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23/02/2023 | FRANCE | N°22/02164

France | France, Cour d'appel de Nancy, Chambre sociale-2ème sect, 23 février 2023, 22/02164


ARRÊT N° /2023

PH



DU 23 FEVRIER 2023



N° RG 22/02164 - N° Portalis DBVR-V-B7G-FBQ4







Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de NANCY

F 20/00288

09 septembre 2022











































COUR D'APPEL DE NANCY

CHAMBRE SOCIALE - SECTION 2













APPELANTE :



Madame [X] [F] NÉE [E]

[A

dresse 2]

[Localité 3]

Représentée par Me Julien FOURAY de la SELARL KNITTEL - FOURAY ET ASSOCIES, avocat au barreau d'EPINAL substitué par Me ALEXANDRE, avocate au barreau de NANCY









INTIMÉE :



S.A.R.L. LORRAINE PNEUS SERVICES NANCY Prise en la personne de son représentant légal pour ce domicilié audit ...

ARRÊT N° /2023

PH

DU 23 FEVRIER 2023

N° RG 22/02164 - N° Portalis DBVR-V-B7G-FBQ4

Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de NANCY

F 20/00288

09 septembre 2022

COUR D'APPEL DE NANCY

CHAMBRE SOCIALE - SECTION 2

APPELANTE :

Madame [X] [F] NÉE [E]

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représentée par Me Julien FOURAY de la SELARL KNITTEL - FOURAY ET ASSOCIES, avocat au barreau d'EPINAL substitué par Me ALEXANDRE, avocate au barreau de NANCY

INTIMÉE :

S.A.R.L. LORRAINE PNEUS SERVICES NANCY Prise en la personne de son représentant légal pour ce domicilié audit siège

[Adresse 1]

[Localité 4]

Représentée par Me Cyrille GUENIOT de la SELAFA AUDIT-CONSEIL-DEFENSE substitué par Me MORLOT, avocats au barreau de NANCY

COMPOSITION DE LA COUR :

Lors des débats et du délibéré,

Président : WEISSMANN Raphaël,

Président : HAQUET Jean-Baptiste,

Conseiller : STANEK Stéphane,

Greffier lors des débats : RIVORY Laurène

DÉBATS :

En audience publique du 15 Décembre 2022 ;

L'affaire a été mise en délibéré pour l'arrêt être rendu le 09 Février 2023 ; par mise à disposition au greffe conformément à l'article 450 alinéa 2 du Code de Procédure Civile ; puis à cette date le délibéré a été prorogé au 23 février 2023 ;

Le 23 Février 2023, la Cour après en avoir délibéré conformément à la Loi, a rendu l'arrêt dont la teneur suit :

EXPOSÉ DU LITIGE ET PRÉTENTIONS RESPECTIVES DES PARTIES

Selon ses déclarations, Madame [X] [F] a été engagée sous contrat de travail à durée indéterminée, par la société S.A.R.L. LORRAINE PNEUS SERVICES NANCY à compter du 02 juillet 2018, en qualité de directrice administrative.

La convention collective nationale des services de l'automobile s'applique au contrat de travail.

Par courrier du 26 juin 2019, Madame [X] [F] a été convoquée à un entretien préalable au licenciement fixé au 09 juillet 2019.

Par courrier du 15 juillet 2019, Madame [X] [F] a été licenciée pour faute grave.

Par requête du 13 juillet 2020, Madame [X] [F] a saisi le conseil de prud'hommes de Nancy, aux fins :

- de requalifier la rupture de son contrat de travail en un licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- de condamner la société S.A.R.L. LORRAINE PNEUS SERVICES NANCY :

- 20 837,90 euros de rappel de salaire, outre la somme de 2 083,79 euros de congés payés afférents,

- 24 234,00 euros à titre d'indemnité pour travail dissimulé,

- 12 117,00 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis, outre la somme de 1 211,70 euros de congés payés afférents,

- 2 019,50 euros à titre d'indemnité de licenciement,

- 8 078,00 euros de dommages et intérêts pour rupture abusive,

- 3 000,00 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,

- d'ordonner la remise, sous astreinte de 100,00 euros par jour de retard passé le délai de 15 jours, des documents suivants :

- bulletins de paie faisant apparaître la rémunération qui aurait dû être versée,

- attestation Pôle Emploi faisant apparaître que la rupture est un licenciement sans cause réelle et sérieuse ainsi que l'ensemble des sommes qui auraient dû lui être versées.

