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23/05/2024 | FRANCE | N°23/01101

France | France, Cour d'appel de Nancy, Chambre sociale-2ème sect, 23 mai 2024, 23/01101


ARRÊT N° /2024

PH



DU 23 MAI 2024



N° RG 23/01101 - N° Portalis DBVR-V-B7H-FFUM







Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire d'EPINAL

21/00208

24 avril 2023











































COUR D'APPEL DE NANCY

CHAMBRE SOCIALE - SECTION 2













APPELANT :



Monsieur [C] [Z] [K]

[Adresse 2]
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Représenté par Me Cécile CABAILLOT, avocat au barreau de METZ substitué par Me PERROT, avocat au barreau de NANCY







INTIMÉE :



S.A.S. FROMAGERIE DE [Localité 4] prise en la personne de son représentant légal pour ce domicilié au siège social

[Adresse 1]

[Localité 4]

Représentée par Me Lauren...

ARRÊT N° /2024

PH

DU 23 MAI 2024

N° RG 23/01101 - N° Portalis DBVR-V-B7H-FFUM

Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire d'EPINAL

21/00208

24 avril 2023

COUR D'APPEL DE NANCY

CHAMBRE SOCIALE - SECTION 2

APPELANT :

Monsieur [C] [Z] [K]

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représenté par Me Cécile CABAILLOT, avocat au barreau de METZ substitué par Me PERROT, avocat au barreau de NANCY

INTIMÉE :

S.A.S. FROMAGERIE DE [Localité 4] prise en la personne de son représentant légal pour ce domicilié au siège social

[Adresse 1]

[Localité 4]

Représentée par Me Laurence ANTRIG de la SCP LAURENCE ANTRIG, avocat au barreau de NANCY substitué par Me BURGUN , avocat au barreau de STRASBOURG

COMPOSITION DE LA COUR :

Lors des débats et du délibéré,

Président : WEISSMANN Raphaël,

Conseillers : BRUNEAU Dominique,

STANEK Stéphane,

Greffier lors des débats : RIVORY Laurène

DÉBATS :

En audience publique du 22 Février 2024 ;

L'affaire a été mise en délibéré pour l'arrêt être rendu le 23 Mai 2024 ; par mise à disposition au greffe conformément à l'article 450 alinéa 2 du Code de Procédure Civile ;

Le 23 Mai 2024, la Cour après en avoir délibéré conformément à la Loi, a rendu l'arrêt dont la teneur suit :

EXPOSÉ DU LITIGE ET PRÉTENTIONS RESPECTIVES DES PARTIES

Monsieur [C] [Z] [K] a été engagé sous contrat de travail à durée indéterminée, par la société SAS FROMAGERIE [Localité 4] à compter du 09 novembre 2020, en qualité de technicien de maintenance.

La convention collective nationale de l'industrie laitière s'applique au contrat de travail.

Par courrier du 27 avril 2021 remis en main propre, Monsieur [C] [Z] [K] a été convoqué à un entretien préalable au licenciement fixé au 07 mai 2021, avec notification de sa mise à pied à titre conservatoire.

Par courrier du 19 mai 2021, Monsieur [C] [Z] [K] a été licencié pour faute grave.

Par requête du 17 décembre 2021, Monsieur [C] [Z] [K] a saisi le conseil de prud'hommes d'Epinal, aux fins :

- de requalifier la rupture de son contrat de travail en licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- de condamner la société SAS FROMAGERIE [Localité 4] à lui verser les sommes suivantes :

- 2 329,00 euros bruts à titre d'indemnité compensatrice de préavis, outre la somme de 232,90 euros bruts au titre des congés payés afférents,

- 2 162,90 euros bruts à titre de rappel de salaires au titre de la mise à pied conservatoire, outre la somme de 216,29 euros bruts au titre des congés payés afférents,

- 2 329,00 euros nets à titre de dommages et intérêts pour licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse,

- 2 000,00 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens,

- d'ordonner à la société SAS FROMAGERIE [Localité 4] à lui remettre les bulletins de paie et documents de fin de contrat rectifiés sous astreinte de 100,00 euros par jour de retard et par document dans un délai d'un mois à compter du jugement à intervenir,

- d'ordonner la capitalisation des intérêts au taux légal,

- d'ordonner l'exécution provisoire du jugement à intervenir.

