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18/04/2024 | FRANCE | N°22/02520

France | France, Cour d'appel de Nancy, Chambre sociale-2ème sect, 18 avril 2024, 22/02520


ARRÊT N° /2024

PH



DU 18 AVRIL 2024



N° RG 22/02520 - N° Portalis DBVR-V-B7G-FCIV







Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de NANCY

F 19/00551

28 octobre 2022











































COUR D'APPEL DE NANCY

CHAMBRE SOCIALE - SECTION 2













APPELANTE :



Madame [K] [S]

[Adresse 2]


[Localité 3]

Représentée par Me Fabrice GOSSIN substitué par Me HORBER de la SCP FABRICE GOSSIN ET ERIC HORBER, avocats au barreau de NANCY









INTIMÉ :



Monsieur [J] [W] Exerçant sous l'enseigne 'BEL AIR', Pris en la personne de son représentant légal pour ce domicilié audit siège

centre commercial [Adress...

ARRÊT N° /2024

PH

DU 18 AVRIL 2024

N° RG 22/02520 - N° Portalis DBVR-V-B7G-FCIV

Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de NANCY

F 19/00551

28 octobre 2022

COUR D'APPEL DE NANCY

CHAMBRE SOCIALE - SECTION 2

APPELANTE :

Madame [K] [S]

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représentée par Me Fabrice GOSSIN substitué par Me HORBER de la SCP FABRICE GOSSIN ET ERIC HORBER, avocats au barreau de NANCY

INTIMÉ :

Monsieur [J] [W] Exerçant sous l'enseigne 'BEL AIR', Pris en la personne de son représentant légal pour ce domicilié audit siège

centre commercial [Adresse 1]

[Localité 4]

Représenté par Me Etienne GUIDON de la SELARL CABINET GUIDON - BOZIAN, avocat au barreau de NANCY

COMPOSITION DE LA COUR :

Lors des débats et du délibéré,

Président : WEISSMANN Raphaël,

Conseillers : BRUNEAU Dominique,

STANEK Stéphane,

Greffier lors des débats : RIVORY Laurène

DÉBATS :

En audience publique du 01 Février 2024 ;

L'affaire a été mise en délibéré pour l'arrêt être rendu le 18 Avril 2024 ; par mise à disposition au greffe conformément à l'article 450 alinéa 2 du Code de Procédure Civile ;

Le 18 Avril 2024, la Cour après en avoir délibéré conformément à la Loi, a rendu l'arrêt dont la teneur suit :

EXPOSÉ DU LITIGE ET PRÉTENTIONS RESPECTIVES DES PARTIES.

Mme [K] [S] a été engagée sous contrat de travail à durée déterminée, par M.[J] [W], exploitant un établissement de coiffure sous l'enseigne BEL HAIR, à compter du 17 juin 2008 pour une durée de 3 mois, en qualité de coiffeuse coloriste permanentiste.

Le contrat de travail a été renouvelé pour une seconde période de 3 mois, puis la relation contractuelle s'est poursuivie sous contrat à durée indéterminée à temps partiel.

La convention collective nationale de la coiffure s'applique au contrat de travail.

Par courrier du 06 décembre 2018, la salariée a pris acte de la rupture de son contrat de travail.

Par requête du 06 décembre 2019, Mme [K] [S] a saisi le conseil de prud'hommes de Nancy, aux fins :

- de dire et juger que sa démission s'analyse en une prise d'acte produisant les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- de dire et juger que son contrat de travail à temps partiel doit être requalifié en contrat à temps plein,

- en conséquence, de condamner M. [J] [W] à lui payer les sommes suivantes :

- 24 161,80 euros au titre de l'article L.1235-3 du code du travail,

- 4 832,36 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis, outre la somme de 483,23 euros de congés payés afférents,

- 2 416,18 euros au titre de l'indemnité légale de licenciement,

- 806,82 euros bruts à titre de rappel de salaire pour requalification de son contrat de travail à temps plein, outre la somme de 80,68 euros de congés payés afférents,

