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05/05/2023 | FRANCE | N°22/01642

France | France, Cour d'appel de Nancy, Première présidence, 05 mai 2023, 22/01642


COUR D'APPEL DE NANCY

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Requête en indemnisation à raison

d'une détention provisoire

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N° RG 22/01642 - N° Portalis DBVR-V-B7G-FALV

du 05 Mai 2023



Minute : /2023







REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



A l'audience du 17 Mars 2023, présidée par M. JEAN-TALON, désigné par ordonnance de Monsieur le Premier Président de la Cour d'Appel de NANCY en date du 09 décembre 2022, assisté de Madame RIVORY

, greffier et statuant sur la requête, enregistrée au Secrétariat de la Première Présidence le 18 Juillet 2022 sous le numéro N° RG 22/01642 - N° Por...

COUR D'APPEL DE NANCY

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Requête en indemnisation à raison

d'une détention provisoire

--------------------------------------

N° RG 22/01642 - N° Portalis DBVR-V-B7G-FALV

du 05 Mai 2023

Minute : /2023

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

A l'audience du 17 Mars 2023, présidée par M. JEAN-TALON, désigné par ordonnance de Monsieur le Premier Président de la Cour d'Appel de NANCY en date du 09 décembre 2022, assisté de Madame RIVORY, greffier et statuant sur la requête, enregistrée au Secrétariat de la Première Présidence le 18 Juillet 2022 sous le numéro N° RG 22/01642 - N° Portalis DBVR-V-B7G-FALV, conformément aux dispositions de l'article 149-2 du Code de Procédure Pénale et formée par :

Monsieur [S] [I]

né le [Date naissance 1] 1997 à [Localité 3] (Pas-de-Calais)

de nationalité Française

demeurant [Adresse 2]

ayant pour avocat Maître Olivier NUNGE, avocat au barreau de Nancy, membre de l'AARPI Claude THOMAS Catherine BERNEZ Olivier NUNGE.

L'Agent Judiciaire de l'Etat était représenté par Maître Nathalie DEVARENNE ODAERT de la SELAS DEVARENNE ASSOCIES GRAND-EST , substituée par Me Charlotte JACQUENET, avocates au barreaude Nancy,

Le ministère public étant représenté aux débats par M. Philippe RENZI, avocat général.

*****

Vu la requête déposée le 6 juillet 2022 par Maître Olivier NUNGE, avocat au barreau de Nancy, membre de l'AARPI Claude THOMAS Catherine BERNEZ Olivier NUNGE au nom de M.[S] [I], notifiées par lettre recommandée avec avis de réception le 21 juillet 2022 ;

Vu les conclusions de l'agent judiciaire de l'État notifiées par lettre recommandée avec avis de réception le 21 septembre 2022 ;

Vu les conclusions du procureur général près la cour d'appel de Nancy, notifiées par lettre recommandée avec avis de réception le 23 décembre 2022 ;

Vu l'avis de fixation à l'audience du 17 mars 2023 ;

Vu les articles 149 à 150, R. 26 à R. 40-22 du code de procédure pénale ;

EXPOSÉ DU LITIGE

M. [S] [I] a été poursuivi devant le tribunal correctionnel de Nancy, suivant procédure de comparution immédiate, pour avoir commis des infractions à la législation sur les stupéfiants en état de récidive légale.

Le juge des libertés et de la détention l'a placé en détention provisoire par ordonnance du 8 janvier 2022.

Par jugement rendu le 31 janvier 2022, le tribunal a déclaré M. [I] coupable des faits objets de la prévention, l'a condamné à la peine de 18 mois d'emprisonnement, avec maintien en détention, et a également révoqué à hauteur de 6 mois un sursis probatoire antérieurement prononcé le 16 octobre 2020.

Statuant sur l'appel du condamné le 19 mai 2022, la chambre des appels correctionnels a infirmé le jugement du 31 janvier 2022 en toutes ses dispositions et a renvoyé M. [I] des fins de la poursuite. M. [I] a été remis en liberté le 20 mai 2022.

Il a ainsi été placé en détention provisoire durant 133 jours.

*****

Suivant requête parvenue au secrétariat de la première présidence le 6 juillet 2022, M. [S] [I] a sollicité l'indemnisation de sa détention provisoire à hauteur de la somme de 19.800 euros en réparation de son préjudice moral, outre 1.213 euros au titre des frais non compris dans les dépens.

À l'appui de sa demande, il a exposé avoir « fêté » son 25ème anniversaire en détention et avoir dû patienter 24 h après sa relaxe pour être libéré.