Vu le jugement du conseil de prud'hommes d'Epinal rendu le 24 avril 2023, lequel a :

- déclaré recevable la demande Monsieur [C] [Z] [K],

- confirmé la qualification de la rupture du contrat de travail de Monsieur [C] [Z] [K] comme étant un licenciement pour faute grave,

- débouté Monsieur [C] [Z] [K] de l'ensemble de ses demandes,

- dit n'y avoir lieu de condamner la société SAS FROMAGERIE [Localité 4] au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, ni d'accorder à celle-ci, à titre reconventionnel, une somme sur ce même fondement,

- condamné Monsieur [C] [Z] [K] aux frais et dépens de l'instance.

Vu l'appel formé par Monsieur [C] [Z] [K] le 22 mai 2023,

Vu l'article 455 du code de procédure civile,

Vu les conclusions de Monsieur [C] [Z] [K] déposées sur le RPVA le 21 décembre 2023, et celles de la société SAS FROMAGERIE [Localité 4] déposées sur le RPVA le 11 janvier 2024

Vu l'ordonnance de clôture rendue le 07 février 2024,

Monsieur [C] [Z] [K] demande :

- de prononcer la recevabilité de son appel et son bien-fondé,

- de recevoir ses moyens de fait et de droit,

- en conséquence, d'infirmer le jugement rendu par le conseil de prud'hommes d'Epinal en date du 24 avril 2023 en ce qu'il a :

- confirmé la qualification de la rupture du contrat de travail comme étant un licenciement pour faute grave,

- débouté le salarié de l'ensemble de ses demandes,

- dit n'y avoir lieu de condamner la société SAS FROMAGERIE [Localité 4] au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, ni d'accorder à celle-ci, à titre reconventionnel, une somme sur ce même fondement,

- condamné l'appelant aux frais et dépens de l'instance,

Statuant à nouveau :

- de constater que le licenciement est dépourvu de toute cause réelle et sérieuse,

- de condamner la société SAS FROMAGERIE [Localité 4] à lui payer les sommes suivantes :

- 2.329,00 euros bruts au titre de l'indemnité compensatrice de préavis,

- 232,90 euros au titre des congés payés afférents,

- 2 162,90 euros bruts à titre de rappel de salaire au titre de la mise à pied conservatoire,

- 216,29 euros bruts au titre des congés payés afférents,

- 6 987,00 euros au titre de l'indemnité forfaitaire conformément aux dispositions de l'article L.8252-2 du code du travail,

- 2 329,00 euros nets à titre de dommages et intérêts pour licenciement dépourvu de toute cause réelle et sérieuse,

- 2 000,00 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile pour la première instance,

- de condamner la société SAS FROMAGERIE [Localité 4] au remboursement du jour du licenciement au jour de l'arrêt prononcé, des indemnités chômage dans la limite de six mois en application de l'article L.1235-4 du code du travail,

- de condamner la société SAS FROMAGERIE [Localité 4], sous astreinte définitive de

100,00 euros par jour de retard et par document, à lui remettre son certificat de travail, le solde de tout-compte et l'attestation Pôle Emploi conforme à la décision à intervenir après un délai d'un mois suivant la notification de la décision à intervenir,

- de se réserver le droit de liquider l'astreinte,

- de condamner la société SAS FROMAGERIE [Localité 4] à lui payer la somme de 3 000,00 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile pour la présente procédure,

- de condamner la société SAS FROMAGERIE [Localité 4] aux entiers frais et dépens.

La société FROMAGERIE [Localité 4] demande :

- de confirmer le jugement rendu par le conseil de prud'hommes d'Epinal en date du 24 avril 2023 en ce qu'il a :

- déclaré recevable la demande Monsieur [C] [Z] [K],

- confirmé la qualification de la rupture du contrat de travail de Monsieur [C] [Z] [K] comme étant un licenciement pour faute grave,

- débouté Monsieur [C] [Z] [K] de l'ensemble de ses demandes,

- dit n'y avoir lieu de condamner la société au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné Monsieur [C] [Z] [K] aux frais et dépens de l'instance,

- d'infirmer le jugement rendu par le conseil de prud'hommes d'Epinal en date du 24 avril2023 en ce qu'il a débouté la société de sa demande reconventionnelle au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

A titre principal :

Sur la demande au titre du licenciement pour faute grave :

- de juger que la faute grave de Monsieur [C] [Z] [K] est établie,

- de juger que le licenciement pour faute grave de Monsieur [C] [Z] [K] est bien fondé,

