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13/06/2024 | FRANCE | N°22/02764

France | France, Cour d'appel de Nancy, Chambre sociale-2ème sect, 13 juin 2024, 22/02764


ARRÊT N° /2024

PH



DU 13 JUIN 2024



N° RG 22/02764 - N° Portalis DBVR-V-B7G-FC2X







Cour d'Appel d'Epinal

21/00003

07 novembre 2022











































COUR D'APPEL DE NANCY

CHAMBRE SOCIALE - SECTION 2













APPELANTES :



S.E.L.A.R.L. VOINOT ET ASSOCIES MANDATAIRES JUDICIAIRES Prise en la pe

rsonne de son représentant légal, pour ce, domiciliée audit siège Es qualité de mandataire judiciaire de l'Association LYCEE PROFESSIONNEL ET TECHNOLOGIQUE FRASSATI

[Adresse 1]

[Localité 5]

Représentée par Me Hervé MONTAUT de la SELAFA ACD, avocat au barreau D'EPINAL substitué par Me WEIRIG, avocat au bar...

ARRÊT N° /2024

PH

DU 13 JUIN 2024

N° RG 22/02764 - N° Portalis DBVR-V-B7G-FC2X

Cour d'Appel d'Epinal

21/00003

07 novembre 2022

COUR D'APPEL DE NANCY

CHAMBRE SOCIALE - SECTION 2

APPELANTES :

S.E.L.A.R.L. VOINOT ET ASSOCIES MANDATAIRES JUDICIAIRES Prise en la personne de son représentant légal, pour ce, domiciliée audit siège Es qualité de mandataire judiciaire de l'Association LYCEE PROFESSIONNEL ET TECHNOLOGIQUE FRASSATI

[Adresse 1]

[Localité 5]

Représentée par Me Hervé MONTAUT de la SELAFA ACD, avocat au barreau D'EPINAL substitué par Me WEIRIG, avocat au barreau de NANCY

Association LYCEE PROFESSIONNEL ET TECHNOLOGIQUE FRASSATI prise en la personne de son représentant légal, pour ce, domiciliée audit siège

[Adresse 2]

[Localité 7]

Représentée par Me Hervé MONTAUT de la SELAFA ACD, avocat au barreau D'EPINAL substitué par Me WEIRIG, avocat au barreau de NANCY

INTIMÉE :

Madame [W] [X]

[Adresse 4]

[Localité 6]

Représentée par Me Laure DESFORGES, avocat au barreau D'EPINAL

PARTIE INTERVENANTE

CGEA AGS DE [Localité 3] prise en la personne de son représentant légal pour ce domicilié au siège social

[Adresse 8]

[Adresse 8]

[Localité 3]

Ni comparant ni représenté

COMPOSITION DE LA COUR :

Lors des débats et du délibéré,

Président : WEISSMANN Raphaël,

Conseillers : BRUNEAU Dominique,

STANEK Stéphane,

Greffier lors des débats : RIVORY Laurène

DÉBATS :

En audience publique du 28 Mars 2024 ;

L'affaire a été mise en délibéré pour l'arrêt être rendu le 13 Juin 2024 ; par mise à disposition au greffe conformément à l'article 450 alinéa 2 du Code de Procédure Civile ;

Le 13 Juin 2024, la Cour après en avoir délibéré conformément à la Loi, a rendu l'arrêt dont la teneur suit :

EXPOSÉ DU LITIGE ET PRÉTENTIONS RESPECTIVES DES PARTIES.

Mme [W] [X] a été engagée sous contrat de travail à durée indéterminée, par l'association Lycée Professionnel et Technologique Frassati, à compter du 01 février 2018, en qualité de secrétaire comptable assistante de direction.

La convention collective nationale de l'enseignement privé indépendant s'applique au contrat de travail.

Par courrier du 27 mai 2020 remis en mains propres, Mme [W] [X] a été convoquée à un entretien préalable au licenciement fixé au 08 juin 2020.

