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15/12/2022 | FRANCE | N°22/00257

France | France, Cour d'appel de Nancy, 2ème chambre, 15 décembre 2022, 22/00257


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

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COUR D'APPEL DE NANCY

DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE



ARRÊT N° /22 DU 15 DECEMBRE 2022





Numéro d'inscription au répertoire général :

N° RG 22/00257 - N° Portalis DBVR-V-B7G-E5LD



Décision déférée à la Cour :

Jugement du tribunal judiciaire de NANCY, R.G. n° 16/00823, en date du 15 décembre 2021,



APPELANTE :

S.A. BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE,

S.A. au capital de 546 601 552,00

€, immatriculée au RCS de PARIS sous le n° 542 097 902, dont le siège social est [Adresse 1], agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés ...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

------------------------------------

COUR D'APPEL DE NANCY

DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE

ARRÊT N° /22 DU 15 DECEMBRE 2022

Numéro d'inscription au répertoire général :

N° RG 22/00257 - N° Portalis DBVR-V-B7G-E5LD

Décision déférée à la Cour :

Jugement du tribunal judiciaire de NANCY, R.G. n° 16/00823, en date du 15 décembre 2021,

APPELANTE :

S.A. BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE,

S.A. au capital de 546 601 552,00 €, immatriculée au RCS de PARIS sous le n° 542 097 902, dont le siège social est [Adresse 1], agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

Représentée par Me Christian OLSZOWIAK de la SCP ORIENS AVOCATS, avocat au barreau de NANCY

INTIMÉE :

Madame [K] [Z]

née le 07 Juillet 1960 à [Localité 4], de nationalité française, domiciliée [Adresse 3]

Représentée par Me Patrice CARNEL de la SCP GASSE CARNEL GASSE TAESCH, avocat au barreau de NANCY

EN PRESENCE DE :

M.J.A. - MANDATAIRES JUDICIAIRES ASSOCIES

dont le siège social est Maître [G] [H], [Adresse 2] prise en la personne de son représentant légal ès qualité de 'mandataire liquidateur' de la société ACTIV'ECO devenue VIVONS ENERGY

Non représentée bien que la déclaration d'appel et les conclusions de l'appelante lui aient été régulièrement signifiées à personne morale par acte de Maître [J] [F], huissier de justice à [Localité 5] en date du 16 mai 2022

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 10 Novembre 2022, en audience publique devant la Cour composée de :

Monsieur Francis MARTIN, président de chambre,

Madame Nathalie ABEL, conseillère,

Madame Fabienne GIRARDOT, conseillère, chargée du rapport

qui en ont délibéré ;

Greffier, lors des débats : Mme Christelle CLABAUX- DUWIQUET ;

A l'issue des débats, le président a annoncé que la décision serait rendue par mise à disposition au greffe le 15 Décembre 2022, en application du deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;

ARRÊT : réputé contradictoire, rendu par mise à disposition publique au greffe le 15 décembre 2022, par Mme Christelle CLABAUX- DUWIQUET, greffier, conformément à l'article 450 alinéa 2 du Code de Procédure Civile ;

signé par Monsieur Francis MARTIN, président de chambre et par Mme Christelle CLABAUX- DUWIQUET, greffier ;

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Copie exécutoire délivrée le à

Copie délivrée le à

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EXPOSE DU LITIGE

Le 8 janvier 2015, Mme [K] [Z] a signé un document intitulé ' fiche d'intervention récapitulative ', dans le cadre d'un démarchage à domicile, aux termes duquel la société Activ Eco, devenue Vivons Energy, a préconisé la fourniture et l'installation d'une chaudière à condensation et d'un ballon thermodynamique pour un prix de 17 500 euros TTC, financé au moyen d'un contrat de prêt consenti par la SA Sygma Banque suivant offre préalable signée le même jour, prévoyant un remboursement sur une durée de 84 mois à compter du 20 novembre 2015, après un différé d'amortissement de 9 mois.

Par courrier du 16 janvier 2015, la SA Sygma Banque a informé Mme [K] [Z] de l'acceptation du crédit affecté, en indiquant que le financement n'interviendrait au profit du vendeur qu'après la livraison effective du bien ou de la prestation de service.