- en conséquence, de débouter Monsieur [C] [Z] [K] de l'intégralité de ses demandes,

A titre subsidiaire :

- de juger que le licenciement de Monsieur [C] [Z] [K] repose sur une cause réelle et sérieuse,

- en conséquence, de débouter Monsieur [C] [Z] [K] de ses demandes,

A titre infiniment subsidiaire :

Sur la demande indemnitaire de Monsieur [C] [Z] [K] :

- de fixer à une bien plus faible valeur le montant des dommages et intérêts sollicités par Monsieur [C] [Z] [K] au titre de la rupture du contrat de travail, faute pour lui de rapporter la preuve d'un préjudice à hauteur de 2.329,00 euros,

Sur la demande au titre des intérêts légaux :

- de débouter Monsieur [C] [Z] [K],

Sur la demande au titre du remboursement des indemnités de retour à l'emploi :

- de juger que Monsieur [C] [Z] [K] n'a pas d'intérêt à agir,

- en conséquence, de débouter Monsieur [C] [Z] de cette demande,

Sur la demande au titre d'une astreinte sur les documents de fin de contrat rectificatifs :

- de débouter Monsieur [C] [Z] de sa demande tendant à la prononciation d'une astreinte sur les documents de fin de contrat rectificatifs,

A titre reconventionnel :

- de condamner Monsieur [C] [Z] [K] à verser à la société la somme de 3 900,00 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- de condamner Monsieur [C] [Z] [K] aux entiers dépens.

SUR CE, LA COUR

Pour plus ample exposé sur les moyens et prétentions des parties, il est expressément renvoyé aux dernières écritures qu'elles ont déposées sur le RPVA, s'agissant de l'employeur le 11 janvier 2024, et en ce qui concerne le salarié le 21 décembre 2023.

Sur le licenciement

- sur la faute grave

La lettre de licenciement du 19 mai 2021 (pièce 8 de la société FROMAGERIE [Localité 4]) indique :

« (') Nous faisons suite à notre entretien du 07 mai 2021 à 09h00, durant lequel vous avez reconnu les faits reprochés, à savoir :

- Votre titre de séjour arrivant à terme le 05/05/2021, le service RH de la Fromagerie de [Localité 4] vous a demandé régulièrement des informations sur le renouvellement de votre autorisation de travail.

- Le 26/04/21 nous découvrons via un mail que vous nous avez adressé, que votre demande de renouvellement était en fait rejetée et que vous étiez même dans une situation dite d'abrogation de votre autorisation de travail valable du 06/11/2020 au 05/05/2021.

- A réception de ce mail, nous contactons la Préfecture de Meurthe et Moselle afin d'obtenir des précisions et nous apprenons que vous aviez l'information depuis le 18/02/2021.

Votre attitude inacceptable constitue un manque de loyauté à l'égard de l'entreprise et nous met en délicatesse avec l'administration concernant le respect des règles de droit sur la gestion des salariés étrangers dans une entreprise.

Nous considérons que ces faits constituent une faute grave rendant impossible votre maintien dans l'entreprise.

Nous vous notifions dons par la présente votre licenciement pour faute grave, sans préavis ni indemnité de rupture, qui prendra effet à la date d'envoi de la présente lettre recommandée avec AR.

Nous vous signalons qu'en raison de la gravité des faits qui vous sont reprochés, la période correspondant à la période de mise à pied à titre conservatoire ne sera pas rémunérée (...). »

La société FROMAGERIE [Localité 4] explique que M. [C] [Z] [K] étant de nationalité gabonaise, il lui a remis, dans le cadre de son embauche, le récépissé de demande de carte de séjour valable du 06 novembre 2020 au 05 mai 2021.

Elle a ensuite transmis à la DIRECCTE la demande d'autorisation de conclure un contrat de travail ; l'autorisation provisoire de travail lui a été donnée le 17 décembre 2020.

L'intimée expose avoir sollicité le salarié à compter de mars 2021 afin qu'il confirme avoir entamé des démarches lui permettant d'obtenir le renouvellement de son titre de séjour, la demande devant être déposée dans les deux mois qui précèdent l'expiration du titre de séjour ou de l'autorisation de travailler.

La société FROMAGERIE [Localité 4] indique que ce n'est qu'à compter du 26 avril 2021 que M. [C] [Z] [K] l'a informé que sa demande de renouvellement était rejetée et qu'il était en situation d'abrogation de son autorisation de travail depuis le 18 février 2021.

