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08/04/2024 | FRANCE | N°23/02147

France | France, Cour d'appel de Nancy, Première présidence, 08 avril 2024, 23/02147


MINUTE :

DU 08 AVRIL 2024





PREMIERE PRESIDENCE

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N° RG 23/02147 - N° Portalis DBVR-V-B7H-FH7O





CONTESTATION HONORAIRES







[S] [D] [K]



c/

[C] [W]

































COUR D'APPEL DE NANCY

ORDONNANCE



Nous, Jean-Baptiste HAQUET, président de chambre, désigné par ordonnance de Monsieur le premier président

de la cour d'appel de NANCY, en date du 15 décembre 2023, agissant en vertu des articles 174 et suivants du Décret n° 91-1197 du 27 novembre 1991, assisté de Mme Christelle CLABAUX-DUWIQUET, greffier, lors des débats, et de Mme Céline PAPEGAY, greffier, lors du délibér...

MINUTE :

DU 08 AVRIL 2024

PREMIERE PRESIDENCE

--------------------------------------

N° RG 23/02147 - N° Portalis DBVR-V-B7H-FH7O

CONTESTATION HONORAIRES

[S] [D] [K]

c/

[C] [W]

COUR D'APPEL DE NANCY

ORDONNANCE

Nous, Jean-Baptiste HAQUET, président de chambre, désigné par ordonnance de Monsieur le premier président de la cour d'appel de NANCY, en date du 15 décembre 2023, agissant en vertu des articles 174 et suivants du Décret n° 91-1197 du 27 novembre 1991, assisté de Mme Christelle CLABAUX-DUWIQUET, greffier, lors des débats, et de Mme Céline PAPEGAY, greffier, lors du délibéré,

ENTRE :

Madame [S] [D] [K]

domiciliée [Adresse 2]

Comparante en personne

DEMANDERESSE A LA CONTESTATION

ET :

Maître [C] [W]

domiciliée [Adresse 1]

Comparante en personne

DEFENDEUR A LA CONTESTATION

SUR QUOI :

Après avoir entendu à l'audience du 05 Février 2024, en chambre du conseil, les parties en leurs explications et conclusions, nous avons avisé les parties que la décision serait prononcée par mise à disposition au greffe le 08 Avril 2024, et ce en application de l'article 450 du code de procédure civile.

Et ce jour, 08 Avril 2024, assisté de Mme Céline PAPEGAY, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire, avons rendu l'ordonnance suivante :

FAITS ET PROCÉDURE

Au cours de l'année 2022, Mme [S] [D] épouse [K] a contacté Maître [C] [W], avocate, dans le cadre de la procédure de divorce à venir d'avec son mari, M. [O] [K]. Elles ont signé une convention d'honoraires au temps passé le 10 janvier 2023, pour un montant horaire de 140 euros hors taxes (HT), soit 168 euros toutes taxes comprises (TTC).

Le 9 février 2023, Maître [W] et Mme [D] [K] ont signé un avenant à cette convention dans lequel elles ont fait apparaître, notamment, que les époux [K] envisageaient désormais de divorcer « à l'amiable sans l'intervention d'un juge » et que le temps devant être consacré au dossier pouvait être provisoirement évalué entre vingt et trente vacations horaires pour un divorce par consentement mutuel.

Le 16 mars 2023, Mme [D] et M. [K] ont signé une convention de divorce par consentement mutuel.

Le 19 avril 2023, Maître [W] a adressé à sa cliente une facture définitive d'honoraires et récapitulative de diligences pour un total de vacations horaires de trente heures en ce compris l'intervention à la liquidation du régime matrimonial et partage non prévu dans la convention d'honoraires, pour un montant de 4.200 euros HT, soit 5.040 euros TTC, c'est-à-dire 1.920 euros après déduction des provisions versées.

Par lettre reçue le 27 avril 2023, Mme [D] [K] a saisi le bâtonnier de l'ordre des avocats à la cour d'appel de Nancy aux fins de fixation des honoraires de Maître [W]. Par ordonnance du 25 août 2023, ce dernier a notamment fixé à la somme de 1.920 euros TTC les honoraires restant dus par Mme [D] [K] à Maître [W], et dit qu'elle devra lui verser cette somme.

Par lettre recommandée avec avis de réception reçue le 11 octobre 2023, Mme [D] [K] a formé un recours contre cette décision. Les parties ont été convoquées à l'audience du 5 février 2024.

