articles L. 121-23, L. 121-24 et L. 121-25 du code de la consommation, dans leur rédaction antérieure à celle issue de la loi n° 2014-344 du 17 mars 2014, et des articles R. 121-3 à R. 121-6 du même code, dans leur rédaction antérieure à celle issue du décret n° 2014-1061 du 17 septembre 2014, que le contrat conclu à l'occasion d'une opération de démarchage doit comprendre un formulaire détachable destiné à faciliter l'exercice, par le consommateur, de la faculté de renonciation dans les conditions prévues à l'article L. 121-25. Ce formulaire détachable doit, à peine de nullité du contrat, comporter la mention prévue aux articles L. 121-25 et R. 121-3, et répondre aux exigences des articles R. 121-4 à R. 121-6 susvisés.

Les époux [V] soutiennent que le bordereau de rétractation ne respecte pas le formalisme prévu par le code de la consommation à peine de nullité aux articles R. 121-4 et R. 121-5 du code de la consommation, et ne peut être détaché sans altérer l'intégrité du bon de commande.

L'article R.121-4 dudit code précise que le formulaire prévu à l'article L. 121-24 comporte, sur une face, l'adresse exacte et complète à laquelle il doit être envoyé, et l'article R.121-5 prévoit quant à lui que le formulaire prévu à l'article L. 121-24 comporte, sur son autre face, les mentions définies à cet article en caractères très lisibles.

En l'espèce, il y a lieu de constater que le contrat dispose d'un formulaire détachable de rétractation, et que ce bordereau répond aux exigences des articles R. 121-4 et R. 121-5 en ce qu'il comporte la mention du délai de rétractation de l'article L. 121-24 alors applicable, de l'adresse à laquelle il doit être envoyé et des modalités d'annulation de la commande.

En outre, le contrat comporte bien la mention de la faculté de rétractation au verso, au paragraphe des conditions générales se rapportant à la commande.

Or, la circonstance que l'utilisation du bordereau ne soit pas facilitée par le fait qu'il ampute le contrat des signatures lorsqu'il est utilisé est liée au caractère détachable du bordereau, et ne constitue pas une irrégularité sanctionnée par la nullité du bon de commande.

Dans ces conditions, ce moyen est sans emport.

Sur l'action en responsabilité dirigée à l'encontre du prêteur

Il résulte des développements précédents que dès la signature de l'attestation de livraison et d'exécution des prestations de services, les époux [V] étaient en mesure de déceler par eux-mêmes les omissions alléguées du bon de commande, déterminant la prescription des demandes d'annulation des contrats de vente et de crédit y afférentes.

De même, les époux [V] ont découvert au jour de la réception de la facture de rachat de l'électricité du 8 avril 2015 les faits leur permettant d'exercer une action en annulation du contrat de vente pour dol, déterminant la prescription des demandes d'annulation des contrats de vente et de crédit fondées sur le dol du vendeur ayant présenté l'installation comme rentable et autofinancée, tel que soutenu.

Aussi, par l'effet de la prescription, les époux [V] ne peuvent plus se prévaloir du manquement du prêteur à son obligation de vérification de la régularité du bon de commande et à son devoir de conseil et d'information sur le rendement de l'installation et l'opportunité économique du projet.

Par ailleurs, les époux [V] soutiennent que l'attestation de livraison-demande de financement présente un caractère ambigu et imprécis, de sorte qu'il est impossible d'affirmer que le déblocage des fonds a été effectué après la vérification par la banque de l'exécution complète de la prestation.

Or, à la date de prélèvement de la première échéance du prêt affecté le 5 janvier 2010, les époux [V] avaient connaissance de la libération des fonds empruntés au bénéfice du vendeur, s'agissant de faits qui leur permettaient de se prévaloir de la responsabilité du prêteur liée à l'absence de vérification préalable de l'exécution complète des prestations commandées.