L'employeur estime que la faute grave est constituée par le manquement à l'obligation de loyauté, qui aurait dû amener M. [C] [Z] [K] à l'informer de sa situation.

L'intimée précise que du fait de cette situation, elle encourait des sanctions pénales.

M. [C] [Z] [K] conteste que l'employeur l'ait questionné quant au renouvellement de son autorisation de travail.

Il affirme qu'il appartient à l'employeur de s'assurer que le salarié dispose bien d'une autorisation lui permettant d'exercer une activité professionnelle.

M. [C] [Z] [K] souligne avoir réalisé toutes les démarches lui permettant d'être en situation régulière dès le 06 novembre 2020, soit dans le délai de trois mois précédant l'expiration de son titre de séjour.

Il fait valoir ne pas avoir eu connaissance de la décision de la Préfecture du 18 février 2021 de refus de son titre de séjour.

Motivation

L'article L 1232-1 du code du travail subordonne la légitimité du licenciement à l'existence d'une cause réelle et sérieuse.

La cause doit ainsi être objective, exacte et les griefs reprochés doivent être suffisamment pertinents pour justifier la rupture du contrat de travail.

La faute grave privative du préavis prévu à l'article L 1234-1 du même code est celle qui rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise.

La charge de la preuve de la faute grave repose exclusivement sur l'employeur.

En l'espèce, la lettre de licenciement reproche au salarié de ne pas l'avoir tenue informée de sa situation quant à son titre de séjour en France.

Il ressort de l'arrêté préfectoral du 18 février 2021 (pièce 5 de la société FROMAGERIE [Localité 4]) portant refus de séjour à l'encontre de M. [C] [Z] [K] que celui-ci a présenté sa demande devant les services compétents le 06 novembre 2020, soit dans les délais qu'invoque l'employeur en page 3 de ses écritures, indiquant que l'appelant devait faire cette demande au plus tard le 05 mars 2021.

Il ressort du mémoire rédigé par le Préfet de Meurthe et Moselle, dans le cadre du recours exercé par M. [C] [Z] [K] devant le Tribunal administratif pour contester la décision de refus précitée (pièce 18 de l'appelant) que l'arrêté du 18 février 2021 a été adressé à M. [C] [Z] [K] à son ancienne adresse, et que le recommandé est revenu avec la mention « destinataire inconnu à l'adresse ».

Il ressort de ce mémoire que « ce n'est que par un message électronique du 15 avril 2021 que M. [Z] [K] a informé mes services de sa nouvelle domiciliation au [Adresse 2]. Le 19 avril 2021, j'ai donc réitéré l'envoi de l'arrêté contesté à cette nouvelle adresse si bien que l'intéressé a pu prendre connaissance du refus de séjour qui lui a été opposé et qu'il a pu le contester devant votre juridiction ».

La société FROMAGERIE [Localité 4] indique que M. [C] [Z] [K] l'a informée de la décision préfectorale de refus le 26 avril.

Il convient dès lors de constater que, ayant été informé par lettre recommandée de la préfecture du 19 avril 2021, M. [C] [Z] [K] n'a pas manqué d'en informer son employeur dans un délai raisonnable.

Dès lors, la faute grave reprochée n'est pas établie.

Le jugement sera donc réformé en ce qu'il a dit que le licenciement reposait sur une faute grave.

- sur la cause réelle et sérieuse

La société FROMAGERIE [Localité 4] estime à titre subsidiaire que le licenciement est fondé sur une cause réelle et sérieuse, compte tenu de l'irrégularité de la situation de M. [C] [Z] [K].

M. [C] [Z] [K] estime que le licenciement est sans cause réelle et sérieuse, ayant réalisé dans les délais l'ensemble des démarches lui permettant d'être en situation régulière, invoquant les articles L311-4 et R311-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (CESEDA).

