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30/05/2024 | FRANCE | N°22/02557

France | France, Cour d'appel de Nancy, Chambre sociale-2ème sect, 30 mai 2024, 22/02557


ARRÊT N° /2024

PH



DU 30 MAI 2024



N° RG 22/02557 - N° Portalis DBVR-V-B7G-FCL7







Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de NANCY

20/00398

07 octobre 2022











































COUR D'APPEL DE NANCY

CHAMBRE SOCIALE - SECTION 2













APPELANTE :



Madame [N] [J]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Représentée par Me Nicolas LITAIZE-THIERY substitué par Me LAMBERT de l'AARPI BERNA AVOCATS ASSOCIES, avocats au barreau de NANCY









INTIMÉE :



Etablissement Public OFFICE PUBLIC DE L'HABITAT DE [Localité 4] A [Localité 3] pris en la personne de son représentant légal pour ce domicilié au siège soci...

ARRÊT N° /2024

PH

DU 30 MAI 2024

N° RG 22/02557 - N° Portalis DBVR-V-B7G-FCL7

Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de NANCY

20/00398

07 octobre 2022

COUR D'APPEL DE NANCY

CHAMBRE SOCIALE - SECTION 2

APPELANTE :

Madame [N] [J]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Représentée par Me Nicolas LITAIZE-THIERY substitué par Me LAMBERT de l'AARPI BERNA AVOCATS ASSOCIES, avocats au barreau de NANCY

INTIMÉE :

Etablissement Public OFFICE PUBLIC DE L'HABITAT DE [Localité 4] A [Localité 3] pris en la personne de son représentant légal pour ce domicilié au siège social

[Adresse 2]

[Adresse 2]

Représentée par Me Eric FILLIATRE substitué par Me NAUDIN de la SELARL FILOR AVOCATS, avocats au barreau de NANCY

COMPOSITION DE LA COUR :

Lors des débats et du délibéré,

Président : WEISSMANN Raphaël,

Conseillers : BRUNEAU Dominique,

STANEK Stéphane,

Greffier lors des débats : RIVORY Laurène

DÉBATS :

En audience publique du 22 Février 2024 ;

L'affaire a été mise en délibéré pour l'arrêt être rendu le 23 Mai 2024 ; par mise à disposition au greffe conformément à l'article 450 alinéa 2 du Code de Procédure Civile ; puis à cette date le délibéré a été prorogé au 30 Mai 2024;

Le 30 Mai 2024, la Cour après en avoir délibéré conformément à la Loi, a rendu l'arrêt dont la teneur suit :

EXPOSÉ DU LITIGE ET PRÉTENTIONS RESPECTIVES DES PARTIES

Madame [N] [J] a été engagée sous contrat de travail à durée indéterminée, par l'établissement public OFFICE PUBLIC DE L'HABITAT de [Localité 4], à compter du 27 janvier 2014, en qualité de secrétaire de direction.

La convention collective nationale des personnels des Offices Publics de l'Habitat s'applique au contrat de travail.

A compter du 01 janvier 2015, la salariée a occupé un poste d'assistante de direction générale.

En date du 11 octobre 2018, elle a été victime d'un accident du travail à la suite duquel elle a été placée en arrêt de travail pour accident du travail, jusqu'au 08 janvier 2019.

Du 13 mars au 09 septembre 2019, elle a été placée en arrêt de travail pour maladie.

Par décision du 10 septembre 2019 de la médecine du travail dans le cadre d'une visite de reprise, Madame [N] [J] a été déclarée inapte à son poste de travail.

Par courrier du 30 septembre 2019, la salariée a été convoquée à un entretien préalable au licenciement.

Par courrier du 11 octobre 2019, Madame [N] [J] a été licenciée pour inaptitude.

Par requête du 09 octobre 2020, Madame [N] [J] a saisi le conseil de prud'hommes de Nancy, aux fins :

- dire que son licenciement pour inaptitude est nul,

- de condamner l'établissement public OFFICE PUBLIC DE L'HABITAT à lui payer les sommes suivantes :

- 51 680,00 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement nul,

- 31 000,00 euros à titre de dommages et intérêts pour le harcèlement moral subi,

- 31 000,00 euros à titre de dommages et intérêts pour la discrimination subie,

- de dire qu'elle relève de la classification conventionnelle cadre, catégorie 3, niveau 1 du

1er janvier 2015 au 31 décembre 2015 et cadre, catégorie 3, niveau 2 à compter du 1er janvier 2016,