Par second courrier du 09 juin 2020, Mme [W] [X] a été convoquée à un entretien préalable au licenciement fixé au 17 juin 2020.

Par courrier du 26 juin 2020, Mme [W] [X] a été licenciée pour motif économique, avec adhésion au contrat de sécurisation professionnelle et fin de la relation contractuelle fixée au 08 juillet 2020.

Par requête du 21 décembre 2020, Mme [W] [X] a saisi le conseil de prud'hommes d'Epinal, aux fins :

- de voir déclarer abusif son licenciement, ne reposant sur aucune cause réelle et sérieuse,

- de dire la procédure de licenciement pour économique irrégulière,

- de dire que le motif économique invoqué n'est pas fondé,

- d'enjoindre à l'association Lycée Professionnel et Technologique Frassati de produire les critères d'ordre appliquées à son licenciement,

- de dire que l'association Lycée Professionnel et Technologique Frassati a manqué à son obligation effective, sérieuse et loyale de recherche de reclassement,

- de la condamner à lui verser les sommes de:

- 1 724,49 euros à titre d'indemnité pour licenciement irrégulier,

- 5 000,00 euros au titre du licenciement abusif,

- 12 000,00 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice économique subi,

- 4 000,00 euros pour le préjudice moral subi,

- 2 000,00 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens,

- d'ordonner l'exécution provisoire.

Par jugement rendu le 05 juillet 2022, le tribunal judiciaire d'Epinal a ouvert la procédure de redressement judiciaire de l'association Lycée Professionnel et Technologique Frassati, et désigné la S.E.L.A.R.L Voinot et Associés Mandataires Judiciaires en qualité de mandataire judiciaire.

Vu le jugement du conseil de prud'hommes d'Epinal rendu le 07 novembre 2022 qui a:

- dit que le licenciement de Mme [W] [X] est dépourvu de cause réelle et sérieuse,

- dit que les effectifs salariés sont supérieurs à 11 équivalents temps plein pour une période supérieure à 12 mois précédant le licenciement,

- condamné l'association Lycée Professionnel et Technologique Frassati à verser à Mme [W] [X] les sommes de:

- 5 000,00 euros à titre d'indemnité pour licenciement abusif,

- 1 724,49 euros à titre d'indemnité du fait de l'irrégularité de la procédure de licenciement,

- 1 500,00 euros à titre de dommages-intérêts pour le préjudice économique,

- 700,00 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- ordonné en application de l'article L.1235-4 du code du travail le remboursement par l'employeur fautif aux organismes intéressés de tout ou partie des indemnités de chômage versées au salarié licencié, du jour de son licenciement au jour du jugement prononcé, dans la limite de six mois d'indemnités de chômage en l'espèce 3 mois,

- débouté Mme [W] [X] de ses autres demandes et du surplus de ses demandes

- débouté l'association Lycée Professionnel et Technologique Frassati de ses demandes

- condamné l'association Lycée Professionnel et Technologique Frassati aux dépens de l'instance.

Vu l'appel formé par la S.E.L.A.R.L Voinot et Associés Mandataires Judiciaires, en qualité de mandataire judiciaire de l'association Lycée Professionnel et Technologique Frassati, le 08 décembre 2022,

Vu l'appel incident formé par Mme [W] [X] le 05 juin 2023,

Vu l'article 455 du code de procédure civile,

Vu les conclusions de la S.E.L.A.R.L Voinot et Associés Mandataires Judiciaires, en qualité de mandataire judiciaire de l'association Lycée Professionnel et Technologique Frassati, déposées sur le RPVA le 07 mars 2023, et celles de Mme [W] [X] déposées sur le RPVA le 05 juin 2023,

Vu l'ordonnance de clôture rendue le 20 septembre 2023,

Vu l'arrêt rendu par la cour de céans le 21 décembre 2023 qui a:

- rabattu l'ordonnance de clôture rendue le 20 septembre 2023 ;

- rouvert les débats ;

- invité les parties à appeler en la cause l'Assurance Garantie des Salaires ;

- renvoyé l'affaire à la mise en état ;

