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25/05/2023 | FRANCE | N°21/02455

France | France, Cour d'appel de Nancy, Chambre sociale-2ème sect, 25 mai 2023, 21/02455


ARRÊT N° /2023

PH



DU 25 MAI 2023



N° RG 21/02455 - N° Portalis DBVR-V-B7F-E3KI







Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de NANCY



21 septembre 2021











































COUR D'APPEL DE NANCY

CHAMBRE SOCIALE - SECTION 2













APPELANTE :



S.A. SAINT GOBAIN PAM HOLDING PRISE EN LA PERSO

NNE DE SES DIRIGEANTS POUR CE DOMICILIES AUDIT SIEGE

[Adresse 2]

[Localité 4]

Représentée par Me Valérie BACH-WASSERMANN, avocat au barreau de NANCY









INTIMÉ :



Monsieur [S] [M]

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représenté par Me Carole BESNARD BOELLE de la SELARL 3B2C, avocat au barreau de PARIS




...

ARRÊT N° /2023

PH

DU 25 MAI 2023

N° RG 21/02455 - N° Portalis DBVR-V-B7F-E3KI

Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de NANCY

21 septembre 2021

COUR D'APPEL DE NANCY

CHAMBRE SOCIALE - SECTION 2

APPELANTE :

S.A. SAINT GOBAIN PAM HOLDING PRISE EN LA PERSONNE DE SES DIRIGEANTS POUR CE DOMICILIES AUDIT SIEGE

[Adresse 2]

[Localité 4]

Représentée par Me Valérie BACH-WASSERMANN, avocat au barreau de NANCY

INTIMÉ :

Monsieur [S] [M]

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représenté par Me Carole BESNARD BOELLE de la SELARL 3B2C, avocat au barreau de PARIS

COMPOSITION DE LA COUR :

Lors des débats et du délibéré,

Président : WEISSMANN Raphaël,

Conseiller : BRUNEAU Dominique,

Greffier lors des débats : RIVORY Laurène

Lors du délibéré,

En application des dispositions de l'article 945-1 du Code de Procédure Civile, l'affaire a été débattue en audience publique du 23 février 2023 tenue par Raphaël WEISSMANN, Président, et Dominique BRUNEAU, conseiller, qui ont entendu les plaidoiries, les avocats ne s'y étant pas opposés, et en ont rendu compte à la Cour composée de Raphaël WEISSMANN, président, Dominique BRUNEAU, Stéphane STANEK, conseillers, dans leur délibéré pour l'arrêt être rendu le 04 mai 2023; puis à cette date le délibéré a été prorogé au 25 mai 2023 ;

Le 25 mai 2023, la Cour après en avoir délibéré conformément à la Loi, a rendu l'arrêt dont la teneur suit :

EXPOSÉ DU LITIGE ET PRÉTENTIONS RESPECTIVES DES PARTIES.

M. [S] [M] a été engagé sous contrat de travail à durée indéterminée, par le groupe SAINT-GOBAIN à compter du 02 septembre 1991, en qualité d'ingénieur de production.

La convention collective nationale des ingénieurs et cadres de la métallurgie s'applique au contrat de travail.

Après plusieurs évolutions de carrière et changements d'affectation, le salarié occupait, au dernier état de ses fonctions, le poste de directeur général « canalisation bâtiment monde » affecté à la société SAINT-GOBAIN PAM, filiale du groupe SAINT-GOBAIN, ce à compter du 01 février 2019.

Le salarié était soumis à une convention de forfait tous horaires.

Par courrier du 27 novembre 2019, M. [S] [M] a été convoqué à un entretien préalable au licenciement fixé au 09 décembre 2019.

Par courrier du 16 décembre 2019, M. [S] [M] a été licencié pour cause réelle et sérieuse.

Par requête du 05 mars 2020, M. [S] [M] a saisi le conseil de prud'hommes de Nancy, aux fins :

- de voir dire et juger que le licenciement qui lui a été notifié le 16 décembre 2019 est sans cause réelle et sérieuse,

- de voir condamner la société SAINT-GOBAIN PAM à lui verser les sommes suivantes :

- 313 427,00 euros de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse (soit 19,5 mois),

- 50 000,00 euros de dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail,

- 10 817,00 euros à titre de rappel du solde de tout compte et rappel de bonus 2019,

- 4 905,17 euros à titre de rappel de bonus 2020,

- 25 796,67 euros à titre de complément d'indemnité conventionnelle de licenciement,

- 2 000,00 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,

- de voir condamner la société SAINT-GOBAIN PAM à lui attribuer 750 actions du groupe SAINT-GOBAIN pour l'année 2019,

- de voir condamner la société SAINT-GOBAIN PAM aux entiers frais et dépens,

- d'ordonner l'exécution provisoire sur le tout conformément à l'article 515 du code de procédure civile.

