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13/06/2024 | FRANCE | N°23/01421

France | France, Cour d'appel de Nancy, Chambre sociale-2ème sect, 13 juin 2024, 23/01421


ARRÊT N° /2024

PH



DU 13 JUIN 2024



N° RG 23/01421 - N° Portalis DBVR-V-B7H-FGLW







Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de NANCY

21/00398

14 juin 2023











































COUR D'APPEL DE NANCY

CHAMBRE SOCIALE - SECTION 2













APPELANTE :



Association VANDOEUVRE NANCY VOLLEY-BALL -

V.N.V.B. Prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 4]

[Localité 1]

Représentée par Me Vincent LOQUET de la SELARL FILOR AVOCATS, substitué par Me DUMINIL, avocats au barreau de NANCY









INTIMÉE :



Madame [P] [I]

[Adresse 2]

[Localité 1]

Repré...

ARRÊT N° /2024

PH

DU 13 JUIN 2024

N° RG 23/01421 - N° Portalis DBVR-V-B7H-FGLW

Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de NANCY

21/00398

14 juin 2023

COUR D'APPEL DE NANCY

CHAMBRE SOCIALE - SECTION 2

APPELANTE :

Association VANDOEUVRE NANCY VOLLEY-BALL - V.N.V.B. Prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 4]

[Localité 1]

Représentée par Me Vincent LOQUET de la SELARL FILOR AVOCATS, substitué par Me DUMINIL, avocats au barreau de NANCY

INTIMÉE :

Madame [P] [I]

[Adresse 2]

[Localité 1]

Représentée par Me Laura KOSNISKY-LORDIER, avocat au barreau de NANCY

COMPOSITION DE LA COUR :

Lors des débats et du délibéré,

Président : WEISSMANN Raphaël,

Conseillers : BRUNEAU Dominique,

STANEK Stéphane,

Greffier lors des débats : RIVORY Laurène

DÉBATS :

En audience publique du 28 Mars 2024 ;

L'affaire a été mise en délibéré pour l'arrêt être rendu le 13 Juin 2024 ; par mise à disposition au greffe conformément à l'article 450 alinéa 2 du Code de Procédure Civile ;

Le 13 Juin 2024, la Cour après en avoir délibéré conformément à la Loi, a rendu l'arrêt dont la teneur suit

EXPOSÉ DU LITIGE ET PRÉTENTIONS RESPECTIVES DES PARTIES.

Mme [P] [I] a été engagée sous contrat de travail à durée indéterminée, par l'association VANDOEUVRE NANCY VOLLEY-BALL (ci-après VNVB) à compter du 03 novembre 2014, en qualité d'agent de développement.

La salariée ayant obtenu le diplôme d'entraineur dans le cadre d'une formation professionnelle, elle a occupé le poste d'entraineur adjoint à compter du 01 septembre 2017 pour la saison 2017-2018, suivant avenant temporaire à son contrat de travail.

Un second avenant temporaire a été signé par les parties pour la saison 2018-2019.

A compter du 20 mars 2019, Mme [P] [I] a été placée en arrêt de travail pour maladie, prolongé jusqu'au 02 mai 2021.

Par décision du 28 septembre 2020 de la CPAM de Meurthe-Moselle, la salariée a obtenu la prise en charge au titre de la législation sur les maladies professionnelles.

Par décision du 03 mai 2021 de la médecine du travail dans le cadre d'une visite de reprise, Mme [P] [I] a été déclarée inapte à son poste et à tout emploi au sein de l'association VNVB.

Par courrier du 07 mai 2021, la salariée a été notifiée de l'impossibilité de procéder à son reclassement au sein de l'association VNVB.

Par courrier du 12 mai 2021, elle a été convoquée à un entretien préalable au licenciement fixé au 26 mai 2021, auquel la salariée ne s'est pas présentée.

Par courrier du 01 juin 2021, Mme [P] [I] a été licenciée pour inaptitude avec impossibilité de reclassement.