- par conséquent, de condamner l'établissement public OFFICE PUBLIC DE L'HABITAT de [Localité 4] à lui payer les sommes suivantes :

- 12 299,82 euros à titre de rappel de salaire du 1/01/2015 au 11/10/2019,

- 1 392,80 euros au titre des primes annuelles du 1/01/2015 au 11/10/2019,

- 1 369,26 euros au titre des congés payés afférent,

A titre subsidiaire :

- de condamner l'établissement public OFFICE PUBLIC DE L'HABITAT de [Localité 4] à lui payer la somme de 31 000,00 euros à titre de dommages et intérêts pour non-respect de l'obligation de sécurité de l'employeur,

En tout état de cause :

- de condamner l'établissement public OFFICE PUBLIC DE L'HABITAT de [Localité 4] à lui remettre les bulletins de paie et de l'attestation Pole Emploi rectifiés sous astreinte de 50,00 euros par jour à compter de la notification du jugement,

- condamner l'établissement public OFFICE PUBLIC DE L'HABITAT de [Localité 4] à lui payer la somme de 2 500,00 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Vu le jugement du conseil de prud'hommes de Nancy rendu le 07 octobre 2022, lequel a :

- dit et jugé que le licenciement pour inaptitude de Madame [N] [J] n'est pas nul,

- débouté Madame [N] [J] de l'ensemble de ses demandes,

- dit n'y avoir lieu de la remise des bulletins de paie et de l'attestation Pôle Emploi rectifiés sous astreinte,

- débouté les parties de leurs demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné Madame [N] [J] aux entiers dépens.

Vu l'appel formé par Madame [N] [J] le 07 novembre 2022,

Vu l'article 455 du code de procédure civile,

Vu les conclusions de Madame [N] [J] déposées sur le RPVA le 09 janvier 2024, et celles de l'établissement public OFFICE PUBLIC DE L'HABITAT déposées sur le RPVA le 02 f écrier 2024,

Vu l'ordonnance de clôture rendue le 07 février 2024,

Madame [N] [J] demande :

- d'infirmer le jugement du conseil des prud'hommes de Nancy rendu le 07 octobre 2022,

Statuant à nouveau :

- de dire que le licenciement pour inaptitude de Madame [N] [J] par l'établissement public OFFICE PUBLIC DE L'HABITAT est nul,

- de condamner l'établissement public OFFICE PUBLIC DE L'HABITAT à payer à Madame [N] [J] les sommes suivantes :

- 51 680,00 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement nul,

- 31 000,00 euros à titre de dommages et intérêts pour le harcèlement moral subi,

- 31 000,00 euros à titre de dommages et intérêts pour la discrimination subie,

- de dire que Madame [N] [J] relève de la classification conventionnelle cadre, catégorie 3, niveau 1 du 1/01/2015 au 31/12/2015 et cadre, catégorie 3, niveau 2 à compter du

1/01/2016,

- par conséquent condamner l'établissement public OFFICE PUBLIC DE L'HABITAT à payer à Madame [N] [J] les sommes suivantes :

- 12 299,82 euros à titre de rappel de salaire du 1/01/2015 au 11/10/2019,

- 1 392,80 euros au titre des primes annuelles du 1/01/2015 au 11/10/2019,

- 1 369,26 euros au titre des congés payés afférent,

A titre subsidiaire :

- de condamner l'établissement public OFFICE PUBLIC DE L'HABITAT à payer à Madame [N] [J] la somme de 31 000,00 euros à titre de dommages et intérêts pour non-respect de l'obligation de sécurité de l'employeur,

*

En tout état de cause :

- de condamner l'établissement public OFFICE PUBLIC DE L'HABITAT à remettre à Madame [N] [J] les bulletins de paie et de l'attestation Pole Emploi rectifiés sous astreinte de 50,00 euros par jour à compter de l'arrêt,

- de condamner l'établissement public OFFICE PUBLIC DE L'HABITAT à payer à Madame [N] [J] la somme de 2 500,00 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile pour la première instance,

- de débouter l'établissement public OFFICE PUBLIC DE L'HABITAT de toutes ses demandes

*

Y ajoutant :

- de condamner l'établissement public OFFICE PUBLIC DE L'HABITAT à payer à Madame [N] [J] la somme de 2 500,00 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile à hauteur de Cour.