Le 23 janvier 2015, Mme [K] [Z] a signé un certificat de livraison de bien ou de fourniture de services portant sur une chaudière à condensation et un ballon thermodynamique, certifiant que la livraison avait été réalisée conformément à la commande et demandant au prêteur de procéder à la mise à disposition des fonds au profit du vendeur.

Par courrier du 28 janvier 2015, la SA Sygma Banque a transmis à Mme [K] [Z] le tableau d'amortissement de la somme empruntée.

Par courrier du 19 août 2015 adressé à la SA Sygma Banque, Mme [K] [Z] s'est opposée au paiement des échéances de prêt à compter du 20 novembre 2015 à défaut de versement des subventions et compte tenu des vices de forme affectant l'installation présentant des problèmes techniques.

Par courrier du 28 août 2015 adressé au vendeur, réitéré le 24 septembre 2015, Mme [K] [Z] a indiqué qu'elle n'avait pas les documents ni la facture lui permettant de bénéficier des subventions et crédit d'impôts, et a fait état d'un défaut de conformité de la chaudière installée, sollicitant la résiliation de la commande et la reprise du matériel.

-o0o-

Par actes d'huissier des 18 et 23 février 2016, Mme [K] [Z] a fait assigner la société Activ Eco, devenue Vivons Energy, ainsi que la SA Sygma Banque, aux droits de laquelle vient la SA BNP Paribas Personal Finance (PF), devant le tribunal de grande instance de Nancy afin de voir prononcer l'annulation du contrat de vente et du contrat de prêt affecté, et de voir condamner le vendeur à procéder à la dépose et l'enlèvement de la chaudière, ainsi que de voir condamner la SA BNP Paribas PF à lui restituer l'intégralité des sommes versées et à lui payer des dommages et intérêts, et d'être dispensée du paiement du capital restant dû. A titre subsidiaire, elle a sollicité la condamnation de société Activ Eco, devenue Vivons Energy, au paiement de dommages et intérêts ainsi qu'à lui payer le prix du prêt accordé, intérêts conventionnels compris.

Mme [K] [Z] s'est prévalu de l'irrégularité du bon de commande concernant la quantité des produits et leur coût unitaire, ainsi que l'indication du coût de la TVA, de même que la date et les modalités de livraison, ajoutant que le bon de commande ne comprenait aucun bordereau de rétractation.

La société Activ Eco, devenue Vivons Energy, a conclu au débouté des demandes de Mme [K] [Z]. Elle a conclu à la régularité du bon de commande et au respect de son obligation de délivrance, faisant état de l'absence de grief de Mme [K] [Z] au titre de l'irrégularité alléguée.

La SA BNP Paribas PF a conclu au débouté et subsidiairement à la condamnation de Mme [K] [Z] à lui rembourser le capital emprunté, déduction faite des paiements effectués, en l'absence de faute dans le déblocage des fonds empruntés.

Par jugement en date du 13 décembre 2017, le tribunal de commerce de Paris a ouvert une procédure de liquidation judiciaire au bénéfice de la société Activ Eco, devenue Vivons Energy, et a désigné la SALAFA MJA, prise en la personne de Me [G] [H], en qualité de mandataire liquidateur.

Par acte d'huissier en date du 28 février 2020, Mme [K] [Z] a attrait en la cause la SALAFA MJA, es qualités.

La SELAFA MJA, es qualités, n'a pas constitué avocat.

Par jugement en date du 15 décembre 2021, le tribunal judiciaire de Nancy a :

Sur les demandes en paiement,

- constaté l'interruption de l'instance relative à la demande tendant à ce que la société Activ Eco, devenue Vivons Energy, procède à la dépose et à l'enlèvement de la chaudière et la pose à ses frais des anciens éléments d'équipements,

- constaté l'interruption de l'instance relative à la demande de dommages et intérêts au titre du non-respect de ses obligations contractuelles et au titre du préjudice matériel et moral dirigée contre la société Activ Eco, devenue Vivons Energy,

- constaté l'interruption de l'instance relative à la demande de condamnation de la société Activ Eco, devenue Vivons Energy, au paiement du prix du prêt octroyé, intérêts conventionnels compris,

- ordonné la radiation de l'affaire du rôle jusqu'à reprise de l'instance par Mme [K] [Z], s'agissant de ces demandes en paiement,

