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30/03/2023 | FRANCE | N°22/00612

France | France, Cour d'appel de Nancy, Chambre sociale-2ème sect, 30 mars 2023, 22/00612


ARRÊT N° /2023

PH



DU 30 MARS 2023



N° RG 22/00612 - N° Portalis DBVR-V-B7G-E6CH







Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de REIMS



31 octobre 2018











































COUR D'APPEL DE NANCY

CHAMBRE SOCIALE - SECTION 2







Saisine sur renvoi après cassation





Demanderesse à la saisine:


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[Adresse 2]

[Localité 3]

Représentée par Me Valérie BACH-WASSERMANN, avocat au barreau de NANCY substitué par Me Christophe BARTHELEMY, avocat au barreau de REIMS









Défendeur à la saisine:



Monsieur [B] [...

ARRÊT N° /2023

PH

DU 30 MARS 2023

N° RG 22/00612 - N° Portalis DBVR-V-B7G-E6CH

Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de REIMS

31 octobre 2018

COUR D'APPEL DE NANCY

CHAMBRE SOCIALE - SECTION 2

Saisine sur renvoi après cassation

Demanderesse à la saisine:

Association [4] ([4]) prise en la personne de ses dirigeants pour ce domicliés audit siège

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représentée par Me Valérie BACH-WASSERMANN, avocat au barreau de NANCY substitué par Me Christophe BARTHELEMY, avocat au barreau de REIMS

Défendeur à la saisine:

Monsieur [B] [T]

[Adresse 1]

[Localité 3]

Non comparant ni représenté

COMPOSITION DE LA COUR :

Lors des débats et du délibéré,

Président : WEISSMANN Raphaël,

Conseillers : BRUNEAU Dominique,

STANEK Stéphane,

Greffier lors des débats : RIVORY Laurène

DÉBATS :

En audience publique du 26 Janvier 2023 ;

L'affaire a été mise en délibéré pour l'arrêt être rendu le 23 Mars 2023 ; par mise à disposition au greffe conformément à l'article 450 alinéa 2 du Code de Procédure Civile ; puis à cette date le délibéré a été prorogé au 30 mars 2023

Le 30 Mars 2023, la Cour après en avoir délibéré conformément à la Loi, a rendu l'arrêt dont la teneur suit :

EXPOSÉ DU LITIGE ET PRÉTENTIONS RESPECTIVES DES PARTIES

Monsieur [B] [T] a été engagé sous contrat à durée unique d'insertion d'accompagnement dans l'emploi à durée déterminée par l'association [4] (ci-après [4]), à compter du 08 juillet 2014 en qualité d'assistant de direction.

La relation contractuelle s'est poursuivie sous contrat à durée indéterminée à compter du 10 juillet 2015.

Par courrier du 31 octobre 2016, Monsieur [B] [T] a été convoqué à un entretien préalable au licenciement fixé au 14 novembre 2016.

Par courrier du 30 novembre 2016, Monsieur [B] [T] a été licencié pour faute grave.

Par requête du 17 octobre 2017, Monsieur [B] [T] a saisi le conseil de prud'hommes de Reims, aux fins :

- de dire que son licenciement n'est fondé sur aucune cause réelle et sérieuse,

- de juger qu'il a subi un harcèlement moral imputable à son employeur,

- de condamner l'association [4] à lui payer les sommes suivantes :

- 12.844,70 euros brut à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- 8 563,12 euros brut à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi au titre du harcèlement moral,

- 4 281,56 euros brut à titre d'indemnité compensatrice de préavis,

- 428,15 euros brut à titre de congés payés sur indemnité compensatrice de préavis,

- 1 070,38 euros brut à titre d'indemnité de licenciement,

- d'ordonner l'exécution provisoire,

- de condamner l'association [4] à lui payer la somme de 1 000,00 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- de condamner l'association [4] aux entiers dépens.