Vu l'assignation en intervention forcé délivré au Centre de gestion et d'études AGS de [Localité 3] par Mme [W] [X] le 13 février 2024 ;

Vu l'ordonnance de clôture rendue le 28 mars 2024,

La S.E.L.A.R.L Voinot et Associés Mandataires Judiciaires, en qualité de mandataire judiciaire de l'association Lycée Professionnel et Technologique Frassati, demande à la cour:

- d'infirmer le jugement du conseil de prudhommes d'Epinal rendu le 07 novembre 2022 en ce qu'il a :

- dit que le licenciement de Mme [W] [X] est dépourvu de cause réelle et sérieuse,

- dit que les effectifs salariés sont supérieurs à 11 équivalents temps plein pour une période supérieure à 12 mois précédant le licenciement

- condamné l'association Lycée Professionnel et Technologique Frassati à verser à Mme [W] [X] les sommes suivantes :

- 5 000,00 euros à titre d'indemnité pour licenciement abusif,

- 1 724,49 euros à titre d'indemnité du fait de l'irrégularité de la procédure de licenciement,

- 1 500,00 euros à titre de dommages-intérêts pour le préjudice économique,

- 700,00 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- ordonné en application de l'article L.1235-4 du code du travail le remboursement par l'employeur fautif aux organismes intéressés de tout ou partie des indemnités de chômage versées au salarié licencié, du jour de son licenciement au jour du jugement prononcé, dans la limite de six mois d'indemnités de chômage en l'espèce 3 mois,

- débouté l'association Lycée Professionnel et Technologique Frassati de ses demandes

- condamné l'association Lycée Professionnel et Technologique Frassati aux dépens de l'instance.

- de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté Mme [W] [X] du surplus de ses demandes,

*

Statuant à nouveau :

*A titre principal :

- de dire le licenciement de Mme [W] [X] justifié par un motif économique,

- en conséquence, de débouter Mme [W] [X] de l'ensemble de ses demandes,

*Subsidiairement,

- de limiter le montant des dommages et intérêts pouvant être réclamé par Mme [W] [X] à la somme de 862,25 euros,

*

- de condamner Mme [W] [X] à verser à l'association Lycée Professionnel et Technologique Frassati les sommes de:

- 2 000,00 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile pour la procédure en 1ère instance,

- 3 000,00 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile pour la procédure en appel,

- de condamner Mme [W] [X] aux entiers dépens de l'instance.

Mme [W] [X] demande à la cour:

- de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a :

- dit que le licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse,

- dit que les effectifs salariés sont supérieurs à 11 équivalents temps plein pour une période supérieure à 12 mois précédant le licenciement,

- condamné l'association Lycée Professionnel et Technologique Frassati à lui verser les sommes de:

- 5 000,00 euros à titre d'indemnité pour licenciement abusif,

- 1 724,49 euros à titre d'indemnité du fait de l'irrégularité de la procédure de licenciement,

- 1 500,00 euros à titre de dommages-intérêts pour le préjudice économique,

- condamné l'association Lycée Professionnel et Technologique Frassati aux dépens de l'instance,

- en conséquence, de fixer sa à la procédure de redressement judiciaire de l'association Lycée Professionnel et Technologique Frassati aux sommes suivantes :

- 5 000,00 euros au titre du licenciement abusif,

- 1 724,49 euros à titre d'indemnité pour licenciement irrégulier,

- en tant que de besoin, de condamner la S.E.L.A.R.L Voinot et Associés Mandataires Judiciaires, en qualité de mandataire judiciaire de l'association Lycée Professionnel et Technologique Frassati, à lui régler ces sommes,

*

Statuant à nouveau :

- de fixer sa créance à la procédure de redressement judiciaire de l'association Lycée Professionnel et Technologique Frassati aux sommes de: 

- 12 000,00 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice économique subi,

- 4 000,00 euros de dommages et intérêts pour préjudice moral subi,

- en tant que de besoin, de condamner la S.E.L.A.R.L Voinot et Associés Mandataires Judiciaires, en qualité de mandataire judiciaire de l'association Lycée Professionnel et Technologique Frassati, à lui régler ces sommes,

- de fixer sa créance à la procédure de redressement judiciaire de l'association Lycée Professionnel et Technologique Frassati aux sommes de: 

- 2 500,00 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, en première instance,

- 3 000,00 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, à hauteur d'appel,

- en tant que de besoin, de condamner la société S.E.L.A.R.L Voinot et Associés Mandataires Judiciaires, en qualité de mandataire judiciaire de l'association Lycée Professionnel et Technologique Frassati, à lui régler ces sommes.

