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06/06/2024 | FRANCE | N°23/01338

France | France, Cour d'appel de Nancy, Chambre sociale-2ème sect, 06 juin 2024, 23/01338


ARRÊT N° /2024

PH



DU 06 JUIN 2024



N° RG 23/01338 - N° Portalis DBVR-V-B7H-FGF4







Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de NANCY

F21/00260

26 mai 2023











































COUR D'APPEL DE NANCY

CHAMBRE SOCIALE - SECTION 2













APPELANTE :



Madame [C] [M]

[Adresse 2]

[L

ocalité 3]

Représentée par Me Frédérique MOREL, avocat au barreau de NANCY, substituée par Me Pierre-André BABEL, avocat au barreau d'EPINAL









INTIMÉE :



S.A. BNP PARIBAS agissant poursuites et diligences de son représentant légal pour ce domicilié audit siège

[Adresse 1]

[Localité 4]

Représentée par Me Cla...

ARRÊT N° /2024

PH

DU 06 JUIN 2024

N° RG 23/01338 - N° Portalis DBVR-V-B7H-FGF4

Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de NANCY

F21/00260

26 mai 2023

COUR D'APPEL DE NANCY

CHAMBRE SOCIALE - SECTION 2

APPELANTE :

Madame [C] [M]

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représentée par Me Frédérique MOREL, avocat au barreau de NANCY, substituée par Me Pierre-André BABEL, avocat au barreau d'EPINAL

INTIMÉE :

S.A. BNP PARIBAS agissant poursuites et diligences de son représentant légal pour ce domicilié audit siège

[Adresse 1]

[Localité 4]

Représentée par Me Clarisse MOUTON de la SELARL LEINSTER WISNIEWSKI MOUTON LAGARRIGUE, avocat au barreau de NANCY, substituée par Me Christophe FERREIRA SANTOS, avocat au barreau de PARIS

COMPOSITION DE LA COUR :

Lors des débats et du délibéré,

Président : WEISSMANN Raphaël,

Conseillers : BRUNEAU Dominique,

STANEK Stéphane,

Greffier lors des débats : PERRIN Céline

DÉBATS :

En audience publique du 21 Mars 2024 ;

L'affaire a été mise en délibéré pour l'arrêt être rendu le 06 Juin 2024 ; par mise à disposition au greffe conformément à l'article 450 alinéa 2 du Code de Procédure Civile ;

Le 06 Juin 2024, la Cour après en avoir délibéré conformément à la Loi, a rendu l'arrêt dont la teneur suit :

EXPOSÉ DU LITIGE ET PRÉTENTIONS RESPECTIVES DES PARTIES

Madame [C] [M] a été engagée sous contrat d'apprentissage, par la SA BNP PARIBAS à compter du 01 septembre 2007, en qualité de chargée d'accueil dans le cadre d'une formation en BTS Banque.

A compter du 01 septembre 2009, la relation contractuelle s'est poursuivie sous contrat à durée indéterminée avec reprise de son ancienneté au 03 septembre 2007.

Au dernier état de ses fonctions, elle occupait le poste de conseiller patrimonial.

La convention collective nationale de la banque s'applique au contrat de travail.

A compter du 18 septembre 2017, le temps de travail de la salariée a été fixé à temps partiel dans le cadre d'un congé parental, à hauteur de 80%, ce jusqu'au 01 avril 2019.

A compter du 02 novembre 2020, elle a été placée en arrêt de travail pour maladie.

Par courrier du 13 février 2021, Madame [C] [M] a démissionné de son poste de travail.

Par requête du 31 mai 2021, Madame [C] [M] a saisi le conseil de prud'hommes de Nancy, aux fins :

- de dire et juger que compte tenu de son caractère équivoque, sa démission doit être qualifiée en prise d'acte de la rupture,

- de dire et juger que la prise d'acte de la rupture doit être qualifiée en un licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- de condamner la SA BNP PARIBAS à lui verser les sommes suivantes :

- 11 828,77 euros à titre d'indemnité légale de licenciement,

- 35 231,05 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- 2 000,00 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens,

- d'ordonner l'exécution provisoire du jugement à intervenir.

