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30/03/2023 | FRANCE | N°22/00581

France | France, Cour d'appel de Nancy, Chambre sociale-2ème sect, 30 mars 2023, 22/00581


ARRÊT N° /2023

PH



DU 30 MARS 2023



N° RG 22/00581 - N° Portalis DBVR-V-B7G-E6AG







Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de NANCY

F 18/00413

04 février 2022











































COUR D'APPEL DE NANCY

CHAMBRE SOCIALE - SECTION 2













APPELANT :



Monsieur [W] [B]

[Adresse 4]>
[Localité 2]

Représenté par Me Sophie COURONNE de l'AARPI BDF AVOCATS, avocat au barreau de NANCY









INTIMÉE :



S.A.S. UPM RAFLATAC pris en la personne de ses représentants légaux domiciliés audit siège

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représentée par Me Fabrice HENON-HILAIRE de la SELARL ELIDE, avocat au barre...

ARRÊT N° /2023

PH

DU 30 MARS 2023

N° RG 22/00581 - N° Portalis DBVR-V-B7G-E6AG

Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de NANCY

F 18/00413

04 février 2022

COUR D'APPEL DE NANCY

CHAMBRE SOCIALE - SECTION 2

APPELANT :

Monsieur [W] [B]

[Adresse 4]

[Localité 2]

Représenté par Me Sophie COURONNE de l'AARPI BDF AVOCATS, avocat au barreau de NANCY

INTIMÉE :

S.A.S. UPM RAFLATAC pris en la personne de ses représentants légaux domiciliés audit siège

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représentée par Me Fabrice HENON-HILAIRE de la SELARL ELIDE, avocat au barreau de METZ

COMPOSITION DE LA COUR :

Lors des débats et du délibéré,

Président : WEISSMANN Raphaël,

Conseillers : BRUNEAU Dominique,

STANEK Stéphane,

Greffier lors des débats : RIVORY Laurène

DÉBATS :

En audience publique du 02 Février 2023 ;

L'affaire a été mise en délibéré pour l'arrêt être rendu le 30 Mars 2023 ; par mise à disposition au greffe conformément à l'article 450 alinéa 2 du Code de Procédure Civile ;

Le 30 Mars 2023, la Cour après en avoir délibéré conformément à la Loi, a rendu l'arrêt dont la teneur suit :

EXPOSÉ DU LITIGE ET PRÉTENTIONS RESPECTIVES DES PARTIES.

M. [W] [B] a été engagé sous contrat de travail à durée indéterminée, par la société S.A.S UPM RAFLATAC à compter du 01 septembre 1997, en qualité d'ouvrier opérateur-production.

La convention collective nationale des ouvriers, employés, dessinateurs, techniciens et agents de maîtrise de la production de papiers, cartons et celluloses s'applique au contrat de travail.

Suite à un avenant contractuel du 27 mars 2014, le salarié occupait les fonctions d'ouvrier cariste-logistique.

Par courrier du 11 septembre 2017, M. [W] [B] s'est vu notifier un avertissement.

Par courrier du 18 octobre 2017, M. [W] [B] a été convoqué à un entretien préalable au licenciement fixé au 27 octobre 2017, avec notification de sa mise à pied à titre conservatoire.

Par courrier du 31 octobre 2017, M. [W] [B] a été licencié pour faute grave.

Par requête du 30 août 2018, M. [W] [B] a saisi le conseil de prud'hommes de Nancy, aux fins :

- de dire son licenciement pour faute grave sans cause réelle et sérieuse,

- de condamner la société S.A.S UPM RAFLATAC à lui verser les sommes suivantes :

- 1 983,07 euros bruts de rappel de salaire du 18/10/2017 au 31/10/2017 au titre de la période de mise à pied à titre conservatoire infondée outre 198,31 euros de congés payés y afférents,

- 48 112,00 euros nets à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- 6 208,00 euros bruts d'indemnité compensatrice de préavis de 2 mois, outre la somme de 620,80 euros bruts au titre des congés payés afférents,

- 18 468,00 euros nets à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement,

- 45 000,00 euros nets de dommages et intérêts pour licenciement intervenu dans des conditions brutales et vexatoires,

- 3 500,00 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile,

- d'ordonner la remise des attestations Pôle Emploi, certificat de travail et bulletins de salaire rectifiés sous astreinte de 100,00 euros par document et par jour de retard, le Conseil se réservant la faculté de liquider lui-même ladite astreinte,

- d'ordonner l'exécution provisoire de l'entier jugement sur le fondement de l'article 515 du code de procédure civile,

- de condamner la société S.A.S UPM RAFLATAC aux entiers dépens.