Le Centre de gestion et d'études AGS de [Localité 3] n'a pas comparu.

SUR CE, LA COUR ;

La cour renvoie expressément, pour plus ample exposé des prétentions et moyens des parties, aux conclusions déposées sur le RPVA par la société S.E.L.A.R.L Voinot et Associés Mandataires Judiciaires, en qualité de mandataire judiciaire de l'association Lycée Professionnel et Technologique Frassati, le 07 mars 2023, et par Mme [W] [X] le 05 juin 2023.

- Sur la procédure de licenciement.

- Sur la qualité du signataire de la lettre de licenciement.

Mme [W] [X] expose que d'une part l'authenticité de la signature du président figurant sur le'pouvoir' donné au directeur pour procéder au licenciement est douteuse, et d'autre part que, conformément aux dispositions de l'article L 5425-8 du code du travail, le signataire de la lettre de licenciement, qui avait été licencié, ne pouvait exercer les mêmes fonctions en qualité de bénévole.

Sur le premier point, l'association Lycée Professionnel et Technologique Frassati apporte au dossier (pièce n° 31 de son dossier) un pouvoir donné le 27 avril 2020 par M. [M] [Z], président de l'association, à M. [E] [B], directeur de l'association, pour 'prendre en charge et mettre en oeuvre les procédures de licenciement économique qui sont envisagées'.

Ce pouvoir est accompagné d'une copie de la carte d'identité du président, dont la signature est similaire à celle figurant sur ce document.

Sur le second point, les dispositions de l'article L 5425-8 du code du travail n'ont pas pour effet de rendre irrégulières ou nulles les décisions prises par le représentant bénévole sur délégation régulière du représentant de la structure qui est son ancien employeur.

Dès lors, et étant constaté que le pouvoir a été confié au directeur de l'association antérieurement au 26 juin 2020, M. [E] [B] avait pouvoir et qualité pour procéder au licenciement de Mme [W] [X], et le grief sera rejeté.

- Sur la régularité de la notification du licenciement.

Mme [W] [X] expose que la notification de son licenciement est irrégulière en ce que d'une part le licenciement lui a été notifié le jour même de l'entretien préalable et que d'autre part cette décision ne lui a pas été notifiée par lettre recommandée conformément aux dispositions de l'article L 1232-6 du code du travail.

La société S.E.L.A.R.L Voinot et Associés Mandataires Judiciaires, en qualité de mandataire judiciaire de l'association Lycée Professionnel et Technologique Frassati, soutient que la procédure est régulière, la lettre du 17 juin 2020 ne constituant pas la notification du licenciement.

Motivation;

Il ressort des pièces n° 8 à 13 du dossier de l'appelante que:

- par courrier du 27 mai 2020, l'association Lycée Professionnel et Technologique Frassati a, par un courrier remis en mains propres à Mme [W] [X] le même jour, contenant les motifs d'un licenciement économique envisagé, convoqué la salariée à un entretien prévu le 8 juin 2020 ;

- le 8 juin 2020, Mme [W] [X] s'est vu remettre le dossier de présentation du contrat de sécurisation professionnelle ;

- l'association Lycée Professionnel et Technologique Frassati a, par un courrier présentant les mêmes caractéristiques que celui du 27 mai précédent, convoqué le même jour Mme [W] [X] à un entretien fixé au 17 juin 2020 ;

- par courrier du 17 juin 2020 reprenant les motifs par lesquels l'association Lycée Professionnel et Technologique Frassati estimait devoir envisager le licenciement de Mme [W] [X], celle-ci a été informée qu'elle disposait d'un délai d'option de 21 jours ;

- par lettre du 26 juin 2020, l'association Lycée Professionnel et Technologique Frassati a notifié à Mme [W] [X] son licenciement, ce courrier comprenant les mentions selon lesquelles elle pouvait se prononcer dans un délai de 21 jours suivant l'information qu'elle avait reçue et de ce qu'en cas de refus du CSP ce courrier constituerait la notification du licenciement.