L'établissement public OFFICE PUBLIC DE L'HABITAT demande :

- de confirmer le jugement entrepris par le conseil de prud'hommes de Nancy le 07 octobre 2022 en ce qu'il a :

- dit et jugé que le licenciement pour inaptitude de Madame [N] [J] n'est pas nul,

- débouté Madame [N] [J] de l'ensemble de ses demandes,

- dit n'y avoir lieu de la remise des bulletins de paie et de l'attestation Pôle Emploi rectifiés sous astreinte,

- condamné Madame [N] [J] aux entiers dépens

*

En tout état de cause :

- de dire et juger que Madame [N] [J] n'a pas été victime de harcèlement moral,

- de dire et juger que l'établissement public OFFICE PUBLIC DE L'HABITAT n'a pas manqué à son obligation de sécurité,

- de dire et juger que l'établissement public OFFICE PUBLIC DE L'HABITAT a exécuté loyalement le contrat de travail de Madame [N] [J],

- de dire et juger que Madame [N] [J] n'a pas été victime de discrimination du fait de son âge,

- de dire et juger le licenciement pour inaptitude de Madame [N] [J] parfaitement régulier et fondé,

- de débouter Madame [N] [J] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,

- de condamner Madame [N] [J] à verser à l'établissement public OFFICE PUBLIC DE L'HABITAT la somme de 3 500,00 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- de condamner Madame [N] [J] aux entiers frais et dépens de la présente instance.

SUR CE, LA COUR

Pour plus ample exposé sur les moyens et prétentions des parties, il sera expressément renvoyé aux dernières conclusions de Madame [N] [J] déposées sur le RPVA le 09 janvier 2024, et celles de l'établissement public OFFICE PUBLIC DE L'HABITAT déposées sur le RPVA le 02 f évrier 2024.

Sur le harcèlement moral :

Madame [N] [J] expose qu'elle a été en arrêt de travail du 11 octobre 2018 au 8 janvier 2019, provoqué par une fracture du poignet sur son lieu de travail ; qu'à son retour, Monsieur [Z], son directeur, l'a invectivée, lui reprochant son arrêt de travail qu'il qualifiait de vacances et lui signifiant qu'il n'avait plus confiance en elle ; qu'il ne lui adressait plus la parole et communiquait avec elle par courriel ou post-il ; qu'il exigeait d'elle de faire valider un ordre de mission avant tout déplacement, alors qu'auparavant cette validation intervenait à posteriori ; qu'il ne répondait pas à ses demandes de congés ; qu'il lui a retiré de nombreuses missions qu'elle exerçait depuis 2015-2016, notamment le pilotage de la communication et de la démarche qualité, sans l'en avoir préalablement avertie ; qu'elle n'était plus invitée aux réunions ressortant de ses fonctions ; qu'elle a candidaté au poste de Directeur responsable de la relation clientèle qui devait se libérer, mais n'a reçu aucune réponse, une autre personne étant embauchée à sa place ; qu'elle a découvert dans un dossier informatique de la DRH, qu'il était envisagé de lui proposer une rupture conventionnelle ; que depuis 2015, elle n'a pas bénéficié de la classification conventionnelle correspondant aux fonctions réellement exercées ; que le harcèlement qu'elle a subi a provoqué une dépression, à l'origine de son inaptitude professionnelle.

L'employeur nie tout fait de harcèlement.

Motivation :

Aux termes des articles L1152-1 et L1154-1 du code du travail, aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel. Pour se prononcer sur l'existence d'un harcèlement moral, il appartient au juge d'examiner l'ensemble des éléments présentés par le salarié, en prenant en compte les documents médicaux éventuellement produits, et d'apprécier si les faits matériellement établis, pris dans leur ensemble, permettent de présumer l'existence d'un harcèlement. Dans l'affirmative, il revient au juge d'apprécier si l'employeur prouve que les agissements invoqués ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que ses décisions sont justifiées par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement. Sous réserve d'exercer son office dans les conditions qui précèdent, le juge apprécie souverainement si le salarié établit des faits qui permettent de présumer l'existence d'un harcèlement et si l'employeur prouve que les agissements invoqués sont étrangers à tout harcèlement.

