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23/05/2024 | FRANCE | N°23/01146

France | France, Cour d'appel de Nancy, Chambre sociale-2ème sect, 23 mai 2024, 23/01146


ARRÊT N° /2024

PH



DU 23 MAI 2024



N° RG 23/01146 - N° Portalis DBVR-V-B7H-FFXO







Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de BAR-LE-DUC

F22/00035

27 avril 2023











































COUR D'APPEL DE NANCY

CHAMBRE SOCIALE - SECTION 2













APPELANTE :



S.A.R.L. STILL BEAUTY DOM prise en la

personne de son représentant légal pour ce domicilié au siège social

[Adresse 4]

[Localité 2]

Représentée par Me Julia GUILLAUME, avocat au barreau de NANCY









INTIMÉE :



Madame [E] [D]

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représentée par Monsieur [X] [I], défenseur syndical, régulièrement muni d'un pouv...

ARRÊT N° /2024

PH

DU 23 MAI 2024

N° RG 23/01146 - N° Portalis DBVR-V-B7H-FFXO

Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de BAR-LE-DUC

F22/00035

27 avril 2023

COUR D'APPEL DE NANCY

CHAMBRE SOCIALE - SECTION 2

APPELANTE :

S.A.R.L. STILL BEAUTY DOM prise en la personne de son représentant légal pour ce domicilié au siège social

[Adresse 4]

[Localité 2]

Représentée par Me Julia GUILLAUME, avocat au barreau de NANCY

INTIMÉE :

Madame [E] [D]

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représentée par Monsieur [X] [I], défenseur syndical, régulièrement muni d'un pouvoir de représentation

COMPOSITION DE LA COUR :

Lors des débats et du délibéré,

Président : WEISSMANN Raphaël,

Conseillers : BRUNEAU Dominique,

STANEK Stéphane,

Greffier lors des débats : RIVORY Laurène

DÉBATS :

En audience publique du 22 Février 2024 ;

L'affaire a été mise en délibéré pour l'arrêt être rendu le 23 Mai 2024 ; par mise à disposition au greffe conformément à l'article 450 alinéa 2 du Code de Procédure Civile ;

Le 23 Mai 2024, la Cour après en avoir délibéré conformément à la Loi, a rendu l'arrêt dont la teneur suit :

EXPOSÉ DU LITIGE ET PRÉTENTIONS RESPECTIVES DES PARTIES

Madame [E] [D] a été engagée sous contrat de travail à durée indéterminée, par la société SARL STILL BEAUTY DOM à compter du 20 décembre 2021, en qualité de coiffeuse qualifiée.

Par courrier du 11 juillet 2022, Madame [E] [D] a été convoquée à un entretien préalable au licenciement fixé au 22 juillet 2022.

Par courrier du 27 juillet 2022 remise en main propre, Madame [E] [D] a été licenciée pour cause réelle et sérieuse, avec dispense de préavis.

Par requête du 05 septembre 2022, Madame [E] [D] a saisi le conseil de prud'hommes de Bar-le-Duc, aux fins :

- de requalifier son licenciement pour faute en licenciement sans cause réelle ni sérieuse,

- de condamner la société SARL STILL BEAUTY DOM à lui payer les sommes suivantes :

- 20 000,00 euros au titre de dommages et intérêts pour préjudice moral et financier,

- 1 645,62 euros à titre d'indemnité pour non-respect de la visite médicale obligatoire,

- 700,00 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Vu le jugement du conseil de prud'hommes de Bar-le-Duc rendu le 27 avril 2023, lequel a :

- requalifié le licenciement pour faute de Madame [E] [D] en licenciement sans cause réelle ni sérieuse,

- condamné la société SARL STILL BEAUTY DOM à payer à Madame [E] [D] les sommes suivantes :

- 8 000,00 euros au titre de dommages et intérêts pour préjudice moral et financier,

- 350,00 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- débouté Madame [E] [D] de sa demande d'indemnité pour non-respect de la visite médicale obligatoire,

- débouté la société SARL STILL BEAUTY DOM de sa demande reconventionnelle sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné la société SARL STILL BEAUTY DOM aux entiers dépens et aux éventuels frais d'exécution.