Lors de cette audience, Mme [D] [K] a demandé au premier président de la cour d'appel de Nancy de dire que 21 actes facturés par Maître [W] n'auraient pas dû l'être, que la procédure de divorce aurait dû lui coûter 1.512 euros TTC et, en conséquence, de condamner Maître [W] à lui rembourser la somme de 1.608 euros correspondant à la somme trop versée.

À l'appui de ces prétentions, elle relève d'abord que, dès le 9 janvier 2023, Maître [W] était informée qu'elle ne souhaitait plus divorcer de manière contentieuse, mais qu'elle aurait pourtant continué à se placer dans l'optique d'une telle procédure, ce qui majorait les frais. Mme [D] [K] ne se souvient plus avoir signé d'avenant. Elle note que certaines diligences, qui lui ont été facturées, n'ont en fait jamais été accomplies. Elle énumère plusieurs anomalies affectant la facture définitive, et note qu'aucun détail des temps passé n'y figure. Au moins sept des actes ne devraient pas lui être facturés. Elle conteste aussi devoir payer les actes liés à la liquidation du régime matrimonial et au partage, explicitement non prévu dans l'avenant à la convention d'honoraires. À ce titre, neuf actes devraient échapper à la facturation. Trois autres actes n'existeraient pas, ou seraient affectés par des erreurs de dates.

De manière générale, il serait étonnant que Maître [W] ait travaillé pendant trente heures pour un divorce par consentement mutuel alors qu'elle prévoyait entre vingt et trente heures pour un divorce contentieux, d'autant qu'elle lui avait écrit dans un courriel du 9 février 2023 : « en outre, cela simplifie le travail à effectuer pour le courrier que j'adresserai à l'avocat de M. [K] ».

Elle assure que la convention de divorce a été rédigée par le conseil de son ex-mari, et grâce à l'appui de leur notaire. Maître [W] ne justifierait pas les recherches qu'elle invoque. Mme [D] [K] indique n'avoir envoyé que huit courriels à son avocate en quatre mois, et conclut que l'avocate de M. [K] n'a retenu que dix heures de travail au total alors qu'elle a beaucoup travaillé.

En réponse, Maître [W] demande la confirmation de l'ordonnance entreprise. Elle indique avoir reçu Mme [D] [K] le 9 décembre 2022 pendant deux heures et lui avoir fourni à cette occasion toutes les explications sur la procédure et ce à quoi sa cliente pouvait prétendre. Le conseil de M. [K] lui aurait, après le 9 février 2023, dit que les demandes de Mme [D] [K] étaient délirantes, ce qui signifiait selon Maître [W] que l'accord entre les époux n'était nullement acquis, et il lui aurait fallu encore négocier et convaincre le conseil de M. [K].

Maître [W] liste l'ensemble des tâches et démarches qu'elle a accomplies sous la pression constante de sa cliente, qui devait réitérer le 14 avril 2023 l'achat d'un appartement dans lequel elle projetait d'aller vivre. Elle fait valoir qu'elle lui a adressé de nombreuses pièces et de nombreux courriel et, qu'elle a informé la demanderesse à la contestation de ce qu'elle allait lui facturer les nouvelles recherches demandées. Certes, l'avocate de M. [K] a rédigé la convention, mais, selon Maître [W], suite à une négociation entre conseils. Elle aurait elle-même écrit certaines clauses concernant les enfants, et fait rectifier à trois reprises l'acte notarié. La comparaison avec la convention signée par son mari avec son propre conseil ne serait pas pertinente, s'agissant d'un tarif au forfait avec un taux horaire bien plus élevé.

Elle rappelle que les honoraires de l'avocat sont libres et regrette que Mme [D] [K] ait attendu l'édition de la facture définitive pour remettre en cause son travail, alors qu'elle avait obtenu tout ce qu'elle souhaitait grâce au travail de son avocate.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Il convient, à titre liminaire, de joindre les deux dossiers qui ont été ouverts informatiquement, et qui concernent en réalité un seul et même litige.

Aux termes de l'article 1103 du code civil, les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits.

En l'espèce, en premier lieu, le fait que Maître [W] n'ait pas, dans sa facture, précisé le temps passé pour chaque diligence réalisée ne la prive pas du droit de percevoir la rémunération qu'elle sollicite pour autant que, globalement, la quantité de travail passée soit justifiée. Mme [D] [K] a considéré que Maître [W] avait comptabilisé une heure pour chaque tâche qu'elle a notée, ce qui n'est pas le cas. Ses observations à ce titre, qui la conduisent à prétendre que sept actes ne doivent pas lui être facturés au motif qu'ils n'ont pas pris une heure, ne sont donc pas pertinentes.

