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17/06/2024 | FRANCE | N°23/01554

France | France, Cour d'appel de Nancy, 3ème chambre - section 1, 17 juin 2024, 23/01554


ARRET N°

DU 17 JUIN 2024



N° RG 23/01554 - N° Portalis DBVR-V-B7H-FGUV



LA COUR D'APPEL DE NANCY, troisième chambre civile section 1, a rendu l'arrêt suivant :



Saisie d'un appel d'une décision rendue le 03 février 2023 par le Juge aux affaires familiales d'EPINAL (21/00143)



APPELANTE :

Madame [K] [E]

née le [Date naissance 5] 1980 à [Localité 12]

[Adresse 2]

[Localité 10]

Représentée par Me Cyrille GAUTHIER de la SCP GAUTHIER substitué par Me Johann SAINT-DIZIER, avocats au bar

reau d'EPINAL



INTIME :

Monsieur [T] [Z]

né le [Date naissance 7] 1979 à [Localité 11]

[Adresse 8]

[Localité 9]

Représenté par Me Gérard W...

ARRET N°

DU 17 JUIN 2024

N° RG 23/01554 - N° Portalis DBVR-V-B7H-FGUV

LA COUR D'APPEL DE NANCY, troisième chambre civile section 1, a rendu l'arrêt suivant :

Saisie d'un appel d'une décision rendue le 03 février 2023 par le Juge aux affaires familiales d'EPINAL (21/00143)

APPELANTE :

Madame [K] [E]

née le [Date naissance 5] 1980 à [Localité 12]

[Adresse 2]

[Localité 10]

Représentée par Me Cyrille GAUTHIER de la SCP GAUTHIER substitué par Me Johann SAINT-DIZIER, avocats au barreau d'EPINAL

INTIME :

Monsieur [T] [Z]

né le [Date naissance 7] 1979 à [Localité 11]

[Adresse 8]

[Localité 9]

Représenté par Me Gérard WELZER substitué par Me Joris DEGRYSE de la SELARL WELZER, avocats au barreau d'EPINAL

COMPOSITION DE LA COUR :

Lors des débats, sans opposition des conseils des parties, en application de l'article 805 du Code de Procédure Civile,

Madame BOUC, Présidente de Chambre, siégeant en rapporteur,

Madame FOURNIER, greffière,

Lors du délibéré :

Présidente de Chambre : Madame BOUC, qui a rendu compte à la Cour, conformément à l'article 805 du Code de Procédure Civile,

Conseillères : Madame LEFEBVRE,

Madame [M] ;

DEBATS :

A l'audience publique du 15 Avril 2024 ;

Conformément à l'article 804 du Code de Procédure Civile, un rapport oral de l'affaire a été fait à l'audience de ce jour ;

L'affaire a été mise en délibéré pour l'arrêt être mis publiquement à disposition au greffe le 17 Juin 2024 ;

Le 17 Juin 2024, la Cour après en avoir délibéré conformément à la Loi, a rendu l'arrêt dont la teneur suit :

Copie exécutoire le

Copie le

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Monsieur [T] [Z] et Madame [K] [E] ont vécu en concubinage.

De leur relation sont issus deux enfants :

[U], né le [Date naissance 4] 2011,

[I], née le [Date naissance 6] 2015.

En 2009, ils ont acquis une maison en indivision située [Adresse 1].

Ils se sont séparés en septembre 2017.

Par jugement en date du 30 octobre 2019, le juge aux affaires familiales du tribunal judiciaire d'Epinal a pour l'essentiel :

constaté l'exercice conjoint de l'autorité parentale,

fixé la résidence des enfants au domicile de Monsieur [Z],

accordé à Madame [E] un droit de visite et d'hébergement une semaine sur deux, un milieu de semaine sur deux et la moitié des vacances scolaires,

fixé la contribution de Madame [E] à l'entretien et à l'éducation à la somme de 90 € par mois et par enfant.

Par jugement en date du 20 juillet 2021, le juge aux affaires familiales du tribunal judiciaire d'Épinal a fixé la résidence des enfants en alternance au domicile des deux parents et a supprimé la contribution à l'entretien et à l'éducation des enfants.

Le bien immobilier commun a été vendu le 9 mars 2020 pour un prix de 115 000 euros. Après apurement du prêt immobilier et paiement de frais de vente, le solde à partager était de 83 763,36 euros, soit 41 881,68 euros chacun.