La société S.A.R.L. LORRAINE PNEUS SERVICES NANCY a soulevé in limine litis l'incompétence d'attribution du conseil de prud'hommes de Nancy.

Vu le jugement du conseil de prud'hommes de Nancy rendu le 09 septembre 2022, lequel a :

- dit que Madame [X] [F] ne pouvait pas être titulaire d'un contrat de travail,

- dit que Madame [X] [F] était gérante majoritaire de la société S.A.R.L. LORRAINE PNEUS SERVICES NANCY ;

- déclaré le conseil de prud'hommes de Nancy matériellement incompétent au profit du tribunal de commerce de Nancy, pour connaitre du litige qui lui est soumis,

- laissé à chaque partie la charge de ses dépens respectifs.

Vu l'appel formé par Madame [X] [F] le 28 septembre 2022,

Vu la requête aux fins d'autorisation d'assignation à jour fixe déposée au greffe de la chambre sociale le 28 septembre 2022,

Vu la requête aux fins d'autorisation d'assignation à jour fixe déposée au greffe de la chambre sociale le 28 septembre 2022,

Vu l'ordonnance sur requête autorisant à assigner à jour fixe rendue le 21 novembre 2022,

Vu l'article 455 du code de procédure civile,

Vu les conclusions de Madame [X] [F] déposées sur le RPVA le 28 septembre 2022, et celles de la société S.A.R.L. LORRAINE PNEUS SERVICES NANCY déposées sur le RPVA le 21 novembre 2022,

L'affaire étant fixée à l'audience du 15 décembre 2022.

Madame [X] [F] demande :

- de déclarer Madame [X] [F] recevable et bien fondée en son appel,

- d'infirmer le jugement du conseil de prud'hommes de Nancy en ce qu'il a :

- dit que Madame [X] [F] ne pouvait pas être titulaire d'un contrat de travail,

- dit que Madame [X] [F] était gérante majoritaire de la société S.A.R.L. LORRAINE PNEUS SERVICES NANCY,

- déclaré le conseil de prud'hommes de Nancy matériellement incompétent au profit du tribunal de commerce de Nancy, pour connaitre du litige qui lui est soumis,

*

Statuant à nouveau :

- de juger que Madame [X] [F] n'était pas gérante majoritaire de la société S.A.R.L. LORRAINE PNEUS SERVICES NANCY,

- de juger que Madame [X] [F] était titulaire d'un contrat de travail valide,

*

En tout état de cause :

- de juger le conseil de prud'hommes de Nancy matériellement compétent à connaitre du litige qui oppose Madame [X] [F] à la société S.A.R.L. LORRAINE PNEUS SERVICES NANCY,

- de renvoyer l'affaire devant le conseil de prud'hommes de Nancy, à défaut pour la Cour d'user de son pouvoir d'évocation sur le fond,

- de condamner la société S.A.R.L. LORRAINE PNEUS SERVICES NANCY à verser à Madame [X] [F] la somme de 1 000,00 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,

- de condamner la société S.A.R.L. LORRAINE PNEUS SERVICES NANCY aux dépens de la première instance et d'appel.