Vu le jugement du conseil de prud'hommes de Reims rendu le 31 octobre 2018, lequel a :

- dit que le licenciement de Monsieur [B] [T] pour faute grave est sans cause réelle et sérieuse,

- condamné l'association [4] à payer à Monsieur [B] [T] les sommes suivantes:

- 12.844,70 euros brut à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- 4 281,56 euros brut à titre d'indemnité compensatrice de préavis,

- 428,15 euros brut à titre de congés payés sur indemnité compensatrice de préavis,

- 1 070,38 euros brut à titre d'indemnité de licenciement,

- rejeté le surplus des demandes,

- condamné l'association [4] à remettre à Monsieur [B] [T] ses documents de fin de contrat rectifiés selon les termes du présent jugement,

- rappelé que l'article R.1454-28 du code du travail stipule qu'est de droit exécutoire à titre provisoire le jugement qui ordonne la remise d'un certificat de travail, de bulletins de paie ou de toutes pièces que l'employeur est tenu de délivrer ainsi que le jugement qui ordonne le paiement de sommes au titre des rémunérations et indemnités mentionnées au 2° de l'article R.1454-14 du code du travail dans la limite maximum de neuf mois de salaire, calculés sur la moyenne des trois derniers mois de salaire,

- dit que la moyenne des trois derniers mois de salaire de Monsieur [B] [T] s'élève à la somme de 2.057,35 euros brut,

- dit n'y avoir lieu à l'exécution provisoire pour le surplus,

- condamné l'association [4] à rembourser aux organismes intéressés les indemnités de chômage versées à Monsieur [B] [T] dans la limite de 6 mois,

- condamné l'association [4] à payer à Monsieur [B] [T] la somme de 1 000,00 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné l'association [4] aux entiers dépens.

L'association [4] a interjeté appel total du jugement précité.

Vu l'arrêt de la chambre sociale de la Cour d'appel de Reims rendu le 10 juin 2020, lequel a :

- infirmé le jugement en ce qu'il a condamné l'employeur à rembourser à l'institution concernée les indemnités chômage versées au salarié,

*

Statuant à nouveau et dans cette limite :

- dit que l'association [4] ne peut être condamnée à rembourser à l'institution concernée les indemnités chômage versées au salarié,

- confirmé le surplus y compris les dépens et l'article 700 du code de procédure civile,

*

Y ajoutant :

- dit que les condamnations sont prononcées sous réserves d'y déduire le cas échéant, les charges sociales et salariales,

- débouté l'association [4] de sa demande de remboursement de ses frais irrépétibles d'appel,

- condamné l'association [4] à payer à Monsieur [B] [T] la somme de 1 500,00 euros en remboursement de ses frais irrépétibles d'appel,

- condamné l'association [4] aux dépens de l'instance d'appel.

L'association [4] a formé un pourvoi en cassation à l'encontre de l'arrêt précité.

Vu l'arrêt de la chambre sociale de la Cour de cassation rendu le 26 janvier 2022, lequel a :

- cassé et annulé, sauf en ce qu'il dit que l'association [4] ne peut être condamnée à rembourser à l'institution concernée les indemnités de chômage versées au salarié, l'arrêt rendu le 10 juin 2020, entre les parties, par la Cour d'appel de Reims,

- remis, sauf sur ce point, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la Cour d'appel de Nancy,

- condamné Monsieur [B] [T] aux dépens,

- en application de l'article 700 du code de procédure civile, rejeté la demande formée par l'association [4].

Vu l'article 1032 du code de procédure civile,

Vu la déclaration de saisine de la juridiction de renvoi formée par l'association [4] le 10 mars 2022,

Vu l'article 455 du code de procédure civile,

Vu les conclusions de l'association [4] déposées sur le RPVA le 27 avril 2022,

Vu les conclusions de Monsieur [B] [T], qui n'est pas représenté à l'instance, déposées à la cour d'appel de Reims le 21 mai 2019,

Vu l'ordonnance de clôture rendue le 07 septembre 2022,

L'association [4] demande :

- d'infirmer le jugement du conseil de prudhommes de Reims du 31 octobre 2018, excepté en ce qu'il déboute Monsieur [B] [T] de sa demande au titre du harcèlement moral, en ce qu'il a :

- dit et jugé le licenciement pour faute grave de Monsieur [B] [T] sans cause réelle et sérieuse,

- condamné l'association [4] à verser à Monsieur [B] [T] les sommes suivantes :

- 12 844,70 euros brut à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- 4 281,56 euros brut à titre d'indemnité compensatrice de préavis,

- 428,15 euros brut à titre de congés payés sur indemnité compensatrice de préavis,

- 1 070,38 euros brut à titre d'indemnité de licenciement,

- 1 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

*

- de déclarer que le licenciement pour faute grave de Monsieur [B] [T] est justifié et, dans l'hypothèse où la gravité ne serait pas caractérisée, que celui-ci repose sur une cause réelle et sérieuse,

- de débouter Monsieur [B] [T] de toutes ses demandes, fins et prétentions,

- de condamner Monsieur [B] [T] au versement d'une somme de 5 000,00 euros au profit de l'association [4] en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- de condamner Monsieur [B] [T] aux dépens.