Vu l'appel formé par la société SARL STILL BEAUTY DOM le 26 mai 2023,

Vu l'article 455 du code de procédure civile,

Vu les conclusions de la société SARL STILL BEAUTY DOM déposées sur le RPVA le 16 décembre 2023, et celles de Madame [E] [D] reçues au greffe de la chambre sociale le 20 octobre 2023,

Vu l'ordonnance de clôture rendue le 07 février 2024,

La société STILL BEAUTY DOM demande :

A titre principal :

- de constater la cause réelle et sérieuse du licenciement notifié à Madame [E] [D],

- de constater la carence probatoire de Madame [E] [D] sur son prétendu préjudice moral et financier,

- en conséquence, d'infirmer le jugement rendu par le conseil de prud'hommes de Bar-le-Duc du 27 avril 2023 en ce qu'il a requalifié le licenciement de Madame [E] [D] pour faute en licenciement sans cause réelle ni sérieuse,

Statuant à nouveau et sur cette seule limite :

- de qualifier le licenciement de Madame [E] [D] en cause réelle et sérieuse,

- de débouter Madame [E] [D] de sa demande de dommages-intérêts pour préjudice moral et financier,

A titre infiniment subsidiaire :

- de réduire à de plus justes proportions la demande de dommages-intérêts au titre du préjudice moral et financier sans pouvoir excéder la somme de 2 000,00 euros,

En tout état de cause :

- de débouter Madame [E] [D], de l'ensemble de ses prétentions, fins et conclusions plus amples ou contraires,

- de condamner Madame [E] [D] à verser à la société SARL STILL BEAUTY DOM la somme 2 000,00 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles de première instance et la somme de 2 000,00 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles d'appel,

- de condamner de Madame [E] [D] aux entiers frais et dépens de la procédure de première instance et d'appel.

Madame [E] [D] demande :

- de confirmer le jugement rendu par le conseil de prud'hommes en ce qu'il a requalifié son licenciement en licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- de condamner la société SARL STILL BEAUTY DOM à la somme de 700,00 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles d'appel,

- de condamner la société SARL STILLE BEAUTY DOM aux entiers dépens de la procédure de première instance et d'appel.

SUR CE, LA COUR

Pour plus ample exposé sur les moyens et prétentions des parties, il sera expressément renvoyé aux dernières écritures qu'elles ont déposées, s'agissant de l'employeur le 16 décembre 2023, et en ce qui concerne la salariée le 20 octobre 2023.

Sur le licenciement

La lettre de licenciement du 27 juillet 2022 (pièce 5 de la société STILL BEAUTY DOM) indique :

« (') En contrepartie de vos fonctions :

- votre rémunération mensuelle brute était fixée à la somme de 1.589,50 euros brut pour 151,67 heures de travail par mois,

- et en application de l'avenant n° 13 du 20 novembre 2008 de la Convention collective de la coiffure, votre rémunération variable calculée sur les prestations de services personnellement effectuées, à savoir une prime de 10 % sur la fraction dépassant l'objectif CA HT mensuel défini comme suit : salaire de base brut (heures supplémentaires incluses) x 3,4, soit a minima au cas d'espèce 5.404,30 euros.

Outre que ces objectifs n'ont jamais été atteints :

[suit un tableau de montants mensuels de janvier à juin]

Je déplore un manque d'investissement et d'enthousiasme qui se ressent sur la qualité relationnelle client et sur les ventes.

Par ailleurs, certaines clientes se sont plaintes de vos prestations.

Vous n'êtes pas avenante avec les clients ; lors des formations, vous êtes passive et ne vous intéressez pas aux nouvelles techniques.

Il ressort que vous n'êtes pas motivée et vos résultats s'en ressentent.

Je vous ai à plusieurs reprises entretenu de ces difficultés en espérant une réaction de votre part, en vain.

Votre comportement nuit à l'image de la société.

Lors de notre entretien du 22 juillet dernier, vous m'avez indiqué que

- vous estimiez que votre travail était fait correctement et que les faits reprochés n'étaient pas justifiés.

- À aucun moment, vous n'avez envisagé de remettre en question votre manière de travailler.

Ces explications ne sont pas de nature à me faire espérer un quelconque changement.

