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20/06/2024 | FRANCE | N°23/01527

France | France, Cour d'appel de Nancy, 2ème chambre, 20 juin 2024, 23/01527


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

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COUR D'APPEL DE NANCY

DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE



ARRÊT N° /24 DU 20 JUIN 2024





Numéro d'inscription au répertoire général :

N° RG 23/01527 - N° Portalis DBVR-V-B7H-FGTB



Décision déférée à la cour :

Jugement du tribunal judiciaire d'EPINAL, R.G. n° 21/00816, en date du 27 juin 2023,



APPELANTE :

La S.A. AXA FRANCE IARD,

Société anonyme dont le siège [Adresse 3], immat

riculé au Registre du Commerce et des Sociétés de NANTERRE (92000) sous le n° 722 057 460, prise en la personne de son représentant légal domicilié ès qualité audit siège...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

------------------------------------

COUR D'APPEL DE NANCY

DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE

ARRÊT N° /24 DU 20 JUIN 2024

Numéro d'inscription au répertoire général :

N° RG 23/01527 - N° Portalis DBVR-V-B7H-FGTB

Décision déférée à la cour :

Jugement du tribunal judiciaire d'EPINAL, R.G. n° 21/00816, en date du 27 juin 2023,

APPELANTE :

La S.A. AXA FRANCE IARD,

Société anonyme dont le siège [Adresse 3], immatriculé au Registre du Commerce et des Sociétés de NANTERRE (92000) sous le n° 722 057 460, prise en la personne de son représentant légal domicilié ès qualité audit siège

Représentée par Me Pascal KNITTEL de la SELARL KNITTEL - FOURAY ET ASSOCIES, avocat au barreau d'EPINAL

INTIMÉS :

Monsieur [P] [X]

né le [Date naissance 1] 1951 à [Localité 6], domicilié [Adresse 4]

Représenté par Me François VALLAS, avocat au barreau d'EPINAL

la S.A.S. LA FAYETTE

SAS immatriculée au RCS d'EPINAL sous le n° 351 589 312 dont le siège social est [Adresse 2], prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

Représentée par Me David COLLOT de la SELARL LORRAINE DEFENSE & CONSEIL, avocat au barreau d'EPINAL

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 23 Mai 2024, en audience publique devant la cour composée de :

Monsieur Francis MARTIN, président de chambre, chargé du rapport,

Madame Nathalie ABEL, conseillère,

Madame Fabienne GIRARDOT, conseillère,

qui en ont délibéré ;

Greffier, lors des débats : Madame Christelle CLABAUX- DUWIQUET ;

A l'issue des débats, le président a annoncé que la décision serait rendue par mise à disposition au greffe le 20 Juin 2024, en application du deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;

ARRÊT : contradictoire, rendu par mise à disposition publique au greffe le 20 Juin 2024, par Madame Christelle CLABAUX- DUWIQUET, greffier, conformément à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile ;

signé par Monsieur Francis MARTIN, président de chambre, et par Madame Christelle CLABAUX- DUWIQUET, greffier ;

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Copie exécutoire délivrée le à

Copie délivrée le à

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EXPOSE DU LITIGE

M. [P] [X] a été victime d'une chute lui ayant causé une fracture du col du fémur, le 10 août 2019 dans le spa de l'hôtel Best Western La Fayette à [Localité 5].

Par actes de commissaire de justice des 25 et 28 mai 2021, M. [X] a fait assigner la société La Fayette et la société AXA France IARD devant le tribunal judiciaire d'Epinal.

M. [X] a demandé au tribunal de :

- déclarer la SAS La Fayette responsable des conséquences dommageables de l'accident dont il a été victime le 10 août 2019,

- condamner solidairement la SAS La Fayette et son assureur la SA AXA France IARD à réparer son entier préjudice,

- ordonner une expertise et désigner un expert avec mission d'évaluer son préjudice physique, moral et économique,

- condamner solidairement la SAS La Fayette et son assureur la SA AXA France IARD au paiement d'une somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers frais et dépens.

La société La Fayette a demandé au tribunal de :

- débouter M. [X] de toutes ses demandes, fins et conclusions.

Reconventionnellement,

- condamner M. [X] au paiement d'une somme de 2 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner M. [X] aux entiers dépens de l'instance.

Subsidiairement,

- si par improbable une quelconque responsabilité devait être retenue à son égard,

condamner la société AXA France IARD à la relever de toute condamnation qui

pourait être prononcée à son encontre.

La société AXA France IARD a demandé au tribunal de :

- débouter M. [X] de toutes ses demandes, fins et conclusions,

Reconventionnellement,

- condamner M. [X] au paiement d'une somme de 2 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner M. [X] aux entiers dépens de l'instance.