Motivation

L'article L. 311-1 du CESEDA, dans sa version applicable au litige, dispose que, sous réserve des engagements internationaux de la France ou de l'article L. 121-1, tout étranger âgé de plus de dix-huit ans qui souhaite séjourner en France pour une durée supérieure à trois mois doit être titulaire de l'un des documents de séjour suivants :

1o Un visa de long séjour, d'une durée maximale d'un an ;

2o Un visa de long séjour, d'une durée maximale d'un an, conférant à son titulaire, en application du troisième alinéa de l'article L. 211-2-1, les droits attachés à une carte de séjour temporaire ou à la carte de séjour pluriannuelle prévue aux articles L. 313-20 et L. 313-21 (L. no 2018-778 du 10 sept. 2018, art. 65) «et aux I et II de l'article L. 313-24» lorsque le séjour envisagé sur ce fondement est d'une durée inférieure ou égale à un an ;

3o Une carte de séjour temporaire, d'une durée maximale d'un an, dont les conditions de délivrance et de renouvellement sont prévues au chapitre III du présent titre;

4o Une carte de séjour pluriannuelle, d'une durée maximale de quatre ans, dont les conditions de délivrance et de renouvellement sont prévues au même chapitre III ;

5o Une carte de résident, d'une durée de dix ans ou à durée indéterminée, dont les conditions de délivrance et de renouvellement sont prévues au chapitre IV du présent titre ;

6o Une carte de séjour portant la mention "retraité", d'une durée de dix ans, dont les conditions de délivrance et de renouvellement sont prévues au chapitre VII du présent titre.

L'étranger qui séjourne au titre de l'un des documents mentionnés aux 2o et 3o du présent article peut solliciter la délivrance d'une carte de séjour pluriannuelle ou d'une carte de résident dans les conditions prévues, respectivement, à l'article L. 313-17 et aux articles L. 314-8 à L. 314-12, sous réserve des exceptions prévues par les dispositions législatives du présent code.

L'article R. 311-2 du même code, dans sa version applicable, dispose que la demande est présentée par l'intéressé dans les deux mois de son entrée en France. S'il y séjournait déjà, il présente sa demande :

1o Soit, au plus tard, avant l'expiration de l'année qui suit son dix-huitième anniversaire, si l'étranger peut obtenir de plein droit un titre de séjour en application soit de l'article L. 313-7-2, soit de l'article L. 313-13,» soit de l'article L. 313-21, soit de l'article L. 313-24, soit des 8o ou 9o de l'article L. 314-11, soit de l'article L. 314-12;

2o Soit au plus tard deux mois après la date de son dix-huitième anniversaire, si l'étranger ne peut obtenir de plein droit un titre de séjour dans les conditions prévues au 1o ci-dessus ;

3o Soit au plus tard deux mois après la date à laquelle la perte de la nationalité française lui est devenue opposable ;

4o Soit dans le courant des deux derniers mois précédant l'expiration de la carte de séjour dont il est titulaire, sauf s'il est titulaire du statut de résident de longue durée-UE accordé par la France en application des articles L. 314-8 , L. 314-8-1» et L. 314-8-2.

A l'échéance de ce délai et en l'absence de présentation de demande de renouvellement de sa carte de séjour, il justifie à nouveau des conditions requises pour l'entrée sur le territoire national lorsque la possession d'un visa est requise pour la première délivrance de la carte de séjour.

Il résulte de la combinaison de ces textes qu'un étranger, titulaire d'une carte de résident, doit, pour bénéficier du délai de trois mois lui permettant, après expiration de son titre, de conserver son droit d'exercer une activité professionnelle, en solliciter le renouvellement dans les deux mois précédant cette expiration.

En l'espèce, M. [C] [Z] [K] ni ne soutient ni ne justifie d'une information de l'employeur quant à un recours exercé contre la décision de la préfecture de Meurthe et Moselle du 18 février 2021, qui aurait eu pour effet de prolonger la validité de son titre de séjour, alors que l'arrêté précité du 18 février 2021 dispose que :

« ARTICLE 1- le renouvellement des droits au séjour et le changement de statut déposés par Monsieur [M] [sic] [K] [C] [L], ressortissant gabonais né le 18-09-1991 à [Localité 5] au Gabon est refusé.

ARTICLE 2 : le récépissé valable du 06-11-2020 au 05-05-2021 est abrogé » [il s'agit du récépissé dont il est fait état en page 1 de l'arrêté : « le dépôt le 06-11-2020 du dossier faisant l'objet de la présente décision ayant conduit à la délivrance du récépissé valable du 06-11-2020 au 05-05-2021 »].

Dans ces conditions, le constat par l'employeur de l'annulation du titre de séjour de M. [C] [Z] [K] et par voie de conséquence de son autorisation de travail, constituant une cause réelle et sérieuse de licenciement, il sera fait droit à la demande subsidiaire de requalification, le jugement étant réformé en ce sens.