Vu le jugement du conseil de prud'hommes de Nancy rendu le 21 septembre 2021 qui a:

- dit et jugé que le licenciement de M. [S] [M] est sans cause réelle et sérieuse,

En conséquence :

- condamné la société SAINT-GOBAIN PAM à verser à M. [S] [M] les sommes de:

- 313 427,00 euros au titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- 10 817,00 euros au titre de rappel de bonus 2019,

- 4 905,17 euros au titre de rappel de bonus 2020,

- 25 796,67 euros au titre de complément de l'indemnité conventionnelle de licenciement,

- débouté M. [S] [M] de surplus de ses demandes,

- dit que le jugement est exécutoire de droit par provision dans la limite de l'article R.1454-28 du code du travail, étant précisé que la moyenne des salaires calculée sur les trois derniers mois est de 16 073,17 euros bruts,

- ordonné à la société SAINT-GOBAIN PAM de rembourser aux organismes intéressés de tout ou parties des indemnités de chômage versées éventuellement à M. [S] [M] du jour de son licenciement au jour du jugement prononcé, dans la limite de 6 mois d'indemnité de chômage,

- condamné la société SAINT-GOBAIN PAM à verser à M. [S] [M] la somme de 2 000,00 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné la société SAINT-GOBAIN PAM aux entiers frais et dépens.

Vu l'appel formé par la société S.A SAINT-GOBAIN PAM le 12 octobre 2021,

Vu l'appel incident formé par M. [S] [M] le 18 mars 2022,

Vu l'article 455 du code de procédure civile,

Vu les conclusions de la S.A SAINT-GOBAIN PAM déposées sur le RPVA le 06 décembre 2022, et celles de M. [S] [M] déposées sur le RPVA le 26 décembre 2022,

Vu l'ordonnance de clôture rendue le 25 janvier 2023,

La société S.A SAINT-GOBAIN PAM demande à la cour:

- de la recevoir en ses écritures et l'y déclarer bien fondée,

- d'infirmer le jugement rendu par le conseil de prud'hommes de Nancy en ce qu'il a :

- dit et jugé que le licenciement de M. [S] [M] est sans cause réelle et sérieuse,

- condamné la société SAINT-GOBAIN PAM à verser à M. [S] [M] :

- 313 427,00 euros au titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- 10 817,00 euros au titre de rappel de bonus 2019,

- 4 905,17 euros au titre de rappel de bonus 2020,

- 25 796,67 euros au titre de complément de l'indemnité conventionnelle de licenciement,

- dit que le présent jugement est exécutoire de droit par provision dans la limite de l'article R.1454-28 du code du travail, étant précisé que la moyenne des salaires calculée sur les trois derniers mois est de 16 073,17 euros bruts,

- ordonné à la société SAINT-GOBAIN PAM de rembourser aux organismes intéressés de tout ou parties des indemnités de chômage versées éventuellement à M. [S] [M] du jour de son licenciement au jour du jugement prononcé, dans la limite de 6 mois d'indemnité de chômage,

- condamné la société SAINT-GOBAIN PAM à verser à M. [S] [M] la somme de 2 000,00 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné la société SAINT-GOBAIN PAM aux entiers frais et dépens,

- débouté la société SAINT-GOBAIN PAM de sa demande reconventionnelle sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

*

Statuant à nouveau :

- de juger que le licenciement notifié à M. [S] [M] est fondé,

- de juger que la société SAINT-GOBAIN PAM n'a commis aucun manquement à l'encontre de M. [S] [M],

- de déclarer irrecevable la demande de M. [S] [M] en paiement de dommages et intérêts pour perte de chance en tant qu'elle méconnaît le principe de concentration des prétentions de l'article 910-4 du Code de procédure civile,

- de débouter M. [S] [M] de l'ensemble de ses demandes, fins et prétentions,

- de condamner M. [S] [M] au paiement de la somme de 2 000,00 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- de condamner M. [S] [M] aux entiers dépens.