- 13 340,60 euros à titre de rappel de salaire pour heures supplémentaires non payés entre 2016 et 2018, congés payés inclus,

- 1 117,78 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi du fait de l'impossibilité de prise de repos compensateur éludé entre 2016 et 2018,

- 14 497,08 euros à titre de dommages et intérêts au titre du travail dissimulé,

- 1 134,53 euros à titre de rappel de primes,

- 5 000,00 euros à titre de réparation du préjudice moral subi du fait du manquement à l'obligation de sécurité de l'employeur,

- de dire et juger qu'elle devait être classée manager débutant, niveau 3 échelon 2 de la classification conventionnelle,

- en conséquence, de condamner M. [J] [W] à lui payer la somme de 5 973,69 euros à titre de rappel de salaire pour requalification conventionnelle, outre la somme de 597,36 euros de congés payés afférents,

- à titre subsidiaire, de dire et juger qu'elle devait être classée coiffeuse coloriste permanentiste très hautement qualifiée niveau 2 échelon 3,

- en conséquence, de condamner M. [J] [W] à lui payer la somme de 2 518,41 euros à titre de rappel de salaire pour requalification conventionnelle, outre la somme de 251,84 euros de congés payés afférents,

- d'ordonner la production sous astreinte de 100,00 euros par jour de retard à compter du 15ème jour suivant le jugement à intervenir, l'ensemble des éléments justifiant des conditions d'attribution, de calcul et les montants des primes et parts variables de rémunération,

- d'ordonner la délivrance dans un délai de 15 jours suivant le jugement à intervenir les documents et les mentions suivantes :

- les bulletins de salaire rectifiés correspondant aux rappels de salaire alloués par la décision à intervenir,

- un certificat de travail rectifié correspondant aux emplois successivement exercés dans le cadre de la relation contractuelle

- une attestation Pôle Emploi conformément à la décision à intervenir,

- d'ordonner à M. [J] [W] de lui restituer l'ensemble des matériels et outillages personnels dont elle disposait dans le cadre de l'exécution de son contrat de travail sous astreinte de 100,00 euros par jour de retard à compter du 8ème jour suivant le jugement à intervenir,

- de condamner M. [J] [W] à lui payer la somme de 2 000,00 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, outre les frais et dépens de l'instance

- d'ordonner l'exécution provisoire du jugement à intervenir en application de l'article 515 du code de procédure civile.

Vu le jugement du conseil de prud'hommes de Nancy rendu le 28 octobre 2022 qui a:

- donné acte à M. [J] [W] du paiement de la somme de 842,13 euros bruts au titre du rappel de salaire, ainsi que la somme de 84,21 euros bruts au titre des congés payés afférents,

- débouté Mme [K] [S] de toutes ses autres demandes,

- débouté M. [J] [W] de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- laissé à chacune des parties ses propres dépens.

Vu l'appel formé par Mme [K] [S] le 02 novembre 2022,

Vu l'article 455 du code de procédure civile,

Vu les conclusions de Mme [K] [S] déposées sur le RPVA le 26 janvier 2023, et celles de M. [J] [W] déposées sur le RPVA le 23 janvier 2024,

Vu l'ordonnance de clôture rendue le 24 janvier 2024,

Mme [K] [S] demande à la cour:

- d'infirmer le jugement entrepris ;

- statuant à nouveau,

- de dire et juger que sa démission s'analyse en une prise d'acte produisant les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- en conséquence, de condamner M. [J] [W] à lui payer les sommes de:

- 24 161,80 euros au titre de l'article L.1235-3 du code du travail,

- 4 832,36 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis,

- 483,23 euros au titre de l'indemnité compensatrice de congés payés afférents,

- 2 416,18 euros au titre de l'indemnité légale de licenciement,

- 806,82 euros bruts à titre de rappel de salaire pour requalification de son contrat de travail à temps plein,