Au regard de ce qui précède, il ne ressort pas du courrier adressé à Mme [W] [X] le 17 juin 2020 que la décision de prononcer son licenciement était prise par l'employeur à cette date.

Les dispositions de l'article L 1232-6 du code du travail ont pour objectif de prévenir toute contestation sur la date de notification du licenciement, la lettre recommandée pouvant être remplacée pour y pourvoir par une remise en main propre ; il ressort de la lettre du 26 juin 2020 que ce courrier a été remis en mains propre à Mme [W] [X], qui ne dénie pas sa signature.

Dès lors, la notification du licenciement est régulière et le grief sur ce point sera rejeté.

- Sur la mise en place du comité social et économique.

Mme [W] [X] expose que le licenciement est irrégulier en ce que cette décision devait être soumise au comité économique et social (CSE), mais que celui-ci n'a pas été constitué.

L'association Lycée Professionnel et Technologique Frassati soutient qu'au regard du nombre de salariés qu'elle employait à la date du licenciement, elle n'était pas soumise à la mise en place de cette institution.

Motivation.

Il ressort des dispositions de l'article L 2311-2 qu'un comité social et économique doit être mis en place dans les entreprises comptant au moins 11 salariés durant 12 mois consécutifs.

Mme [W] [X] apporte au dossier un tableau (pièce n° 24 de son dossier) faisant état que, sur les années 2019 et 2020, l'association comprenait un effectif au moins égal à 11 salariés en équivalent temps-plein.

L'association Lycée Professionnel et Technologique Frassati apporte de déclarations de temps partiel (pièces n° 23 et 24 de son dossier) faisant état de ce qu'elle comptait 9,7 salariés en mars 2019 et 11,25 salariés en mars 2020.

C'est par une exacte analyse de ces éléments que les premiers juges ont relevé que l'association Lycée Professionnel et Technologique Frassati n'apportait pas la preuve qu'elle comptait moins de 11 salariés pour la période de 12 mois consécutifs précédant la date du licenciement.

Dès lors, il convient de constater que l'association Lycée Professionnel et Technologique Frassati n'a pas consulté le CSE sur le licenciement projeté, et en conséquence que la procédure relative à cette décision est irrégulière sur ce point.

- Sur le motif économique du licenciement.

Mme [W] [X] expose que l'association Lycée Professionnel et Technologique Frassati ne démontre pas avoir été en situation de difficulté économique dans les mois précédant son licenciement.

L'association Lycée Professionnel et Technologique Frassati soutient avoir connu des difficultés importantes et verse sur ce point au dossier des documents comptables (pièces n° 35 et 36 de son dossier).

Il ressort toutefois de ces documents qu'ils visent une 'association collège Bienheureux-Frassati' et non l''association Lycée Professionnel et Technologique Frassati' figurant au contrat de travail et sur les bulletins de paie de Mme [W] [X] ;

Les documents apportés par l'association Lycée Professionnel et Technologique Frassati (pièces n° 37 à 42 de son dossier) indiquant que celle-ci a eu recours à de l'activité partielle et qu'elle est débitrice de sommes importantes vis à vis de l'URSSAF ne sont pas suffisants pour démontrer les difficultés économiques invoquées.

Compte tenu de ce qui précède, l'association Lycée Professionnel et Technologique Frassati ne démontre pas la réalité des difficultés économiques qu'elle allègue.

