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06/07/2023 | FRANCE | N°22/01799

France | France, Cour d'appel de Nancy, Chambre sociale-2ème sect, 06 juillet 2023, 22/01799


ARRÊT N° /2023

PH



DU 06 JUILLET 2023



N° RG 22/01799 - N° Portalis DBVR-V-B7G-FAWF







Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de NANCY

21/00309

30 juin 2022











































COUR D'APPEL DE NANCY

CHAMBRE SOCIALE - SECTION 2









APPELANTE :



Madame [Z] [O]

[Adresse 1]

[Localité 5]r>
Représentée par Me Gérard CHEMLA de la SCP SCP ACG & ASSOCIES, avocat au barreau de REIMS







INTIMÉES :



S.C.P. [H] [Y] Es qualité de «liquidateur judiciaire» de la « LA P'TITE PAUSE » prise en la personne de son représentant légal pour ce domicilié au siège social

[Adresse 2]

[Localité 3]

Non compa...

ARRÊT N° /2023

PH

DU 06 JUILLET 2023

N° RG 22/01799 - N° Portalis DBVR-V-B7G-FAWF

Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de NANCY

21/00309

30 juin 2022

COUR D'APPEL DE NANCY

CHAMBRE SOCIALE - SECTION 2

APPELANTE :

Madame [Z] [O]

[Adresse 1]

[Localité 5]

Représentée par Me Gérard CHEMLA de la SCP SCP ACG & ASSOCIES, avocat au barreau de REIMS

INTIMÉES :

S.C.P. [H] [Y] Es qualité de «liquidateur judiciaire» de la « LA P'TITE PAUSE » prise en la personne de son représentant légal pour ce domicilié au siège social

[Adresse 2]

[Localité 3]

Non comparant ni représenté

Association UNEDIC DÉLÉGATION AGS (CGEA DE [Localité 5]) prise en la personne de son représentant légal pour ce domicilié au siège social

[Adresse 4]

[Localité 5]

Représentée par Me Eric SEGAUD de la SELARL FILOR AVOCATS, substitué par Me CLEMENT-ELLES , avocats au barreau de NANCY

COMPOSITION DE LA COUR :

Lors des débats, sans opposition des parties

Président : WEISSMANN Raphaël

Conseiller : STANEK Stéphane

Greffier : RIVORY Laurène (lors des débats)

Lors du délibéré,

En application des dispositions de l'article 945-1 du Code de Procédure Civile, l'affaire a été débattue en audience publique du 06 Avril 2023 tenue par WEISSMANN Raphaël, Président, et STANEK Stéphane, Conseiller, qui ont entendu les plaidoiries, les avocats ne s'y étant pas opposés, et en ont rendu compte à la Cour composée de Raphaël WEISSMANN et Guerric HENON, présidents, et Stéphane STANEK, conseiller, dans leur délibéré pour l'arrêt être rendu le 29 Juin 2023 ; puis à cette date le délibéré a été prorogé au 06 juillet 2023 ;

Le 06 juillet 2023 , la Cour après en avoir délibéré conformément à la Loi, a rendu l'arrêt dont la teneur suit :

EXPOSÉ DU LITIGE ET PRÉTENTIONS RESPECTIVES DES PARTIES

Madame [Z] [O] a été engagée sous contrat de travail à durée déterminée à temps partiel, pour surcroît temporaire d'activité, par la société S.A.R.L LA P'TITE PAUSE du 18 septembre 2018 au 30 septembre 2018, en qualité de vendeuse boulangerie.

Le contrat de travail a été renouvelé une première fois jusqu'au 31 janvier 2019, puis une seconde fois jusqu'au 30 juin 2019.

La relation contractuelle s'est poursuivie à compter du 13 janvier 2020, dans le cadre de contrats de travail à durée déterminée à temps partiel successifs, pour remplacement de salariés :

- du 13 janvier au 27 janvier 2020,

- du 28 janvier au 10 février 2020, renouvelé jusqu'au 17 février 2020,

- du 18 février au 23 février 2020, renouvelé du 24 février au 28 février 2020,

- du 02 mars 2020 pour une durée minimale de 7 jours et jusqu'au retour de la salariée absente,

- du 01 avril 2020 pour une durée minimale de 5 jours et jusqu'au retour de la salariée absente.