Sur les autres demandes,

- prononcé la nullité du contrat de vente conclu le 8 janvier 2015 entre Mme [K] [Z] et la société Activ Eco, devenue Vivons Energy,

- constaté en conséquence la nullité du contrat de crédit affecté conclu le 8 janvier 2015 entre Mme [K] [Z] et la SA BNP Paribas PF, venant aux droits de la société Sygma Banque, pour un montant de 17 500 euros,

- dit que la SA BNP Paribas PF, venant aux droits de la société Sygma Banque, a commis une faute de nature à la priver de son droit à restitution du capital prêté,

- débouté en conséquence la SA BNP Paribas PF, venant aux droits de la société Sygma Banque, de sa demande de remboursement du capital restant dû,

- condamné la SA BNP Paribas PF, venant aux droits de la société Sygma Banque, à restituer à Mme [K] [Z] l'intégralité des sommes versées en exécution du crédit affecté, avec intérêts au taux légal à compter de la présente décision,

- débouté Mme [K] [Z] de sa demande en paiement de la somme de 5 000 euros à titre de dommages et intérêts,

- condamné la société Activ Eco, devenue Vivons Energy, représentée par son liquidateur, la SELAS MJA, et la SA BNP Paribas PF, venant aux droits de la société Sygma Banque, aux dépens,

- condamné la société Activ Eco, devenue Vivons Energy, représentée par son liquidateur, la SELAS MJA, à payer à Mme [K] [Z] une indemnité de 2 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Le tribunal a constaté que Mme [K] [Z] ne justifiait pas d'une déclaration de créance à l'égard de la procédure collective de la société Activ Eco, devenue Vivons Energy, de sorte que les demandes formées à son encontre portant sur l'allocation de dommages et intérêts, sur le remboursement du prêt ainsi que sur la dépose du matériel, étaient interrompues en vertu de l'article L. 622-21 du code de commerce prévoyant l'arrêt des poursuites.

Il a retenu l'irrégularité du bon de commande quant à la désignation précise de la nature et des caractéristiques des marchandises (marque, fabricant, références techniques et prix unitaire) et a relevé l'absence de bordereau de rétractation au contrat de vente. Il a jugé qu'aucun élément ne permettait de soutenir que Mme [K] [Z] avait eu connaissance de la cause de nullité de l'acte de vente et avait la volonté tacite de confirmer l'acte nul.

Il a retenu une faute de la SA BNP Paribas PF dans le déblocage des fonds la privant de son droit à restitution du capital restant dû, sans pour autant que Mme [K] [Z] ne démontre l'existence d'un préjudice distinct afin de solliciter l'allocation de dommages et intérêts.

-o0o-

Le 2 février 2022, la SA BNP Paribas PF a formé appel du jugement tendant à son infirmation en tous ses chefs critiqués.

Dans ses dernières conclusions transmises le 29 avril 2022, auxquelles il convient de se reporter pour l'exposé détaillé de ses prétentions et moyens, la SA BNP Paribas PF, appelante, demande à la cour sur le fondement des dispositions des articles L. 111-1 et suivants du code de la consommation, L. 312-1 et suivants du code de la consommation, L. 312-56 du code de la consommation et des articles 1241 et 1338 alinéa 2 du code civil :

A titre principal,

- de dire et juger que Mme [K] [Z] est irrecevable en ses demandes en l'absence de mise en cause valable et régulière du vendeur,

- de dire et juger que les conditions de nullité des contrats de vente et de crédit ne sont pas réunies,

- de dire et juger que Mme [K] [Z] ne peut plus invoquer la nullité du contrat de vente, et donc du contrat de prêt du fait de l'exécution volontaire des contrats, de sorte que l'action est irrecevable en application de l'article 1338 alinéa 2 du code civil,

- de dire et juger qu'elle n'a commis aucune faute,

En conséquence,

- d'infirmer en toutes ses dispositions le jugement rendu le 15 décembre 2021 par le tribunal judiciaire de Nancy sauf en ce que Mme [K] [Z] a été déboutée de sa demande de dommages et intérêts,