Par requête du 16 septembre 2021, Mme [P] [I] a saisi le conseil de prud'hommes de Nancy, aux fins :

- de voir annuler de son licenciement pour inaptitude,

- de condamner l'association VNVB à lui verser les sommes de:

- 35 328,00 euros de dommages et intérêts pour harcèlement moral, subsidiairement sur le quantum la somme de 21 000,00 euros,

- à titre subsidiaire, 35 328,00 euros de dommages et intérêts pour non-respect de l'obligation de sécurité de résultat, subsidiairement sur le quantum la somme de 21 000,00 euros,

- 76 544,00 euros de dommages et intérêts pour licenciement nul, subsidiairement sur le quantum la somme de 45 000,00 euros,

- à titre subsidiaire, 26 496,00 euros de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, subsidiairement sur le quantum la somme de 15 500,00 euros,

- 7 693,67 euros à titre de rappel d'heures supplémentaires pour la période de juin 2018 à décembre 2018, outre la somme de 769,36 euros de congés payés afférents,

- 3 659,13 euros de rappel d'heures supplémentaires sur la période de janvier 2019 à mars 2019, outre la somme de 365,91 euros de congés payés afférents,

- 17 664,00 euros à titre d'indemnité forfaitaire de travail dissimulé,

- 258,12 euros au titre du reliquat d'indemnité spéciale de licenciement,

- 2 150,18 euros au titre du reliquat d'indemnité compensatrice de préavis, outre la somme de 215,02 euros au titre du reliquat de congés payés afférents,

- de condamner l'association VNVB aux entiers frais et dépens de l'instance,

- d'ordonner l'exécution provisoire au visa de l'article 515 du code de procédure civile,

- d'appliquer les intérêts au taux légal en vigueur.

A titre reconventionnel, l'association VNVB sollicite la condamnation de Mme [P] [I] au paiement de la somme de 15 937,92 euros à titre de remboursement des loyers indument pris en charge.

Vu le jugement du conseil de prud'hommes de Nancy rendu le 14 juin 2023 qui a:

- reconnu le harcèlement moral dont a été victime Mme [P] [I] au sein de l'association VANDOEUVRE NANCY VOLLEY-BALL,

- dit que l'inaptitude d'origine professionnelle de Mme [P] [I] prononcée par le médecin du travail a pour origine le harcèlement moral subi par Mme [P] [I],

- prononcé la nullité du licenciement pour inaptitude de Mme [P] [I] notifié le 01 juin 2021 à celle-ci,

- débouté Mme [P] [I] de sa demande de rappel de salaires,

- l'a déboutée de sa demande d'indemnisation pour travail dissimulé,

- condamné l'association Vandoeuvre Nancy Volley-Ball aux sommes suivantes :

- 45 000,00 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement nul,

- 21 000,00 euros à titre de dommages et intérêts pour préjudice résultant du harcèlement moral,

- 2 000,00 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- débouté l'association Vandoeuvre Nancy Volley-Ball de ses demandes reconventionnelles,

- ordonné l'exécution provisoire de la décision conformément à l'article R.1454-28 du code du travail,

- condamné l'association aux entiers dépens de l'instance.

Vu l'appel formé par l'association VNVB le 04 juillet 2023,

Vu l'appel incident formé par Madame [P] [I] le 17 novembre 2023,

Vu l'article 455 du code de procédure civile,

Vu les conclusions de l'association VNVB déposées sur le RPVA le 21 février 2024, et celles de Mme [P] [I] déposées sur le RPVA le 26 février 2024,

Vu l'ordonnance de clôture rendue le 13 mars 2024,

L'association VNVB demande à la cour:

- de débouter Mme [P] [I] de son appel incident, ainsi que de l'ensemble de ses demandes, fins et prétentions,

- d'infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a :

- reconnu le harcèlement moral dont a été victime Mme [P] [I] au sein de l'association,

- dit que l'inaptitude d'origine professionnelle de Mme [P] [I] prononcée par le médecin du travail a pour origine le harcèlement moral subi par Mme [P] [I],

- prononcé la nullité du licenciement pour inaptitude de Mme [P] [I] notifié le 01 juin 2021 à celle-ci,

- condamné l'association aux sommes suivantes :

- 45 000,00 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement nul,

- 21 000,00 euros à titre de dommages et intérêts pour préjudice résultant du harcèlement moral,