A compter du 24 juin 2020, la relation contractuelle s'est poursuivie sous contrat de travail à durée indéterminée, en qualité de vendeuse boulangerie.

La convention collective nationale de la boulangerie et boulangerie-pâtisserie artisanale s'applique au contrat de travail.

Par jugement du tribunal de commerce de Nancy rendu le 12 février 2019, la société S.A.R.L P'TITE PAUSE a été placé en redressement judiciaire, avec l'ouverture d'une période d'observation, à la suite de laquelle un plan de redressement a été adopté par jugement du 20 octobre 2020.

En date du 30 décembre 2020, Madame [Z] [O] a été victime d'un accident du travail, à la suite duquel elle a été placée en arrêt de travail.

Par décision du 02 avril 2021, la CPAM a accepté la prise en charge de cet accident du travail au titre de la législation sur les risques professionnels.

Par requête du 01 juillet 2021, Madame [Z] [O] a saisi le conseil de prud'hommes de Nancy, aux fins :

- de requalifier ses contrats à durée déterminée successifs en contrat à durée indéterminée,

- de condamner la société S.A.R.L LA P'TITE PAUSE à lui payer les sommes suivantes :

- 1 595,57 euros à titre d'indemnité de requalification,

- 248,88 euros de rappel de salaire au titre du 12 janvier 2020 et du 1er mars 2020, outre 24,88 euros de congés payés afférents,

- 3 349,63 euros de rappel de salaire au titre des heures supplémentaires, outre 334,96 euros de congés payés afférents,

- 9 773,42 euros d'indemnité au titre du travail dissimulé,

- 450,85 euros de rappel de salaire au titre de la prime de fin d'année 2019,

- 1 111,61 euros de rappel de salaire au titre de la prime de fin d'année 2020,

- 5 000,00 euros d'indemnité au titre du manquement à l'obligation de sécurité,

- de prononcer la résiliation judiciaire de son contrat de travail aux torts de l'employeur,

- de condamner la société S.A.R.L LA PTITE PAUSE à lui verser les sommes suivantes :

- 3 191,14 euros d'indemnité de préavis, outre 319,11 euros de congés afférents,

- 1 196,67 euros d'indemnité légale de licenciement,

- 4 500,00 euros d'indemnité au titre du licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- de condamner société S.A.R.L LA PTITE PAUSE à lui verser la somme de 3 000,00 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens,

- d'ordonner l'exécution provisoire.

Vu le jugement du conseil de prud'hommes de Nancy rendu le 30 juin 2022, lequel a :

- dit et jugé que les contrats de travail à durée déterminée ne sont pas à requalifier en contrat à durée indéterminée,

- dit qu'il n'y a pas lieu de prononcer la résiliation judiciaire du contrat de travail de Madame [Z] [O],

- débouté Madame [Z] [O] de l'ensemble de ses demandes,

-condamné Madame [Z] [O] aux dépens.

Vu l'appel formé par Madame [Z] [O] le 29 juillet 2022,

Vu l'article 455 du code de procédure civile,

Vu les conclusions de Madame [Z] [O] déposées sur le RPVA le 27 février 2023, et celles de l'association UNEDIC AGS-CGEA [Localité 5] déposée sur le RPVA le 16 janvier 2023,

Maître [H] [Y] n'a pas constitué avocat, bien que régulièrement signifié par acte d'huissier du 18 novembre 2022,

Vu l'ordonnance de clôture rendue le 01 mars 2023,

Madame [Z] [O] demande :

- d'infirmer le jugement du conseil de prud'hommes de Nancy du 30 juin 2022 dans toutes ses dispositions,

Statuant à nouveau :

- de requalifier ses contrats à durée déterminée en un contrat à durée indéterminée,

- de condamner la société S.A.R.L LA P'TITE PAUSE à lui verser la somme de 1 595,57 euros à titre d'indemnité de requalification,