Dans ces conditions, le délai de prescription de cinq ans ayant commencé à courir à compter du 5 janvier 2010, leur action en responsabilité dirigée à l'encontre du prêteur était prescrite à la date de son introduction le 25 août 2022, et doit être déclarée irrecevable, de même que les demandes y afférentes.

Au surplus, il y a lieu de constater en tout état de cause que l'installation a bénéficié d'un raccordement au réseau public et a été mise en service, caractérisant l'exécution complète des prestations convenues à ce jour.

Dès lors, il convient d'ajouter au jugement déféré et de déclarer irrecevable pour cause de prescription l'action en responsabilité dirigée à l'encontre du prêteur.

Sur la déchéance du droit aux intérêts contractuels du prêteur

Les époux [V] se prévalent du manquement du prêteur à son obligation de vérification de leurs capacités financières et de mise en garde du fait de l'octroi d'un prêt excessif au regard de leurs facultés contributives, et de la nécessité pour celui-ci de justifier que le crédit a été distribué par un professionnel qualifié, compétent et formé, ainsi que de la consultation et de la réponse obligatoire du FICP.

Le prêteur soutient que la déchéance du droit aux intérêts sollicitée pour la première fois par les appelants à hauteur de cour est manifestement irrecevable.

L'article 565 du code de procédure civile dispose que 'les prétentions ne sont pas nouvelles dès lors qu'elles tendent aux mêmes fins que celles soumises au premier juge, même si leur fondement juridique est différent.'

En l'espèce, la demande tendant à voir prononcer l'annulation de plein droit du contrat de crédit affecté suite à l'annulation du contrat principal de vente tend à voir priver le prêteur de son droit aux intérêts conventionnels.

Aussi, la demande en déchéance du droit aux intérêts du prêteur présentée à hauteur de cour est recevable.

En revanche, il convient de rappeler que la loi n°2010-737 du 1er juillet 2010, en vigueur à compter du 1er mai 2011, a introduit dans le code de la consommation des dispositions relatives à l'obligation faite à tout prêteur, préalablement à l'octroi d'un crédit, de vérifier la solvabilité de l'emprunteur notamment en consultant le fichier des incidents caractérisés de remboursement des crédits aux particuliers (FICP) qui recense tous les incidents dans le remboursement des crédits aux particuliers.

De même, cette loi a introduit dans le code de la consommation les obligations de formation à la distribution du crédit à la consommation et à la prévention du surendettement des intermédiaires de crédit.

Dans ces conditions, les époux [V] ne peuvent se prévaloir des manquements du prêteur auxdites obligations précontractuelles entrées en vigueur postérieurement à la signature du contrat.

Dès lors, les époux [V] seront déboutés de leur demande en déchéance du droit aux intérêts du prêteur.

Sur les demandes accessoires

Le jugement déféré sera confirmé en ses dispositions relatives aux dépens et aux frais irrépétibles.

Les époux [V] qui succombent en leurs prétentions à hauteur de cour supporteront la charge des dépens et seront déboutés de leur demande au titre des frais irrépétibles.

Eu égard à la situation respective des parties, il n'y a pas lieu de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS :

LA COUR, statuant publiquement, par arrêt réputé contradictoire prononcé par mise à disposition au greffe, conformément aux dispositions de l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,

CONFIRME le jugement déféré en toutes ses dispositions,

Y ajoutant,

DECLARE irrecevable pour cause de prescription l'action en responsabilité dirigée à l'encontre de la SA COFIDIS venant aux droits de la SA SOFEMO,

DEBOUTE M. [U] [V] et Mme [K] [W] épouse [V] de leur demande sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

DIT n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNE M. [U] [V] et Mme [K] [W] épouse [V] aux dépens.

Le présent arrêt a été signé par Monsieur Francis MARTIN, président de chambre à la Cour d'Appel de NANCY, et par Madame Christelle CLABAUX- DUWIQUET, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,

Minute en seize pages.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Nancy
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 23/01995
Date de la décision : 20/06/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 26/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-06-20;23.01995 ?
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