- 80,68 euros au titre de l'indemnité compensatrice de congés payés afférents,

- 1 134,53 euros à titre de rappel de primes,

- 113,45 euros au titre de l'indemnité compensatrice de congés payés afférents,

- 13 340,60 euros à titre de rappel de salaire pour heures supplémentaires non payés entre 2016 et 2018, congés payés inclus,

- 1 117,78 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi du fait de l'impossibilité de prise de repos compensateur éludé entre 2016 et 2018,

- 14 497,08 euros à titre de dommages et intérêts au titre du travail dissimulé,

- de dire et juger qu'elle devait être classée manager débutant, niveau 3 échelon 2 de la classification conventionnelle,

- en conséquence, de condamner M. [J] [W] à lui payer la somme de 5 973,69 euros à titre de rappel de salaire pour requalification conventionnelle, outre la somme de 597,36 euros de congés payés afférents,

- à titre subsidiaire, de dire et juger qu'elle devait être classée coiffeuse coloriste permanentiste très hautement qualifiée niveau 2 échelon 3,

- en conséquence, de condamner M. [J] [W] à lui payer la somme de 2 518,41 euros à titre de rappel de salaire pour requalification conventionnelle, outre la somme de 251,84 euros de congés payés afférents,

- de condamner M. [J] [W] à lui payer la somme de 5 000,00 euros à titre de réparation du préjudice moral subi du fait du manquement à l'obligation de sécurité de l'employeur,

En tout état de cause :

- de condamner M. [J] [W] à lui délivrer:

- les bulletins de salaire rectifiés correspondant aux rappels de salaire alloués par la décision à intervenir,

- un certificat de travail rectifié correspondant aux emplois successivement exercés dans le cadre de la relation contractuelle

- une attestation Pôle Emploi conformément à la décision à intervenir,

- d'ordonner à M. [J] [W] de restituer l'ensemble des matériels et outillages personnels dont elle disposait dans le cadre de l'exécution de son contrat de travail sous astreinte de 100,00 euros par jour de retard à compter du 8ème jour suivant le jugement à intervenir,

- de condamner M. [J] [W] à payer à Mme [K] [S] la somme de 2 000,00 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- de condamner M. [J] [W] aux entiers frais et dépens de l'instance

M. [J] [W] demande à la cour:

- de juger Mme [K] [S] mal fondée en son appel,

- de confirmer en toutes ses dispositions le jugement rendu par le conseil de prud'hommes de Nancy en date du 28 octobre 2022 en ce qu'il a débouté Mme [K] [S] de toutes ses autres demandes,

Y ajoutant :

- de condamner Mme [K] [S] à lui verser la somme de 2 000,00 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile à hauteur d'appel,

- de condamner Mme [K] [S] aux entiers frais et dépens à hauteur d'appel.

SUR CE, LA COUR ;

La cour renvoie expressément pour plus ample exposé des prétentions et moyens des parties aux conclusions déposées sur le RPVA par Mme [K] [S] le 26 janvier 2023 et par M. [J] [W] le 23 janvier 2024.

- Sur la demande de requalification du contrat.

Mme [K] [S] expose que, pour la période du 1er janvier 2016 au 1er juillet 2017, elle a travaillé, ainsi que le démontre la lecture de ses bulletins de salaire, au delà de 147,33 heures mensuelles tel que prévu par son contrat initial, mais en réalité au moins 151 h 30, et qu'en conséquence le contrat doit ainsi être requalifié à temps plein pour cette période.

M. [J] [W] ne conteste pas la demande, et accepte de régler au titre de rappel de rémunération la somme de 842,13 euros brut outre 84,21 euros au titre des congés payés affétents.

Motivation.

M. [J] [W] ne conteste pas le bien fondé de la demande et il y sera donc fait droit.

Les premiers juges ont sur ce point 'donné acte à M. [J] [W] du paiement de la somme de 842,13 euros bruts au titre du rappel de salaire, ainsi que la somme de 84,21 euros bruts au titre des congés payés afférents' et par ailleurs 'débouté Mme [K] [S] de toutes ses autres demandes'.