- 2 000,00 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- débouté l'association de ses demandes reconventionnelles,

- ordonné l'exécution provisoire de la décision conformément à l'article R.1454-28 du code du travail,

- condamné l'association aux entiers dépens de l'instance,

- de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a :

- débouté Mme [P] [I] de sa demande de rappel de salaires,

- débouté Mme [P] [I] de sa demande d'indemnisation pour travail dissimulé,

*

Statuant à nouveau :

- de dire et juger que les demandes de rappels d'heures supplémentaires antérieures au 15 septembre 2018 sont prescrites, et par conséquent irrecevables,

En tout état de cause :

- de débouter Mme [P] [I] de l'intégralité de ses demandes, fins et prétentions,

*

Reconventionnellement :

- de condamner Mme [P] [I] à payer à l'association VNVB la somme de 15 937,92 euros à titre de remboursement des loyers indument pris en charge,

- de la condamner à payer à l'association la somme de 2 500,00 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile pour la première instance,

- de condamner Mme [P] [I] aux entiers dépens,

- d'autoriser l'association, en cas de condamnations éventuelles, à échelonner leur paiement sur une période de 24 mois,

*

Y ajoutant :

- de condamner Mme [P] [I] à payer à l'association la somme de 2 500,00 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile pour l'appel,

- de condamner Mme [P] [I] aux entiers dépens.

Mme [P] [I] demande à la cour:

- de confirmer le jugement de première instance du 14 juin 2023 en ce qu'il a :

- reconnu le harcèlement moral dont a été victime Mme [P] [I] au sein de l'association Vandoeuvre Nancy Volley-Ball ,

- dit que l'inaptitude d'origine professionnelle de Mme [P] [I] prononcée par le médecin du travail a pour origine le harcèlement moral qu'elle a subi,

- prononcé la nullité du licenciement pour inaptitude notifié le 01 juin 2021 à celle-ci,

- condamné l'association à des dommages et intérêts au titre du préjudice subi résultant du harcèlement moral et à des dommages et intérêts pour licenciement nul,

- condamné l'associationà la somme de 2 000,00 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile

- débouté l'association de ses demandes reconventionnelles,

- d'infirmer le jugement entrepris en ce qu'il:

- l'a déboutée de sa demande de rappel de salaires,

- l'a déboutée de sa demande d'indemnisation au titre du travail dissimulé,

- l'a déboutée sur le quantum de ses demandes principales de dommages et intérêts pour harcèlement moral et licenciement nul,

- l'a déboutée de sa demande de reliquat d'indemnité spéciale de licenciement et d'indemnité compensatrice de préavis,

*

Statuant à nouveau :

**A titre principal, sur les heures supplémentaires et les indemnités de rupture :

- de dire et juger qu'elle a réalisé 494 heures supplémentaires de juin à décembre 2018 et 227 heures supplémentaires sur l'année 2019 qui ne lui ont pas été rémunérées par l'association VNVB,

- de dire et juger les demandes de paiement d'heures supplémentaires réalisées sur les mois de juin, août et septembre 2018 non prescrites et donc recevables,

- de retenir un salaire mensuel de référence d'un montant de 2 944,00 euros bruts sur les trois derniers mois (décembre 2018, janvier et février 2019) précédant l'arrêt de travail du mois de mars 2019,

- de dire et juger le délit de travail dissimulé commis par l'association VNVB caractérisé,

- de condamner l'association VNVB à lui payerles sommes de:

- 7 693,67 euros à titre de rappel d'heures supplémentaires pour la période de juin 2018 à décembre 2018,

- 769,36 euros de congés payés afférents,

- 3 659,13 euros de rappel d'heures supplémentaires sur la période de janvier 2019 à mars 2019,

- 365,91 euros de congés payés afférents,

- 17 664,00 euros à titre d'indemnité forfaitaire de travail dissimulé,

- 258,12 euros au titre du reliquat d'indemnité spéciale de licenciement,

- 2 150,18 euros au titre du reliquat d'indemnité compensatrice de préavis,

- 215,02 euros au titre du reliquat de congés payés afférents,

**A titre subsidiaire :

- de dire et juger les demandes d'heures supplémentaires réalisées sur le mois de septembre 2018 non prescrites et donc recevables,