La société S.A.R.L. LORRAINE PNEUS SERVICES NANCY demande :

A titre principal, sur l'exception d'incompétence soulevée in limine litis :

- de confirmer le jugement du conseil de prud'hommes de Nancy du 9 septembre 2022 en ce qu'il a :

- dit que Madame [X] [F] ne pouvait pas être titulaire d'un contrat de travail,

- dit que Madame [X] [F] était gérante majoritaire de la société S.A.R.L. LORRAINE PNEUS SERVICES NANCY ;

- déclaré le conseil de prud'hommes de Nancy matériellement incompétent au profit du tribunal de commerce de Nancy, pour connaitre du litige qui lui est soumis,

Par conséquent :

- de juger que, par application des articles 74 et 75 du code de procédure civile, L.1411-1 du code du travail et L.721-3 du code de commerce, seul le tribunal de commerce de Nancy est compétent pour connaître de la demande formée par Madame [X] [F] consistant à obtenir des rappels de salaires et indemnités suite à la rupture d'un prétendu contrat de travail, et ce, à l'exclusion du conseil de prud'hommes de Nancy,

- de confirmer l'incompétence du conseil de prud'hommes de Nancy pour connaître du litige,

*

A défaut, et à titre subsidiaire :

- de renvoyer l'affaire devant le conseil de prud'hommes de Nancy,

*

A titre infiniment subsidiaire, si la Cour décidait d'user de son pouvoir d'évocation :

- de dire et juger à titre principal que la demande est irrecevable car prescrite,

- subsidiairement, dire et juger les demandes de Madame [X] [F] mal-fondées,

- de débouter Madame [X] [F] de l'ensemble de ses demandes,

*

A titre reconventionnel :

- de condamner Madame [X] [F] à verser à la société S.A.R.L LORRAINE PNEUS SERVICES NANCY la somme de 21 769,03 euros correspondant aux rémunérations perçues en qualité de « salariée » pour la période du 1er juillet 2018 au 28 février 2019.

SUR CE, LA COUR

Pour plus ample exposé sur les moyens et prétentions des parties, il sera expressément renvoyé à l'assignation de Madame [X] [F] déposées sur le RPVA le 21 octobre 2022, et aux conclusions de la société S.A.R.L LORRAINE PNEUS SERVICES NANCY déposées sur le RPVA le 21 novembre 2022.

Sur la nullité du contrat de travail :

L'intimée indique que la société S.A.R.L LORRAINE PNEUS SERVICES NANCY avaient pour gérants [R] [F] et [X] [F] et que 100% des parts de la société étaient détenues par la SARL [F] ET ASSOCIE HOLDING, dont les deux gérants, également [R] [F] et [X] [F], possédaient respectivement 59% et 26% des parts.

Elle fait valoir qu'en application de l'article L. 311-3 11° du code de la sécurité sociale, les parts appartenant en toute propriété ou en usufruit au conjoint d'un gérant sont considérées comme possédées par celui-ci ; qu'en conséquence, les deux époux détenant ensemble la majorité des parts sociales de la SARL [F] ET ASSOCIE HOLDING ils devaient être considérés, chacun pour ce qui le concerne, comme étant gérant majoritaire de la S.A.R.L LORRAINE PNEUS SERVICES NANCY.

Dès lors, Madame [X] [F] étant gérante majoritaire, elle ne pouvait être titulaire d'un contrat de travail ; ainsi le contrat de travail signé le 2 juillet 2018 est nul.

A titre subsidiaire, l'intimée indique que le signataire du contrat de travail, Monsieur [O] [G], n'avait pas le pouvoir d'engager la S.A.R.L LORRAINE PNEUS SERVICES NANCY et que donc le contrat est en tout état de cause irrégulier.

Encore à titre subsidiaire, l'intimée fait valoir que le contrat de travail est en tout état de cause nul, Madame [X] [F] n'ayant pas de fonctions techniques distinctes de son mandat social, n'étant pas dans un état de subordination vis-à-vis de la société et le contrat ayant été conclu dans un but de fraude à la loi.

Madame [X] [F] fait valoir que l'intimée ne justifie pas qu'elle ait occupé les fonctions de mandataire social, ni qu'elle les exerçait effectivement et ne justifie pas non plus qu'elle avait la qualité d'associée majoritaire.

Elle fait également valoir qu'à supposer la nullité du contrat de travail, elle reste créancière à l'égard de la Société SARL LORRAINE PNEUS SERVICES d'une indemnisation en raison de l'activité qu'elle a exercée au profit de l'Entreprise et au titre des conditions dans lesquelles il a été mis fin à sa Collaboration.