M. [S] [M] demande à la cour:

- de le dire et juger tant recevable que bien fondée en ses explications et chefs de demandes,

Y statuant,

- de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a :

- dit et jugé que le licenciement est sans cause réelle et sérieuse,

- condamné la société SAINT-GOBAIN PAM à lui verser les sommes de:

- 313 427,00 euros au titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- 10 817,00 euros au titre de rappel de bonus 2019,

- 4 905,17 euros au titre de rappel de bonus 2020,

- 25 796,67 euros au titre de complément de l'indemnité conventionnelle de licenciement,

- d'infirmer le jugement en ce qu'il l'a débouté du surplus de ses demandes,

*

Statuant à nouveau :

- de condamner la société SAINT-GOBAIN PAM à lui verser la somme de 50 000,00 euros de dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail,

- de condamner la société SAINT-GOBAIN PAM à lui attribuer 750 actions du groupe SAINT-GOBAIN, ou à défaut à lui verser une somme de 28 500,00 euros, valeur à la date du licenciement (38 euros par action) au titre de dommages et intérêts pour perte de chance,

*

En tout état de cause :

- de condamner la société SAINT-GOBAIN PAM à lui verser une somme de 3 000,00 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- de statuer ce que droit quant aux entiers dépens d'instance.

SUR CE, LA COUR ;

La cour renvoie expressément pour plus ample exposé des prétentions et moyens des parties aux conclusions déposées sur le RPVA par la société SAINT-GOBAIN PAM le 06 décembre 2022 et par M. [S] [M] le 26 décembre 2022.

- Sur la demande au titre du rappels sur les bonus 2019 et 2020.

M. [S] [M] expose qu'il n'a pas perçu le montant de bonus qui lui était dû pour ces exercices, le taux qui lui a été attribué ayant été fixé arbitrairement sans rapport avec ses performances.

La société SAINT-GOBAIN PAM soutient que M. [M] n'a pas atteint sur la période les objectifs qui lui ont été fixés en 2019 ; que pour l'année 2020, il lui a été versé un bonus sur la base de l'année 2019 proratisée.

Il ressort d'un document intitulé ' Mon entretien individuel' (pièce n° 34 du dossier de M. [M]) que l'employeur a estimé au titre de l'objectif n° 1 'croissance du Métier Bâtiment dans le monde' que M. [M] n'avait atteint ses objectif qu'à proportion de 40 % ; toutefois, il convient de constater d'une part qu'aucun élément de commentaire de cette rubrique n'objective un résultat médiocre de la part du salarié, et d'autre part que ce document n'a pas été validé par celui-ci, à la différence des évaluations des années précédentes.

Par ailleurs, il ressort de ces documents que le taux d'atteinte des objectifs fixés à M.[S] [M] pour les années précédentes n'a pas été inférieur à 91,5 %.

Dès lors, conformément aux dispositions contractuelles issues de l'avenant du 26 mai 2016, il sera fait droit à la demande pour l'année 2019.

S'agissant du bonus pour l'année 2020, s'il a été attribué à M. [M] la somme de 6456 euros, l'application de ces modalités de calcul fait apparaître que M. [S] [M] aurait dû percevoir la somme de 11 361, 17 euros ;

En conséquence, il sera fait droit à la demande pour la somme de 4905,17 euros.

Dès lors, la décision entreprise sera confirmée sur ce point.

- Sur la demande relative à l'attribution d'actions.

M. [S] [M] expose qu'alors qu'il avait été bénéficiaire d'attribution d'actions gratuites depuis plusieurs années, il n'a pas bénéficié de cet avantage en 2019; que la société SAINT-GOBAIN PAM ne justifie pas de l'absence d'attribution de ces actions l'année à l'issue de laquelle il a quitté la société ; qu'en tout état de cause, le plan d'attribution d'actions gratuites prévoit l'attribution de 100 titres sans aucune conditions.

La société SAINT-GOBAIN PAM soutient que l'attribution d'action gratuite n'a aucun caractère systématique mais qu'elles sont attribuées sur proposition de la hiérarchie.