Vu le jugement du conseil de prud'hommes de Nancy rendu le 04 février 2022, lequel a :

- dit que le licenciement pour faute grave prononcé à l'encontre de M. [W] [B] par la société S.A.S UPM RAFLATAC repose sur une cause réelle et sérieuse,

- débouté M. [W] [B] de l'ensemble de ses demandes,

- condamné M. [W] [B] à payer à la société S.A.S UPM RAFLATAC la somme de 1 000,00 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné M. [W] [B] aux entiers dépens.

Vu l'appel formé par M. [W] [B] le 07 mars 2022,

Vu l'article 455 du code de procédure civile,

Vu les conclusions de M. [W] [B] déposées sur le RPVA le 07 juin 2022, et celles de la société S.A.S UPM RAFLATAC déposées sur le RPVA le 29 août 2022,

Vu l'ordonnance de clôture rendue le 11 janvier 2023,

M. [W] [B] demande à la cour :

- de dire M. [W] [B] recevable en son appel,

- d'infirmer le jugement du conseil de prud'hommes de Nancy rendu le 4 février 2022 en ce qu'il a :

- dit que le licenciement pour faute grave prononcé à l'encontre de M. [W] [B] par la société S.A.S UPM RAFLATAC repose sur une cause réelle et sérieuse,

- débouté M. [W] [B] de l'ensemble de ses demandes,

- condamné M. [W] [B] à payer à la société S.A.S UPM RAFLATAC la somme de 1 000,00 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné M. [W] [B] aux entiers dépens,

*

Statuant à nouveau :

- d'annuler la mise à pied conservatoire prononcée le 18 octobre 2017,

- de dire et juger le licenciement de M. [W] [B] comme étant dépourvu de cause réelle et sérieuse,

- de dire et juger son licenciement comme étant intervenu dans des conditions brutales et vexatoires,

- en conséquence, de condamner la société UPM RAFLATAC à verser à M. [W] [B] les sommes de :

- 1 983,07 euros bruts de rappel de salaire du 18/10/2017 au 31/10/2017 au titre de la période de mise à pied à titre conservatoire infondée outre 198,31 euros de congés payés y afférents,

- 48 112,00 euros nets à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- 6 208,00 euros bruts d'indemnité compensatrice de préavis de 2 mois, outre la somme de 620,80 euros bruts au titre des congés payés afférents,

- 18 468,00 euros nets à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement,

- 45 000,00 euros nets de dommages et intérêts pour licenciement intervenu dans des conditions brutales et vexatoires,

- d'ordonner la remise des attestations Pôle Emploi, certificat de travail et bulletins de salaire rectifiés sous astreinte de 100,00 euros par document et par jour de retard ; la Cour se réservant la faculté de liquider elle-même ladite astreinte,

- d'ordonner l'exécution provisoire de l'entier jugement sur le fondement de l'article 515 du code de procédure civile,

- de condamner la société S.A.S UPM RAFLATAC à verser à M. [W] [B] la somme de 3 500,00 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- de condamner la société S.A.S UPM RAFLATAC aux entiers dépens,

- de débouter la société S.A.S UPM RAFLATAC de sa demande reconventionnelle.

La société S.A.S UPM RAFLATAC demande à la cour:

- de confirmer le jugement du conseil de prud'hommes de Nancy du 4 février 2022, ainsi entrepris en ce qu'il a reconnu le licenciement pour faute grave notifié à M. [W] [B] pleinement motivé et justifié,

- de débouter M. [W] [B] de l'ensemble des demandes, fins et prétentions,

- de condamner M. [W] [B] au paiement d'une indemnité d'un montant de 3 500,00 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- de condamner M. [W] [B] aux entiers frais et dépens.

SUR CE, LA COUR ;

La cour renvoie pour plus ample exposé des prétentions et moyens des parties aux conclusions déposées sur le RPVA par M. [W] [B] le 07 juin 2022 et par la société S.A.S UPM RAFLATAC le RPVA le 29 août 2022.