- sur le comportement agressif de Monsieur [Z] :

Madame [N] [J] produit un courrier qu'elle a adressé à ce dernier le 30 mai 2019, dans lequel elle relate le changement de comportement de son directeur à son égard depuis son retour d'arrêt maladie (pièce n° 27). Elle produit également un courriel qu'elle lui a adressé relatif aux ordres de mission (pièce n° 21) et, s'agissant du refus de Monsieur [Z] de lui adresser la parole, la photocopie d'un post-il rédigé par celui-ci (pièce n° 23), d'instructions manuscrites (pièce n° 38) et de courriels (pièce n° 39).

L'employeur fait valoir que Monsieur [Z] n'a pas eu le comportement décrit par Madame [N] [J] et a eu avec elle des relations professionnelles normales ; que s'agissant de sa manière de communiquer, il utilisait des post-it avec d'autres salariés, dont il produit des attestations (pièces n° 76 à 79) ; que le document produit en pièce n° 38 est en fait un brouillon de compte-rendu de réunion.

Sur ce :

Les pièces produites par Madame [N] [J] ne permettent pas d'établir la réalité du changement, dans un sens négatif, du comportement de Monsieur [Z]. Le courrier qu'elle lui a adressé ne constitue pas une preuve à cet égard ; l'unique post-it, les deux courriels et le document manuscrit en pièce n° 39 qu'elle produit, ne permettent pas d'établir que Monsieur [Z] ne lui adressait plus la parole, étant par ailleurs relevé que ces documents ne révèlent aucune agressivité.

Le fait relatif au comportement inapproprié de la part de Monsieur [Z] n'est donc pas établi.

- sur les ordres de mission :

L'employeur reconnaît que s'agissant des frais de mission, il y avait eu une certaine souplesse permettant leur validation ex-post et qu'il y a été mis fin à l'égard de tous les salariés, pas seulement à l'égard de Madame [N] [J]. Il produit une copie de l'accord d'entreprise relatif aux frais de mission, non daté, prévoyant que les demandes d'ordre de mission devaient être faites avant le départ du salarié (pièce n° 79).

Le fait relatif à l'exigence nouvelle relative à la validation des ordres de mission est établi.

- sur le retrait de missions antérieurement confiées à Madame [N] [J] :

Madame [N] [J] indique qu'elle était chargée du pilotage de la communication de l'OPH à compter du 1er janvier 2015 ; produit une note manuscrite de Monsieur [Z] titrée « Groupe de travail piloté par [N] » (pièce n° 15) ; un courriel de ce dernier du 22 juin 2015 la remerciant pour avoir « piloté cette opération avec enthousiasme et professionnalisme » (pièce n° 56) ; les comptes-rendus de réunions et du comité de direction (CODIR), de 2014 à 2018, dans lesquels elle apparait comme responsable de la communication (pièce n° 67 et 14.1 à 14.9).

Elle indique également qu'à compter de 2016, elle s'est vue confier également le pilotage de la démarche qualité de l'OPH et produit des comptes-rendus de réunion du CODIR, établis en 2017 et 2018, dans lesquels elle apparaît en tant que responsable de la démarche qualité (pièces n° 14.6 à 14.8).

Enfin, Madame [N] [J] indique qu'il avait été acté qu'elle piloterait le groupe de travail « Management de la Qualité et Communication » en septembre 2018, avant son accident du travail (pièce n° 67).

Elle fait valoir qu'à son retour de congé maladie, elle s'est vue retiré les missions de pilotage de la communication et de la démarche qualité et n'est plus invitée aux réunions du CODIR, sans en avoir été préalablement avertie (pièces n° 20, 30, 31, 18, 58 et 59), ce dont elle s'est plainte à Monsieur [Z] (pièce n° 22) ; qu'elle a été cantonnée à des tâches de dactylographie et de préparation de power-points (pièces n° 23, 24, 42 à 44 et 55).

L'employeur expose que Madame [N] [J] n'a pas eu la responsabilité des missions de pilotage de la communication ou de la démarche qualité ; qu'elle a été associée à la démarche qualité, mais que toutes les procédures relevaient de Monsieur [Z] et de la direction (pièces n°17 et 18 de l'appelante) ; que Madame [N] [J] n'avait pas la responsabilité de l'élaboration, ni de la diffusion des documents de communication mais y était simplement associée ; que compte-tenu de son absence et de sa présence ponctuelle à partir d'octobre 2018, l'OPH n'a eu d'autre choix que de poursuivre les dossiers en cours et les différentes démarches mises en 'uvre ; qu'elle avait notamment la charge d'un volet communication, de la gestion du site internet, de la rédaction de la lettre aux locataires, mais également du rapport d'activité de l'OPH.