Il ressort de l'article 2 des documents intitulés 'Règlement du plan d'attribution gratuite d'actions de performance à certains cadres dirigeants du groupe SAINT GOBAIN' pour les années 2015, 2016, 2017 et 2018 (pièces n° 49 à 52 du dossier de M. [M]) que les bénéficiaires du plan de distribution d'actions gratuites sont choisis par le conseil d'administration de la société ;

Il ressort par ailleurs d'une note établie le 26 août 2019 par la société intitulé 'Rémunération Long Terme 2019" (pièce n° 26 du dossier de la société) que les bénéficiaires de l'attribution d'action sont sont proposés par les 'managers' et que cette attribution, n'a aucun caractère automatique.

Enfin, M. [S] [M] ne produit pas le plan d'attribution d'actions gratuites pour l'année 2019.

Dès lors, M. [M] ne démontre pas qu'il disposait d'un droit à attribution d'actions gratuites pour l'année 2019.

La demande sera rejetée, et la décision entreprise sera confirmée sur ce point.

- Sur le licenciement.

- Sur le motif du licenciement.

Par lettre du 16 décembre 2019, la S.A. SAINT-GOBAIN PAM a notifié à M. [S] [M] son licenciement en ces termes:

« Le 19 septembre 2019, votre supérieur hiérarchique, M. [E] [K], Directeur Général de l'Activité Canalisation, vous a proposé une mobilité professionnelle consistant dans la prise de la fonction de directeur de la stratégie de l'activité canalisation du groupe Saint-Gobain.

Il vous a précisé que vous restiez membre du CODIR de l'activité canalisation, que votre rémunération, votre rattachement hiérarchique et votre lieu de travail demeuraient inchangés. Nous avons décidé la création de ce poste en raison des enjeux économiques et dans le but de regrouper des taches actuellement réparties sur plusieurs managers ou prestataires extérieurs.

Compte tenu de votre parcours au sein de l'activité canalisation avec les différentes fonctions occupées en Chine et en France, mais également votre expérience à la direction plan du groupe Saint-Gobain, nous avons estimé que vous étiez le candidat idéal pour occuper cette fonction, essentielle pour l'avenir de l'entreprise, entre autres dans le cadre actuel de recherche partenaire, mais également en raison des études stratégiques industrielles à mener.

Ce poste ne remet pas en cause votre contrat à durée indéterminée au sein de l'entreprise, ni votre évolution de carrière future tant au sein du groupe qu'au sein de l'activité canalisation et Saint-Gobain Pam.

Étant donné le nombre important de rendez-vous, échanges et entretiens avec Messieurs [H], [K] et moi-même, les 23 septembre et 21 octobre, nous vous pensions décidé à accepter cette fonction.

Nous avions même envisagé la suite de votre carrière après avoir mené à bien cette mission, et pris acte de votre souhait d'occuper ensuite le poste Supply Chain.

En conséquence, à la suite de l'entretien du 21 octobre, nous vous avons adressé la lettre valant avenant à votre contrat, pour signature.

Nous avions mis en place, parallèlement, le processus de succession sur votre poste actuel.

Les délais relativement longs depuis nos premiers échanges, environ trois mois, nous ont permis d'identifier votre successeur. Nous avons ensuite dû constater que vous tergiversiez quant à la signature de cet avenant, puis finalement comprendre que vous reveniez sur votre accord, et que vos intentions étaient de profiter de cette opportunité pour négocier un départ de l'entreprise.

Nous avons été surpris de votre position, qui nous a amené à déclencher la recherche d'autres personnes pour occuper le poste de directeur de la stratégie ...

Nous avons entendu vos explications, mais elles ne peuvent justifier votre attitude, et nous vous notifions par la présente votre licenciement pour cause réelle et sérieuse ... ».

La société SAINT-GOBAIN PAM expose que M. [S] [M] avait accepté la modification du contrant de travail liant les parties avant de se rétracter, alors que, sur la base de l'acceptation formulée, elle avait mis en place une démarche du recrutement de son remplacement ; que par ailleurs, le licenciement n'a aucun caractère économique dans la mesure où le poste proposé à M. [M] a effectivement a été crée, et qu'il a été effectivement remplacé sur son poste.