Vu l'arrêt avant-dire droit de la chambre sociale de la Cour d'appel de Nancy rendu le 15 décembre 2022, lequel a :

- rabattu l'ordonnance de clôture ;

- vu la lettre de licenciement du 30 novembre 2016, invité l'association [4] à conclure :

- sur l'éventuelle prescription des faits de violences verbales qui auraient été commises à l'encontre de Monsieur [G] [A],

- sur l'éventuelle prescription des faits d'« accusations infondées »,

- renvoyé à l'audience du 26 Janvier 2023 à 09h30.

Vu les conclusions additionnelles de l'association [4] déposées sur le RPVA le 23 janvier 2023,

L'association [4] demande :

- d'infirmer le jugement du conseil de prudhommes de Reims du 31 octobre 2018 en ce qu'il dit et juge le licenciement pour faute grave sans cause réelle et sérieuse et condamne en conséquence l'association [4] à verser à Monsieur [B] [T] les sommes de 12 844,70 euros brut à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, 4 281,56 euros brut à titre d'indemnité compensatrice de préavis, 428,15 euros brut à titre de congés payés sur indemnité compensatrice de préavis, 1 070,38 euros brut à titre d'indemnité de licenciement, 1 000,00 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, excepté en ce qu'il déboute Monsieur [T] de sa demande au titre du harcèlement moral,

- de déclarer que le licenciement pour faute grave de Monsieur [B] [T] est justifié et, dans l'hypothèse où la gravité ne serait pas caractérisée, que celui-ci repose sur une cause réelle et sérieuse,

- de débouter Monsieur [B] [T] de toutes ses demandes, fins et prétentions,

- de condamner Monsieur [B] [T] au versement d'une somme de 5 000,00 euros au profit de l'association [4] en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- de condamner Monsieur [B] [T] aux dépens.

Monsieur [B] [T] demande de :

- Dire et juger l'appel relevé recevable mais mal fondé.

- Débouter l'Association [4] de l'ensemble de ses demandes, fins et prétentions.

- Confirmer le jugement de départage rendu par le Conseil de Prud'hommes de REIMS du 31 octobre 2018, en ce qu'il a :

- dit que le licenciement prononcé le 30 novembre 2016 pour faute grave à l'encontre de Monsieur [B] [N] [T] est sans cause réelle et sérieuse.

- condamné l'Association [4] à payer à Monsieur [B] [N] [T] les sommes suivantes :

- 12.844,70 euros bruts à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- 4.2811,56 euros bruts à titre d'indemnité compensatrice de préavis,

- 428,11 euros bruts à titre de congés payés sur l'indemnité compensatrice de

préavis

- 1070,38 euros bruts à titre d'indemnité de licenciement

- dit que la moyenne des trois derniers mois de salaire de Monsieur [T] s'élève à la somme de 2.057,35 euros brut

- condamné l'Association [4] a verser à Monsieur [B] [N] [T] la somme de 1.000,00 euros au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile.

- condamné l'Association [4] aux entiers dépens de l'instance,

Infirmer le jugement dont appel quant au surplus.

- Condamner l'[4] à la somme de 8.563,12 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi au titre du harcèlement moral.

- Condamner I'[4] à la somme de 3.000,00 euros au titre des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure Civile.

SUR CE, LA COUR

Pour plus ample exposé sur les moyens et prétentions des parties, il sera expressément renvoyé aux conclusions de Monsieur [B] [T] déposées à la cour d'appel de Reims le 21 mai 2019, aux conclusions de l'association [4] déposées sur le RPVA le 27 avril 2022 et aux conclusions additionnelles de de l'association [4] déposées sur le RPVA le 23 janvier 2023.