Dès lors, le licenciement de Mme [W] [X] par l'association Lycée Professionnel et Technologique Frassati est sans cause réelle et sérieuse, et la décision entreprise sera confirmée sur ce point.

- Sur les conséquences du licenciement abusif.

- Sur l'ancienneté de Mme [W] [X].

Mme [W] [X] expose que si elle a conclu avec l'association Lycée Professionnel et Technologique Frassati un contrat à durée indéterminée le 1er février 2018, elle a antérieurement été employée par l'association à compter du 1er septembre 2013 de telle façon que son ancienneté doit être calculée à partir de cette date.

L'association Lycée Professionnel et Technologique Frassati soutient que Mme [W] [X] a été salariée de l'association à plusieurs reprises mais que les dispositions de l'article L 1243-11 du code du travail ne sont pas applicables en l'espèce.

Motivation.

L'article L 1243-11 du code du travail dispose que lorsque la relation contractuelle de travail se poursuit après l'échéance du terme du contrat à durée déterminée, celui-ci devient un contrat à durée indéterminée ; le salarié conserve l'ancienneté qu'il avait acquise au terme du contrat de travail à durée déterminée.

Il ressort des pièces n° 1, 1.1 et 6 à 8 du dossier de Mme [W] [X] qu'elle a été liée à l'association Lycée Professionnel et Technologique Frassati pour les périodes des:

- 1er septembre 2013 au 29 février 2016 ;

- du 3 octobre 2016 au 2 octobre 2017 ;

- du 1er février 2018 au 8 juillet 2020.

Si Mme [W] [X] soutient qu'elle a été en arrêt maladie entre le 3 octobre 2017 et le 1er février 2018 et qu'elle a continué durant cette période à travailler pour l'association, elle n'en justifie pas.

Dès lors, l'ancienneté de Mme [W] [X] au titre de la présente procédure doit être considérée comme débutant le 1er février 2018.

- Sur l'indemnisation.

En préliminaire, il convient de rappeler qu'aux termes des dispositions de l'article L 1235-2 du code du travail applicables aux licenciements postérieurs au 1er janvier 2018, si la procédure de licenciement est frappée d'irrégularité mais que le licenciement est sans cause réelle est sérieuse, les indemnités dues à ces deux titres ne se cumulent pas ; dès lors, le jugement entrepris sera infirmé en ce qu'il a condamné l'association Lycée Professionnel et Technologique Frassati à payer à Mme [W] [X] la somme de 1724, 49 euros au titre de l'irrégularité de la procédure.

S'agissant de l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, il ressort du dossier que :

- Mme [I] [X] était, à la date du licenciement, âgée de 61 ans et avait une ancienneté dans l'entreprise de 2 années complètes ;

- sa rémunération mensuelle moyenne brut était de 1724 euros brut.

Mme [W] [X] ne justifie pas de sa situation professionnelle et financière postérieure au licenciement ; conformément aux dispositions de l'article L 1235-3 du code du travail, il sera fait droit à cette demande à hauteur de 6034 euros, et cette somme sera inscrite au passif de la procédure collective de l'association Lycée Professionnel et Technologique Frassati.

Mme [W] [X] sollicite une indemnisation au titre du préjudice moral qu'elle a subi en raison de ce qu'elle n'a pas pu poursuivre sa carrière professionnelle et a du accepter sa mise à la retraite.

Toutefois, elle ne justifie pas du préjudice qu'elle allègue de telle façon que cette demande se confond avec celle tendant à voir réparer le préjudice issu du licenciement abusif ; la décision entreprise sera infirmée sur ce point.

Enfin, Mme [W] [X] sollicite une indemnisation au titre du préjudice issu du caractère vexatoire et discriminatoire du licenciement ; toutefois, elle n'apporte aucun élément probatoire sur ce point, le seul fait d'avoir été licenciée ne constitue pas, à défaut d'autre démonstration, le caractère discriminatoire allégué.

La décision entreprise sera confirmée sur ce point.