- de condamner l'association VNVB à lui payer les sommes de:

- 6 288,62 euros à titre de rappel d'heures supplémentaires pour la période de septembre 2018 à décembre 2018,

- 628,86 euros de congés payés afférents,

- 3 659,13 euros de rappel d'heures supplémentaires sur la période de janvier 2019 à mars 2019,

- 365,91 euros de congés payés afférents,

- 17 664,00 euros à titre d'indemnité forfaitaire de travail dissimulé,

- 258,12 euros au titre du reliquat d'indemnité spéciale de licenciement,

- 2 150,18 euros au titre du reliquat d'indemnité compensatrice de préavis,

- 215,02 euros au titre du reliquat de congés payés afférents,

*

**A titre principal, sur le harcèlement moral et le licenciement nul :

- de reconnaître le harcèlement moral dont elle a été victime au sein de l'association VNVB,

- de dire et juger que son inaptitude médicale a pour origine le harcèlement moral qu'elle a subi au sein de l'association VNVB,

- de dire et juger le licenciement qui lui a été notifié nul,

- de retenir un salaire mensuel de référence d'un montant de 2 944,00 euros bruts sur les trois derniers mois (décembre 2018, janvier et février 2019) précédant l'arrêt de travail du mois de mars 2019,

- en conséquence, de condamner l'association VNVB à lui payer les sommes de:

- 35 328,00 euros de dommages et intérêts pour harcèlement moral,

- 76 544,00 euros de dommages et intérêts pour licenciement nul,

**Subsidiairement, sur le quantum :

- de retenir un salaire mensuel de référence d'un montant de 1 724,55 euros bruts sur les trois derniers mois (décembre 2018, janvier et février 2019) précédant l'arrêt de travail du mois de mars 2019,

- en conséquence, de condamner l'association VNVB à lui payer les sommes de:

- 21 000,00 euros de dommages et intérêts pour harcèlement moral,

- 45 000,00 euros de dommages et intérêts pour licenciement nul,

**A titre subsidiaire, sur le manquement à l'obligation de sécurité et le licenciement sans cause réelle et sérieuse :

- de dire et juger que l'association VNVB a manqué à son obligation de sécurité à son égard,

- de dire et juger que son inaptitude a pour origine le manquement de l'association VNVB à son obligation de sécurité privant ainsi le licenciement notifié le 01 juin 2021 de cause réelle et sérieuse,

- en conséquence, de condamner l'association VNVB à lui payer les sommes suivantes :

- 26 496,00 euros de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- subsidiairement sur le quantum la somme de 15 500,00 euros,

*

En toute hypothèse :

- de condamner l'association VNVB a lui verser la somme de 6 000,00 euros au titre du préjudice distinct subi du fait des témoignages et moyens de défenses adverses invoqués à hauteur d'appel,

- de débouter l'association VNVB de l'intégralité de ses demandes reconventionnelles,

- de dire et juger que l'ensemble des condamnations à intervenir portera intérêt au taux légal en vigueur,

- de condamner l'association VNVB aux entiers frais et dépens de l'instance,

- de condamner l'association à lui payer la somme de 2 000,00 euros nets au titre de l'article 700 du code de procédure civile de première instance,

- de condamner l'association VNVB à lui payer la somme de 2 500,00 euros nets au titre de l'article 700 du code de procédure civile à hauteur d'appel.

SUR CE, LA COUR ;

La cour renvoie pour plus ample exposé des prétentions et moyens des parties aux conclusions déposées sur le RPVA par l'association VNVB le 21 février 2024 et par Mme [P] [I] le RPVA le 26 février 2024.

- Sur les heures supplémentaires.

- Sur la prescription.

L'association VNVB expose que les demandes relatives au paiement des heures supplémentaires antérieures au 15 septembre 2018 sont irrecevables comme prescrites.

Motivation.

L'article L 3245-1 du code du travail dispose que l'action en paiement ou en répétition du salaire se prescrit par trois ans à compter du jour où celui qui l'exerce a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer. La demande peut porter sur les sommes dues au titre des trois dernières années à compter de ce jour ou, lorsque le contrat de travail est rompu, sur les sommes dues au titre des trois années précédant la rupture du contrat.