Sur ce :

Il ressort des pièces produites par les parties que Madame [N] [J] a participé aux groupes de travail qualité et communication, mais il n'en ressort pas qu'elle en ait eu la direction ou la responsabilité.

A cet égard, les comptes-rendus des CODIR, s'ils confirment la présence de Madame [N] [J] et sa participation à des actions diverses, ne démontrent pas qu'elle ait eu un rôle de pilotage. En outre, le document manuscrit attribué par Madame [N] [J] à Monsieur [Z], dans lequel figure la mention « groupe de travail piloté par [N]. Mise en place d'une stratégie de communication », est anonyme, ne comportant ni la signature, ni le nom de son rédacteur.

S'agissant du courriel de félicitation du 22 juin 2015, figurant en pièce n° 56 de l'appelante, il est adressé à sept personnes, dont Madame [N] [J] et fait état de ce que cette dernière « a piloté cette opération avec enthousiasme et professionnalisme » s'agissant de l'organisation d'une « manifestation du 19 juin » (pièce n° 56), il ne permet pas non plus d'en inférer que Madame [N] [J] avait la responsabilité générale de la communication de l'OPHLM de 2014 à 2018.

Madame [N] [J] produit également un document intitulé « La lettre au locataire », datée de juillet 2015, dans laquelle elle apparait en tant que « Responsable projet » (pièce n° 25), ce dont on ne peut déduire qu'elle avait la mission de piloter l'ensemble de la communication de l'OPHLM.

Enfin, si les brochures intitulées « comptes-rendus d'activité de l'OPHLM » en 2016 et 2017, contiennent des paragraphes consacrés à la mise en place d'une « démarche qualité » et a la communication de l'Office, elles ne prouvent que Madame [N] [J] ait joué un rôle moteur dans ces domaines et ne mentionnent d'ailleurs pas son nom.

Il résulte en outre des pièces produites par l'employeur que Madame [N] [J] a continué à participer aux réunions du CODIR en 2018 et en 2019 à son retour de congé maladie (pièces n° 68 et 69).

Le retrait de « missions de pilotage » de projets n'est donc pas établi.

- Sur l'inapplication de la classification conventionnelle due et en conséquence la non-reconnaissance de son statut cadre :

Madame [N] [J] expose qu'elle a été embauchée en qualité de secrétaire de direction coefficient II niveau 1 de la Convention collective applicable, puis est devenue assistante de direction générale ; qu'à compter de 2015, elle n'a pas bénéficié de la classification conventionnelle correspondant aux fonctions réellement exercées.

Elle fait valoir que sa prédécesseur dans le poste d'assistante de direction était classée catégorie II niveau 1 (pièce n° 49), mais qu'en plus des missions qui étaient assignées à cette dernière, elle s'est vue confiée des missions de pilotage de projets et le pilotage de la démarche qualité de l'OPHLM, tâches relevant du statut cadre catégorie III niveau 2, indiquant en outre qu'elle était titulaire d'un Master 1 en management depuis 2015. Elle produit une Fiche Emploi -Responsable Pole qui correspond à ce qu'elle indique être ses fonctions réelles (pièce n° 69).

Madame [N] [J] fait également valoir qu'un projet de fiche de poste, ainsi qu'un projet d'Avenant N°4 avaient été préparés en juillet 2018 afin de la nommer « chargée de mission » (pièces n° 36 et 37).

L'employeur expose que la classification conventionnelle de Madame [N] [J] correspondait à ses missions d'assistante de direction et non à celles de cadre.

Il fait valoir que l'OPH de [Localité 4] à [Localité 3] est une petite structure dont l'envergure et l'activité ne nécessitent pas un cadre administratif au sein de son effectif, ce qui lui a été indiqué dès son embauche ; que cependant, pour tenir compte de ses aspirations futures, il a financé son Master.

Il produit la fiche de poste, identique à celle de Madame [N] [J], de la salariée lui ayant succédé au poste d'assistante administrative, laquelle fait état de « la participation à des projets transversaux », « la participation à des groupes de travail, comités de pilotage, réunions institutionnelles et organisation logistiques, rédaction des comptes-rendus, mise en place et suivi d'actions de communication » (pièce n° 80).

Il indique que si Madame [N] [J] a participé à des groupes de travail sur la qualité et sur la communication, elle n'en a jamais eu la responsabilité, la direction de ces groupes étant assurée, pour le premier par Monsieur [Z] et pour le second par la directrice de la relation clientèle.

