RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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COUR D'APPEL DE NANCY
CINQUIEME CHAMBRE COMMERCIALE
ARRÊT N° /23 DU 22 FEVRIER 2023
RENVOI APRES CASSATION
Numéro d'inscription au répertoire général :
N° RG 21/03004 - N° Portalis DBVR-V-B7F-E4Q7
Décision déférée à la Cour :
Déclaration de saisine de Me Clarisse MOUTON avocat au barreau de Nancy agissant pour le compte de L'EURL [4] suite à l'arrêt de la chambre commerciale de la Cour de Cassation prononcé le 29 septembre 2021 qui a cassé et annulé en toutes ses dispositions l'arrêt rendu le 21 novembre 2019 par la Cour d'appel de Metz et désigné la Cour d'appel de Nancy comme cour de renvoi ;
DEMANDEUR A LA REPRISE D'INSTANCE
E.U.R.L. [4], prise en la personne de son représentant légal pour ce domicilié au siège social [Adresse 2]
Représentée par Me Clarisse MOUTON de la SELARL LEINSTER WISNIEWSKI MOUTON LAGARRIGUE, avocat au barreau de NANCY
DEFENDEURS A LA REPRISE D' INSTANCE
UNION POUR LE RECOUVREMENT DES COTISATIONS DE SECURITE SOCIALE ET D'ALLOCATIONS FAMILIALES DE LORRAINE (URSSAF DE LORRAINE) ayant son siège
[Adresse 3]
Représentée par Me Nathalie DEVARENNE ODAERT de la SELAS DEVARENNE ASSOCIES GRAND EST, avocat au barreau de NANCY
S.C.P. NOEL & LANZETTA, mandataire judiciaire, demeurant [Adresse 1]
ès qualité de mandataire judiciaire de la société [4] et de commissaire à l'exécution du plan,
prise en la personne de son représentant légal pour ce domicilié audit siège, demeurant
Représentée par Me Clarisse MOUTON de la SELARL LEINSTER WISNIEWSKI MOUTON LAGARRIGUE, avocat au barreau de NANCY
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 786 et 907 du Code de Procédure Civile, l'affaire a été débattue le 11 Janvier 2023, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur Patrice BOURQUIN, Président de Chambre chargé du rapport et Monsieur Olivier BEAUDIER, conseiller ;
Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Monsieur Patrice BOURQUIN Président de Chambre,
Monsieur Olivier BEAUDIER, Conseiller,
Monsieur Jean-Louis FIRON Conseiller
Greffier, lors des débats : Monsieur Ali ADJAL.
A l'issue des débats, le Président a annoncé que la décision serait rendue par mise à disposition au greffe le 22 Février 2023, en application du deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;
ARRÊT : contradictoire, rendu par mise à disposition publique au greffe le 22 Février 2023, par Monsieur Ali ADJAL, Greffier, conformément à l'article 450 alinéa 2 du Code de Procédure Civile ;
signé par Monsieur Patrice BOURQUIN, Président de chambre, et par Monsieur Ali ADJAL, Greffier ;
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Copie exécutoire délivrée le à
Copie délivrée le à
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RAPPEL DES FAITS ET DE LA PROCEDURE
La société [4] a pour activité la vente de produits asiatiques sur place et à emporter.
Par jugement du 12 novembre 2014, le tribunal de grande instance de Metz a constaté l'état de cessation des paiements de la société [4] au 12 mai 2013 et a prononcé l'ouverture d'une procédure de liquidation judiciaire à son égard.
Par arrêt du 12 janvier 2016, la cour d'appel de Metz a confirmé le jugement en ce qu'il a constaté l'état de cessation des paiements de la société [4]à la date du 12 mai 2013 mais l'a infirmé pour le surplus en ouvrant une procédure de redressement judiciaire.
Par jugement du 11 janvier 2017, le tribunal de grande instance de Metz a arrêté le plan de redressement concernant la société [4] et a désigné la société Noël [M] Lanzetta ès qualités de commissaire à l'exécution du plan.
Le 16 mai 2017, le mandataire judiciaire a transmis au juge-commissaire la liste des créances déclarées avec ses propositions d'admission, de rejet ou de renvoi devant la juridiction compétente.