Il ressort du dossier que Mme [P] [I] a été licenciée le 1er juin 2021 ;

Elle est donc fondée à présenter des demandes de paiement de rémunérations pour la période du 1er juin 2018 au 1er juin 2021.

- Sur le montant des rémunérations.

Mme [P] [I] demande de voir infirmer le jugement entrepris sur ce point, et sollicite de voir condamner l'association VNVB à lui payer des sommes au titre des heures supplémentaires accomplies.

L'association VNVB conteste la demande, soutenant d'une part que les élements apportés par Mme [I] au soutient de sa demande ne sont pas probants, et qu'en tout état de cause les bases de ses calculs notamment concernant les repos compensateurs sont erronés . Qu'en tout état de cause, les heures supplémentaires alléguées n'ont pas fait l'objet d'une demande de la part de la salariée.

Motivation.

Il ressort des dispositions de l'article L 3171-4 du code du travail en sa rédaction applicable au litige qu'en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l'appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu'il prétend avoir accomplies afin de permettre à l'employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d'y répondre utilement en produisant ses propres éléments. Le juge forme sa conviction en tenant compte de l'ensemble de ces éléments au regard des exigences rappelées aux dispositions légales et réglementaires précitées. Après analyse des pièces produites par l'une et l'autre des parties, dans l'hypothèse où il retient l'existence d'heures supplémentaires, il évalue souverainement, sans être tenu de préciser le détail de son calcul, l'importance de celles-ci et fixe les créances salariales s'y rapportant.

Mme [P] [I] apporte aux débats des décomptes des horaires qu'elle prétend avoir effectués (pièces n° 3-1, 3-2 et 19 de son dossier), qui font apparaître, pour les années 2018 et 2019, des temps de travail hebdomadaires pouvant aller jusqu'à 77 heures ; elle présente donc des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu'elle prétend avoir accomplies afin de permettre à l'employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d'y répondre utilement en produisant ses propres éléments.

L'association VNVB n'apporte pour sa part aucun élément relatif aux modalités de contrôle des heures de travail mis en place en son sein ; s'agissant des repos compensateurs, les pièces n° 5 et 6 du dossier de l'association sont relatives au décompte des congés payés pris par Mme [I] et ne constituent pas la démonstration du prétendu bénéfice des repos complémentaires dont aurait bénéficié celle-ci.

Par ailleurs, il ressort d'une attestation établie par Mme [D] [J], ancien membre du comité directeur de l'association (pièce n° 4-2 du dossier de Mme [I]), que ' la charge de travail de [P] était...considérable: 7 jours sur 7, bien au delà des 35 heures réglementaires...De nombreuses heures de travail nocturnes ont été réalisées.' ; qu'en conséquence, Mme [P] [I] a nécessairement bénéficié de l'accord de l'employeur pour la réalisation des heures supplémentaires effectuées.

En conséquence, il sera fait droit à la demande en son principe et la décision entreprise sera infirmée sur ce point.

Au regard des éléments apportés par Mme [P] [I], il sera fait droit à la demande pour les sommes de:

- 7 693,67 euros à titre de rappel d'heures supplémentaires pour la période de juin 2018 à décembre 2018 outre la somme de 769,36 euros au titre des congés payés afférents,

- 3 659,13 euros de rappel d'heures supplémentaires sur la période de janvier 2019 à mars 2019, outre la somme de 365,91 euros au titre des congés payés afférents.

- Sur la demande au titre du travail dissimulé.

Mme [P] [I] expose que les heures supplémentaires qu'elle a effectuées ne figurent pas sur ses bulletins de paie ; que cette omission est volontaire et constitue le délit de travail dissimulé.

Motivation.

L'article L.8221-5, 2°, du code du travail dispose notamment qu'est réputé travail dissimulé par dissimulation d'emploi salarié le fait pour tout employeur de se soustraire intentionnellement à la délivrance d'un bulletin de paie ou d'un document équivalent défini par voie réglementaire, ou de mentionner sur le bulletin de paie ou le document équivalent un nombre d'heures de travail inférieur à celui réellement accompli, si cette mention ne résulte pas d'une convention ou d'un accord collectif d'aménagement du temps de travail conclu en application du titre II du livre Ier de la troisième partie ;

Toutefois, la dissimulation d'emploi salarié prévue par ces textes n'est caractérisée que s'il est établi que l'employeur a agi de manière intentionnelle.