Cette formulation ne permet pas de considérer qu'ils ont fait droit à la demande de requalification, le dispositif se résumant au débouté de l'ensemble des demandes présentées par Mme [K] [S].

Dès lors, la décision entreprise sera infirmée sur ce point, et il sera fait droit à la demande de requalification du contrat à temps partiel en contrat à temps plein pour la période du 1er janvier 2016 au 1er juillet 2017.

Par ailleurs, Mme [K] [S] demandant sur ce point la condamnation de M. [J] [W] à lui payer sa somme de 806,82 euros bruts à titre de rappel de salaire pour requalification de son contrat de travail à temps plein outre de celle de 80,68 euros au titre de l'indemnité compensatrice de congés payés afférents, M. [J] [W] sera condamné au paiement de ces sommes en deniers ou quittance.

- Sur la demande relative aux primes contractuelles.

Mme [K] [S] expose que son contrat de travail prévoyait dans sa rémunération totale une part variable et que cette rémunération ne lui a pas été versée pour la période de mars à septembre 2018.

M. [J] [W] ne répond pas sur ce point.

Motivation.

Il ressort de l'avenant n° 1 au contrat de travail (pièce n° 1 du dossier de M. [J] [W]) que, pour la période du 1er juillet 2017 au 15 septembre 2018, Mme [K] [S] devait percevoir, outre son salaire, une prime mensuelle ainsi calculée:

- 20 % de participation sur le chiffre d'affaires TTC ventes de marchandises ;

- 20 % de participation sur le chiffres d'affaires TTC coiffure supérieur à 6500 euros ;

Mme [K] [S] expose qu'à la lecture des documents comptables de l'employeur, il lui est dû à ce titre une somme de 1134,53 euros outre celle de 113,45 euros au titre des congés payés.

La demande n'est pas contestée ; il y sera donc fait droit et la décision entreprise sera infirmée sur ce point.

- Sur la demande au titre des heures supplémentaires.

Mme [K] [S] expose qu'elle a effectué un nombre important d'heures supplémentaires qui ne lui ont pas été rémunerées.

M. [J] [W] s'oppose à cette demande.

Motivation.

Il ressort des dispositions de l'article L 3171-4 du code du travail en sa rédaction applicable au litige qu'en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l'appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu'il prétend avoir accomplies afin de permettre à l'employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d'y répondre utilement en produisant ses propres éléments. Le juge forme sa conviction en tenant compte de l'ensemble de ces éléments au regard des exigences rappelées aux dispositions légales et réglementaires précitées. Après analyse des pièces produites par l'une et l'autre des parties, dans l'hypothèse où il retient l'existence d'heures supplémentaires, il évalue souverainement, sans être tenu de préciser le détail de son calcul, l'importance de celles-ci et fixe les créances salariales s'y rapportant.

Mme [K] [S] apporte au dossier des relevés horaires (pièce n° 3 de son dossier) et des attestations (pièces n° 9 à 13 et 15 et 16 id) faisant état qu'elle pouvait débuter sa journée à 7 h 45 et effectuer des prestations durant la pause méridienne ; elle présente donc, à l'appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu'elle prétend avoir accomplies afin de permettre à l'employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d'y répondre utilement en produisant ses propres éléments.

M. [J] [W], qui ne justifie pas avoir mis en place un système de contrôle des heures effectuées par la salariée, apporte au dossier les fiches de paie des mois de février, mars et octobre 2018 (pièce n° 7 de son dossier) qui font mention d'heures supplémentaires, et une 'note en délibéré' (pièce n° 21 id) indiquant que Mme [S] ne travaillait ni le lundi matin ni le jeudi matin.

Toutefois, ces éléments sont insuffisants pour combattre ceux apportés par la salariée, étant précisé que, sur les décomptes horaires apportés par celle-ci, il apparaît qu'elle ne travaillait pas le lundi.

Au regard des éléments apportés par la salariée et l'employeur, il convient de faire droit à la demande, pour les années 2016 à 2018, à hauteur de 7500 euros outre la somme de 750 euros au titre des congés payés afférents.