Par acte en date du 25 janvier 2021, Madame [E] a fait assigner Monsieur [Z] devant le juge aux affaires familiales du tribunal judiciaire d'Épinal aux fins de voir ordonner l'ouverture des opérations de comptes, liquidation et partage de l'indivision [E] / [Z], et voir Monsieur [Z] condamner à verser différentes sommes.

Par jugement contradictoire en date du 3 février 2023, le juge aux affaires familiales du tribunal judiciaire d'Épinal a pour l'essentiel :

Ordonné qu'il soit procédé aux opérations de comptes, liquidation et partage de l'indivision ayant existé entre Monsieur [Z] et Madame [E] ;

Désigné Maître [H] [W], notaire à [Localité 12] (88), [Adresse 3] pour procéder aux opérations de comptes, de liquidation et partage ;

Commis le juge aux affaires familiales du cabinet 1 du service des affaires familiales du Tribunal judiciaire d'Épinal pour surveiller ces opérations, et en cas d'empêchement tout juge aux affaires familiales du tribunal judiciaire d'Épinal ;

Constaté qu'il est dû par Monsieur [Z] une indemnité d'occupation pour la période du 11 septembre 2017 jusqu'au 18 septembre 2019 ;

Confié au notaire la mission d'évaluer le montant de l'indemnité d'occupation ;

Constaté qu'il y aura lieu d'intégrer au compte de l'indivision les bénéfices tirés de la vente d'électricité à EDF grâce aux panneaux photovoltaïques ;

Débouté Madame [E] de sa demande de provision de 5 000 € ;

Débouté Madame [E] de sa demande de provision de 3 885,33 € ;

Débouté Madame [E] tendant au constat d'une récompense à son égard de 26 425,96 euros :

Débouté Madame [E] de sa demande de provision de 13 212,98 €;

Débouté les parties du surplus de leurs demandes plus amples ou contraires;

Débouté les parties de leurs demandes sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

Ordonné l'emploi des dépens en frais privilégiés de partage ;

Ordonné l'exécution provisoire.

Par déclaration au greffe en date du 14 juillet 2023, Madame [E] a interjeté appel de ce jugement dans ses dispositions relatives à ses demandes de provision et récompenses.

Aux termes de ses dernières conclusions transmises le 18 mars 2024, Madame [E] demande à la cour de :

Déclarer Madame [E] recevable et bien fondée en son appel,

Y faisant droit,

Infirmer le jugement rendu le 3 février 2023 par Madame le Juge aux Affaires Familiales d'Epinal en ce qu'il a :

o Débouté Madame [E] de sa demande de provision de 5.000 €,

o Débouté Madame [E] de sa demande de provision de 3.885,33 €,

o Débouté Madame [E] tendant au constat d'une récompense à son égard de 26.425,96 €,

o Débouté Madame [E] de sa demande de provision de 13.212,98€,

o Débouté Madame [E] de ses demandes plus amples ou contraires,

Débouter Monsieur [Z] de l'ensemble de ses demandes, fins et prétentions et le débouter de tout éventuel appel incident,

Dire et Juger que Monsieur [Z] est redevable envers l'indivision du produit de la revente d'électricité du 1er septembre 2017 au 1er octobre 2019,

Condamner Monsieur [Z] à verser à Madame [E] une provision de 5.000 €,

Dire et Juger que le couple s'est séparé en septembre 2017,

Dire et juger que le Notaire désigné devra faire les comptes entre les parties à compter de cette date notamment en tenant compte des mouvements financiers sur le compte joint,

Dire et Juger que l'indivision [E]/[Z] est redevable d'une récompense à Madame [E] d'un montant de 26.425,96 € au titre des sommes qu'elle a versées et qui ont servi à rembourser le crédit immobilier et le crédit concernant les panneaux photovoltaïques,

Dire et Juger que Monsieur [Z] devra restituer les sommes versées par Madame [E] sur le compte joint au-delà de ces 26.425,96 € soit la somme de 637,39 €,

Dire et Juger que le Notaire commis devra faire les comptes entre les parties,

Condamner Monsieur [Z] à verser à Madame [E] la somme de 3.000,00 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamner Monsieur [Z] aux entiers frais et dépens de l'instance dont distraction au profit de maître Cyrille Gauthier, avocat aux offres de droit.