- de condamner la société S.A.R.L LA P'TITE PAUSE à lui verser les sommes suivantes :

- 248,88 euros à titre de rappel de salaire pour les journées travaillées du 12 janvier et 1er mars 2020,

- 24,88 euros au titre des congés payés y afférents,

- 3 349,63 euros à titre de rappel d'heures supplémentaires,

- 334,96 euros au titre des congés payés y afférents,

- 225,94 euros à titre d'indemnité forfaitaire pour heures supplémentaires au-delà du contingent,

- vu la requalification du contrat de travail à temps partiel en temps plein à compter de janvier 2020, de condamner la société S.A.R.L LA P'TITE PAUSE à lui verser les sommes suivantes :

- 2 105,21 euros à titre de rappel de salaire,

- 210,52 euros à titre de congés payés y afférents,

*

En tout état de cause :

- de condamner l'employeur à lui verser les sommes suivantes :

- 9 773,42 euros à titre d'indemnité forfaitaire pour travail dissimulé,

- 450,85 euros à titre de rappel de prime de fin d'année 2019,

- 1 111,61 euros à titre de rappel de prime de fin d'année 2020,

- 5 000,00 euros à titre de dommages et intérêts pour manquement à l'obligation de sécurité de résultat,

- de prononcer la résiliation du contrat de travail aux torts de l'employeur,

- de fixer la date de résiliation au jour de son licenciement,

- en conséquence, de condamner l'employeur à lui verser la somme de 4 500,00 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

L'association UNEDIC AGS-CGEA [Localité 5] demande :

- de confirmer le jugement du conseil de prud'hommes rendu le 30 juin 2022 en ce qu'il a :

- dit et jugé que les contrats de travail à durée déterminée ne sont pas à requalifier en contrat à durée indéterminée,

- dit qu'il n'y a pas lieu de prononcer la résiliation judiciaire du contrat de travail de Madame [Z] [O],

- débouté Madame [Z] [O] de l'ensemble de ses demandes,

-condamné Madame [Z] [O] aux dépens,

En conséquence :

- de débouter Madame [Z] [O] de l'intégralité de ses demandes,

A titre subsidiaire :

- de prendre acte des limites de garantie du CGEA AGS de [Localité 5],

En tout état de cause :

- de mettre à la charge de tout autre que le CGEA AGS de [Localité 5] les entiers frais et dépens de la présente instance.

SUR CE, LA COUR

Pour plus ample exposé sur les moyens et prétentions des parties, il sera expressément renvoyé aux dernières écritures qu'elles ont déposées sur le RPVA, s'agissant de l'AGS le 16 janvier 2023, et en ce qui concerne la salariée le 27 février 2023.

Sur la demande de requalification des contrats de travail à durée déterminée (CDD)

Mme [Z] [O] soutient que le contrat de travail initial du 18 septembre 2018 au 30 septembre 2018, et ses deux renouvellements jusqu'au 30 juin 2019, ne sont pas justifiés par un accroissement d'activité ; elle considère qu'elle a été affectée à l'activité normale et structurelle de l'entreprise.

L'AGS -CGEA de [Localité 5] rétorque que rien dans le dossier ne permet de douter de la réalité du surcroît d'activité qui aurait légitimé le recours au CDD.

Motivation

Aux termes des dispositions de l'article L1242-2 du code du travail, un contrat de travail à durée déterminée ne peut être conclu que pour l'exécution d'une tâche précise et temporaire, et seulement pour :

- remplacement d'un salarié, dans les cas précisés dans l'article

- accroissement temporaire de l'activité de l'entreprise

- emplois à caractère saisonnier

- remplacement d'un chef d'entreprise

- remplacement du chef d'une exploitation agricole

- recrutements d'ingénieurs ou de cadres en vue de la réalisation d'un objet défini.

Aux termes des dispositions de l'article L1245-1 du code du travail, est réputé à durée indéterminée tout contrat de travail conclu en méconnaissance des dispositions notamment des articles L1242-1 à L1242-4 .