La décision entreprise sera infirmée sur ce point.

- Sur la demande au titre du repos compensateur.

Mme [K] [S] expose que le nombre d'heures supplémentaires qu'elle a effectuées a dépassé le contingent annuel ; qu'elle a subi un préjudice du fait de l'impossibilité de bénéficier de ces repos compensateurs.

M. [J] [W] ne répond pas sur ce point.

Motivation.

Il ressort des décomptes apportés par Mme [K] [S] que le contingent d'heures supplémentaires a été dépassé en 2016 et 2017.

Sur la base de ces éléments, il sera fait droit à la demande à hauteur de 650 euros outre la somme de 65 euros au titre des congés payés afférents.

La décision entreprise sera infirmée sur ce point.

- Sur la demande au titre du travail dissimulé.

Mme [K] [S] expose qu'il ressort du nombre d'heures supplémentaires ne figurant pas sur ses bulletins de salaire que M. [J] [W] a commis l'infraction de travail dissimulé.

M. [J] [W] conteste cette demande.

Motivation.

Aux termes de l'article L.8223-1 du code du travail, le salarié auquel l'employeur a recours dans les conditions de l'article L.8221-3 ou en commettant les faits prévus à l'article L.8221-5 du même code relatifs au travail dissimulé a droit, en cas de rupture de la relation de travail, à une indemnité forfaitaire égale à six mois de salaire.

L'article L.8221-5, 2°, du code du travail dispose notamment qu'est réputé travail dissimulé par dissimulation d'emploi salarié le fait pour tout employeur de mentionner sur le bulletin de paie ou le document équivalent un nombre d'heures de travail inférieur à celui réellement accompli, si cette mention ne résulte pas d'une convention ou d'un accord collectif d'aménagement du temps de travail conclu en application du titre II du livre Ier de la troisième partie ;

Toutefois, la dissimulation d'emploi salarié prévue par ces textes n'est caractérisée que s'il est établi que l'employeur a agi de manière intentionnelle.

Il ressort des éléments précédemment évoqués que des heures supplémentaires effectuées par Mme [K] [S] n'ont pas été portées sur ses bulletins de paie.

Toutefois, il ne ressort pas des élements du dossier, et Mme [S] n'établit pas, que ces omissions sont le fait d'une intention de l'employeur.

La demande sera donc rejetée, et la décision entreprise sera confirmée sur ce point.

- Sur la demande relative à la qualification professionnelle.

Mme [K] [S] expose qu'elle était classée et rémunérée en qualité de coiffeuse coloriste niveau 2 échelon 2 mais qu'en réalité elle remplissait les fonction de Manager débutant niveau 3 échelon 1 ; qu'en tout état de cause elle doit être a minima reclassée niveau 2 échelon 3 et sollicite un rappel de salaire sur ce point.

M. [J] [W] s'oppose à cette demande, faisant valoir que Mme [S] ne justifie pas avoir exercé des fonctions correspondant à la classification sollicitée.

Motivation.

En cas de litige portant sur la qualification reconnue par l'employeur au salarié, le juge doit se prononcer au vu des fonctions réellement exercées par celui-ci ; il doit en particulier les comparer à la grille de la convention collective pour vérifier dans quelle catégorie se place l'emploi.

Si Mme [K] [S] démontre qu'elle arrivait le matin avant l'ouverture du salon, elle n'apporte aucun élément sur le contenu de ces attributions en en particulier qu'elle exerçait les fonction d'un manager au sens de la convention collective applicable.

Dès lors, la demande sera rejetée et la décision entreprise sera confirmée sur ce point.

Sur la demande subsidiaire, il ressort du bulletin de paie de Mme [K] [S] pour le mois de mars 2018 (pièce n° 7 du dossier de M. [J] [W]) que celle-ci était classée en qualité de coiffeuse coloriste permanentiste très hautement qualifiée niveau 2 échelon 3 ; Mme [K] [S] ne démontrant pas que le taux horaire appliqué alors ne correspond pas à cette qualification, sa demande subsidiaire sera rejetée et la décision entreprise sera confirmée sur ce point.