La faute grave est celle qui résulte d'un fait ou d'un ensemble de faits imputables au salarié qui constituent une violation des obligations résultant du contrat de travail ou des relations de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise. C'est à l'employeur qui invoque la faute grave pour licencier d'en rapporter la preuve.

Par lettre du 31 octobre 2017, la SAS UPM RAFLATAC a notifié à M. [W] [B] son licenciement en ces termes:

'...

Après réflexion, nous vous informons que nous avons décidé de procéder à votre licenciement pour les motifs suivants:

Propos et comportements à connotation sexuelle répétés qui portent atteinte à la dignité de la victime en raison de leur caractère dégradant ou humiliant et créent à son encontre une situation offensante.

Vous trouverez ci-desous la nature des agissements qui vous sont reprochés:

- avoir fait sur le lieu de travail des avances à caractère sexuel à Mademoiselle [L] [V] votre collègue de travail ;

- avoir écrit au marker sur le casier du vestiaire de Mademoiselle [V]: 'KVI SALE CHIENNE', inscription visible par tous vos collègues de travail et personnels fréquentant le bureau des caristes du service logistique (pour rappel, KVI est l'identifiant de [L] [V] dans le réferentiel UPM RAFLATAC) ;

- avoir pendant plusieurs mois harcelé et provoqué Mademoiselle [V] en jetant quotidiennement vos cuillères plastiques souillées de café dans son casier personnel ;

- avoir provoqué et harcelé Mademoiselle [V] qui faisant des heures supplémentaires, s'est retrouvée en faction dans votre équipe. Vous êtes allé sur son poste de travail lui déclarer 'Je te trouve mollasse dans tes mouvements en ce moment, il faudrait que tu te bouges un peu !'

- avoir provoqué et harcelé Mademoiselle [V] alors qu'elle quittait son poste, en lui crachant au visage la fumée de votre cigarette électronique puis en lui adressant un baiser mimé avec vos lèvres pour lui souhaiter bonne nuit.

Nous vous rappelons que vous aviez déjà été vu en entretien informel par votre Responsable, Monsieur [Z] [H] et le Directeur Général, Monsieur [O] [F], pour les motifs injurieux sur le vestiaire, à l'occasion de réunions collectives pour dénoncer ces agissements inacceptables. A l'époque, nous n'avions pas la preuve de votre implication.

Les faits récapitulés ci-dessus ont été corroborés par vos collègues de travail, qui nous ont fait part de leur mal-être suite à vos comportements et agissements envers Mademoiselle [V]. Pour cette dernière, il est impossible de venir travailler sereinement et sans 'la boule au ventre' en attendant d'être de nouveau agressée et/ou de découvrir d'autres provocations de votre part.

Ces agissements sont constitutifs de harcèlement moral et sexuel. Compte tenu de la gravité, ces éléments rendent impossible votre maintien dans l'entreprise.'.

Sur le licenciement sans cause réelle et sérieuse :

M. [W] [B] fait valoir que son licenciement est sans cause réelle et sérieuse, la procédure de licenciement étant irrégulière, les faits étant non datés ou prescrits et les griefs qui lui sont reprochés n'étant pas établis.

Motivation :

- Sur le contenu de la lettre de licenciement et l'application de la convention collective.

L'article 29 de la convention collective dans sa rédaction applicable aux faits de l'espèce dispose que 'la lettre recommandée de notification de licenciement devra rappeler au salarié licencié qu'il a la possibilité de demander que l'empoyeur lui fasse connaître par écrit les causes réelles et sérieuses du licenciement' ;

M. [W] [B] expose que que la lettre de licenciement ne comprend pas cette mention.

Toutefois, il ressort du contenu de la lettre rappelé plus haut que les griefs reprochés à M.[B] sont clairement exprimés et qu'il en a eu une connaissance suffisante de leur nature.

Par ailleurs, si la lettre de licenciement ne précise pas la date des faits reprochés, cette absence n'a pas pour effet de vicier la procédure dans la mesure où ces faits sont vérifiables et peuvent être discutés devant le juge.

La cour constate en conséquence que M. [W] [B] était suffisament informé des griefs qui lui sont reprochés.

- Sur la prescription.