En l'espèce, les contrats de travail des 18 septembre 2018, 28 septembre 2018 et 31 janvier 2019 (pièces 1 à 3 de Mme [Z] [O]), couvrant une période continue du 18 septembre 2018 au 30 juin 2019, visent un accroissement temporaire d'activité.

L'AGS -CGEA de [Localité 5] ne justifie pas de la réalité de ce motif de recours au contrat à durée déterminée.

En conséquence, il sera fait droit à la demande de requalification des CDD en contrat de travail à durée indéterminée ; il sera fait droit à la demande d'indemnité de requalification, non discutée à titre subsidiaire par l'AGS -CGEA de [Localité 5].

Sur la demande de rappel de salaire pour les journées des 12 janvier et 1er mars 2020

Mme [Z] [O] affirme avoir travaillé le 12 janvier 2020 et le 1er mars 2020 ; elle renvoie à sa pièce 17, soit les relevés de temps de travail.

L'AGS-CGEA de [Localité 5] fait valoir que le relevé du mois de janvier dont se prévaut la salariée n'a pas été établi sur le support de l'entreprise mais sur une feuille libre par les soins de Mme [Z] [O], et qu'il n'est signé ni par la salariée, ni par l'employeur.

En ce qui concerne le relevé de mars, l'intimée fait valoir qu'il ne comporte pas la signature de l'employeur.

Elle ajoute que Mme [Z] [O] n'a jamais émis la moindre revendication à ce sujet du temps de la relation contractuelle.

Motivation

Aux termes de l'article1353 du code civil, celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver.

Réciproquement, celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l'extinction de son obligation.

S'agissant du 12 janvier 2020, il convient de rappeler que Mme [Z] [O] n'était liée par un contrat de travail avec la société LA P'TITE PAUSE qu'à compter du 13 janvier 2020 (pièce 4 ' contrat de travail signé le 13 janvier 2020, indiquant qu'elle est engagée à compter du 13 janvier).

Le contrat de travail précédent, avec la société LA P'TITE PAUSE, a pris fin le 30 juin 2019.

Mme [Z] [O] produit en pièces 17 un relevé pour le mois de janvier 2020, qui n'est pas le formulaire type utilisé pour les autres périodes ; il s'agit d'un document entièrement établi à la main.

Elle ne produit aux débats aucune autre pièce pour essayer d'établir qu'elle aurait travaillé dès le 12 janvier 2020.

Dans ces conditions, elle sera déboutée de sa demande de rappel pour la journée du 12 janvier 2019.

En ce qui concerne la journée du 1er mars 2020, il convient de rappeler que Mme [Z] [O] a travaillé pour l'entreprise du 24 février 2020 au 28 février 2020 (pièce 7 de la salariée) puis a signé un nouveau CDD le 02 mars 2020, pour une durée de 7 jours, à compter du 02 mars 2020.

Si Mme [Z] [O] produit en pièce 17 un relevé d'heures travaillées pour le mois de mars 2020, faisant état d'heures travaillées pour le 1er mars 2020, ce document, ainsi que le fait valoir l'AGS -CGEA de [Localité 5], n'est pas contresigné par l'employeur.

Mme [Z] [O] ne produit aucun élément visant à établir qu'elle se serait trouvée dans une relation de travail avec la société LA P'TITE PAUSE dès le 1er mars 2020.

Dans ces conditions, elle sera déboutée de sa demande à ce titre.

Sur la demande de rappel au titre d'heures supplémentaires

L'article L. 3171-4 du code du travail dispose qu' en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, l'employeur fournit au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié. Au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l'appui de sa demande, le juge forme sa conviction.

Il ressort de cette règle que la preuve des heures de travail effectuées n'incombe spécialement à aucune des parties mais que le salarié doit appuyer sa demande en paiement d'heures supplémentaires par la production d'éléments suffisamment précis quant aux horaires effectivement réalisés pour permettre à l'employeur de répondre en fournissant ses propres éléments.

Mme [Z] [O] renvoie à sa pièce 19 ; il s'agit d'un tableau listant, par semaine, le nombre d'heures travaillées, le volume horaire étant ensuite ventilé en heures majorées à 25 % et heures majorées à 50 %, puis valorisées selon le taux horaire applicable.