Statuant à nouveau,

- de rejeter les demandes, fins et conclusions de Mme [K] [Z],

- de dire et juger que Mme [K] [Z] sera tenue d'exécuter les contrats jusqu'au terme et condamnée à lui régler, en sus des échéances en cours, les échéances impayées au jour de l'arrêt à intervenir,

À titre subsidiaire et dans l'hypothèse où la nullité des contrats serait confirmée,

- d'infirmer en toutes ses dispositions le jugement rendu le 15 décembre 2021 par le tribunal judiciaire de Nancy sauf en ce que Mme [K] [Z] a été déboutée de sa demande de dommages et intérêts,

Statuant à nouveau,

- de rejeter les demandes, fins et conclusions de Mme [K] [Z],

- de condamner Mme [K] [Z] à lui régler la somme de 17 500 euros, déduction faite des échéances réglées au jour de l'arrêt à intervenir,

À titre infiniment subsidiaire et dans l'hypothèse où la nullité des contrats serait confirmée et une faute des établissements de crédit retenue,

- d'infirmer en toutes ses dispositions le jugement rendu le 15 décembre 2021 par le tribunal judiciaire de Nancy sauf en ce que Mme [K] [Z] a été déboutée de sa demande de dommages et intérêts,

Statuant à nouveau,

- de rejeter les demandes, fins et conclusions de Mme [K] [Z],

- de fixer au passif de la liquidation judiciaire de la société Vivons Energy la somme de 17 500 euros à son profit,

En tout état de cause,

- de condamner Mme [K] [Z] à lui payer une somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- de condamner Mme [K] [Z] aux entiers dépens.

Au soutien de ses demandes, la SA BNP Paribas PF fait valoir en substance :

- que l'absence de déclaration de créance par Mme [K] [Z] entraîne nécessairement l'irrecevabilité de la demande formée à l'encontre du mandataire liquidateur du vendeur pour le contrat principal, et dès lors, de la demande à l'encontre de la SA BNP Paribas PF pour le contrat de crédit ; que le tribunal ne pouvait statuer sur la demande de nullité des contrats ;

- que le bon de commande est parfaitement valable et régulier, et précise la marque et la contenance du chauffe-eau ainsi que sa puissance ;

- que Mme [K] [Z] a signé le bon de commande et pris connaissance des conditions générales de vente figurant au dos du bon de commande, qui reproduisent les dispositions du code de la consommation rappelant les mentions obligatoires devant y figurer à peine de nullité ; qu'elle n'a pas fait usage de son droit de rétractation et a au contraire signé une attestation de fin de travaux sans réserves ni griefs, ordonné le déblocage des fonds et remboursé régulièrement les mensualités, de sorte qu'elle a exécuté volontairement les contrats principaux ;

- que subsidiairement, il n'appartient pas au prêteur de s'assurer de la conformité du bon de commande au code de la consommation ; qu'elle ne peut donc voir sa responsabilité engagée pour des fautes qu'elle n'aurait pas commises, mais qui l'auraient été par le vendeur dans l'exécution du contrat principal ; que Mme [K] [Z] a signé une attestation de fin de travaux et ordonné le déblocage des fonds, de sorte qu'elle a agi sur la base de ce seul document ; que la banque n'a pas à se livrer à d'autres vérifications et qu'aucune faute ne peut lui être reprochée du fait que le raccordement ou que certaines démarches administratives n'auraient pas été effectuées, lesquelles dépendent de tiers, voire des diligences de l'emprunteur lui-même ;

- que la faute alléguée ne peut donner lieu à sanction que si un lien de causalité est établi et que s'il en résulte un préjudice pour les emprunteurs ; que Mme [K] [Z] ne justifie d'aucun préjudice puisque le matériel a été livré, installé et est fonctionnel ; que la perte d'une chance ne peut donc jamais donner lieu à la réparation intégrale du préjudice.