Compte tenu de votre ancienneté dans l'entreprise, votre préavis est fixé à un mois et débutera à la date de la première présentation de la présente lettre.

Je vous dispense toutefois d'effectuer votre préavis. Votre salaire continuera de vous être versé durant le préavis. (...) »

La société STILL BEAUTY DOM indique produire les fiches clients ayant eu à faire à Mme [E] [D], qui permettent de constater qu'ils ne sont plus revenus, n'étant pas satisfaits des prestations de la salariée, malgré la détention de la carte de fidélité.

L'employeur conteste la partialité de l'attestation de Mme [Z] produite par l'intimée, Mme [Z] étant son associée dans son nouveau salon.

La société STILL BEAUTY DOM reprend dans ses écritures des extraits des attestations de clientes qu'elle indique verser aux débats, faisant état de l'attitude désagréable de la salariée.

La société STILL BEAUTY DOM critique les attestations produites par la partie adverse.

L'appelante ne conclut pas sur le grief, contenu dans la lettre de licenciement, relatif aux objectifs de chiffre d'affaires, qu'elle est donc réputée abandonner.

Mme [E] [D] explique que l'employeur l'a en fait licenciée pour des motifs économiques, le salon ne réalisant pas assez de chiffre d'affaires.

Elle indique produire aux débats 12 attestations de clients satisfaits de son travail.

L'intimée expose qu'après son départ d'autres salariées ont quitté le salon, en raison de l'ambiance délétère.

Elle estime que les attestations produites par la société STILL BEAUTY DOM le sont pour les besoins de la cause, et demande de ne pas tenir compte de l'attestation de Mme [F], belle-s'ur de l'époux de la gérante.

Motivation

La société STILL BEAUTY DOM produit en pièces 11 à 13 des attestations de clientes qui disent avoir été mal accueillies et mal conseillées par Mme [E] [D], sans plus de précisions, seule Mme [S] [P] précisant que celle-ci ne répondait pas à ses questions sur les soins (pièce 12).

L'attestation de Mme [U] [F] en pièce 14 est plus circonstanciée, cette cliente expliquant s'être rendue au salon pour réserver un soin de massage ; désirant un rendez-vous également pour son époux « on m'a répondu qu'elle n'allait quand même pas enchaîner un massage derrière l'autre ».

Le jour du rendez-vous, alors qu'elle était sur le trajet et habite à une heure de route, Mme [E] [D] l'appelle 30 minutes avant ce rendez-vous pour l'annuler ; Mme [U] [F] indique : « Je lui ai demandé s'il était possible d'obtenir un autre rendez-vous, elle m'a tout simplement répondu que je voulais faire trop de choses à la fois et que par ma faute elle s'est trompée dans le planning pour ensuite me dire « j'ai du monde, je n'ai pas le temps, rappelez plus tard » elle a raccroché sans même s'être excusée.

Mme [E] [D] ne produit aucune pièce pour démontrer que Mme [F] aurait un lien de parenté avec la gérante de la société STILL BEAUTY DOM.

En pièce 17, Mme [C] [N] explique que « Melle [D] [E] s'est occupée de mon brushing. J'ai été très déçue et mécontente de l'accueil ainsi que le résultat de la prestation. Le shampoing étant mal rincé, le brushing n'a pas tenu la journée ».

Mme [E] [D] produit en pièces 4-1 à 4-10 des attestations de clientes très satisfaites de l'accueil reçu de sa part, ainsi que de ses conseils et de sa compétence technique.

L'attestation en pièce 4-11, élogieuse de la même manière, sera prise en considération même en l'absence de copie d'une pièce d'identité, l'indication de son auteur et de ses date et lieu de naissance, ainsi que de son adresse, permettant d'en assurer la fiabilité.

Les critiques exprimées par la société STILL BEAUTY DOM en pages 9 et suivantes de ses écritures, consistant par exemple à relever que ces clientes ne sont venues qu'une seule fois au salon de coiffure, ou ne sont venues que pour des prestations esthétiques dont ne s'est pas chargée Mme [E] [D], sont insuffisantes pour atténuer la valeur probante des attestations produites par la salariée.