Aux termes de ses dernières conclusions transmises le 21 février 2024, Monsieur [Z] demande à la cour de :

Confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions,

Par conséquent,

Débouter Madame [E] de l'ensemble de ses demandes, fins et prétentions,

Déclarer Madame [E] recevable mais mal fondée en ses demandes,

Donner acte à Monsieur [Z] qu'il ne s'oppose pas à l'ouverture des opérations de partage,

Ordonner l'ouverture des opérations de comptes, liquidation et partage de l'indivision [E] / [Z],

Commettre tel notaire qu'il plaira au Tribunal de nommer pour surveiller les opérations de partage,

Commettre tel Notaire que le Tribunal entendra désigner, pour procéder aux opérations de partage, et à cette fin, dresser un état liquidatif établissant les comptes entre les copartageants, la masse partageable, les droits des parties et l'éventuelle composition des lots,

Dire et juger les demandes d'indemnité d'occupation et de récompenses de Madame [E] mal fondées,

Débouter Madame [E] de ces demandes,

Condamner Madame [E] aux entiers dépens de l'instance ainsi qu'à verser à Monsieur [Z] une somme de 1 500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi que 3 000 euros à hauteur de Cour.

En application des disposition de l'article 455 du Code de procédure civile, la cour renvoie aux conclusions des parties pour l'exposé des moyens.

L'ordonnance de clôture est en date du 21 mars 2024.

MOTIFS DE LA DÉCISION

À titre préliminaire, il convient de rappeler qu'en application de l'article 562 du code de procédure civile, l'appel ne défère à la cour que la connaissance des chefs de jugement qu'il critique expressément et de ceux qui en dépendent.

Dans ces conditions, la cour n'est pas saisie des chefs du jugement dont il est sollicité la confirmation par les 2 parties ou qui ne sont pas contestés aux termes de leur appel.

Tel est le cas en l'espèce des prétentions relatives au partage judiciaire, à la désignation du notaire et à la mission générale du notaire de faire les comptes entre les parties, à la créance de l'indivision relative au produit de la revente d'électricité et la date de séparation du couple en septembre 2017.

En application des articles 562 et 954 du code de procédure civile, la partie qui demande la confirmation du jugement ne peut solliciter au titre de ses prétentions une demande contraire à celle prise dans le jugement.

En l'espèce, M. [Z] sollicite la confirmation du jugement querellé en toutes ses dispositions pour ensuite demander à ce que la demande d'indemnité d'occupation présentée par Mme [E] soit rejetée.

En l'absence de demande d'infirmation, la cour n'est pas saisie de cette prétention de M. [Z].

En application de l'article 954 du code de procédure civile, la cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif et n'examine les moyens au soutien de ces prétentions que s'ils sont invoqués dans la discussion.

Mme [E], si elle fait valoir dans ses moyens qu'il n'y aurait pas lieu de tenir compte de certaines charges particulières pour l'évaluation de l'indemnité d'occupation, comme l'a mentionné le premier juge dans sa motivation, elle ne fait aucune demande de ce chef dans le dispositif de ses conclusions. Il convient de relever que, par ailleurs, le juge n'a pas repris cette mention dans son dispositif.

La cour n'est donc pas saisie de cette demande.

De même, si M. [Z] réclame, dans ses moyens, la restitution des allocations familiales perçues par Mme [E] ainsi que la fixation d'une créance pour le règlement du solde du crédit pour les panneaux solaires et les intérêts de remboursement par anticipation, il ne fait aucune demande de ces chefs dans le dispositif de ses conclusions.

La cour n'est donc pas saisie de ces demandes.

Sur les créances de Mme [E] à l'encontre de l'indivision

À titre préliminaire, il convient de rappeler qu'en l'absence de mariage, les sommes réclamées par Mme [E] ne peuvent être qualifiées de récompenses mais de créances soit à l'encontre de l'indivision soit à l'encontre de son ancien concubin.

Aucune disposition légale ne réglant la contribution des concubins aux charges de la vie commune, chacun d'eux doit supporter définitivement les dépenses de la vie courante exposées. En effet, si les concubins ne sont tenus d'aucune obligation de contribuer aux charges de la vie commune, ils ont néanmoins l'obligation naturelle de le faire. Cette obligation naturelle, par son exécution, devient une obligation civile.

Pour le même motif, aucun fondement ne permet d'établir des comptes entre les concubins.