Ensuite, des documents que Maître [W] avait sollicités de sa cliente, et qu'elle indique avoir étudiés dans le cadre d'un divorce contentieux, demeuraient utiles pour la négociation avec la partie adverse, y compris pour le règlement amiable de la séparation. En effet, le travail de l'avocat à l'occasion d'un divorce par consentement mutuel n'est pas nécessairement moindre que lorsqu'il assiste son client sur un autre fondement dans la perspective d'un débat judiciaire : même si le principe du divorce est acquis, les différentes dispositions peuvent en être négociées et discutées. D'ailleurs, dans un courriel du 3 février 2023, Mme [D] [K] évoquait cette négociation et les avantages financiers qu'elle pouvait en tirer. Le 20 janvier 2023, elle écrivait à son notaire : « les négociations quant à un éventuel accord ne font que commencer ». Elle ne peut donc pas être suivie lorsqu'elle prétend que l'accord avec son mari était finalisé. Le courriel de Maître [W] du 9 février 2023, dont la demanderesse à la contestation déduit que le travail de l'avocate sera réduit dans le cadre de cette nouvelle procédure, ne concerne que le courrier que son avocate allait envoyer à sa cons'ur adverse.

L'étude de pièces citée par Mme [D] [K] comme ne devant pas lui être facturées en raison de du caractère mutuellement consenti du divorce est donc due par cette dernière.

Mme [D] [K] relève des erreurs dans la facture contestée. Toutefois, ni le fait que le rendez-vous du 18 janvier 2023 se soit tenu en présentiel et non téléphoniquement, ni le fait qu'une conversation téléphonique ait eu lieu le 23 janvier 2023 et non le 25 janvier n'a d'incidence sur le caractère exigible du prix de ces prestations.

Il ressort par ailleurs de l'examen des courriels échangés par les parties à la présente instance les 19 et 20 janvier 2023 que Maître [W] a conseillé Mme [D] [K] au sujet d'une réponse à adresser à Maître [J] [B], notaire, concernant les conditions financières du divorce, alors que l'achat de l'appartement [Adresse 2], financé par M. [K] était prévu. Maître [W] a été amenée, dans ce cadre à étudier la promesse de vente de ce bien afin d'appréhender la globalité de la situation. Ses diligences à ce titre ne peuvent être soustraites des prestations dont le paiement est dû.

En revanche, Maître [W] ne démontre pas avoir été mandatée par sa cliente pour la conseiller et l'assister dans le cadre de liquidation de son régime matrimonial, dont elle a indiqué elle-même que les actes y afférents étaient « non prévu(s) dans l'avenant à la convention d'honoraires ». Les neuf tâches effectuées à ce titre et listées par Mme [D] [K] dans les observations qu'elle a remises à l'audience ne doivent donc pas être comptabilisés dans le prix à payer par cette dernière.

En définitive, il convient donc de fixer à 24 heures le temps justifié passé par Maître [W] dans le cadre du travail qu'elle a réalisé au bénéfice de Mme [D] [K]. Cela représente une somme totale de 3.360 euros HT, soit 4.032 euros TTC. Déduction faite des provisions versées, Mme [D] [K] lui est redevable de la somme de 912 euros.

L'ordonnance entreprise sera infirmée en ce sens.

Mme [D] [K] obtenant partiellement gain de cause en sa contestation, Maître [W] sera tenue aux dépens.

PAR CES MOTIFS,

Statuant publiquement par ordonnance contradictoire mise à disposition au greffe, après débats en chambre du conseil,

Ordonnons la jonction du dossier n° 24/100 avec le dossier n° 23/2147,

Infirmons l'ordonnance rendue le 25 août 2023 par le bâtonnier de l'ordre des avocats à la cour d'appel de Nancy,

Statuant à nouveau,

Fixons à 4.032 euros toutes taxes confondues (TTC) les honoraires dus par Mme [S] [D] [K] à Maître [C] [W],

Disons que, déduction des provisions versées, Mme [D] [K] reste redevable envers Maître [W] de la somme de 912 euros, et dit qu'elle devra lui verser cette somme,

Y ajoutant,

Condamnons Maître [W] aux dépens devant la cour d'appel.

Et Nous, avons signé, ainsi que le greffier, la présente ordonnance.

Le Greffier, Le Président,

Céline PAPEGAY Jean-Baptiste HAQUET

Minute en cinq pages


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Nancy
Formation : Première présidence
Numéro d'arrêt : 23/02147
Date de la décision : 08/04/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 14/04/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-04-08;23.02147 ?
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