Dans ses conclusions transmises le 8 juillet 2022, auxquelles il convient de se reporter pour l'exposé détaillé de ses prétentions et moyens, Mme [K] [Z], intimée, demande à la cour :

- de confirmer le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Nancy le 15 décembre 2021 en ce qu'il a :

* prononcé la nullité du contrat de vente conclu le 8 janvier 2015 entre Mme [K] [Z] et la société Activ Eco devenue Vivons Energy,

* déclaré recevable son action à l'encontre de la SA BNP Paribas PF,

* constaté la nullité du crédit affecté du 8 janvier 2015 entre Mme [K] [Z] et la SA BNP Paribas PF venant aux droits de Sygma Banque,

* dit que la SA BNP Paribas PF venant aux droits de Sygma Banque a commis une faute de nature à la priver de son droit à restitution du capital prêté,

* débouté la SA BNP Paribas PF de sa demande de remboursement du capital restant dû,

* condamné la SA BNP Paribas PF venant aux droits de la société Sygma Banque à lui restituer l'intégralité des sommes versées en exécution du crédit affecté, avec intérêts au taux légal à compter dudit jugement,

En conséquence,

- de débouter la SA BNP Paribas PF de sa demande d'exécution du contrat de prêt jusqu'à terme, de sa demande en paiement des échéances en cours, des échéances impayées,

- de débouter la SA BNP Paribas PF de sa demande tendant à la voir condamnée à lui payer la somme de 17 500 euros,

- de débouter la SA BNP Paribas PF de sa demande fondée sur les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- de condamner la SA BNP Paribas PF au paiement de la somme de 3 000 euros par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- de condamner la SA BNP Paribas PF aux entiers dépens.

Au soutien de ses demandes, Mme [K] [Z] fait valoir en substance :

- que ses demandes sont recevables en ce qu'elle demande simplement que le contrat soit déclaré nul, ayant à cette fin régulièrement mis en cause le liquidateur ;

- que les caractéristiques des produits figurant au bon de commande sont totalement indéterminées (marque et fabricant, référence technique, prix unitaire de chacun des produits) ; que le bon de commande ne comporte aucun bordereau de rétractation ; qu'elle s'est manifestée dans des délais très rapides pour suspendre le prélèvement des échéances ;

- que la SA BNP Paribas PF n'a pas vérifié la régularité formelle du contrat de vente ; que si elle avait satisfait à ses obligations, elle n'aurait pas consenti le crédit querellé qui l'a conduite à s'endetter, caractérisant l'existence d'un préjudice ; que la perte de chance doit être évaluée à 100%.

-o0o-

Régulièrement assignée par acte d'huissier délivré le 16 mai 2022 à personne se déclarant habilitée à le recevoir, la SELAFA MJA, es qualités, n'est pas représentée.

La clôture de l'instruction a été prononcée le 7 septembre 2022.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur la recevabilité des demandes de Mme [K] [Z] présentées à l'encontre de la société Activ Eco, devenue Vivons Energy

Selon l'article L. 622-21 I du code de commerce, le jugement d'ouverture d'une procédure collective interrompt ou interdit toute action en justice de la part de tous les créanciers dont la créance n'est pas mentionnée au I de l'article L. 622-17 (créances nées régulièrement après le jugement d'ouverture pour les besoins du déroulement de la procédure ou de la période d'observation, ou en contrepartie d'une prestation fournie au débiteur pendant cette période) et tendant :

1° à la condamnation du débiteur au paiement d'une somme d'argent,

2° à la résolution d'un contrat pour défaut de paiement d'une somme d'argent.

En effet, les créances qui tendent au paiement d'une somme d'argent doivent faire l'objet d'une déclaration permettant d'échapper à l'arrêt des poursuites, conformément aux dispositions de l'article L. 622-24 du code de commerce.

En l'espèce, Mme [K] [Z] se prévaut de l'irrégularité du bon de commande pour solliciter la résolution du contrat de vente, et ne sollicite plus à hauteur de cour la condamnation du vendeur en liquidation judiciaire à des dommages et intérêts, ni le remboursement du prix perçu, ni la dépose et l'enlèvement de la chaudière et du ballon d'eau chaude.

Aussi, l'action en résolution du contrat de vente n'est pas concernée par l'arrêt des poursuites.

Par ailleurs, la demande de la SA BNP Paribas PF tendant à voir déclarer Mme [K] [Z] irrecevable en ses demandes relatives à la condamnation du vendeur en liquidation judiciaire à des dommages et intérêts, au remboursement du prix perçu, et à la dépose et l'enlèvement de la chaudière et du ballon d'eau chaude, en l'absence de mise en cause valable et régulière du vendeur, est devenue sans objet.