Elle précise avoir reporté sur ce tableau les heures indiquées sur les feuilles de relevés en pièce 17 précitée.

Ces éléments sont suffisamment précis pour permettre à la partie adverse d'y répondre.

L'AGS-CGEA de [Localité 5] répond que sur la période allant du 13 janvier 2020 au 15 mars 2020, la salariée était à temps partiel, et qu'elle ne peut donc demander un rappel de salaire au titre d'heures supplémentaires sur cette période dans la mesure où elle n'était pas embauchée à temps complet.

Elle ajoute que les relevés sur lesquels elle se base pour calculer ses rappels de salaire sont remplis par ses soins et comportent uniquement sa signature.

Motivation

L'AGS -CGEA de [Localité 5] ne produit aucune pièce justifiant des heures travaillées qu'elle considère comme ayant été effectuées par la salariée, alors qu'il incombe à l'employeur de procéder au contrôle des horaires de travail des salariés.

Aucune pièce ne venant contredire les éléments produits par Mme [Z] [O], il sera fait droit à sa demande, en ce compris au titre de l'indemnité de congés payés, dont le chiffrage n'est pas discuté à titre subsidiaire.

Sur la demande de rappel de salaire de 2105,21 euros, outre 210,52 euros à titre d'indemnité de congés payés afférents

Cette demande étant formulée subsidiairement à celle présentée au titre des heures supplémentaires, elle est sans objet, la première étant accueillie.

Sur la demande d'indemnité pour travail dissimulé

Mme [Z] [O] fait valoir avoir travaillé le 12 janvier 2020 et le 1er mars 2020, sans avoir été déclarée, et avoir effectué des heures supplémentaires non payées, l'entreprise retenant une semaine civile différente de celle du lundi au dimanche.

L'AGS -CGEA de [Localité 5] fait valoir que le caractère intentionnel de la dissimulation des heures de travail n'est pas prouvé par l'appelante.

Motivation

Il résulte des développements qui précèdent qu'il n'est pas établi que Mme [Z] [O] a travaillé les 12 janvier et 1er mars 2020.

Mme [Z] [O] ne démontre pas que l'absence de décompte des heures supplémentaires résulterait d'une démarche intentionnelle de l'employeur, celle-ci ne pouvant simplement découler du constat d'un écart entre les heures effectivement payées et celles indiquées sur les relevés d'heures.

Dans ces conditions, Mme [Z] [O] sera déboutée de sa demande à ce titre.

Sur la demande d'indemnité pour repos compensateur

Mme [Z] [O] indique avoir effectué 36,95 heures au-delà du contingent d'heures, qui est de 220 heures, ce qui aboutit à une indemnité pour 19,82 heures, toute heure effectuée au-delà du contingent ouvrant droit à une demi-heure de repos, qu'elle valorise à 10,37 euros de l'heure.

L'AGS -CGEA de [Localité 5] considère que la salariée doit être déboutée de cette demande, dans la mesure où elle sera déboutée de sa demande d'heures supplémentaires.

Motivation

Aux termes des dispositions de l'article L. 3121-30 des heures supplémentaires peuvent être accomplies dans la limite d'un contingent annuel. Les heures effectuées au-delà de ce contingent annuel ouvrent droit à une contrepartie obligatoire sous forme de repos.

Il résulte des développements précédents qu'il sera fait droit à la demande de Mme [Z] [O] présentée au titre des heures supplémentaires.

En conséquence, la demande d'indemnité du repos compensateur n'étant pas discutée en son quantum, alors qu'elle est fondée en son principe, il y sera fait droit à hauteur de ce qui est réclamé.

Sur la demande de paiement d'une prime de fin d'année

Mme [Z] [O] fait valoir que son contrat de travail étant requalifié en CDI à compter du 18 septembre 2018, elle peut prétendre, sur le fondement de l'article 42 de la convention collective, à une prime de fin d'année en décembre 2019, et en 2020 ; pour 2020, elle prend en compte, dans la base de calcul, le montant du rappel d'heures supplémentaires.