La débitrice a proposé le rejet de la créance déclarée par l'URSSAF de Lorraine, pour un montant de 8276,63 euros à titre privilégié et de 31212,51 euros à titre chirographaire.
Par ordonnance du 29 janvier 2018, considérant que la débitrice ne présentait aucune argumentation au soutien de sa contestation, le juge-commissaire a déclaré admise la créance déclarée par l'URSSAF de Lorraine pour un montant de 8276,63 euros à titre privilégié et de 31 212,51 euros à titre chirographaire.
La société [4] a interjeté appel de cette décision par déclaration déposée au greffe le 12 février 2018.
Selon arrêt avant-dire droit du 4 juillet 2019, la cour d'appel de Metz a ordonné la réouverture des débats, a enjoint à l'URSSAF de Lorraine de produire un décompte actualisé de sa créance tenant compte des derniers éléments comptables transmis par la société [4] et des règlements effectués, a enjoint à la société [4] de transmettre à l'URSSAF de Lorraine ses derniers documents comptables et de produire les justificatifs des règlements effectués.
Puis par arrêt du 21 novembre 2019, la cour d'appel de Metz a :
- déclaré irrecevables les conclusions de la société Noël [M] Lanzetta prise en la personne de M. [M] ès qualités ;
- confirmé l'ordonnance entreprise en toutes ses dispositions ;
Y ajoutant,
- condamné la société [4] représentée par son représentant légal aux dépens de première instance et d'appel ;
- condamné la société [4] représentée par son représentant légal à payer à l'URSSAF de Lorraine la somme de 1500 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile ;
- dit que les dépens de première instance et d'appel et l'indemnité au titre de l'article 700 du CPC seront employée en frais privilégiés de la procédure de redressement judiciaire de la société [4].
La société [4] a formé un pourvoi en cassation à l'encontre de cette décision.
Par arrêt du 29 septembre 2021, la cour de cassation a :
- cassé et annulé, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 21 novembre 2019, entre les parties, par la cour d'appel de Metz ;
- remis l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les a renvoyé devant la cour d'appel de Nancy ;
- condamné l'URSSAF de Lorraine aux dépens ;
La Cour de cassation a retenu que la cour d'appel en statuant, sans constater qu'une contrainte avait été décernée et signifiée ou notifiée à la société redevable, dans le délai imparti au mandataire judiciaire pour la vérification du passif, la contrainte pouvant seule constituer la titre exécutoire permettant l'admission définitive de la créance de cotisations sociales, a violé les articles L. 622-24 du code de commerce et L. 244-9 du code de la sécurité sociale.
La société [4] a saisi la cour de renvoi le 23 décembre 2021 en sollicitant l'infirmation en toutes ses dispositions de l'ordonnance rendue par le juge commissaire de la chambre commerciale du tribunal de grande instance de Metz le 29 janvier 2018 et statuant à nouveau de :
- rejeter l'intégralité de la créance déclarée par l'URSSAF tant à titre privilégié qu'à titre chirographaire ;
- à titre infiniment subsidiaire, surseoir à statuer en renvoyer l'URSSAF à saisir le juge compétent ;
- condamner l'URSSAF à lui payer la somme de 5.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais exposés en première instance et en appel, en ce compris les frais exposés au titre de la procédure ayant donné lieu à l'arrêt cassé ;
Aux termes de ses dernières conclusions transmises le 27 septembre 2022, l'URSSAF demande à la cour de confirmer l'ordonnance du juge commissaire du 29 janvier 2018 en toutes ses dispositions et de condamner la société [4] au paiement de la somme de 1.500 euros au titre de l'article 700 du CPC ;
Aux termes de ses dernières conclusions transmises le 21 avril 2022, la société Noël et Lanzetta sollicite l'infirmation en toutes ses dispositions l'ordonnance rendue par le juge commissaire de la chambre commerciale du tribunal de grande instance de Metz le 29 janvier 2018 et de :
- constater que l'URSSAF ne justifie pas avoir émis des contraintes régulières au regard des dispositions des articles L244-2 et R133-3 du code de la sécurité sociale ;
- rejeter l'intégralité de la créance déclarée par l'URSSAF tant à titre privilégié qu'à titre chirographaire ;
- condamner l'URSSAF à lui payer la somme de 2.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
En application de l' article 455 du code de procédure civile, la Cour se réfère, pour plus ample exposé des faits, moyens et prétentions des parties, à leurs conclusions précédemment visées.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 7 décembre 2022.