Sur le licenciement pour faute grave :

La lettre de licenciement, qui fixe les limites du litige, est ainsi rédigée :

« Nous avons eu à déplorer de votre part plusieurs agissements fautifs dont nous vous avons fait part lors de notre entretien du 14 novembre 2016 à 14h00.

En effet, le jeudi 13 octobre 2016 entre 17h15 et 17h40, vous avez eu un comportement violent et menaçant à l'égard du Président ; pour mémoire, vous l'avez pris à parti en lui disant «vous terrorisez tout le monde depuis trente ans au club » mais que vous, «vous n'êtes pas une personne que l'on terrorise », puis, vous vous êtes placé tout contre lui, visage et corps a un centimètre de lui de façon à l'impressionner et lui avez dit en le fixant dans les yeux «vous ne me faites pas peur », et ce, sans aucune raison valable.

Le Président a alors quitté le bureau du secrétariat où la scène se déroulait en présence de Mme [M] la secrétaire du club, pour regagner son bureau où M. [K] [D], adhérent du club saison 2016, conseil du président, l'attendait pour rechercher son téléphone portable égaré au cours d'un entretien précédent.

Vous êtes alors arrivé véhément et vous êtes interposé entre M. [D] et le Président en continuant à invectiver celui-ci ; M. [D] tenta de vous calmer et vous faisant remarquer au passage votre insolence s'est vu également menacé en ces tenues : « vous n'avez rien à faire ici, ne refaites jamais cela, cela pourrait vous en coûter ». Une fois M. [D] reparti, vous êtes revenu vers le Président en lui disant « s'il revient je le dégage », « il n'a rien à faire ici », « sa fonction je n'en ai rien à faire ». Il était 17h40

Ce comportement est intolérable et totalement inapproprié de la part d'un assistant de direction.

Or, ce n'est pas la première fois que nous ayons à déplorer des violences verbales et un comportement intimidant de votre part. En effet, vous vous êtes déjà exprimé à propos de l'un de vos collègues ' M. [G] [A] ' en déclarant à notre Président : «je vais lui en mettre une, et vu que je fais de la boxe, il va s'en souvenir ».

Par courriel du 29 juillet 2016, nous vous avons demandé d'adopter un comportement convenable et de favoriser la communication avec vos collègues, soulignant par ailleurs vos difficultés à comprendre le fonctionnement du club basé sur la communication orale et l'échange, à vous y intégrer, et à appliquer les directives édictées par le Président

Vous n'avez pas tenu compte de ses recommandations.

De plus, alors que la qualité de votre travail s'avère insuffisante vous ne supportez pas les remontrances et les corrections, utilisez un ton condescendant, voire méprisant et remettez en cause nos actions, modes opératoires et le fonctionnement du club en effectuant des accusations infondées (concernant notamment l'application de la Convention collective en matière de primes, les dossiers de subvention du centre national et du sport, les bilans comptables d'organisations du club, le travail de l'un de vos collègues qui aurait mis des « vies en danger » lors d'un déplacement au Luxembourg).

Enfin, vous n'appliquez pas les directives de la direction, refusez le mode de communication oral et remettez en cause de façon réitérée la méthode de gestion du club et tes instructions reçues conne ce fut encore le cas dernièrement, dans votre courriel du 06/10/2016 :

-où vous exigez un ordre de mission pour toute action à entreprendre,

-vous rappelez vos déclarations quant à l'illégalité « dans laquelle baigne le club, la direction et un salarié »,

De même, lors de la soirée des champions (13/11/2016) où vous vous êtes autorisé à mettre en oeuvre l'organisation de la soirée sans en référer à la présidence du club ; cette initiative de votre part provoqua une difficulté pour les récompenses, dont vous avez demandé la fabrication à un artisan, renouvelant, selon vous, une commande de l'an dernier alors que le club souhaitait des récompenses innovantes pour cette année, (l'an passé nous n'avions pas eu à faire à cet artisan).

Il en est de même pour l'animation de la soirée et l'organisation du service par les bénévoles, vous avez contacté des personnes dites responsables, sens en soumettre la proposition au président, qui vous avait imposé de faire un appel à des bénévoles du club, démarche que vous ne souhaitiez pas.