Les conditions d'applications de l'article L 1235-4 du code du travail étant réunies, la décision entreprise sera confirmée sur ce point en son principe, sauf à préciser que le Centre de gestion et d'études AGS de [Localité 3] devra déclarer sa créance au passif de la procédure collective de l'association Lycée Professionnel et Technologique Frassati.

Les dépens d'appel seront inscrits en frais privilégiés de procédure collective.

Il apparaît inéquitable de laisser à la charge de Mme [W] [X] l'intégralité des frais irrépétibles qu'elle a supportés ; la société S.E.L.A.R.L Voinot et Associés Mandataires Judiciaires, en sa qualité de mandataire judiciaire de l'association Lycée Professionnel et Technologique Frassati, sera condamnée au paiement des sommes de 2000 euros au titre de la procédure de première instance et de 2500 euros à hauteur d'appel.

PAR CES MOTIFS:

La Cour, chambre sociale, statuant par arrêt réputé contradictoire mis à disposition au greffe et après débats en audience publique et après en avoir délibéré,

INFIRME le jugement rendu le 7 novembre 2022 par le conseil de prud'hommes d'Epinal dans le litige opposant Mme [W] [X] à l'association Lycée Professionnel et Technologique Frassati en ce qu'il a condamné l'association Lycée Professionnel et Technologique Frassati à verser à Mme [W] [X] les sommes de :

- 5 000,00 euros à titre d'indemnité pour licenciement abusif,

- 1 724,49 euros à titre d'indemnité du fait de l'irrégularité de la procédure de licenciement,

- 1 500,00 euros à titre de dommages-intérêts pour le préjudice économique,

- 700,00 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

STATUANT à nouveau sur ces points ;

FIXE la créance de Mme [W] [X] à la procédure collective de l'association Lycée Professionnel et Technologique Frassati à la somme de 6034 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

CONDAMNE la S.E.L.A.R.L Voinot et Associés Mandataires Judiciaires, en sa qualité de mandataire judiciaire de l'association Lycée Professionnel et Technologique Frassati, à payer à Mme [W] [X] la somme de 2000 euros au titre des frais irrépétibles exposés en première instance .

CONFIRME le jugement entreprise pour le surplus ;

Y AJOUTANT ;

CONDAMNE la S.E.L.A.R.L Voinot et Associés Mandataires Judiciaires, en sa qualité de mandataire judiciaire de l'association Lycée Professionnel et Technologique Frassati, à payer à Mme [W] [X] la somme 2500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile à hauteur d'appel ;

DEBOUTE les parties de leurs autres demandes ;

DIT que le Centre de gestion et d'études AGS de [Localité 3] devra déclarer sa créance dans le cadre de la procédure collective de l'association Lycée Professionnel et Technologique Frassati ;

DIT que les dépens d'appel seront inscrits en frais privilégiés de procédure collective.

DIT que la présente décision est opposable au Centre de Gestion et d'Etude AGS de [Localité 3] ;

DIT que le Centre d'études et de gestion de l'AGS de [Localité 3] ne devra procéder à l'avance des créances visées aux articles L. 3253-8 du code du travail que dans les termes et conditions résultant des dispositions des articles L. 3253-15, L. 3253-19, L. 3253-20, L. 3253-21, L. 3253-17 et D. 3253-5 du même code ;

DIT qu'il ne devra s'exécuter, toutes créances confondues, qu'à titre subsidiaire en l'absence de fonds disponibles et sur présentation d'un relevé présenté par le mandataire judiciaire ;

DIT que la garantie du Centre d'études et de gestion de l'AGS de [Localité 3] est plafonnée, toutes créances avancées pour le compte du salarié, à un des trois plafonds définis à l'article D. 3253-5 du code du travail ;

Ainsi prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Et signé par Monsieur Raphaël WEISSMANN, Président de Chambre, et par Madame Laurène RIVORY, Greffier.

LE GREFFIER LE PRESIDENT DE CHAMBRE

Minute en onze pages


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Nancy
Formation : Chambre sociale-2ème sect
Numéro d'arrêt : 22/02764
Date de la décision : 13/06/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 19/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-06-13;22.02764 ?
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