- Sur le manquement à l'obligation de sécurité.

Mme [K] [S] expose que l'employeur a manqué à son obligation de sécurité:

- du fait du manque d'information sur la nocivité des produits qu'elle était amenée à utiliser ;

- du fait du non-respect des horaires de travail.

M. [J] [W] conteste ces demandes.

Sur le premier point, Mme [K] [S] n'apporte aucun élément établissant que l'employeur a omis ou refusé de l'informer sur la nature des produits qu'elle utilisait.

Sur le second point, si Mme [S] a travaillé régulièrement 41 heures par semaine, elle ne démontre pas en quoi ces conditions de travail ont constitué un manquement de l'employeur à son obligation de sécurité, alors que Mme [S] n'apporte aucun élément sur la dégradation alléguée de son état de santé.

En conséquence, la demande sera rejetée et la décision entreprise sera confirmée sur ce point.

- Sur la rupture du contrat de travail.

Mme [K] [S] expose que l'employeur a gravement manqué à ses obligations contractuelles, notamment en ne payant pas les rémunérations qui lui étaient dues à titre d'heures supplémentaires et de primes, et que ces manquements ont rendu impossible le maintien de la relation contractuelle.

M. [J] [W] conteste ces manquements, faisant valoir que Mme [K] [S] s'est livrée à des actes de concurrence déloyale.

Motivation.

Il résulte de la combinaison des articles L.1231-1, L.1237-2 et L.1235-1 du code du travail que la prise d'acte permet au salarié de rompre le contrat de travail en cas de manquement suffisamment grave de l'employeur qui empêche la poursuite du contrat de travail.

En cas de prise d'acte de la rupture du contrat de travail par le salarié, cette rupture produit, soit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse , si les faits invoqués la justifiaient, soit, dans le cas contraire, d'une démission.

Il appartient au salarié d'établir les faits qu'il allègue à l'encontre de l'employeur.

Seuls peuvent être de nature à justifier la rupture, des faits, manquements, ou agissements de l'employeur d'une gravité rendant impossible la poursuite des relations contractuelles par le salarié.

Il ressort des éléments évoqués plus haut que l'employeur a manqué à ses obligations en ne rémunérant pas Mme [K] [S] au titre de nombreuses heures supplémentaires et en ne lui réglant pas des primes contractuellement prévues.

Dès lors, il convient de constater que M. [J] [W] a gravement manqué à ses obligations contractuelles et que ces manquements rendaient impossible le maintien de la relation contractuelle, et de dire que la rupture présente la nature d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Dès lors, il y a lieu de faire droit à la demande, et la décision entreprise sera infirmée sur ce point.

A la date du licenciement, Mme [K] [S] avait une ancienneté de 10 ans ; sa rémunération mensuelle moyenne brut était de 2195 euros.

- Sur l'indemnité de préavis.

Au regard de la rémunération mensuelle moyenne brut de Mme [K] [S], il sera fait droit à la demande à hauteur de 4390 euros outre la somme de 439 euros au titre des congés payés afférents.

- Sur l'indemnité de licenciement.

Au regard de la rémunération mensuelle moyenne brut de Mme [K] [S] et de son ancienneté dans l'entreprise, il sera fait droit à la demande à hauteur de 2250 euros.

- Sur l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Il ressort des pièces n° 2 et 3 du dossier de M. [J] [W] que Mme [K] [S] a, concomittament la rupture de la relation contractuelle, crée une société dont l'objet est l'exploitation d'un salon de coiffure.

Elle n'apporte aucun élément sur cette activité ni sur sa situation matérielle et financière postérieure à la rupture.

Dès lors, conformément aux dispositions de l'article L 1235-3-1 du code du travail, il sera fait droit à la demande à hauteur de 5 mois de salaire, soit la somme de 10 979 euros.

La décision entreprise sera infirmée sur ce point.