Il ne peut être invoqué l'enrichissement injustifié, qui ne doit pas suppléer l'absence d'obligation légale entre concubins, même en cas de répartition disproportionnée des dépenses de la vie courante.

M. [Z] et Mme [E] étaient titulaires d'un compte de dépôt joint.

Même après leur séparation en septembre 2017, ils ont continué à le faire fonctionner comme auparavant : chacun d'eux alimentait ce compte, qui servait autant à l'un qu'à l'autre aux dépenses courantes de leur vie personnelle et au paiement des deux crédits communs (emprunt immobilier et emprunt relatif à la pose de panneaux photovoltaïques).

Il convient de relever que durant toute la période entre septembre 2017 et avril 2019, les enfants ont résidé dans l'ancien domicile conjugal avec M. [Z], sans versement d'une contribution à l'entretien et à l'éducation des enfants par Mme [E], la première décision fixant cette contribution datant d'octobre 2019.

Ce mode de fonctionnement permettait ainsi à Mme [E] d'exécuter son obligation légale d'entretien des enfants.

À la lecture des relevés de compte, il apparaît que le salaire de Mme [E] a été viré sur ce compte-joint jusqu'en juillet 2018, M. [Z], qui n'avait pas alors d'emploi stable, faisant des virements selon ses disponibilités ( de 300 à 1900 euros). À compter de septembre 2018, le salaire de M. [Z] sera viré sur ce compte, soit environ 1 300 euros par mois et Mme [E] faisant uniquement des virements ( de 300 à 1 600 euros).

Dans ces conditions, le jugement sera confirmé en ce qu'il a débouté Mme [Z] de sa demande de créance d'un montant de 26 425,96 euros et elle sera déboutée, à hauteur d'appel, de sa demande de restitution d'une somme de 637,39 euros et de celle de donner mission au notaire de faire les comptes entre les parties en tenant compte des mouvements financiers sur le compte joint.

Sur la demande de provision de 5 000 euros

En l'absence de toute évaluation ou éléments d'évaluation des créances de l'indivision envers M. [Z] au titre de l'indemnité d'occupation et des revenus tirés de la revente de la production d'électricité par les panneaux photovoltaïques, étant relevé que des versements de ce chef apparaissent sur les relevés du compte joint, il n'est pas possible de connaître les droits éventuels de Mme [E] dans la liquidation de l'indivision.

Dès lors, le jugement sera confirmé en ce qu'il a débouté Mme [E] de ce chef de demande.

Sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile

Le jugement de première instance sera confirmé en ce qu'il a débouté les parties de leurs demandes respectives au titre de l'article 700 et en ce qu'il a ordonné l'emploi des dépens en frais privilégiés de partage.

À hauteur d'appel, Mme [E], partie perdante, sera condamnée aux dépens ainsi qu'au paiement d'une somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Dès lors, elle sera déboutée de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour, par arrêt contradictoire, publiquement et par mise à disposition au greffe,

Confirme le jugement rendu le 3 février 2023 par le juge aux affaires familiales du tribunal judiciaire d'Épinal en ce qui concerne :

- le rejet de la demande de Mme [K] [E] au titre de la créance de 26 425,96 euros,

- le rejet de la demande de provision de 5000 euros,

- le rejet des demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- les dépens,

Y ajoutant,

Déboute Mme [K] [E] de sa demande de restitution d'une somme de 637,39 euros et de celle de donner mission au notaire de faire les comptes entre les parties en tenant compte des mouvements financiers sur le compte joint,

Condamne Mme [K] [E] aux dépens d'appel,

Condamne Mme [K] à payer à M. [T] [Z] la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile à hauteur d'appel,

Déboute Mme [K] [E] de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile à hauteur d'appel.

L'arrêt a été prononcé par sa mise à disposition au Greffe de la Cour le dix sept Juin deux mille vingt quatre, par Madame FOURNIER, greffier, conformément à l'article 450 alinéa 2 du Code de Procédure Civile.

Et Madame la Présidente a signé le présent arrêt ainsi que le Greffier.

Signé : I. FOURNIER.- Signé : C. BOUC.-

Minute en huit pages.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Nancy
Formation : 3ème chambre - section 1
Numéro d'arrêt : 23/01554
Date de la décision : 17/06/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 23/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-06-17;23.01554 ?
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