Vu le jugement du conseil de prud'hommes de Nancy rendu le 26 mai 2023, lequel a :

- dit que les demandes de Madame [C] [M] ne sont pas suffisamment fondées,

- débouté Madame [C] [M] de l'intégralité de ses demandes,

- condamné Madame [C] [M] à payer à la SA BNP PARIBAS la somme de 50,00 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- mis la totalité des dépens à la charge de Madame [C] [M].

Vu l'appel formé par Madame [C] [M] le 22 juin 2023,

Vu l'article 455 du code de procédure civile,

Vu les conclusions de Madame [C] [M] déposées sur le RPVA le 22 janvier 2024, et celles de la SA BNP PARIBAS déposées sur le RPVA le 16 février 2024,

Vu l'ordonnance de clôture rendue le 21 février 2024,

Madame [C] [M] demande :

- de dire recevable et bien fondé son appel,

- d'infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a :

- dit que ses demandes ne sont pas suffisamment fondées,

- débouté l'appelante de l'intégralité de ses demandes,

- condamné la salariée à payer à la SA BNP PARIBAS la somme de 50,00 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- mis la totalité des dépens à sa charge,

Statuant à nouveau :

- de dire que compte tenu de son caractère équivoque, sa démission doit être qualifiée en prise d'acte de la rupture,

- de dire que la prise d'acte doit être qualifiée en un licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- de condamner la SA BNP PARIBAS à lui payer les sommes suivantes :

- 11 828,77 euros à titre d'indemnité légale de licenciement,

- 35 231,05 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- 4 000,00 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,

- de débouter la SA BNP PARIBAS de l'intégralité de ses demandes,

- de condamner la SA BNP PARIBAS aux éventuels dépens.

La SA BNP PARIBAS demande :

- de dire et juger Madame [C] [M] infondée en son appel interjeté le 22 juin 2023 du jugement rendu par le conseil de prud'hommes de Nancy le 26 mai 2023,

- de confirmer en toutes ses dispositions le jugement entrepris,

- de débouter Madame [C] [M] de l'ensemble de ses demandes, fins et prétentions,

- de condamner Madame [C] [M] à lui payer une somme de 2 500,00 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- de condamner Madame [C] [M] aux entiers dépens de l'instance et aux éventuels frais d'exécution forcée de la décision à intervenir.

SUR CE, LA COUR

Pour plus ample exposé sur les moyens et prétentions des parties, il est expressément renvoyé aux dernières écritures qu'elles ont déposées sur le RPVA, s'agissant de l'employeur le 16 février 2024, et en ce qui concerne la salariée le 22 janvier 2024.

Sur la démission

Mme [C] [M] fait valoir que sa démission est équivoque, dans la mesure où elle reproche à l'employeur, dans sa lettre de rupture, de ne pas avoir pris en compte sa souffrance au travail.

Elle affirme qu'elle faisait face à une surcharge de travail.

Elle indique que l'agence où elle travaillait a été classée « en difficulté » en 2020, et que la situation a perduré au moins jusque 2021.

L'appelante expose avoir averti son employeur dès le mois d'octobre 2019.

Elle précise avoir informé également les représentants du personnel et le médecin du travail.

Mme [C] [M] explique qu'en raison de cette situation elle a subi une dépression.

La société BNP PARIBAS fait valoir avoir mis en place depuis 2010 un dispositif de prévention des risques psycho-sociaux.

Elle indique que Mme [C] [M] n'a jamais émis le moindre grief ni soulevé la moindre difficulté avant son arrêt de travail du 02 novembre 2020.

L'employeur considère que Mme [C] [M] ne justifie pas de la réalité de la surcharge de travail alléguée, prétendument liée à un sous-effectif de l'agence de [Localité 6] les [Localité 5].

La société BNP PARIBAS explique que si la réorganisation de cette agence a conduit notamment à la suppression d'un poste de conseiller patrimonial en septembre 2019, elle visait à adapter sa structure à son activité. Elle précise que le 24 mai 2018, lors d'entretiens avec le gestionnaire de carrière, les conseillers patrimoniaux de l'agence ont confirmé qu'il n'y avait pas suffisamment de clientèle pour trois conseillers patrimoniaux.