MOTIFS ET MOYENS
Aux termes de l'article L 622-24 du code de commerce, la déclaration des créances doit être faite alors même qu'elles ne sont pas établies par un titre. Celles dont le montant n'est pas encore définitivement fixé sont déclarées sur la base d'une évaluation. Les créances du Trésor public et des organismes de prévoyance et de sécurité sociale ainsi que les créances recouvrées par les organismes visés à l'article L. 351-21 du code du travail qui n'ont pas fait l'objet d'un titre exécutoire au moment de leur déclaration sont admises à titre provisionnel pour leur montant déclaré. En tout état de cause, les déclarations du Trésor et de la sécurité sociale sont toujours faites sous réserve des impôts et autres créances non établis à la date de la déclaration. Sous réserve des procédures judiciaires ou administratives en cours, leur établissement définitif doit, à peine de forclusion, être effectué dans le délai prévu à l'article L. 624-1.
L'URSSAF produit désormais les titres exécutoires sur lesquels elle se fonde et qui ont tous été délivrés avant l'ouverture de la procédure collective.
Dès lors qu'aucune disposition n'impose au créancier de produire le titre exécutoire au plus tard au moment où le juge commissaire statue, l'URSSAF remplit donc les conditions prévues par les dispositions précitées pour que sa créance soit admise.
La société [4]fait valoir que d'une part les actes de notification des contraintes ne sont pas réguliers et que, d'autre part, lesdites contraintes ont été délivrées à la suite d'une procédure irrégulière dès lors qu'il n'est pas établi que la signature des accusés de réception des courriers recommandés de notification des mises en demeure est bien celle de son représentant.
Toutefois les créances sociales ne peuvent être contestées, en cas d'ouverture d'une procédure de redressement judiciaire, que dans les conditions prévues par le code de la sécurité sociale.
Or , la société [4] ne justifie pas avoir formé opposition à ces contraintes devant le tribunal judiciaire.
Elle ne peut donc dans la présente instance ni contester la validité de la signification, qui lui appartenait éventuellement de faire valoir devant cette juridiction pour voir son opposition jugée recevable, ni la régularité de la procédure préalable.
La société [4] fait enfin valoir que le bordereau de déclaration de créance au mandataire n'a manifestement pas été établi sur la base des contraintes produites au motif que la contrainte relative au 1er trimestre 2015 mentionne des cotisations à hauteur de 370,50€, alors que le tableau de déclaration de créance vise une somme de 191€ et que la contrainte du 1er trimestre 2013 a été délivrée pour 2779€ en principal, 150€ de majoration et 17€ de pénalités alors que la déclaration mentionne une somme de 2698€.
L'URSSAF indique qu'ont été pris en compte les acomptes versés et le montant déclaré est effectivement dans les deux cas inférieur à celui résultant de la contrainte, de sorte que les observations de la société [4] ne remettent pas en cause le montant des déclarations.
L'ordonnance entreprise sera donc confirmée.
La somme de 1500€ sera allouée à l'URSSAF au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS :
LA COUR, statuant par arrêt contradictoire prononcé publiquement par mise à disposition au greffe, conformément aux dispositions de l'article 450 alinéa 2 du Code de procédure civile,
CONFIRME l'ordonnance du juge-commissaire du 29 janvier 2018 en toutes ses dispositions ;
CONDAMNE la société [4] à payer à l'URSSAF de Lorraine la somme de 1500 € (mille cinq cents euros) au titre de l'article 700 du code de procédure civile;
CONDAMNE la société [4] aux dépens.
Le présent arrêt a été signé par Monsieur Patrice BOURQUIN Président de Chambre, à la Cour d'Appel de NANCY, et par Monsieur Ali ADJAL, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,
Minute en six pages.