RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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COUR D'APPEL DE NANCY
Première Chambre Civile
ARRÊT N° /2024 DU 21 MAI 2024
Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 23/01664 - N° Portalis DBVR-V-B7H-FG4O
Décision déférée à la Cour : jugement du tribunal judiciaire d'EPINAL,
R.G.n° 11-23-000137, en date du 29 juin 2023,
APPELANTE :
S.A.S.U. VISIPLUS, prise en la personne de son représentant légal, pour ce domicilié au siège social, sis [Adresse 1]
Représentée par Me Farida AYADI de la SCP EST AVOCATS, avocat au barreau d'EPINAL
INTIMÉE :
Madame [V] [C]
née le 13 janvier 1984 à [Localité 3] (51)
domiciliée [Adresse 2]
Non représentée, bien que la déclaration d'appel lui ait été régulièrement signifiée par acte de Me [L] [W], Commissaire de Justice à [Localité 4], en date du 21 septembre 2023 transformé en procès-verbal de recherches infructueuses
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 11 Mars 2024, en audience publique devant la Cour composée de :
Madame Nathalie CUNIN-WEBER, Président de Chambre,
Monsieur Jean-Louis FIRON, Conseiller, chargé du rapport,
Madame Mélina BUQUANT, Conseiller,
qui en ont délibéré ;
Greffier, lors des débats : Madame Céline PERRIN ;
A l'issue des débats, le Président a annoncé que l'arrêt serait rendu par mise à disposition au greffe le 21 Mai 2024, en application de l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,
ARRÊT : défaut, rendu par mise à disposition publique au greffe le 21 Mai 2024, par Madame PERRIN, Greffier, conformément à l'article 450 alinéa 2 du Code de Procédure Civile ;
signé par Monsieur FIRON, Conseiller, en remplacement de Madame CUNIN-WEBER, Président, régulièrement empêchée, et par Madame PERRIN, Greffier ;
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Copie exécutoire délivrée le à
Copie délivrée le à
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EXPOSÉ DU LITIGE
Le 16 octobre 2020, la SASU Visiplus a établi au nom de Madame [V] [C] deux devis de formation.
Le premier portait sur une formation 'Titre certifié assistant(e) RH' devant être suivie à distance, d'une durée globale estimée à 590 heures moyennant le prix de 9700,80 euros TTC.
Le second concernait une formation 'Tecodi : Certification aux compétences digitales', suivie à distance, d'une durée globale estimée à 40 heures, moyennant le prix de 2899,20 euros TTC.
Les deux documents portent la même signature à l'emplacement 'Signature du participant'.
Le 2 mars 2021, la SASU Visiplus a établi à l'ordre de Madame [C] deux factures relatives à l'indemnité d'abandon des deux formations de 4850,40 euros TTC et 1449,60 euros TTC.
Par courriers des 23 mars et 9 avril 2021 ainsi que par courrier du 20 mai 2021 signifié par huissier le 28 mai 2021 à l'étude, la SASU Visiplus a mis Madame [C] en demeure de lui verser ces sommes.
Par acte d'huissier du 9 février 2023, la SASU Visiplus a fait assigner Madame [C] devant le tribunal judiciaire d'Épinal afin qu'elle soit condamnée à lui payer notamment une indemnité d'abandon égale à 50 % du montant TTC des actions de formation, soit les sommes de :
- 4850,40 euros TTC au titre de la facture n° 210316221 du 2 mars 2021,
- 1449,60 euros TTC au titre de la facture n° 210316220 du 2 mars 2021.
Par jugement réputé contradictoire du 29 juin 2023, le tribunal judiciaire d'Épinal a :
- débouté la SASU Visiplus de toutes ses demandes dirigées contre Madame [C],
- condamné la SASU Visiplus aux entiers dépens de l'instance.
Dans ses motifs, le tribunal a observé que la 'marque' figurant sur les divers documents était une reproduction utilisée à de maintes reprises et qu'elle ne permettait pas d'établir que Madame [C], à qui elle était attribuée, avait eu connaissance des stipulations des contrats litigieux.