M. [S] [M] expose que son licenciement est sans cause réelle et sérieuse en ce que d'une part en visant une réorganisation de l'entreprise, la société S.A SAINT-GOBAIN admet que la modification du contrat de travail liant les parties correspond à un motif économique, mais que les conditions exigées par les dispositions de l'article L 1222-6 du code du travail ne sont pas remplies, et d'autre part qu'il n'a jamais accepté la modification du contrat du travail alléguée.

Il ressort des termes de la lettre de licenciement que la société SAINT-GOBAIN PAM reproche à M. [S] [M] de s'être rétracté après avoir accepté une modification de son contrat de travail, plaçant ainsi l'entreprise en situation délicate.

La société SAINT-GOBAIN PAM ; apporte au dossier un courrier qu'elle a, sous la signature de M. [P] [D], directeur des ressources humaines, adressé à M. [M] le 21 octobre 2019 ainsi rédigé (pièce n° 11 de son dossier):

' Faisant suite à vos différents entretiens, notamment les 21 octobre avec M. [W] [H], les 19 septembre 2019, 22 et 24 octobre 2019 avec M. [E] [K] et les 23 septembre 2019, 17 et 21 octobre avec moi, je vous confirme votre mutation à compter du 1° décembre 2019 en qualité de Directeur de la Stratégie de l'Activité Canalisation, sous la responsabilité de M. [E] [K], Directeur Général de l'Activité Canalisation.' ;

Toutefois, les échanges écrits entre la société et M. [S] [M] (pièces n° 9, 10, 11 et 12 du dossier de la société et n° 13 à 18 du dossier de M. [M]) ne permettent pas d'établir que M. [M] a accepté la modification de son contrat de travail.

En conséquence, la rétractation alléguée par la société SAINT-GOBAIN PAM n'est pas établie.

Par ailleurs, si la société SAINT-GOBAIN PAM expose que la création du poste proposé à M. [M] était motivée par une réorganisation de l'entreprise, en l'espèce un regroupement des 'tâches actuellement réparties sur plusieurs managers ou prestataires extérieurs', elle ne démontre pas que cette réorganisation résulterait de difficultés économiques ou de mutations technologiques ou qu'elle soit indispensable à la sauvegarde de la compétitivité de l'entreprise.

Enfin, il ressort des pièces n° 13 et 14 du dossier de la société SAINT-GOBAIN PAM que le poste de 'Directeur de la stratégie' n'a pas été crée, mais qu'une fonction de 'chargé d'études économiques et des stratégies industrielles de l'activité Canalisation' a été mise en place, et confiée à un salarié n'ayant ni l'ancienneté ni l'expérience professionnelle de M. [M].

Dès lors, il convient de constater que le licenciement de M. [S] [M] par la société SAINT-GOBAIN PAM est sans cause réelle et sérieuse.

La décision entreprise sera confirmée sur ce point.

- Sur l'indemnisation.

L'article L 1235-3 du code du travail dispose que si le licenciement d'un salarié survient pour une cause qui n'est pas réelle et sérieuse, le juge peut proposer la réintégration du salarié dans l'entreprise, avec maintien de ses avantages acquis ;si l'une ou l'autre des parties refuse cette réintégration, le juge octroie au salarié une indemnité à la charge de l'employeur, dont le montant est compris entre les montants minimaux et maximaux fixés dans le tableau en annexe ; pour déterminer le montant de l'indemnité, le juge peut tenir compte, le cas échéant, des indemnités de licenciement versées à l'occasion de la rupture, à l'exception de l'indemnité de licenciement mentionnée à l'article L. 1234-9.

M. [S] [M] avait, à la date du licenciement, 52 ans et une ancienneté de 28 ans et 9 mois ;

Sa rémunération mensuelle moyenne brute telle qu'elle ressort de ses bulletins de salaire était de 15 813,46 euros ;

M. [M] a été demandeur d'emploi durant une année, puis a retrouvé un emploi ; il indique que la rémunération dont il dispose aujourd'hui est sensiblement moins élevée que celle dont il disposait au sein de la société SAINT-GOBAIN PAM mais n'en justifie pas.

M. [M] a bénéficié à son départ de la société une indemnité de licenciement de 171 122,25 euros dont 137 379,35 euros au titre de l'indemnité légale.

Au regard de ces éléments, il sera fait droit à la demande à hauteur de 15 mois de salaire soit la somme de 237 202 euros ; la décision entreprise sera infirmée sur ce point.

- Sur la demande relative au complément d'indemnité conventionnelle de licenciement.