L'article L 1332-4 du code du travail dispose qu'aucun fait fautif ne peut donner lieu à lui seul à l'engagement de poursuites disciplinaires au delà d'un délai de deux mois à compter du jour où l'employeur en a eu connaissance ;

Il ressort de ces dispositions que l'employeur peut engager une procédure sur le fondement de faits antérieurs au délai de prescription dans la mesure où ceux-ci se sont poursuivis ou ont été réitérés dans ce délai et s'il s'agit de faits de même nature.

Il ressort de l'attestation, régulière en la forme, rédigée par Mme [L] [V] et le courriel qu'elle a adressé à sa hiérarchie le 25 septembre 2017 (pièces n° 11 et 16 bis du dossier de la SAS UPM RAFLATAC) que les faits qui sont reprochés à M. [W] [B] ont été commis pour l'essentiel entre le 1er et le 22 septembre 2017, soit dans le délai de deux mois précédant l'envoi de la lettre de convocation à l'entretien préalable le 18 octobre 2017.

Par ailleurs, si les 'avances' évoquées par Mme [L] [V] dans son attestation sont datées de '2016", elles se rapprochent par leur nature des faits commis par M. [B] ( 'en lui adressant un baiser mimé avec vos lèvres pour lui souhaiter bonne nuit') le 22 septembre 2017, tel qu'il ressort du courriel précédemment évoqué.

En conséquence les faits retenus à l'encontre de M. [W] [B] ne sont pas frappés de prescription.

- Sur les motifs du licenciement.

M. [W] [B] soutient que la SAS UPM RAFLATAC ne démontre pas la réalité des faits qui lui sont reprochés.

Il ressort de l'attestation établie par Mme [L] [V] et du courriel précédemment évoqué, ainsi que des attestations, régulières en la forme, établies par Mme [X] [U] et MM. [Z] [H] et [Y] [S] que les faits reprochés à M. [B] sont établis ; qu'ils constituent un ensemble de faits imputables au salarié qui constituent une violation des obligations résultant du contrat de travail ou des relations de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise.

Dès lors, le licenciement pour faute grave de M. [W] [B] par la SAS UPM RAFLATAC est fondé et la décision entreprise sera confirmée sur ce point ; les demandes indemnitaires et de rappel de salaire de M. [B] seront en conséquence rejetées.

Sur la demande de dommages et intérêts pour licenciement vexatoire :

M. [W] [B] fait valoir son ancienneté de vingt ans et la soudaineté de son éviction qui l'a empêché de saluer ses collègues et de s'expliquer et que donc sa réputation a été entâchée.

Il réclame en conséquence la somme de 45 000 euros.

La SAS UPM RAF LATAC s'oppose à cette demande.

Motivation :

La gravité de la faute commise par le salarié a justifié sa mise à pied conservatoire, l'employeur ayant appliqué la procédure prévue par la loi.

M. [W] [B] ne faisant pas valoir d'autre élément caractérisant le caractère vexatoire de son licenciement, il sera débouté de sa demande, le jugement attaqué étant confirmé sur ce point.

Sur la remise des documents rectifiés :

Le licenciement pour faute étant causé, il n'y a pas lieu à remise de documents réctifiés.

M. [W] [B] qui succombe supportera les dépens d'appel.

Il n'apparaît pas inéquitable de laisser à la charge de la SAS UPM RAFLATAC l'intégralité des frais irrépétibles qu'elle a exposés ; la demande sur ce point sera rejetée.

PAR CES MOTIFS ;

La Cour, chambre sociale, statuant par arrêt contradictoire mis à disposition au greffe et après débats en audience publique et après en avoir délibéré,

CONFIRME le jugement rendu le 4 février 2022 par le conseil de prud'hommes de Nancy ;

DÉBOUTE les parties de leurs autres demandes ;

Y ajoutant:

CONDAMNE [W] [B] aux dépens de la procédure d'appel ;

DEBOUTE les parties de leurs demandes sur le fondement au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Ainsi prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Et signé par Monsieur Raphaël WEISSMANN, Président de Chambre, et par Madame Céline PERRIN, Greffier.

LE GREFFIER LE PRESIDENT DE CHAMBRE

Minute en sept pages


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Nancy
Formation : Chambre sociale-2ème sect
Numéro d'arrêt : 22/00581
Date de la décision : 30/03/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-03-30;22.00581 ?
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