Dès lors, le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il a déclaré recevable l'action de Mme [K] [Z] tendant à voir prononcer l'annulation du contrat de vente et du contrat de crédit affecté.

Sur la régularité du bon de commande

Mme [K] [Z] soutient que les caractéristiques des matériaux figurant au bon de commande sont totalement indéterminées (marque et fabricant, référence technique, prix unitaire de chacun des produits), et ajoute que le bon de commande ne comporte aucun bordereau de rétractation

L'article L121-18 du code de la consommation, dans sa version en vigueur avant l'ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016 applicable au bon de commande signé le 8 janvier 2015, dispose que ' dans le cas d'un contrat conclu hors établissement, le professionnel fournit au consommateur, sur papier ou, sous réserve de l'accord du consommateur, sur un autre support durable, les informations prévues au I de l'article L. 121-17. Ces informations sont rédigées de manière lisible et compréhensible.'

En outre, l'article L121-18-1 du code de la consommation précise que ' ce contrat comprend, à peine de nullité, toutes les informations mentionnées au I de l'article L. 121-17.'

Or, l'article L121-17 I du code de la consommation dispose que (...) 'le professionnel communique au consommateur, de manière lisible et compréhensible, les informations suivantes :

1° Les informations prévues aux articles L. 111-1 et L. 111-2 ;

2° Lorsque le droit de rétractation existe, les conditions, le délai et les modalités d'exercice de ce droit ainsi que le formulaire type de rétractation, dont les conditions de présentation et les mentions qu'il contient sont fixées par décret en Conseil d'Etat (...) '.

Selon l'article L111-1 du code de la consommation, 'le professionnel communique au consommateur, de manière lisible et compréhensible, les informations suivantes :

1° Les caractéristiques essentielles du bien ou du service, compte tenu du support de communication utilisé et du bien ou service concerné ;

2° Le prix du bien ou du service, en application des articles L. 113-3 et L. 113-3-1 ;

3° En l'absence d'exécution immédiate du contrat, la date ou le délai auquel le professionnel s'engage à livrer le bien ou à exécuter le service (...).'

L'article L121-17 III du code de la consommation dispose que 'la charge de la preuve concernant le respect des obligations d'information mentionnées à la présente sous-section pèse sur le professionnel.'

En l'espèce, il y a lieu de constater à l'instar du tribunal que la ' fiche d'intervention récapitulative ' versée aux débats par Mme [K] [Z] ne mentionne pas la marque de la chaudière à condensation, ni la date de livraison de l'installation.

Aussi, il en résulte qu'une caractéristique essentielle du matériel commandé ne figure pas à ce document et que Mme [K] [Z] n'était pas informée du délai de réalisation des prestations y figurant.

Dans ces conditions, il en résulte que ce document est affecté d'un vice susceptible d'entraîner sa nullité.

Sur la confirmation de l'acte nul

Aux termes de l'article 1338 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, la confirmation tacite par exécution de l'acte est subordonnée à quatre conditions cumulatives :

- une exécution après l'époque à laquelle l'obligation pouvait être valablement confirmée,

- une exécution en connaissance du vice ou des causes de nullité qui affectent l'acte,

- une exécution volontaire de l'acte nul,

- l'intention de réparer le vice.

En l'espèce, force est de constater que la ' fiche d'intervention récapitulative ' ne comporte aucune référence aux articles du code de la consommation applicables.

En outre, Mme [K] [Z] a fait état auprès de la SA Sygma Banque ainsi que de la société Activ Eco, devenue Vivons Energy, dès août 2015, d'un défaut de conformité de la chaudière installée.

Dans ce contexte, le paiement des échéances de prêt de même que la signature d'une attestation de livraison sont insuffisants à manifester l'intention de Mme [K] [Z] de réparer le vice affectant le bon de commande irrégulier.

Dès lors, le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il a prononcé l'annulation du contrat de vente.

Sur l'annulation du contrat de crédit affecté

L'article L. 311-32 alinéa 2 du code de la consommation prévoit que le contrat de crédit est résolu ou annulé de plein droit lorsque le contrat en vue duquel il a été conclu est lui-même judiciairement annulé ou résolu.