M. [S] [M] expose que la somme qui lui a été versée à ce titre par la société SAINT-GOBAIN PAM ne le remplit pas entièrement de ses droits en ce que la société a pris une base de calcul de rémunération mensuelle moyenne brute erronée ; qu'il lui est dû la somme de 279 190, 92 euros mais qu'il n'a reçu que 253 394,25 euros ; qu'il est donc dû un reliquat de 25 796,67 euros.

Toutefois, il ressort des pièces du dossier que la société SAINT-GOBAIN PAM a effectué le calcul de cette indemnité sur la base d'une rémunération mensuelle brute de 15 813,46 euros, soit la somme ressortant des bulletins de salaire de M. [M] ;il est donc dû à M. [M] la somme de 265 666,20 euros ; que la société SAINT-GOBAIN PAM reconnaît qu'elle n'a réglé que la somme de 253 394,25 euros.

Il est donc dû à M. [M] la somme de 12 271,95 euros.

Il sera fait droit à la demande pour cette somme, et la décision entreprise sera infirmée sur ce point.

- Sur la demande au titre de l'exécution déloyale de contrat de travail.

M. [S] [M] expose que la société SAINT-GOBAIN PAM a manqué à son obligation d'exécution loyale du contrat ; qu'en effet, après 28 années durant lesquelles il a donné entière satisfaction à son employeur, il lui a été imposé une mutation correspondant en réalité à une rétrogradation, sur un poste comportant des responsabilités sensiblement moindre, sans véritable fonction d'encadrement, ledit poste constituant, selon les termes mêmes de l'employeur, une simple mission temporaire, sans perspective d'avenir ; que l'attitude de la société SAINT-GOBAIN PAM a été totalement irrespectueuse, et que le préjudice subi de ce fait ne se confond pas avec celui indemnisé par l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, qui ne répare que les conséquences du licenciement injustifié.

Toutefois, il ressort de ce qui a été évoqué plus haut quant aux conditions du licenciement dont a fait l'objet M. [M] que le préjudice subi du fait des éléments qu'il souligne que le préjudice subi de ce fait n'est pas distinct de celui indemnisé au titre du caractère sans cause réelle et sérieuse du licenciement.

Dès lors, la demande sera rejetée et la décision entreprise sera confirmée sur ce point.

C'est par une exacte appréciation des éléments de la cause que les premiers juges ont condamné la société SAINT-GOBAIN PAM à rembourser à l'Etablissement public Pôle-Emploi les indemnités de chômage éventuellement versées à M. [S] [M] dans une limite de 6 mois d'indemnité.

La société SAINT-GOBAIN PAM qui succombe partiellement supportera les dépens d'appel.

Il apparaît inéquitable de laisser à la charge de M. [S] [M] l'intégralité des frais irrépétible qu'il a exposés ; il sera fait droit à la demande à hauteur de 3000 euros.

PAR CES MOTIFS:

La Cour, chambre sociale, statuant contradictoirement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, après débats en audience publique et après en avoir délibéré,

INFIRME le jugement rendu le 21 septembre 2021 par le conseil de prud'hommes de Nancy en ce qu'il a condamné la société SAINT-GOBAIN PAM à payer à M. [S] [M] les sommes de:

- 313 427,00 euros euros au titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- 25 796,67 euros au titre de complément de l'indemnité conventionnelle de licenciement,

Statuant à nouveau sur ces points ;

CONDAMNE la société SAINT-GOBAIN PAM à payer à M. [S] [M] les sommes de:

- 237 202 euros au titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- 12 271,95 euros au titre de complément de l'indemnité conventionnelle de licenciement ;

CONFIRME la décision entreprise pour le surplus ;

Y ajoutant:

CONDAMNE la société SAINT-GOBAIN PAM aux dépens de la procédure d'appel ;

LA CONDAMNE à payer à M. [S] [M] une somme de 3000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Ainsi prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Et signé par Monsieur Raphaël WEISSMANN, Président de Chambre, et par Madame Laurène RIVORY, Greffier.

LE GREFFIER LE PRESIDENT DE CHAMBRE

Minute en dix page


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Nancy
Formation : Chambre sociale-2ème sect
Numéro d'arrêt : 21/02455
Date de la décision : 25/05/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-05-25;21.02455 ?
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