Le logiciel de caisse produit en pièce 1 par la société STILL BEAUTY DOM au soutien de son argument selon lequel les clientes qui ont eu affaire à Mme [E] [D] ne sont pas revenues ensuite, n'est pas de nature à contredire les attestations produites par la salariée, étant souligné par ailleurs que le simple fait qu'une cliente ne vienne qu'une fois peut s'expliquer, à défaut d'éléments probatoires complémentaires à ces fiches, par d'autres motifs, indépendants des critiques exprimées dans le cadre de la procédure par l'employeur.

Il ressort de l'ensemble de ces éléments que si Mme [E] [D] a pu se montrer désagréable avec certaines clientes, elle était appréciée par d'autres.

Par ailleurs, il n'est pas fait état d'antécédent disciplinaire à l'encontre de Mme [E] [D].

Dans ces conditions, les fautes reprochées établies ne pouvaient justifier le licenciement pour faute grave.

Le jugement sera donc confirmé en ce qu'il a dit le licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse.

Sur les conséquences financières du licenciement

La société STILL BEAUTY DOM considère que Mme [E] [D] avait préparé son départ, ayant ouvert son propre salon dès le 12 décembre 2022 ; que ceci explique sa démotivation au sein de l'institut STILL BEAUTY DOM.

Elle estime qu'aucun préjudice financier n'est caractérisé.

L'appelante demande à titre subsidiaire, si le licenciement était considéré comme sans cause réelle et sérieuse, de réduire à 2000 euros le montant des dommages et intérêts.

Mme [E] [D] explique avoir effectué des démarches pour ouvrir son propre salon pour le 24 novembre 2022, ne souhaitant bénéficier de ses droits au chômage qui n'étaient que de 6 mois.

Elle estime que son préjudice moral et financier est probant.

Motivation

Aux termes des dispositions de l'article 954 du code de procédure civile, la cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif et n'examine les moyens au soutien de ces prétentions que s'ils sont invoqués dans la discussion.

Il convient de relever que Mme [E] [D], aux termes de ses écritures, demande de :

- confirmer le jugement rendu par le conseil de prud'hommes en ce qu'il a requalifié son licenciement en licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- condamner la société SARL STILL BEAUTY DOM à la somme de 700,00 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles d'appel,

- condamner la société SARL STILLE BEAUTY DOM aux entiers dépens de la procédure de première instance et d'appel.

Elle ne demande ni confirmation ni réformation du jugement quant à la condamnation à des dommages et intérêts, ni que la société STILL BEAUTY DOM soit déboutée de ses demandes à ce titre.

La société STILL BEAUTY DOM demandant à titre subsidiaire de les réduire à 2000 euros, il sera fait droit à cette demande.

Le jugement sera donc réformé en ce sens.

Sur les dépens et les frais irrépétibles

Succombant à l'instance, la société STILL BEAUTY DOM sera condamnée aux dépens, ainsi qu'à payer à Mme [E] [D] 700 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

L'appelante sera déboutée de ses demandes à ces titres.

PAR CES MOTIFS

La Cour, chambre sociale, statuant par arrêt contradictoire mis à disposition au greffe, après débats en audience publique et après en avoir délibéré,

Infirme, dans les limites de l'appel, le jugement rendu par le conseil de prud'hommes de Bar-le-Duc le 27 avril 2023, en ce qu'il a condamné la SARL STILL BEAUTY DOM à payer à Madame [E] [D] 8 000 euros au titre de dommages et intérêts pour préjudice moral et financier ;

Le confirme pour le surplus ;

Statuant à nouveau dans ces limites,

Condamne la société STILL BEAUTY DOM à payer à Mme [E] [D] 2000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

Y ajoutant,

Condamne la société STILL BEAUTY DOM à payer à Mme [E] [D] 700 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Déboute la société STILL BEAUTY DOM de sa demande à ce titre ;

Condamne la société STILL BEAUTY DOM aux dépens.

Ainsi prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Et signé par Monsieur Raphaël Weissmann, Président de Chambre et par Madame Laurène Rivory, Greffier.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT DE CHAMBRE

Minute en huit pages


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Nancy
Formation : Chambre sociale-2ème sect
Numéro d'arrêt : 23/01146
Date de la décision : 23/05/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 29/05/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-05-23;23.01146 ?
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