En l'espèce, l'annulation du contrat principal de vente a pour effet l'annulation du contrat de crédit affecté.

Dès lors, le jugement déféré sera confirmé sur ce point.

Sur les conséquences de l'annulation

La résolution ou l'annulation d'un contrat de crédit affecté, en conséquence de celle du contrat constatant la vente ou la prestation de services qu'il finance, emporte pour l'emprunteur l'obligation de restituer au prêteur le capital prêté.

Cependant, le prêteur qui a versé les fonds sans s'être assuré, comme il y était tenu, de la régularité formelle du contrat principal ou de sa complète exécution, peut être privé en tout ou partie de sa créance de restitution, dès lors que l'emprunteur justifie avoir subi un préjudice en lien avec cette faute.

Aussi, l'absence de préjudice subi par les emprunteurs, en lien avec les fautes alléguées du prêteur, exclut la responsabilité de ce dernier.

En l'espèce, il y a lieu de constater que la SA Sygma Banque a commis une faute en libérant les fonds empruntés sans s'assurer de la régularité formelle du bon de commande et notamment de l'absence de délai d'exécution des prestations et de mention de la marque de la chaudière à condensation commandée, étant précisé au surplus que le document versé aux débats signé par Mme [K] [Z] est intitulé ' fiche d'intervention récapitulative- Eco conditionnalité des aides et subventions. Dans le cadre du programme gouvernemental français Habiter mieux '.

Pour autant, le technicien ayant vérifié la chaudière le 26 mars 2015 a listé les points contrôle et relevé la conformité et le bon de fonctionnement de la chaudière en mode chauffage et sanitaire, en indiquant au titre des ' défauts corrigés ou à corriger ' : ' manque terminal-manque support PPS-tube PPS ne dépasse pas de la cheminée ! ' sans émettre de conseils et recommandations, expliquant dans une partie ' observations/remarques ' avoir remarqué dans le cadre du 'contrôle fumisterie' un coude du tube PPS à 90° au lieu de 45° ayant pour effet qu'il ne dépasse pas du conduit de cheminée, avec la mention 'averifier' (sic).

Aussi, il en résulte d'une part, que la chaudière est en état de fonctionnement, et d'autre part, que le défaut de réalisation de la prestation par le vendeur/installateur n'est pas en lien avec les fautes imputées au prêteur.

Dans ces conditions, Mme [K] [Z] ne justifie pas d'un préjudice imputable à une faute de la SA BNP Paribas PF justifiant de la dispenser du remboursement du capital emprunté ou de condamner le prêteur à lui rembourser les échéances payées.

Dès lors, le jugement déféré sera infirmé sur ces points, et statuant à nouveau, Mme [K] [Z] sera condamnée à payer à la SA BNP Paribas PF la somme de 17 500 euros, déduction faite des échéances réglées au jour de cet arrêt.

Sur les demandes accessoires

Le jugement critiqué sera infirmé en ses dispositions relatives aux dépens et aux frais irrépétibles.

Mme [K] [Z] qui succombe à hauteur de cour sera condamnée aux dépens de première instance et d'appel, et sera déboutée de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Eu égard à la situation respective des parties, il n'y a pas lieu de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile en première instance et à hauteur de cour.

PAR CES MOTIFS :

LA COUR, statuant publiquement, par arrêt réputé contradictoire prononcé par mise à disposition au greffe, conformément aux dispositions de l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,

INFIRME partiellement le jugement déféré et, statuant à nouveau,

CONDAMNE Mme [K] [Z] à payer à la SA BNP Paribas PF, venant aux droits de la SA Sygma Banque, la somme de 17 500 euros, déduction faite des échéances réglées à ce jour,

DIT n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNE Mme [K] [Z] au paiement des dépens,

CONFIRME le jugement déféré pour le surplus,

Y ajoutant,

DEBOUTE Mme [K] [Z] de sa demande sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

DIT n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNE Mme [K] [Z] aux dépens.

Le présent arrêt a été signé par Monsieur Francis MARTIN, président de chambre à la Cour d'Appel de NANCY, et par Mme Christelle CLABAUX- DUWIQUET, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,

Minute en dix pages.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Nancy
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 22/00257
Date de la décision : 15/12/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-12-15;22.00257 ?
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