L'AGS -CGEA de [Localité 5] demande de la débouter de cette prétention, en conséquence du débouté de la demande de requalification du contrat de travail en CDI.

Motivation

Il résulte des développements qui précèdent que les contrats de travail à durée déterminée seront requalifiés en CDI, et ce à compter du début du premier contrat, soit le 18 septembre 2018.

Mme [Z] [O] vise dans ses conclusions les dispositions de l'article 42 de la convention collective applicable, prévoyant le versement d'une prime de fin d'année « après un an de présence dans l'entreprise ».

Ni les dispositions visées, ni le calcul des primes sollicitées ne sont discutées à titre subsidiaire par l'AGS -CGEA de [Localité 5].

Il sera dès lors fait droit à la demande.

Sur la demande de dommages et intérêts pour manquement à l'obligation de sécurité

Mme [Z] [O] indique avoir été victime d'un accident du travail le 29 décembre 2020 : elle s'est fracturée le pied en glissant dans les escaliers menant au vestiaire, ces escaliers étant dépourvus d'éclairage ; elle précise que cet accident du travail a été reconnu comme tel par la sécurité sociale.

L'AGS -CGEA de [Localité 5] fait valoir que le fait que la chute serait due à l'absence d'ampoule dans les escaliers ne résulte que des déclarations de la salariée, dont la chute est plutôt imputable à son manque d'inattention.

Elle ajoute que Mme [Z] [O] ne justifie pas de son préjudice.

Motivation

Aux termes des dispositions de l'article L. 4121-1 du code du travail, l'employeur prend les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs.

Ces mesures comprennent:

1o Des actions de prévention des risques professionnels y compris ceux mentionnés à l'article L. 4161-1;

2o Des actions d'information et de formation;

3o La mise en place d'une organisation et de moyens adaptés.

L'article L. 4121-2 dispose que l'employeur met en 'uvre les mesures prévues à l'article L. 4121-1 sur le fondement des principes généraux de prévention suivants:

1o Éviter les risques;

2o Évaluer les risques qui ne peuvent pas être évités;

3o Combattre les risques à la source;

4o Adapter le travail à l'homme, en particulier en ce qui concerne la conception des postes de travail ainsi que le choix des équipements de travail et des méthodes de travail et de production, en vue notamment de limiter le travail monotone et le travail cadencé et de réduire les effets de ceux-ci sur la santé;

5o Tenir compte de l'état d'évolution de la technique;

6o Remplacer ce qui est dangereux par ce qui n'est pas dangereux ou par ce qui est moins dangereux;

7o Planifier la prévention en y intégrant, dans un ensemble cohérent, la technique, l'organisation du travail, les conditions de travail, les relations sociales et l'influence des facteurs ambiants, notamment les risques liés au harcèlement moral et au harcèlement sexuel, tels qu'ils sont définis aux articles L. 1152-1 et L. 1153-1, ainsi que ceux liés aux agissements sexistes définis à l'article L. 1142-2-1;

8o Prendre des mesures de protection collective en leur donnant la priorité sur les mesures de protection individuelle.

Mme [Z] [O] renvoie à sa pièce 14, qui est le « questionnaire assuré AT » de la CPAM, dans laquelle elle explique être tombée dans les escaliers qui étaient dépourvus d'éclairage, l'ampoule était « grillée » ; elle y précise que sa collègue Mme [J] [E] « vendeuse depuis février 2020 m'a contacté pour m'apprendre qu'après ma chute une ampoule aurait été remise dans cet escalier (...) »

L'AGS-CGEA de [Localité 5] ne produit aucune pièce contredisant les déclarations de Mme [Z] [O] auprès de la CPAM.

Il convient par ailleurs de rappeler que la survenance de l'accident de travail est un fait constant.

Il est ainsi établi que la société LA P'TITE PAUSE a manqué à son obligation de sécurité.

En revanche, Mme [Z] [O] ne caractérise aucun préjudice distinct de l'accident de travail, dont l'examen est de la compétence exclusive du tribunal judiciaire.

Elle sera donc déboutée de sa demande.