Aux termes de ses diverses écritures, l'agent judiciaire de l'État a tout d'abord réclamé qu'il soit sursis à statuer sur la requête jusqu'à la production de la fiche pénale et du casier judiciaire du requérant. Il n'a subsidiairement pas contesté la recevabilité de la requête de M. [S] [I] mais a conclu à la réduction à de plus justes proportions,au plus 10.000 euros, de l'indemnité au titre du préjudice moral, en raison du passé pénal du requérant et notamment d'une incarcération précédente, et à la réduction de la somme demandée au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Le procureur général près cette cour a exposé s'en remettre aux observations présentées par l'agent judiciaire de l'Etat, la somme proposée au titre du préjudice moral apparaissant satisfactoire.

Lors des débats, tenus à l'audience du 17 mars 2023, les parties ont comparu et maintenu, chacune, la position développée dans leurs écritures.

Le demandeur a eu la parole en dernier.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur la recevabilité de la requête

En application de l'article 149 du code de procédure pénale, la personne qui a fait l'objet d'une détention provisoire au cours d'une procédure terminée à son égard par une décision de non-lieu, de relaxe ou d'acquittement devenue définitive a droit, à sa demande, à réparation intégrale du préjudice moral et matériel que lui a causé cette détention.

Le droit à réparation suppose toutefois que soient démontrées la réalité des préjudices invoqués et l'existence d'un lien de causalité direct et certain entre la détention et ces préjudices.

En l'espèce, M. [S] [I] a bénéficié d'une décision de relaxe rendue par la cour d'appel de Nancy le 19 mai 2022, devenue définitive en l'absence de pourvoi, a présenté sa requête dans le délai de six mois fixé par l'article 149-2 du code de procédure pénale et n'apparaît pas se trouver dans l'un des cas d'exclusion prévus par l'article 149 précité.

Sa requête est donc recevable.

Sur la demande aux fins de sursis à statuer

La fiche pénale et le bulletin n° 1 du casier judiciaire de M. [I] ont été produits par le ministère public, déposés au dossier et communiqués à l'audience aux parties.

Il n'y a donc pas lieu de surseoir à statuer.

Les éléments résultant de ces pièces ne contredisent au surplus pas ceux qui étaient en possession des parties.

Sur le bien-fondé de la requête

S'agissant du préjudice moral

Pour déterminer l'existence et l'étendue du préjudice moral, il doit être tenu compte de l'âge de la personne détenue, de sa situation familiale et des répercussions que la détention a pu avoir sur sa santé physique ou mentale.

En l'espèce, M. [I] a nécessairement subi un préjudice moral résultant du choc carcéral ressenti par toute personne brutalement et injustement privée de liberté durant plus de 4 mois.

La circonstance que le requérant a déjà été incarcéré antérieurement à son placement en détention provisoire doit être analysée comme un facteur justifiant une minoration du choc carcéral subi. M. [I], déjà condamné cinq fois et incarcéré une fois, du 18 novembre 2015 au 25 mai 2016, avant son placement en détention provisoire le 8 janvier 2022, ne peut ainsi prétendre qu'à un choc carcéral modéré.

Par ailleurs, il n'est pas démontré ni même allégué des conditions particulièrement difficiles de détention.

Enfin, la circonstance que M. [I] est resté détenu encore un jour après sa relaxe n'est pas directement liée à la détention provisoire mais constitue une irrégularité dont les conséquences ne peuvent être réparées sur le fondement des articles 149 et suivants du code de procédure pénale.

En définitive, l'allocation de la somme de 10.000 euros réparera intégralement le préjudice moral subi par M. [S] [I] du fait de la détention provisoire injustifiée dont il a fait l'objet.

S'agissant des frais non compris dans les dépens

Il serait inéquitable que M. [S] [I] conserve la charge intégrale des frais non compris dans les dépens qu'il a déboursés du fait de la présente instance. La somme de 1.213 euros lui sera en conséquence accordée en application de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement, contradictoirement et en premier ressort,

Disons n'y avoir lieu à sursis à statuer ;

Déclarons recevable en la forme la requête de M. [S] [I] ;

Lui allouons, en indemnisation de la détention provisoire injustifiée dont il a fait l'objet, les sommes de :

- 10.000 euros ( dix mille euros) , en réparation de son préjudice moral,

- 1.213 euros (mille deux cent treize euros), au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

Rejetons le surplus de la demande ;

Rappelons qu'en application de l'article R. 40 du code de procédure pénale, la présente décision est assortie de plein droit de l'exécution provisoire.

Laissons les frais à la charge de l'État.

Ainsi fait, jugé et prononcé par M. JEAN-TALON, Premier Président, conformément aux dispositions de l'article 149-1 du Code de Procédure Pénale le 05 mai 2023, assisté de madame Laurène RIVORY, greffier

Le greffier Le premier président

Laurène RIVORY Marc JEAN-TALON


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Nancy
Formation : Première présidence
Numéro d'arrêt : 22/01642
Date de la décision : 05/05/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-05-05;22.01642 ?
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