L'intimée souligne que le portefeuille de clientèle de Mme [C] [M] a été ajusté en conséquence de son temps partiel à 80 %, et que lorsqu'elle a repris un temps plein à compter du 1er avril 2019, son portefeuille était de 608 clients au 23 octobre 2019, pour une moyenne au niveau des conseillers patrimoniaux de 647.

Elle ajoute que tous les comptes clients repris par Mme [C] [M] à compter de septembre 2019 n'étaient pas tous des comptes actifs.

La société BNP PARIBAS poursuit en indiquant que si un poste de conseiller patrimonial a été supprimé en septembre 2020 à l'agence de [Localité 6] les [Localité 5], en raison d'une diminution du nombre de clients, Mme [C] [M] ne justifie pas avoir eu à reprendre le moindre client du portefeuille du poste supprimé.

L'employeur précise qu'aucun des éléments produits par Mme [C] [M], datés antérieurement au refus de BNP le 07 janvier 2021 de sa demande de rupture conventionnelle, ne fait état du moindre grief à l'encontre de la banque.

La société BNP PARIBAS affirme qu'en réalité, ce n'est qu'après avoir été informée de son refus de conclure une rupture conventionnelle, que Mme [C] [M] a commencé à développer cette argumentation pour motiver sa démission.

Elle souligne que l'appelante a trouvé un nouvel emploi au sein d'une banque concurrente qu'elle occupe depuis le 16 mars 2021, soit le lendemain de la rupture de son contrat de travail, le nouveau contrat de travail ayant été conclu le 29 janvier 2021.

Motivation

- sur le caractère équivoque de la démission :

La société BNP PARIBAS ne discutant pas le caractère équivoque de la lettre de démission, mais argumentant sur la prise d'acte, il est établi que la démission présente un caractère équivoque, et que la lettre de rupture est une prise d'acte de la rupture.

- sur la prise d'acte de la rupture :

Mme [C] [M] renvoie à ses pièces suivantes :

- 45 : l'impression d'un site internet relatif à l'agence BNP PARIBAS de Dombasle sur Meurthe, indiquant « définitivement fermée » ;

- 46 : document d'évaluation d'une apprentie, établie par Mme [C] [M], en date du 25 octobre 2019, en qualité de tutrice ;

- 21, attestation de M. [G] [A], élu au CSE de l'entreprise ; il explique avoir été contacté par Mme [C] [M], alors en arrêt maladie, pour l'aider dans sa démarche de solliciter une rupture conventionnelle.

M. [A] complète son attestation par des copies de mails qu'il a envoyé à M. [D], gestionnaire individuel de carrière, et M. [Z], RGRH, supérieur hiérarchique de M. [D].

M. [A] fait état dans ses mails des arrêts maladie nombreux à l'agence de [Localité 6]. Il évoque également avec M. [D], en janvier 2021, puis avec M. [Z] en février 2021, la demande de rupture conventionnelle de Mme [C] [M] ;

- 30, attestation de Mme [N] [R], faisant état des problèmes d'organisation de l'agence dans laquelle elle travaillait avec Mme [C] [M], et de la surcharge de travail en découlant, et également générée par les arrêts maladie de collègues pour burn-out ;

Cette attestation respecte les prescriptions de l'article 202 du code de procédure civile.

Le fait que Mme [N] [R] ait reçu un blâme de la part de la société BNP PARIBAS le 04 mars 2020 (pièce 12 de l'intimée) ne permet pas de remettre en cause la fiabilité de cette attestation, et qu'il soit considéré comme le soutient la Banque que « manifestement elle doit nourrir une certaine animosité envers BNP Paribas » (page 21 de ses conclusions) dès lors que la société BNP PARIBAS indique en page 22 de ses écritures que Mme [N] [R] épouse [P] est toujours salariée de la banque.