Il a relevé que la signature alléguée de Madame [C] sur les documents ne correspondait ni à celle qui figurait sur les accusés de réception des courriers de mise en demeure qui lui avaient été adressés, ni à celle apparaissant sur sa carte d'identité.
Il en a déduit qu'il n'était pas établi que Madame [C] avait contracté avec la SASU Visiplus et était engagée par les deux contrats de formation.
Par déclaration reçue au greffe de la cour, sous la forme électronique, le 27 juillet 2023, la SASU Visiplus a relevé appel de ce jugement.
Au dernier état de la procédure, par conclusions reçues au greffe de la cour d'appel sous la forme électronique le 22 septembre 2023, auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé des prétentions et moyens, la SASU Visiplus demande à la cour, sur le fondement des articles 1103, 1104 et 1231-1 du code civil, de :
- recevoir son appel et le dire bien fondé,
- infirmer le jugement rendu le 29 juin 2023 en tout point,
En conséquence,
Statuant à nouveau,
- débouter Madame [C] de l'ensemble de ses demandes,
- dire et juger que Madame [C] a donné son consentement au contrat du 27 octobre 2020,
- dire et juger qu'en l'absence d'assiduité du participant, une indemnité d'abandon est due par le participant aux termes des deux contrats signés entre les parties égale à 50 % du montant TTC de l'action de formation,
En conséquence,
- condamner Madame [C] au paiement des sommes de :
* 4850,40 euros TTC au titre de la facture n° 210316221 du 2 mars 2021,
* 1449,60 euros TTC au titre de la facture n° 210316220 du 2 mars 2021,
- condamner Madame [C] à lui payer la somme de 3000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile outre les entiers dépens.
La déclaration d'appel et les conclusions d'appelant ont été signifiées à Madame [C] le 21 septembre 2023 selon procès-verbal de recherches infructueuses. Cette dernière n'a pas constitué avocat.
La clôture de l'instruction a été prononcée par ordonnance du 20 février 2024.
L'audience de plaidoirie a été fixée au 11 mars 2024 et le délibéré au 21 mai 2024.
MOTIFS DE LA DÉCISION
SUR LES DEMANDES PRINCIPALES
En vertu de l'article 1103 du code civil, 'Les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits'.
En application du premier alinéa de l'article 1353 de ce code, 'Celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver'.
Selon le premier alinéa de l'article 1359, 'L'acte juridique portant sur une somme ou une valeur excédant un montant fixé par décret doit être prouvé par écrit sous signature privée ou authentique [...]', étant précisé que la somme ou la valeur visée à cet article est fixée à 1500 euros.
L'article 1361 dispose qu'il peut être suppléé à l'écrit par un commencement de preuve par écrit corroboré par un autre moyen de preuve.
En particulier, le premier alinéa de l'article 1362 précise que 'Constitue un commencement de preuve par écrit tout écrit qui, émanant de celui qui conteste un acte ou de celui qu'il représente, rend vraisemblable ce qui est allégué'.
En vertu de l'article 1366 du même code, 'L'écrit électronique a la même force probante que l'écrit sur support papier, sous réserve que puisse être dûment identifiée la personne dont il émane et qu'il soit établi et conservé dans des conditions de nature à en garantir l'intégrité'.
L'article 1367 de ce code dispose : 'La signature nécessaire à la perfection d'un acte juridique identifie son auteur. Elle manifeste son consentement aux obligations qui découlent de cet acte. Quand elle est apposée par un officier public, elle confère l'authenticité à l'acte.
Lorsqu'elle est électronique, elle consiste en l'usage d'un procédé fiable d'identification garantissant son lien avec l'acte auquel elle s'attache. La fiabilité de ce procédé est présumée, jusqu'à preuve contraire, lorsque la signature électronique est créée, l'identité du signataire assurée et l'intégrité de l'acte garantie, dans des conditions fixées par décret en Conseil d'Etat'.
En l'espèce, les contrats allégués portent sur une somme supérieure à 1500 euros. Ils sont signés à l'emplacement réservé au 'participant' par signature électronique, le 27 octobre 2020. En l'absence de certificat électronique, la fiabilité du procédé de recueil de la signature n'est pas démontrée. Dès lors, la preuve du consentement de Madame [C] à ces deux contrats n'est pas suffisamment établie par ces seules pièces.