Compte tenu de l'activité de l'association VNVB et des conditions particulière de l'exercice de cette activité, l'intention dissimulatrice de l'employeur n'est pas démontrée.

La décision entreprise sera confirmée sur ce point.

- Sur les reliquats d'indemnité.

Mme [P] [I] expose que les indemnités qui lui on été accordées ne tiennent pas compte de l'impact des heures supplémentaires de telles façon que la rémunération prise en compte pour établir ces indemnités est plus faible que sa rémunération réelle.

Motivation.

Il a été retenu précédemment que Mme [P] [I] a effectué des heures supplémentaires qui ne lui ont pas été réglées ;

Compte tenu de celles-ci, sa rémunération mensuelle moyenne brut s'établit à la somme de 2944 euros et non 1724,55 euros.

Dès lors, il sera fait droit à la demande à hauteur de:

- 258,12 euros au titre du reliquat d'indemnité spéciale de licenciement,

- 2 150,18 euros au titre du reliquat d'indemnité compensatrice de préavis, outre la somme de 215,02 euros au titre du reliquat de congés payés afférents.

- Sur le harcèlement moral.

Mme [P] [I] expose qu'elle a fait l'objet d'un harcèlement moral se caractérisant d'une part par le comportement de l'entraineur de l'équipe, et d'autre part par ses conditions de travail ; que ce harcèlement a entraîné son inaptitude et son départ de l'association.

L'association VNVB conteste la demande.

Motivation.

Aux termes de l'article L.1152-1 du code du travail, aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel ;

L'article L.1154-1 du même code prévoit qu'en cas de litige, le salarié concerné présente des éléments de fait qui permettent de laisser supposer l'existence d'un harcèlement et il incombe alors à l'employeur, au vu de ces éléments, de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement ;

Sur les faits relatifs au comportement de M. [T], entraîneur de l'équipe, il ressort de l'attestation établie par Mme [D] [J], que Mme [P] [I] était 'soumise à une persécution quotidienne par le biais de textos envoyés parfois très tardivement dans la soirée, lui demandant un travail considérable en termes de volume horaire...' ; que Mme [J] indique avoir entendu au sujet de Mme [I] 'des propos dénigrants...au sujet du niveau des jeunes joueuses' ; qu'il 'arrivait même à ce dernier (M. [T]) d'envoyer des textos à [P] pour exiger d'elle un travail à réaliser alors qu'il ne pouvait ignorer qu'elle n'était pas en mesure de le faire immédiatement puisqu'elle état en déplacement avec l'équipe jeunes' ; que l'attitude de l'entraîneur principal [M. [T]] à l'égard de [P] était très déplacée, par exemple les soirs de match de l'équipe professionnelle, alors qu'elle s'activait à installer le filet...son collègue la regardait sans l'aider, assis sur une chaise' alors que 'les entraîneurs des autres équipes professionnelles n'agissent absolument pas de la même manière et travaillent conjointement avec leurs adjoints au service de leur équipe' ; qu'elle était 'convaincue que l'entraîneur principal insidieusement voulu 'se débarrasser' de son adjointe en essayant de la faire 'craquer' psychologiquement' ;

Il ressort également d'une attestation établie par M. [R] [S], membre du comité directeur de l'association (pièce n° 4-3 id), que M. [T] lui a demandé de 'faire pression pour virer [P] car sa relation avec elle était impossible' et qu'il a informé le président de l'association que la relation entre M. [T] et Mme [I] était 'humiliante pour elle'.

Par ailleurs, il ressort des deux attestations précitées que la direction de l'association a été informée de l'attitude de M. [T] vis à vis de Mme [I] mais qu'aucune décision ni initiative n'a été prise dans l'intérêt de celle-ci.