- 31, procès-verbal de la réunion du CSE des 21 et 22 octobre 2020, faisant état des fermetures d'agences et réorganisations ;

- 32, procès-verbal de la réunion du CSE du 25 novembre 2020 ; le procès-verbal reprend les propos de l'élu CFTC sur l'agence de [Localité 6], faisant état d'un conseiller en longue maladie et de l'absence d'un autre conseiller ;

- 39, tract CFDT sur les risques psychosociaux ; il s'agit d'une communication générale, qui ne traite pas de la situation de l'agence de [Localité 6] ;

- 36, rapport social du CSE région Grand Est ;

- 8, mail de Mme [C] [M] à M. [E] [F], du 15 octobre 2019, dans lequel elle fait part de son ressenti négatif à la suite de la réunion collective qu'il a dirigée à l'agence ; elle lui fait grief de lui avoir reproché ses résultats, estimant faire le maximum, dans un esprit d'équipe ; elle lui reproche notamment d'avoir tenu ces propos : « l'année prochaine quand il faudra faire des choix je n'aurai aucun scrupule à en laisser sur le côté ».

Dans sa réponse du même jour, M. [F] ne conteste pas cette phrase.

- 10, son entretien d'évaluation pour 2019, soulignant dans ses écritures son commentaire suivant : « l'année 2019 a été la plus dure de ma carrière, en effet cette dernière a été marquée par de nombreux changements qui ont non seulement impacté ma charge de travail mais également mon état d'esprit » ;

Il convient de noter que dans son appréciation, le manager de Mme [C] [M] note : « L'année 2019 a été marquée par la suppression d'un poste de CP pour laquelle les clients ont été réaffectés en partie dans celui de [C]. Cette montée en charge a été initialement difficile à mettre en place mais [C] a, par la suite, su au quotidien mettre à profit cette nouvelle clientèle ».

- 12, « échanges d'emails d'octobre 2020 et justificatif entretien Skype » : cette pièce est un échange de mails sur une date de rendez-vous d'entretien à fixer.

- 34, échanges de sms avec « [U] », dans lesquels il est fait état, mais sans qu'ils soient précisés, de propos tenus par le « DT » à l'encontre des conseillers patrimoniaux (CP) ; il s'agit pour le reste de conversations sur la chaleur dans l'agence (juillet 2019), et du COVID au foyer de Mme [C] [M] ;

- 38, extrait du dossier médical (santé au travail) de Mme [C] [M] ; à la date du 24 octobre 2019, et à celle du 14 janvier 2020, le médecin du travail note ce que lui rapporte Mme [C] [M] : « Vient m'avertir de situation particulièrement difficile au niveau de l'agence de [Localité 6]. Etaient 10 il y a 2 ans, ne sont plus que 6 (') » (24/10/2019 ; « dégradation des conditions de travail dans l'agence de [Localité 6] en fin d'année.(') Dit qu'elle aidera moins ses collègues car l'aide qu'elle a apportée l'an dernier lui a causé du tort professionnellement et pour sa santé. (') Sent ses collègues en difficulté mais ne veut pas plonger ... (14/01/2020 ;

- 9, avis d'arrêt de travail du 17 au 19 octobre 2019 ;

- 13, avis d'arrêt de travail du 02 novembre 2020 au 15 mars 2021 ;

- 15, attestation de Mme [L], psychologue, en date du 07 février 2021 : « certifie avoir reçu en consultation psychologique Mme [C] [M] à plusieurs reprises entre le 18/11/2020 et le 9/12/2020. Elle présentait alors un syndrome dépressif en lien direct avec ses conditions de travail » ;

- 47, ordonnances du 02 novembre 2020, du 12 novembre 2020 et du 18 février 2021 ; Mme [C] [M] souligne dans ses écritures le SAFRALITE, qu'elle précise être un médicament pour l'équilibre émotionnel) et l'ALPRAZOLAM, qu'elle précise être un anxiolytique) ;

- 29, attestation de son époux M. [X] [M], qui fait état de la dégradation de la santé psychologique de son épouse, en lien avec un management défaillant et une surcharge de travail en raison d'un manque de personnel ;

La société BNP PARIBAS renvoie à ses pièces :