Cependant, comme le relève à juste titre la SASU Visiplus, si la signature électronique apparaissant sur les devis n'est pas identique aux signatures figurant sur les autres documents de Madame [C], force est de constater que les signatures de Madame [C] diffèrent les unes des autres (carte d'identité, accusés de réception des courriers de mise en demeure).
En outre, compte tenu de son procédé de recueil, une signature électronique est fréquemment différente de la signature manuscrite d'une même personne.
Par ailleurs, la SASU Visiplus communique le dossier d'inscription de Madame [C], signé électroniquement le 27 octobre 2020, mentionnant notamment les éléments relatifs à son état civil, ses coordonnées, son niveau d'études et sa situation professionnelle.
La SASU Visiplus produit également le 'dossier de demande de validation des acquis professionnels' comportant, outre les éléments d'état civil et les coordonnées de Madame [C], une lettre de motivation, un curriculum vitae, un certificat de travail, des bulletins de paie, une attestation Unédic, la copie d'un diplôme et de sa carte d'identité.
En outre, la SASU Visiplus produit en pièce n° 16 une pièce justifiant de ce que Madame [C] a demandé la prise en charge de sa formation le 23 octobre 2020.
Au surplus, au vu de l'état des connexions, Madame [C] a commencé ses formations, soit 19 heures 37 pour la formation 'assistant(e) RH' et 20 minutes pour la formation 'Tecodi'.
Il résulte des développements qui précèdent que la SASU Visiplus rapporte la preuve de l'existence des deux contrats qu'elle allègue.
Les deux contrats prévoient que dans le cas où le participant arrête son cycle de formation en cours, quelle que soit la raison (sauf décès ou invalidité absolue et définitive), il est redevable d'une indemnité d'abandon de 50 % du montant TTC de l'action de formation.
En conséquence, Madame [C] sera condamnée à payer à la SASU Visiplus les sommes de 4850,40 euros TTC et 1449,60 euros TTC.
Le jugement sera donc infirmé en ce qu'il a débouté la SASU Visiplus de ces demandes.
Enfin, il n'appartient pas à la cour de statuer sur les demandes tendant à ce qu'il soit 'dit et jugé que', 'constaté que' ou 'donné acte que' qui ne sont pas des prétentions au sens de l'article 4 du code de procédure civile.
SUR LES DÉPENS ET L'ARTICLE 700 DU CODE DE PROCÉDURE CIVILE
Au regard des développements qui précèdent, le jugement sera infirmé en ce qu'il a condamné la SASU Visiplus aux dépens de l'instance.
Statuant à nouveau et y ajoutant, Madame [C] sera condamnée aux dépens de première instance et d'appel, ainsi qu'à payer à la SASU Visiplus la somme de 1500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS,
LA COUR, statuant par arrêt rendu par défaut et en dernier ressort, prononcé publiquement, par mise à disposition au greffe,
Infirme en toutes ses dispositions le jugement rendu par le tribunal judiciaire d'Épinal le 29 juin 2023 ;
Statuant à nouveau et y ajoutant,
Condamne Madame [V] [C] à payer à la SASU Visiplus les sommes de 4850,40 euros (QUATRE MILLE HUIT CENT CINQUANTE EUROS ET QUARANTE CENTIMES) TTC et 1449,60 euros (MILLE QUATRE CENT QUARANTE-NEUF EUROS ET SOIXANTE CENTIMES) TTC au titre des indemnités d'abandon prévues contractuellement ;
Condamne Madame [V] [C] à payer à la SASU Visiplus la somme de 1500 euros (MILLE CINQ CENTS EUROS) au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
Condamne Madame [V] [C] aux dépens de première instance et d'appel.
Le présent arrêt a été signé par Monsieur FIRON, Conseiller, en remplacement de Madame CUNIN-WEBER, Présidente de la première chambre civile de la Cour d'Appel de NANCY, régulièrement empêchée, et par Madame PERRIN, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Signé : C. PERRIN.- Signé : J.-L. FIRON.-
Minute en cinq pages.