L'employeur fait en outre valoir que la pièce produite par Madame [N] [J] relative à un Avenant n° 4 est un faux. A cet égard, il produit l'attestation de Madame [R] [W], en charge de la rédaction des contrats de travail et avenants des salariés. Elle indique que ' L'avenant 4 fourni par Madame [J] (pièce 37) ne correspond pas à celui que j'avais moi-même rédigé. Je précise que l'avenant n°4 rédigé par mes soins, comme tout avenant, précise une date d'application et que celle-ci est antérieure à la date mentionnée en bas de l'avenant ' ' pièce 37 (produit par Madame [N] [J]) ; aucune date d'application n'étant précisée par ailleurs sur ce dernier (pièce n° 74).

L'employeur produit l'Avenant n° 4 préparé par Madame [W], lequel ne prévoit qu'une augmentation de salaire à compter du 1er janvier 2018 (pièce n° 75).

Sur ce :

Il résulte de la convention collective applicable, que la classification des emplois est définie selon cinq critères : l'autonomie ' la responsabilité ' la dimension relationnelle ' les connaissances requises (pièce n° 28 de l'appelante).

A chaque critère sont associés des points, en fonction de leur degré plus ou moins élevé d'exigence pour l'emploi occupé par le salarié.

La classification de cadre exige 20 à 25 points.

En l'espèce, Madame [N] [J] ne démontre pas que les tâches qui lui étaient confiées permettaient de lui attribuer ce nombre de points, étant relevé que les pièces qu'elle produit ne permettent pas d'en déduire un niveau d'autonomie, de responsabilité et de technicité lui permettant de prétendre à la classification de cadre.

En conséquence, le fait que Madame [N] [J] aurait dû être classée cadre n'est pas établi.

- Sur l'absence de réponse à sa candidature au poste de Directeur responsable de la relation clientèle :

Madame [N] [J] expose avoir candidaté au poste de Directeur responsable de la relation clientèle ; qu'elle avait obtenu un entretien, fixé au 16 octobre 2018, mais qu'elle n'avait pu s'y rendre en raison de son arrêt de travail ; qu'une autre candidate a vu son recrutement validé quelques jours seulement avant la fin de son arrêt de travail le 6 décembre 2018 ; que dès lors l'employeur aurait pu attendre son retour d'arrêt maladie pour la recevoir en entretien.

L'employeur fait valoir qu'un entretien avait été prévu au mois d'octobre et que si elle n'avait pu s'y présenter en raison de son arrêt maladie, elle n'a pas demandé un nouveau rendez-vous (pièce n° 19).

Sur ce :

Il résulte de ce qui précède que Madame [N] [J] a obtenu un entretien lorsqu'elle l'a demandé et que par la suite elle n'en a pas demandé d'autre.

En conséquence, le fait d'absence de réponse à sa candidature n'est pas établi.

- Sur l'altération de la santé mentale de Madame [N] [J] :

Madame [N] [J] produit divers documents médicaux établissant son état dépressif, qui a entraîné un arrêt de travail du 13 mars au 9 septembre 2019. Elle fait valoir que son psychiatre a diagnostiqué « un syndrome dépressif réactionnel à de la maltraitance au travail » et qu'il a précisé, à la demande du médecin du travail qu'elle « se mettrait gravement en danger en reprenant le travail dans son entreprise. Une inaptitude définitive à tout poste dans son entreprise est justifiée » (pièces n° 6 et 26).

Cependant, ces documents ne sauraient à eux seuls établir l'existence d'un harcèlement moral, aucun des faits présentés par Madame [N] [J] n'étant matériellement établis.

En conséquence, sa demande d'annulation du licenciement et ses demandes financières en découlant seront rejetées, de même que sa demande de dommages et intérêts pour harcèlement moral, le jugement du conseil de prud'hommes étant confirmé sur ces points.

Sur la classification conventionnelle applicable et le rappel de salaire afférent :

Madame [N] [J] fait valoir qu'elle aurait dû être classée cadre depuis 2015 ; elle demande à ce titre un rappel de salaire de 12299,82 euros, un rappel de primes de 1392,80 euros, ainsi que 1369,26 euros au titre des congés payés.

L'employeur s'oppose à cette demande.

Motivation :

Ainsi qu'il l'a été motivé ci-dessus, Madame [N] [J] ne démontre pas que les tâches qui lui avaient été assignées lui permettaient de prétendre à être classée comme cadre.