Sur la demande de résiliation du contrat de travail aux torts de l'employeur

Mme [Z] [O] fait valoir, à titre de motifs de résiliation : le non-paiement d'heures supplémentaires, le non-paiement des journées travaillées, le manquement à l'obligation de sécurité.

Elle demande de fixer la date de résiliation au jour du licenciement, et sollicite 4500 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

L'AGS-CGEA de [Localité 5] considère qu'aucun des manquements reprochés n'est établi.

Elle demande à titre subsidiaire de réduire la demande indemnitaire à de plus justes proportions.

Motivation

En l'espèce, il résulte des développements qui précèdent que l'employeur n'a pas payé à Mme [Z] [O] des heures supplémentaires, et n'a pas respecté à son égard son obligation de sécurité, ayant conduit à un accident du travail le 29 décembre 2020.

Ces manquements sont suffisamment graves pour justifier le prononcé de la rupture du contrat de travail aux torts de l'employeur, à la date de son licenciement prononcé, dont la date n'est pas précisée par les parties dans leurs conclusions ni justifiée par aucune des pièces produites.

Les parties n'indiquent pas le nombre de salariés de l'entreprise.

Une consultation du site SOCIETE.COM permet de constater que l'entreprise comptait moins de 11 salariés, et que la société a fait l'objet d'une liquidation judiciaire le 14 juin 2022.

Au 14 juin 2022, Mme [Z] [O] avait une ancienneté de 2 ans, les bulletins de salaire produits par Mme [Z] [O] en pièces 11 faisant état d'une date d'entrée au 1er avril 2020.

Mme [Z] [O] indique en page 13 de ses conclusions que son salaire de référence est de 1 595,57 euros, ce que ne conteste pas l'AGS -CGEA de [Localité 5].

En application des dispositions de l'article L1235-3 du code du travail, il sera fait droit à sa demande à hauteur de 1595,57 euros.

Sur les dépens

Maître [Y], ès qualités sera condamné aux dépens de première instance et d'appel.

PAR CES MOTIFS

La Cour, chambre sociale, statuant par arrêt réputé contradictoire mis à disposition au greffe, après débats en audience publique et après en avoir délibéré,

Infirme en toutes ses dispositions le jugement rendu par le conseil de prud'hommes de Nancy le 30 juin 2022 ;

Statuant à nouveau,

Requalifie les contrats à durée déterminée des 18 septembre 2018, 28 septembre 2018 et 31 janvier 2019, couvrant une période continue du 18 septembre 2018 au 30 juin 2019, en contrat à durée indéterminée ;

Prononce la résiliation du contrat de travail de Mme [Z] [O], aux torts de la société LA P'TITE PAUSE, à la date du licenciement intervenu ;

Dit que cette résiliation produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

Fixe la créance de Mme [Z] [O] à la liquidation de la société LA P'TITE PAUSE aux sommes de :

- 1 595,57 euros à titre d'indemnité de requalification,

- 3 349,63 euros à titre de rappel d'heures supplémentaires,

- 334,96 euros au titre des congés payés y afférents,

- 225,94 euros à titre d'indemnité pour repos compensateur

- 450,85 euros à titre de rappel de prime de fin d'année 2019,

- 1 111,61 euros à titre de rappel de prime de fin d'année 2020,

- 1595,57 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

Déboute les parties du surplus de leurs demandes ;

Y ajoutant,

Dit que le présent arrêt est opposable à l'AGS -CGEA de [Localité 5], dans les limites légales de sa garantie ;

Condamne Maître [Y], ès qualités de liquidateur judiciaire de la société LA P'TITE PAUSE, aux dépens de première instance et d'appel.

Ainsi prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Et signé par Monsieur Raphaël WEISSMANN, Président de Chambre, et par Madame Laurène RIVORY, Greffier.

LE GREFFIER LE PRESIDENT DE CHAMBRE

Minute en douze pages


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Nancy
Formation : Chambre sociale-2ème sect
Numéro d'arrêt : 22/01799
Date de la décision : 06/07/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-07-06;22.01799 ?
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