Par jugement en date du 27 juin 2023, le tribunal judiciaire d'Epinal a :

- déclaré régulières et recevables les demandes de M. [X],

- déclaré les sociétés La Fayette et AXA France IARD responsables de l'accident

survenu à M. [X] à l'hôtel Best Western La Fayette d'[Localité 5] le 10 août 2019,

- condamné solidairement la société La Fayette et la société AXA France IARD à indemniser M. [X] de ses préjudices résultant de l'accident du 10 août 2019,

- ordonné une expertise judiciaire de M. [X],

- désigné pour y procéder le docteur [H] [Y],

- fixé à la somme de 800,00 euros la consignation pour frais d'expertise que M.[X] devra verser dans un délai de deux mois à valoir sur la rémunération de l'expert, - invité les parties, à mettre en cause, en tant que de besoin, les organismes sociaux concernés par leurs demandes en indemnisation des préjudices corporels,

- condamné in solidum les sociétés La Fayette et AXA France IARD à payer à M. [X] la somme de 2 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné in solidum les sociétés La Fayette et AXA France IARD aux entiers

dépens.

Par déclaration au greffe en date du 12 juillet 2023, la société AXA France IARD a interjeté appel en sollicitant l'infirmation du jugement rendu le 27 juin 2023 par le tribunal judiciaire d'Epinal, notamment en ce qu'il l'a déclarée, avec la société La Fayette, responsable de l'accident survenu à M. [X] à l'hôtel Best Western La Fayette d'[Localité 5] le 10 août 2019, en ce qu'il l'a condamnée solidairement avec la société La Fayette à indemniser M. [X] de ses préjudices résultant de l'accident du 10 août 2019, en ce qu'il a ordonné expertise judiciaire de M. [X], en ce qu'il a fixé à la somme de 800,00 euros la consignation pour frais d'expertise que M. [X] devra verser sur la rémunération de l'expert, en ce qu'il l'a condamnée in solidum avec la société La Fayette à payer à M. [X] la somme de 2 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile, et en ce qu'il l'a condamnée in solidum avec la société La Fayette aux entiers dépens.

Par conclusions déposées le 9 octobre 2023, la société AXA France IARD demande à la cour d'infirmer la décision entreprise en toutes ses dispositions et, statuant à nouveau, de :

- débouter M. [X] de toutes ses demandes, fins et prétentions.

Reconventionnellement,

- condamner M. [X] au paiement d'une somme de 2 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner M. [X] aux entiers dépens d'instance et d'appel.

A l'appui de son appel, la société AXA France IARD expose notamment :

- que M. [P] [X] est à l'origine de son propre dommage, car il a été imprudent et inattentif en contournant le jacuzzi,

- que les lieux où s'est produit l'accident présentent un agencement permettant un accès facile à la piscine comme au jacuzzi, dans des conditions normales de sécurité,

- que la commission de sécurité qui contrôle périodiquement les lieux n'a jamais relevé d'anomalies ou insuffisances créant un risque pour la sécurité des clients,

- qu'il n'y avait d'ailleurs jamais eu d'accident dans cet espace balnéo depuis son ouverture en 2010.

Par conclusions déposées le 8 décembre 2023, la société La Fayette demande à la cour d'infirmer en toutes ses dispositions le jugement du 5 juillet 2023 et, statuant à nouveau, de :

- débouter M. [X] de toutes ses demandes, fins et prétentions,

Reconventionnellement,

- condamner M. [X] à payer à la SAS La Fayette une somme de 2 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner M. [X] aux entiers dépens de première instance et d'appel,

Subsidiairement, si une quelconque responsabilité devait être retenue à l'encontre de la SAS La Fayette,

- confirmer la condamnation d'AXA France IARD solidairement avec son assurée.

La société La Fayette reprend les arguments de son assureur, en soulignant que l'accident s'est produit parce que M. [P] [X] est allé vers l'extrémité de la plate-forme qui n'est pas un lieu de passage et qu'il n'a pas fait attention où il mettait les pieds.

Par conclusions déposées le 15 décembre 2023, M. [X] demande à la cour de :

Sur l'appel principal,

- déclarer la SA AXA France IARD mal fondée en son appel.,

- débouter la SA AXA France IARD de l'ensemble de ses fins et conclusions.

Sur appel incident,

- déclarer la SAS La Fayette mal fondée en son appel incident,

- débouter la SAS La Fayette de l'ensemble de ses fins et conclusions.