- En cours de cette soirée, à 18h00, vous êtes venu provoquer le président, par les propos suivants : « Président, avez-vous du travail à donner aux bénévoles que vous avez fait venir ' » alors que les bénévoles avaient terminé l'installation de la soirée et qu'ils attendaient la remise de récompense qui devait débuter à 18h30. Vous avez ajouté « ces personnes auraient pu passer une soirée bien meilleure » cette réflexion étant, selon vos dires, destinée à pointer « son incapacité à gérer un évènement », il vous a répondu que votre commentaire était malvenu et déplacé, vous avez alors achevé la conversation en lui disant « oui mais moi cela me fait plaisir!»

Il résulte de l'ensemble de ces éléments que votre conduite met en cause la bonne marche de l'association, perturbe son organisation et rend impossible le maintien de votre contrat de travail.

Les explications recueillies auprès de vous lors de l'entretien préalable précité ne nous ont pas permis de modifier notre appréciation à ce sujet.

En conséquence, nous vous informons que nous avons décidé de vous licencier pour faute grave.

Le licenciement prend donc effet immédiatement dès réception de la présente lettre et votre solde de tout compte sera arrêté à cette date, sens indemnité de préavis, ni de licenciement ».

1) sur le grief de comportement verbalement violent envers le président du club, Monsieur [S], le 13 octobre 2016 :

L'employeur indique que ce jour-là, dans le bureau du secrétariat, en présence de Madame [P] [M], Monsieur [B] [T] a pris à partie Monsieur [S] en se plaçant à un centimètre de lui et en lui disant qu'il ne lui faisait pas peur, puis, qu'ensuite, dans le bureau de Monsieur [S], Monsieur [B] [T] a continué à l'invectiver et a également menacé Monsieur [D], présent dans le bureau et qui essayait de s'interposer.

L'employeur produit deux attestations de Monsieur [D], témoignant qu'il avait vu Monsieur [B] [T] acculer Monsieur [S] contre la photocopieuse du secrétariat, le premier hurlant et menaçant le second, puis que dans le bureau du président, Monsieur [B] [T] avait continué à l'injurier et le menacer et qu'il s'était senti physiquement en danger quand il avait tenté de s'interposer (pièces n° 21 et 36 de l'appelant).

Monsieur [B] [T] nie avoir commis les faits qui lui sont reprochés, reconnaissant uniquement qu'une « vive altercation » l'a opposé à Monsieur [S].

Il produit l'attestation de Madame [P] [M] qui indique avoir subi des pressions de la part de Monsieur [S] pour « fournir un témoignage en faveur du club », ce qu'elle avait refusé de faire. Elle indique que le jour des faits Monsieur [T] n'a eu ni mot, ni geste déplacé envers Monsieur [S] (pièce n° RR 36 de l'intimé).

Motivation :

Les faits reprochés à Monsieur [B] [T] se sont déroulés en deux temps :

- dans un premier temps dans le secrétariat, où se trouvait, selon l'employeur lui-même, Madame [M]. Or celle-ci a témoigné de ce que Monsieur [T] n'avait eu « ni mot, ni geste déplacé ». L'employeur ne fait pas valoir qu'il y ait eu une autre personne dans le secrétariat, au moment de cette première scène. Ce témoignage contredit directement les dires de l'employeur ainsi que ceux de Monsieur [D], « conseil du président » comme il est indiqué dans les conclusions de l'employeur ;

- dans un second temps, dans le bureau de Monsieur [S], en présence de Monsieur [D].

Cependant, la cour constate que si ce dernier mentionne des menaces et des injures proférées par Monsieur [T], il n'en donne pas la teneur.

En conséquence, le premier grief n'est pas établi.

2) sur le grief de menace de violences sur la personne de Monsieur [A] :

L'employeur produit un courriel du 29 juillet 2016 de Monsieur [S] adressé à Monsieur [B] [T] indiquant « (...] Concernant ta relation avec [G], quand tu viens me voir et que tu me dis que « tu vas lui en mettre une et que comme tu fais de la boxe il va s'en souvenir », je te demande de revenir à des relations convenables (...) » (pièce n° 11 de l'appelante).

Motivation :

Par arrêt avant-dire droit du 15 décembre 2022, la cour a mis dans les débats la question de la prescription de ces faits au regard du délai de deux mois prévu par l'article L. 1332'4, du code du travail.