Sur les conséquences financières de la rupture

M. [C] [Z] [K] sollicite la condamnation de l'employeur à lui payer une indemnité compensatrice de préavis, outre les congés payés afférents, un rappel de salaire pour la période de mise à pied, outre les congés payés afférents, une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

La société FROMAGERIE [Localité 4] conclut à l'existence d'une cause réelle et sérieuse au licenciement, et au débouté de la demande à ce titre.

Elle ne conclut pas sur le surplus des demandes.

Motivation

Le licenciement pour faute étant requalifié de licenciement fondé sur une cause réelle et sérieuse, le salarié a droit à une indemnité de licenciement, une indemnité de préavis, le paiement de ses jours de mise à pied, une indemnité de congés payés afférents au préavis et aux jours de mis à pied, en application des articles L1234-9, L3141-24, L1234-1, L1234-5 et L3141-3 du code du travail.

En l'espèce, le licenciement sera requalifié en licenciement pour cause réelle et sérieuse.

En conséquence, M. [C] [Z] [K] sera débouté de sa demande de dommages et intérêts pour licenciement non fondé.

En l'absence de contestation subsidiaire, de la part de la société FROMAGERIE [Localité 4], du surplus de ses demandes, fondées en leur principe, il y sera fait droit.

Sur la demande fondée sur l'article L8252-2 du code du travail

L'article L. 8252-2 du code du travail dispose que le salarié étranger a droit au titre de la période d'emploi illicite :

1o Au paiement du salaire et des accessoires de celui-ci, conformément aux dispositions légales, conventionnelles» et aux stipulations contractuelles applicables à son emploi, déduction faite des sommes antérieurement perçues au titre de la période considérée. A défaut de preuve contraire, les sommes dues au salarié correspondent à une relation de travail présumée d'une durée de trois mois. Le salarié peut apporter par tous moyens la preuve du travail effectué ;

2o En cas de rupture de la relation de travail, à une indemnité forfaitaire égale à trois mois de salaire, à moins que l'application des règles figurant aux articles L. 1234-5, L. 1234-9, L. 1243-4 et L. 1243-8 ou des stipulations contractuelles correspondantes ne conduise à une solution plus favorable.

Les dispositions dont se prévaut M. [C] [Z] [K] ne trouvant pas à s'appliquer dès lors que l'employeur a diligenté une procédure de licenciement dès l'instant où le salarié l'a informé qu'il n'avait plus d'autorisation de travail, l'appelant sera débouté de sa demande.

Sur la demande de remboursement à France Travail

Le licenciement étant fondé, la demande à ce titre est sans objet.

Sur la demande de documents de fin de contrat

En application des articles L1121-16 et L1234-19 du Code du travail, il sera fait droit à la demande, à l'exception de la demande d'astreinte, celle-ci n'apparaissant pas justifiée.

Sur les dépens et les frais irrépétibles

Succombant partiellement à l'instance, la société FROMAGERIE [Localité 4] sera condamnée aux dépens, ainsi qu'à payer à M. [C] [Z] [K] 1000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La Cour, chambre sociale, statuant par arrêt contradictoire mis à disposition au greffe, après débats en audience publique et après en avoir délibéré,

Infirme en toutes ses dispositions le jugement rendu par le conseil de prud'hommes d'Epinal le 24 avril 2023 ;

Statuant à nouveau,

Dit que le licenciement de M. [C] [Z] [K] est fondé sur une cause réelle et sérieuse ;

Condamne la société FROMAGERIE [Localité 4] à payer à M. [C] [Z] [K]:

- 2.329,00 euros au titre de l'indemnité compensatrice de préavis,

- 232,90 euros au titre des congés payés afférents,

- 2 162,90 euros à titre de rappel de salaire au titre de la mise à pied conservatoire,

- 216,29 euros au titre des congés payés afférents ;

Condamne la société FROMAGERIE [Localité 4] à remettre à M. [C] [Z] [K], dans un délai d'un mois, les documents de fin de contrat ;

Y ajoutant,

Condamne la société FROMAGERIE [Localité 4] à payer à M. [C] [Z] [K] 1000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne la société FROMAGERIE [Localité 4] aux dépens.

Ainsi prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Et signé par Monsieur Raphaël WEISSMANN, Président de Chambre, et par Madame Laurène RIVORY, Greffier.

LE GREFFIER LE PRESIDENT DE CHAMBRE

Minute en onze pages


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Nancy
Formation : Chambre sociale-2ème sect
Numéro d'arrêt : 23/01101
Date de la décision : 23/05/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 29/05/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-05-23;23.01101 ?
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