En tout état de cause,

- confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions,

- condamner l'appelant et l'appelant incident à verser à M. [X] une somme de 5 000 euros chacun sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner la société AXA France IARD et la société La Fayette aux entiers frais et dépens de première instance et d'appel.

Pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, la cour renvoie expressément à leurs conclusions visées ci-dessus, conformément à l'article 455 du code de procédure civile.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur la responsabilité de la société Lafayette

L'hôtelier est tenu à l'égard de son client d'une obligation de moyens de sécurité. Il appartient donc au client de démontrer la faute de l'hôtelier.

En l'espèce, la scène de l'accident a été filmée grâce à la caméra de surveillance et le film de l'accident est produit aux débats.

L'analyse de cette vidéo permet de constater :

- que M. [P] [X] sort de la piscine et se dirige vers la bassin du jacuzzi où se trouve son épouse,

- qu'il essaie de rentrer dans le jacuzzi en y plongeant une jambe, cherchant manifestement l'escalier qui lui permet d'y descendre,

- que ne trouvant pas l'escalier d'accès (manifestement masqué à sa vue par le bouillonnement de l'eau), il ressort la jambe de l'eau et continue de faire le tour du bassin du jacuzzi,

- qu'il arrive alors à un endroit où la plate-forme sur laquelle il marche et dans laquelle se trouve inséré le jacuzzi se rétrécit au point de n'être plus constituée que du rebord du jacuzzi,

- qu'étant tourné vers le bassin du jacuzzi qu'il scrute à la recherche des escaliers d'accès, il n'arrête pas sa marche malgré ce rétrécissement et en continuant à avancer il met un pied dans le vide, ce qui le déséquilibre et provoque sa chute au bas de la plate-forme haute d'environ 40 centimètres.

M. [P] [X] n'a manifestement commis aucune faute ayant concouru à son accident. Au contraire, la vidéo le montre progresser lentement et prudemment autour du jacuzzi, sans enfreindre aucune interdiction d'accès sur son parcours.

En revanche, les lieux favorisent le risque d'accident :

- l'éclairage est faible et la scène s'est déroulée dans une semi-pénombre,

- rien ne permet de visualiser l'endroit où se trouvent les escaliers permettant de descendre dans le jacuzzi, ce qui ne peut qu'inciter les clients à faire le tour du bassin pour les découvrir,

- la plate-forme d'accès entourant le jacuzzi se rétrécit progressivement jusqu'à n'être plus constituée que du rebord du bassin sans que rien ne vienne signaliser ce rétrécissement (ni lumière au sol, ni garde-corps), alors que le dénivelé entre cette plate-forme et le sol de l'espace balnéo est haut d'une quarantaine de centimètres.

Il importe peu que la commission de sécurité n'ait jamais pointé ce risque d'accident ou que ce type d'accident ne se fût encore jamais produit. Les faits dont s'agit montrent que ce risque d'accident existait et qu'une personne normalement prudente comme l'a été M. [P] [X] peut être piégée par la conformation des lieux.

Par conséquent, c'est à juste titre que le tribunal a déclaré la société Lafayette responsable de l'accident survenu à M. [P] [X]. C'est à juste titre également qu'il a condamné cette société, solidairement avec son assureur responsabilité civile, la société AXA France IARD, à indemniser l'entier préjudice de M. [P] [X] et qu'il a ordonné une expertise médicale pour permettre d'évaluer ses préjudices.

Sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile

La société Lafayette et la société AXA France IARD, qui sont les parties perdantes, supporteront les dépens de première instance et d'appel et elles seront déboutées de leurs demandes de remboursement de leurs frais de justice irrépétibles. En outre, il est équitable qu'elles soient condamnées in solidum à payer à M. [P] [X] la somme globale de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile (en sus de celle de 2 000 euros déjà allouée par le tribunal).

PAR CES MOTIFS :

LA COUR, statuant publiquement, par arrêt contradictoire prononcé par mise à disposition au greffe, conformément aux dispositions de l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,

CONFIRME le jugement déféré en toutes ses dispositions,

Y ajoutant,

DEBOUTE la société Lafayette et la société AXA IARD de leurs demandes sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNE in solidum la société Lafayette et la société AXA France IARD à payer à M. [X] la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNE in solidum la société Lafayette et et la société AXA France IARD aux dépens.

Le présent arrêt a été signé par Monsieur Francis MARTIN, président de chambre à la Cour d'Appel de NANCY, et par Madame Christelle CLABAUX- DUWIQUET, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,

Minute en six pages.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Nancy
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 23/01527
Date de la décision : 20/06/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 26/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-06-20;23.01527 ?
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