Elle sera donc déboutée de sa demande, le jugement du conseil de prud'hommes étant confirmé sur ce point.

Sur la discrimination du fait de l'âge :

Madame [N] [J] expose qu'elle a subi une discrimination liée à son âge caractérisée par l'absence d'évolution de sa classification conventionnelle.

Elle fait valoir que deux autres salariés, plus jeunes qu'elle et embauchés très rapidement après la fin de leurs études universitaire, ont été embauchés sur des postes de cadres et ont eu une évolution de carrière plus rapide que la sienne (pièces n° 51, 52, 61 et 62).

Elle demande la somme de 31 000 euros à titre de dommages et intérêts.

L'employeur fait valoir que Madame [N] [J] ne se trouvait pas dans une situation objectivement identique aux deux salariés auxquels elle se compare, lesquels justifient d'une formation et d'expériences professionnelles tout à fait différentes de la sienne.

Motivation :

Le salarié qui invoque être victime d'une discrimination n'a pas à rapporter la preuve de son existence. En revanche, il doit, dans un premier temps, présenter des faits laissant supposer l'existence d'une telle discrimination, à charge, dans un second temps, à l'employeur de rapporter la preuve d'éléments objectifs étrangers à toute discrimination qui soient propres à justifier la différence apparente de traitement.

En l'espèce il résulte des contrats de travail de Monsieur [U] [P] et de Madame [B] [S], que ces derniers ont été embauchés respectivement en 2012 et 2015 sur des postes de cadres.

Dès lors, la situation de ces salariés, occupant des fonctions d'une classification supérieure à celle de Madame [N] [J], ne peut être comparée à la sienne.

Madame [N] [J] ne présentant aucun élément laissant supposer l'existence d'une discrimination fondée sur l'âge, étant relevé que leur ancienneté dans l'entreprise était supérieure ou égale à la sienne, elle sera déboutée de sa demande, le jugement du conseil de prud'hommes étant confirmé sur ce point.

Sur la demande de dommages et intérêts pour non-respect de l'obligation de sécurité de résultat de l'employeur :

Madame [N] [J] ne fait valoir que l'altération de sa santé mentale est la conséquence du non-respect de l'obligation de sécurité de son employeur à son égard et demande la somme de 31 000 euros de dommages et intérêts.

L'employeur s'oppose à cette demande.

Motivation :

Il convient de relever que l'inaptitude de Madame [N] [J] n'est pas de nature professionnelle. Dès lors, les seuls éléments médicaux qu'elle produits, à l'exclusion de toute autre pièce, sont insuffisants pour établir à eux seuls un lien entre son affection mentale et le comportement de son employeur.

En outre, elle n'allègue pas d'autre éléments et ne produit par d'autres pièces que ceux présentés à l'appuis de sa demande de reconnaissance d'une situation de harcèlement moral.

En conséquence, elle sera déboutée de sa demande de dommages et intérêts, le jugement du conseil de prud'hommes étant confirmé sur ce point.

Sur la demande de remise de bulletins de paie et de l'attestation France Travail rectifiés :

Les demandes de Madame [N] [J] relatives au paiement de rattrapages de salaires et à l'annulation de son licenciement étant rejetées, sa demande sera rejetée, le jugement du conseil de prud'hommes étant confirmé sur ce point.

Sur l'article 700 du code de procédure civile et sur les dépens :

L'employeur et Madame [N] [J] seront déboutés de leurs demandes au titre des frais irrépétibles.

Madame [N] [J] sera condamnée aux dépens.

PAR CES MOTIFS

La Cour, chambre sociale, statuant contradictoirement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, après débats en audience publique et après en avoir délibéré,

CONFIRME le jugement du conseil de prud'hommes de Nancy en ses dispositions soumises à la cour ;

Y AJOUTANT

Déboute l'OFFICE PUBLIC DE L'HABITAT DE [Localité 4] A [Localité 3] de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Déboute Madame [N] [J] de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne Madame [N] [J] aux dépens.

Ainsi prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Et signé par Monsieur Raphaël Weissmann, Président de Chambre et par Madame Laurène Rivory, Greffier.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT DE CHAMBRE

Minute en douze pages


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Nancy
Formation : Chambre sociale-2ème sect
Numéro d'arrêt : 22/02557
Date de la décision : 30/05/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 05/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-05-30;22.02557 ?
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