Il sera fait droit à la demande tendant à voir ordonner la délivrance des documents et les mentions suivantes :

- les bulletins de salaire rectifiés correspondant aux rappels de salaire alloués par la décision à intervenir,

- un certificat de travail rectifié correspondant aux emplois successivement exercés dans le cadre de la relation contractuelle

- une attestation France Travail,

selon les modalités indiquées au dispositif.

En revanche, la demande relative à la restitution de matériel sera rejetée, Mme [K] [S] ne précisant pas la nature de ces matériels.

M. [J] [W] qui succombe supportera les dépens de première instance et d'appel.

Il apparaît inéquitable de laisser à la charge de Mme [K] [S] la charge de l'intégralité des frais qu'elle a exposés et non compris dans les dépens ; il sera fait droit à la demande à hauteur de 1500 euros.

PAR CES MOTIFS:

La Cour, chambre sociale, statuant par arrêt contradictoire mis à disposition au greffe et après débats en audience publique et après en avoir délibéré,

CONFIRME le jugement rendu le 28 octobre 2022 par le conseil de prud'hommes de Nancy dans le litige opposant Mme [K] [S] à M. [J] [W] en ce qu'il a:

- débouté Mme [K] [S] de ses demandes relatives au travail dissimulé, à la requalification professionnelle et au manquement à l'obligation de sécurité ;

- débouté M. [J] [W] de sa demande sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

- laissé à chacune des parties ses propres dépens ;

L' INFIRME pour le surplus ;

STATUANT A NOUVEAU ;

REQUALIFIE le contrat de travail liant Mme [K] [S] à M. [J] [W] en contrat à temps plein ;

CONDAMNE M. [J] [W] à payer à Mme [K] [S] les sommes de 806,82 euros bruts à titre de rappel de salaire pour requalification de son contrat de travail à temps plein outre celle de 80,68 euros au titre de l'indemnité compensatrice de congés payés afférents ;

CONDAMNE M. [J] [W] à payer à Mme [K] [S] au titre des primes contractuelles les sommes de 1134,53 euros outre celle de 113,45 euros au titre des congés payés afférents ;

CONDAMNE M. [J] [W] à payer à Mme [K] [S] au titre des heures supplémentaires les sommes de 7500 euros outre la somme de 750 euros au titre des congés payés afférents ;

CONDAMNE M. [J] [W] à payer à Mme [K] [S] au titre des repos compensateurs les sommes de 650 euros outre la somme de 65 euros au titre des congés payés afférents ;

DIT que la rupture de la relation contractuelle présente la nature d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

CONDAMNE M. [J] [W] à payer à Mme [K] [S] à ce titre les sommes de:

- 4390 euros outre la somme de 439 euros au titre des congés payés afférents au titre de l'indemnité de préavis ;

- 2250 euros au titre de l'indemnité de licenciement ;

- 10 979 euros au titre de l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

ORDONNE à M. [J] [W] de delivrer à Mme [K] [S] :

- les bulletins de salaire rectifiés correspondant aux rappels de salaire alloués par la présente décision ;

- une attestation France Travail,

DIT que ces documents devront être délivrés dans un délai de TROIS MOIS à compter de la signification à M. [J] [W] de la présente décision ;

DIT qu'à l'issue de ce délai M. [J] [W] devra payer une astreinte d'un montant de 20 euros par jours de retard durant un délai de TROIS mois à l'issue duquel il pourra le cas échéant être de nouveau statué ;

CONDAMNE M. [J] [W] aux dépens de première instance et d'appel ;

CONDAMNE M. [J] [W] à payer à Mme [K] [S] la somme de 1500 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Ainsi prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Et signé par Monsieur Raphaël WEISSMANN, Président de Chambre, et par Madame Laurène RIVORY, Greffier.

LE GREFFIER LE PRESIDENT DE CHAMBRE

Minute en douze pages


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Nancy
Formation : Chambre sociale-2ème sect
Numéro d'arrêt : 22/02520
Date de la décision : 18/04/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 24/04/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-04-18;22.02520 ?
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