Si l'association VNVB produit des attestations faisant état de la personnalité 'difficile' de Mme [P] [I] et de l'incompatibilité d'humeur' existant entre elle et M. [T] (pièces n° 15, 30, 31 et 32 de son dossier), ces élements ne sont pas contradictoires avec les faits évoqués par les attestations précédemment examinées.

Dès lors, les faits allégués sont établis.

S'agissant de la surcharge de travail, il a été relevé précédemment que Mme [P] [I] a effectué des horaires hebdomadaires de travail excédant largement les 35 heures légales, et dépassant à de nombreuses reprises les 60 heures hébdomadaires.

En conséquence, les faits sont établis.

Ces faits constituent des éléments qui permettent de laisser supposer l'existence d'un harcèlement.

En réponse sur le premier point, l'association VNVB soutient que si Mme [I] était soumise à un stress professionnel, celui-ci était inhérent à ses fonctions, et qu'il n'est pas anormal que dans ces conditions les relations entre collègues puissent être tendues sans que cette situation puisse être considéré comme constitutive d'un harcèlement.

Toutefois, il ressort des attestations examinées précédemment que l'attitude de M. [T] vis à vis de Mme [I] excédait la notion de 'tension entre collègues', ces attestations évoquant un comportement humiliant de la part de M. [T] et une volonté manifeste de la faire 'craquer', étant précisé que M. [T] n'était pas un simple collègue mais le supérieur de Mme [I].

Sur le second point, les pièces précitées établissent l'existence de temps de travail extrêmement importants et l'absence régulière du bénéfice pour la salariée du repos hebdomadaire.

L'association VNVB ne démontre donc pas que les faits dénoncés par Mme [P] [I] sont étranger à tout harcèlement.

Par ailleurs, il ressort du dossier et en particulier:

- de l'attestation établie par Mme [D] [J] que celle-ci a accompagné Mme [I] dans un service hospitalier le 19 mars 2019 ; que celle-ci présentait un état d'angoisse important, une tension artérielle très élevée et a été prise en charge par un interne en psychiatrie ;

- des pièces n° 12-1 à 12-4 de son dossier que Mme [P] [I] a bénéficié par la suite de plusieurs arrêts de travail ;

- de la pièce n° 8 de son dossier qu'elle a été suivie dans le cadre du centre psychothérapique de [Localité 3] durant plusieurs mois ;

- que le Docteur [O] a établi le 26 juin 2019 un certificat (pièce n° 8 id) aux termes duquel Mme [I] présentait 'un burn-out avec épuisement psychique et physique'.

Compte tenu de ce qui précède, il convient de constater que Mme [P] [I] a subi les agissements répétés de harcèlement moral ayant pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel.

C'est par une exacte appréciation des éléments du dossier que les premiers juges ont fixé:

- à la somme de 21 000 euros le montant de l'indemnisation due au titre du préjudice subi du fait du harcèlement moral ; la décision entreprise sera confirmée sur ce point.

- à la somme de 45 000 euros le montant de l'indemnité pour licenciement nul ;

La décision entreprise sera confirmée sur ces points.

- Sur la demande de délai de paiement.

L'association VNVB sollicite un délai de 24 mois pour se libérer des sommes mises à sa charge, exposant qu'elle se trouve en difficulté financière et que tant la perennité des emploi que sa survie seraient menacés sans une telle mesure ; elle produit aux débats (pièce n° 27 de son dossier) une notification de la Ligue Nationale de Volley-ball en date du 27 juin 2013 qui fait état d'une situation nette négative du club au 30 juin 2022 à hauteur de 225 000 euros, soit 17 % de son budget, et d'un plan d'apurement sur trois saisons qui porterait sur une somme de 72 000 euros pour la saison 2023/2024 et une somme de 50 000 euros pour la saison 2024/ 2025 ; que dans ce document le président du club expose qu'il attend d'une part une aide exceptionnelle des collectivités locales et une progression important des revenus issus des partenariats ;

L'association ne produit pas d'élément permettant d'apprécier sa situation économique et financière actuelle.

Dès lors, la demande sera rejetée.

- Sur la demande en dommage et intérêts relatif au 'préjudice distinct subi du fait des témoignages et moyens de défense adverses invoqués à hauteur d'appel'.