- 1 à 6 et 31, pour justifier de la mise en place en son sein d'un dispositif d'évaluation et de mesure du stress ;

- 13, son plan BDDF 2020, conduisant « à faire évoluer la structure de pilotage du réseau banque de détail en France (BDDF) » ;

- 30, attestation de M. [J] [D], gestionnaire individuel de carrière, qui explique avoir rencontré en mai 2018 [2028 indiqué par erreur '] l'ensemble du personnel de l'agence de [Localité 6], dont Mme [C] [M] qui lui a indiqué qu'elle n'avait « pas assez de matière » pour exercer son poste de conseiller patrimonial et qu'il n'y avait pas besoin d'un troisième conseiller patrimonial à l'agence ;

- 11, tableaux des effectifs de l'agence de [Localité 6] en mai 2018, au 31 décembre 2019 et au 31 décembre 2020.

L'effectif est de 6,6 en mai 2018, de 7 au 31 décembre 2019, et de 6 au 31 décembre 2020 (Mme [C] [M] étant comprise dans les absences) ;

- pièce adverse 5, pour souligner que lorsque la salariée était à temps partiel, elle avait un portefeuille de 442 clients, pour une moyenne des CP de 642 clients, et qu'en septembre 2019, alors qu'elle est repassée à temps plein, elle compte 608 clients, contre une moyenne pour les CP de 647.

Ces éléments ressortent des tableaux de situation au 26 mars 2019 et de situation au 23 octobre 2019.

Il convient toutefois de noter que la situation au 18 juin 2020 indique 660 clients pour une moyenne CP de 646, et que la situation au 25 septembre 2020 indique 682 clients, pour une moyenne des CP de 647 ;

- pièce 33, sa note en délibéré du 17 mai 2023, adressée au conseil des prud'hommes de [Localité 5]

- pièce 32, tableaux d'évolution des postes commerciaux du territoire de [Localité 5] entre le 31 décembre 2019 et le 31 décembre 2021.

Il apparaît que les effectifs sont passés de 61,6 au 31/12/2019, à 59,1 au 31/12/2020 et à 57,3 au 31/12/2021.

Il est indiqué que l'agence de [Localité 6] a perdu 1 ETPT en septembre 2020 ;

- pièce 15, mail de Mme [Y] [H] à M. [J] [D], du 16 novembre 2021, indiquant que « le poste CSI n'a jamais été proposé par mes soins à Mme [C] [M] » ;

- pièce 17, entretien d'évaluation annuelle 2019 de Mme [I] [O], justifiant qu'elle occupe le poste de conseiller spécialisé en immobilier ;

- pièce 7, « imprimé de mobilité » de MMe [C] [M] du 29 novembre 2017, justifiant de son affectation au poste de conseiller patrimonial ;

Il ressort de l'examen des éléments mis en avant par les parties, que Mme [C] [M] établit la surcharge de travail qu'elle explique avoir subi, ainsi que la dégradation de son état de santé qui s'en est suivi, sans que les pièces et les arguments de l'intimée ne les contredisent.

Dans ces conditions, la prise d'acte produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Le jugement sera réformé en ce qu'il a débouté Mme [C] [M] de cette demande.

Sur les conséquences financières de la rupture

- sur le salaire de référence

Mme [C] [M] indique que son salaire moyen était de 3063,57 euros, sur la base des salaires de février 2020 à janvier 2021, repris en page 24 de ses écritures.

La société BNP PARIBAS considère que son salaire moyen était de 2542,53 euros, en renvoyant à la pièce adverse 24, soit le bulletin de paie de mars 2021.

La société BNP PARIBAS ne discute pas du calcul de la salariée, alors que le salaire de référence est la moyenne des salaires des douze derniers mois.

Le salaire à retenir sera donc 3063,57 euros.

- sur l'indemnité de licenciement

Mme [C] [M] sollicite une indemnité de licenciement de 11 828,77 euros, en détaillant ses calculs en page 24 de ses conclusions.

A défaut de contestation subsidiaire par l'employeur des calculs et du montant réclamé, il sera fait droit à la demande.