L'employeur fait valoir qu'en application de l'article 2247 du code civil, « Les juges ne peuvent pas suppléer d'office le moyen résultant de la prescription » et qu'en conséquence cette cour ne peut soulever d'office le non-respect du délai de deux mois prévu par l'article du code du travail précité.

La cour constate cependant que l'arrêt de la cour de cassation fait grief, au visa de l'article 16 du code de procédure civile, à la cour d'appel de Reims d'avoir soulevé d'office le moyen de la prescription « sans inviter préalablement les parties à présenter leurs observations ».

De fait, l'article 2247 du code de procédure civile vise les prescriptions relatives aux délais pour agir en justice justice, ce qui n'est pas le cas du délai de deux mois de l'article L.1332'4, du code du travail, qui est relatif au déclenchement d'une procédure disciplinaire et non à la saisine d'une juridiction.

Le juge est donc fondé à soulever d'office le non-respect de ce délai, dès lors qu'il a invité les parties à en débattre contradictoirement.

Les faits dénoncés s'étant produits plus de deux mois avant le déclenchement des poursuites disciplinaires contre Monsieur [T] le 31 octobre 2016, celles-ci sont hors délai.

Le grief de l'altercation du 13 octobre 2016 n'étant pas retenu, l'employeur n'est pas fondé à invoquer la continuité d'un même comportement fautif pour poursuivre les faits dont il fait état dans son mail du 29 juillet 2016.

Dès lors, le grief de menaces à l'encontre de Monsieur [A] ne peut être retenu.

3) Sur le grief d'insubordination et de mauvaise qualité du travail fourni :

L'employeur s'en réfère à la lettre de licenciement qui mentionne la remise en cause des actions, modes opératoires et méthodes de gestion du club par Monsieur [B] [T], son refus d'appliquer les directives de la direction et ses courriers relatifs à l'application à sa personne de la convention collective du sport.

Monsieur [B] [T] nie ce grief.

Motivation :

Il ressort du courriel adressé par Monsieur [B] [T] à Monsieur [S] (pièce n° RR 20 de l'intimé) et de son contrat de travail que ses fonctions n'ont jamais été précisément déterminées, ni les méthodes de communication entre les salariés du club et la direction.

Il ne peut donc lui être reproché d'avoir abusé de la communication écrite, ni d'avoir adressé à sa hiérarchie diverses demandes d'explications, étant relevé que les courriels produits par les parties ne révèlent aucun comportement inadapté de la part de Monsieur [B] [T].

S'agissant des demandes de Monsieur [B] [T] concernant la rémunération qu'il estimait lui être due en application de la convention collective du sport, il ne peut être reproché à un salarié d'exprimer un désaccord avec son employeur sur la rémunération ou les avantages qu'ils lui sont dus, dès lors que ce désaccord n'est pas exprimé dans des termes outranciers, ce qui est le cas en l'espèce, le ton utilisé par Monsieur [B] [T] étant mesuré.

Le grief d'insubordination n'est donc pas établi.

4) sur le grief d'accusations infondées :

L'employeur fait valoir que Monsieur [B] [T] l'a accusé de vouloir lui faire établir de faux bilans comptables.

Motivation :

Il ressort des conclusions des parties que les accusations de malversation faites par Monsieur [T] ont eu principalement lieu après que le jugement du conseil de prud'hommes de Reims ait été rendu.

Cependant, Monsieur [B] [T] a adressé à Monsieur [S] le 1er août 2016 un courriel récapitulant plusieurs griefs, dont celui de vouloir lui faire établir un faux bilan comptable de l'association pour obtenir des subventions supplémentaires.

Dès lors que l'employeur avait ainsi eu connaissance de cette accusation le 1er août 2016, le déclenchement de la procédure disciplinaire le 31 octobre 2016 ne respecte pas le délai de deux mois prévu par l'article L. 1332-4 du code du travail.

Invité à s'expliquer sur ce point par l'arrêt avant-dire droit du 15 décembre 2022, l'employeur fait valoir l'impossibilité par le juge d'invoquer d'office la prescription de deux mois, en application de l'article 2247 du code civil.

Cependant, comme il a été indiqué ci-dessus, s'agissant du délai pour déclencher une procédure disciplinaire et non une procédure judiciaire, l'article 2247 n'a pas vocation à s'appliquer en l'espèce.

Les poursuites disciplinaires ayant eu lieu tardivement, le grief ne peut donc être retenu.