Mme [P] [I] expose que l'association VNVB a produit aux débats des témoignages et attestations qui mettent en cause son honneur et son professionnalisme de façon humiliante pour elle.

Toutefois, il ne ressort pas des documents apportés au dossier par l'association VNVB que celle-ci a outrepassé ses droits à faire valoir ses moyens de défense.

La demande sera donc rejetée.

- Sur la demande reconventionnelle de l'association VNVB.

L'association VNVB expose qu'elle a réglé par erreur le loyer du logement occupé par Mme [P] [I] durant plusieurs années, cet avantage étant lié au contrat de joueuse pro de l'intéressée, alors qu'elle est employée depuis 2014 sous une autre qualité et que cet avantage ne figurait pas dans le CDI conclu en 2014 ; elle demande donc de se voir restituer la somme de 15 937,92 euros.

Mme [P] [I] s'oppose à la demande ; elle soutient que le logement qu'elle occupait était lié à ses fonctions, et que l'avantage figurait sur ses bulletins de paie.

Motivation.

Il ressort des dispositions des articles 1302 à 1302-3 du code civile que tout paiement suppose une dette, ce qui a été reçu sans être dû est sujet à restitution.

Il ressort des bulletins de salaire de Mme [P] [I] pour les années 2019 et 2020 que figure sur ces documents la mention 'Avantage en nature-Logement au Forfait' ;

Au regard de cet élément, il convient de constater que l'association VNVB a librement et volontairement pris en charge le paiement du loyer du logement occupé par sa salariée ; ce paiement ne procède donc pas d'une erreur, et il ne peut donner lieu à répétition.

La demande sera rejetée et la décision entreprise sera confirmée sur ce point.

L'association VNVB qui succombe partiellement supportera les dépens de l'instance.

Il apparaît inéquitable de laisser à la charge de Mme [P] [I] l'intégralité des frais irrépétibles qu'elle a exposés ; il sera fait droit à la demande sur ce point à hauteur de 2000 euros.

PAR CES MOTIFS:

La Cour, chambre sociale, statuant par arrêt contradictoire mis à disposition au greffe et après débats en audience publique et après en avoir délibéré,

INFIRME le jugement rendu le 14 juin 2023 par le conseil de prud'hommes de Nancy dans le litige opposant Mme [P] [I] à l'association VANDOEUVRE NANCY VOLLEY-BALL en ce qu'il a débouté Mme [P] [I] de ses demandes relatives à des rappels de rémunération ;

STATUANT A NOUVEAU sur ce point :

CONDAMNE l'association VANDOEUVRE NANCY VOLLEY-BALL à payer à Mme [P] [I] les sommes de:

- 7 693,67 euros à titre de rappel d'heures supplémentaires pour la période de juin 2018 à décembre 2018 outre la somme de 769,36 euros au titre des congés payés afférents,

- 3 659,13 euros de rappel d'heures supplémentaires sur la période de janvier 2019 à mars 2019, outre la somme de 365,91 euros au titre des congés payés afférents ;

FIXE le montant du salaire mensuel brut moyen de Mme [P] [I] à la somme de 2944 euros ;

CONDAMNE l'association VANDOEUVRE NANCY VOLLEY-BALL à payer à Mme [P] [I] les sommes de:

- 258,12 euros au titre du reliquat d'indemnité spéciale de licenciement,

- 2 150,18 euros au titre du reliquat d'indemnité compensatrice de préavis, outre la somme de 215,02 euros au titre du reliquat de congés payés afférents ;

CONFIRME le jugement entrepris pour le surplus ;

Y ajoutant:

DEBOUTE les parties de leurs autres demandes ;

CONDAMNE l'association VANDOEUVRE NANCY VOLLEY-BALL aux dépens d'appel ;

LA CONDAMNE à payer à Mme [P] [I] une somme de 2000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ,

Ainsi prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Et signé par Monsieur Raphaël Weissmann, Président de Chambre et par Madame Laurène Rivory, Greffier.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT DE CHAMBRE

Minute en treize pages


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Nancy
Formation : Chambre sociale-2ème sect
Numéro d'arrêt : 23/01421
Date de la décision : 13/06/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 19/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-06-13;23.01421 ?
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