- sur les dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

Mme [C] [M] réclame 35 231,05 euros de dommages et intérêts, en faisant valoir que si elle a retrouvé un emploi, elle a été contrainte d'accepter un poste de chargée de clientèle particuliers, dans un autre département, poste soumis à risque puisque comportant une période d'essai de 3 mois renouvelable une fois, et sans rémunération variable.

Elle fait également valoir avoir été affectée des manquements de son employeur.

La société BNP PARIBAS demande de limiter à titre subsidiaire le montant dû à 3 mois de salaire, pour un total de 7 627,29 euros, en faisant valoir qu'elle a trouvé un emploi dès le lendemain de la rupture, qu'elle perçoit un salaire annuel de bas bancaire supérieur à celui qui était le sien, et que son bulletin de paie de décembre 2022 fait apparaître un brut social cumulé supérieur à la rémunération qu'elle percevait auparavant.

Motivation

Aux termes des dispositions de l'article L1235-3 du code du travail, si le licenciement d'un salarié survient pour une cause qui n'est pas réelle et sérieuse, le juge peut proposer la réintégration du salarié dans l'entreprise, avec maintien de ses avantages acquis.

Si l'une ou l'autre des parties refuse cette réintégration, le juge octroie au salarié une indemnité à la charge de l'employeur, dont le montant est compris entre les montants minimaux et maximaux fixés dans les tableaux intégrés à l'article, dont le second concerne les entreprises employant habituellement moins de 11 salariés.

En l'espèce, Mme [C] [M] avait une ancienneté d'un peu plus de 13 ans.

Elle est susceptible de percevoir une indemnité comprise entre 3 mois et 11,5 mois de salaire, en application de l'article précité.

Il ressort du contrat de travail de Mme [C] [M] du 29 janvier 2021 (pièce 22 de l'appelante) qu'elle travaille à l'agence CIC de Commercy (55).

Si cette affectation est plus éloignée de son domicile ([Localité 3]) que [Localité 6], elle est située dans un rayon géographique raisonnable.

Son bulletin de paie de décembre 2022 fait apparaître un brut annuel de 35 795,74 euros, soit un montant mensuel moyen de 2 983 euros, inférieur à son ancien salaire de référence (3063 euros).

Elle est chargée de clientèle particuliers, alors qu'elle était conseiller patrimonial, poste plus valorisant, selon les conclusions des parties.

Dans ces conditions, il sera fait droit à sa demande à hauteur de 18 000 euros, sur la base de son salaire de référence.

Sur les dépens et les frais irrépétibles

Succombant à l'instance, la société BNP PARIBAS sera condamnée aux dépens, de première instance et d'appel, ainsi qu'à payer à Mme [C] [M] 2500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile, au titre de la première instance et de l'appel.

La société BNP PARIBAS sera déboutée de ses demandes à ces titres.

PAR CES MOTIFS

La Cour, chambre sociale, statuant par arrêt contradictoire mis à disposition au greffe, après débats en audience publique et après en avoir délibéré,

Infirme en toutes ses dispositions le jugement rendu par le conseil de prud'hommes de Nancy le 26 mai 2023 ;

Statuant à nouveau,

Dit que la prise d'acte de la rupture entraîne les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

Condamne la société BNP PARIBAS à payer à Mme [C] [M]:

- 11 828,77 euros à titre d'indemnité de licenciement,

- 18 000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

Y ajoutant,

Condamne la société BNP PARIBAS à payer à Mme [C] [M] 2 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, pour la procédure de première instance et la procédure en appel ;

Déboute la société BNP PARIBAS de sa demande fondée sur l'article 700 ;

Condamne la société BNP PARIBAS aux dépens, de première instance et d'appel.

Ainsi prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Et signé par Monsieur Raphaël WEISSMANN, Président de Chambre, et par Madame Laurène RIVORY, Greffier.

LE GREFFIER LE PRESIDENT DE CHAMBRE

Minute en onze pages


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Nancy
Formation : Chambre sociale-2ème sect
Numéro d'arrêt : 23/01338
Date de la décision : 06/06/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 13/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-06-06;23.01338 ?
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