5) Sur le grief de mauvaise organisation et de comportement provocateur lors de la soirée des champions :

L'employeur ne développe pas ce grief dans ses conclusions. Il indique que des faits commis postérieurement au déclenchement de la procédure disciplinaire peuvent justifier un licenciement.

Motivation :

C'est par une juste analyse du droit et du fait que le conseil de prud'hommes de Reims, dont la cour adopte les motifs, a jugé que les faits litigieux s'étant déroulés le 16 novembre 2016 et non le 13, comme indiqué dans la lettre de licenciement, soit postérieurement à l'entretien préalable au licenciement du 14 novembre, auraient dû faire l'objet d'une procédure disciplinaire distincte, le salarié n'ayant pu s'expliquer sur les reproches qui lui sont faits quant à l'organisation de cette soirée.

Le grief n'est donc pas établi.

En conséquence, au vu des éléments développés ci-dessus, il y a lieu de confirmer le jugement du conseil de prud'hommes de Reims en ce qu'il a dit le licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Sur les conséquences financières du licenciement sans cause réelle et sérieuse :

Monsieur [B] [T] demande la confirmation des sommes qui lui ont été attribuées par le conseil de prud'hommes de Reims au titre de l'indemnité de licenciement, de l'indemnité compensatrice de préavis et des congés payés y afférant et de l'indemnisation pour licenciement abusif.

L'employeur ne conclut pas sur le quantum des sommes demandées.

Le jugement du conseil de prud'hommes sera donc confirmé sur ces points.

Sur le harcèlement moral :

Monsieur [B] [T] fait valoir qu'il a été insulté et menacé par Monsieur [A], que des reproches injustifiés lui ont été faits et que ses conditions de travail se sont dégradées.

L'employeur nie tout fait de harcèlement :

Motivation :

Aux termes des articles L1152-1 et L1154-1 du code du travail, aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel. Pour se prononcer sur l'existence d'un harcèlement moral, il appartient au juge d'examiner l'ensemble des éléments présentés par le salarié, en prenant en compte les documents médicaux éventuellement produits, et d'apprécier si les faits matériellement établis, pris dans leur ensemble, permettent de présumer l'existence d'un harcèlement. Dans l'affirmative, il revient au juge d'apprécier si l'employeur prouve que les agissements invoqués ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que ses décisions sont justifiées par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement. Sous réserve d'exercer son office dans les conditions qui précèdent, le juge apprécie souverainement si le salarié établit des faits qui permettent de présumer l'existence d'un harcèlement et si l'employeur prouve que les agissements invoqués sont étrangers à tout harcèlement.

En l'espèce, à l'appui de ces dires, Monsieur [B] [T] produit les attestations d'anciens salariés ne relatant que des faits de harcèlement les concernant uniquement eux, un compte-rendu de ses déclarations à un médecin et un courrier qu'il a adressé à son employeur relatant le comportement de Monsieur [A] à son égard.

Ces éléments sont insuffisants pour établir la matérialité des faits que Monsieur [B] [T] dénonce.

En conséquence la demande de dommages et intérêts de Monsieur [B] [T] pour harcèlement moral sera rejetée, le jugement du conseil de prud'hommes de Reims étant confirmé sur ce point.

Sur l'article 700 du code de procédure civile et sur les dépens :

Les parties seront déboutées de leurs demandes respectives au titre des frais irrépétibles.

L'employeur sera condamné aux dépens.

PAR CES MOTIFS

La Cour, chambre sociale, statuant par arrêt réputé contradictoire, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, après débats en audience publique et après en avoir délibéré,

CONFIRME le jugement du conseil de prud'hommes de Reims du 31 octobre 2018 en ses dispositions soumises à la cour ;

Y AJOUTANT

Déboute Monsieur [B] [T] et l'[4] ([4]) de leurs demandes respectives au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne l'[4] ([4]) aux dépens.

Ainsi prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Et signé par Monsieur Raphaël WEISSMANN, Président de Chambre, et par Madame Céline PERRIN, Greffier.

LE GREFFIER LE PRESIDENT DE CHAMBRE

Minute en treize pages


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Nancy
Formation : Chambre sociale-2ème sect
Numéro d'arrêt : 22/00612
Date de la décision : 30/03/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-03-30;22.00612 ?
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