Madame [X] [F] fait enfin valoir que la nullité du contrat de travail telle qu'invoquée par l'intimée, présente un caractère relatif, au sens de l'article 1179 alinéa 2 du code civil ; qu'en application de l'article 1182 dudit code, l'acte qui serait, le cas échéant, frappé de nullité, peut être confirmé, notamment par son exécution volontaire ; qu'en l'espèce, l'existence d'un contrat de travail écrit, l'édition de bulletins de salaire, le versement de salaires, son licenciement démontrent une telle exécution volontaire.

Motivation :

Il résulte des statuts de la SARL LORRAINE PNEUS SERVICES que ses deux gérants étaient, au moment de la conclusion du contrat de travail litigieux, Madame [X] [F] et son époux ce, depuis le 10 octobre 2016 (pièce n° 2 de l'intimée).

Il résulte de ces mêmes statuts que l'unique actionnaire en était la société SARL [F] ET ASSOCIES HOLDING.

La circonstance que Madame [X] [F] ait été, avec son époux, actionnaire de cette dernière société ne lui confère pas la qualité d'actionnaire de la SARL LORRAINE PNEUS SERVICES, société distincte de la première.

En tant que gérante non associée de la SARL LORRAINE PNEUS SERVICES, Madame [X] [F] a pu être liée à cette société par un contrat de travail, dès lors qu'il est établi qu'elle y a exercé des fonctions techniques différentes de son mandat, dans un lien de subordination.

L'exercice de fonctions techniques distinctes conditionne le cumul du mandat social avec le contrat de travail. Ces fonctions supposent des attributions mettant en 'uvre des connaissances particulières et une séparation entre celles-ci et les missions menées au titre du mandat.

En l'espèce, il résulte du contrat de travail signé le 2 juillet 2018, que Madame [X] [F] y a exercé les fonctions de directrice administrative (pièce n° 1 de l'appelante) et de la liste du personnel qu'elle était la seule cadre de la société, qui ne comportait que 15 salariés (pièces n° 12 et 13 de l'intimée).

Dès lors, la cour constate que les fonctions de gérante de la société SARL LORRAINE PNEUS SERVICES NANCY de Madame [X] [F] n'étaient distinctes de celles de « directrice administrative », étant observé que dans ses écritures, l'appelante ne prétend pas avoir exercé d'autre mission que celle de dirigeante de la société. En conséquence, le contrat de travail du 2 juillet 2018 est nul.

Sur la compétence matérielle du conseil de prud'hommes :

Vu les dispositions de l'article L. 1411-1 du code du travail, en l'absence de contrat de travail établi entre la SARL LORRAINE PNEUS SERVICES NANCY et Madame [X] [F], la juridiction prud'homale n'est pas compétente pour juger du litige opposant les parties.

Le jugement du conseil de prud'hommes sera confirmé sur ce point.

Sur l'article 700 du code de procédure civile et sur les dépens :

Madame [X] [F] devra verser la somme de 2000 euros à la S.A.R.L. LORRAINE PNEUS SERVICES NANCY au titre des frais irrépétibles et sera déboutée de sa propre demande.

Madame [X] [F] sera condamnée aux dépens.

PAR CES MOTIFS

La Cour, chambre sociale, statuant contradictoirement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, après débats en audience publique et après en avoir délibéré,

CONFIRME le jugement du conseil de prud'hommes de Nancy du 09 septembre 2022 en ses dispositions soumises à la cour ;

Y AJOUTANT

Condamne Madame [X] [F] à verser à la société S.A.R.L. LORRAINE PNEUS SERVICES NANCY la somme de 2000 euros (deux mille euros) au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Déboute Madame [X] [F] de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne Madame [X] [F] aux dépens.

Ainsi prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Et signé par Monsieur Raphaël WEISSMANN, Président de Chambre, et par Madame Laurène RIVORY, Greffier.

LE GREFFIER LE PRESIDENT DE CHAMBRE

Minute en sept pages


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Nancy
Formation : Chambre sociale-2ème sect
Numéro d'arrêt : 22/02164
Date de la décision : 23/02/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-02-23;22.02164 ?
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