ARRÊT N° /2022
PH
DU 15 DECEMBRE 2022
N° RG 21/02887 - N° Portalis DBVR-V-B7F-E4I3
Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de NANCY
20/00493
24 novembre 2021
COUR D'APPEL DE NANCY
CHAMBRE SOCIALE - SECTION 2
APPELANTE :
FEDERATION REGIONALE DES MJC DE LORRAINE prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés audit siège
[Adresse 1]
[Localité 2]
Représentée par Me Vincent LOQUET de la SELARL FILOR AVOCATS, substitué par Me DUMINIL , avocats au barreau de NANCY
INTIMÉE :
Madame [L] [E]
[Adresse 4]
[Localité 3]
Représentée par Me Adrien PERROT de la SCP PERROT AVOCAT, avocat au barreau de NANCY
COMPOSITION DE LA COUR :
Lors des débats et du délibéré,
Président : WEISSMANN Raphaël,
Président : HAQUET Jean-Baptiste,
Conseillers : STANEK Stéphane,
Greffier lors des débats : RIVORY Laurène
DÉBATS :
En audience publique du 06 Octobre 2022 ;
L'affaire a été mise en délibéré pour l'arrêt être rendu le 08 Décembre 2022 ; par mise à disposition au greffe conformément à l'article 450 alinéa 2 du Code de Procédure Civile ; puis à cette date le délibéré a été prorogé au 15 Décembre 2022;
Le 15 Décembre 2022, la Cour après en avoir délibéré conformément à la Loi, a rendu l'arrêt dont la teneur suit :
EXPOSÉ DU LITIGE ET PRÉTENTIONS RESPECTIVES DES PARTIES
A la suite d'un contrat à durée déterminée d'accompagnement vers l'emploi en date du 30 décembre 2013, Madame [L] [E] a été engagée sous contrat de travail à durée indéterminée à temps partiel à hauteur de 20 heures hebdomadaires, par la Fédération régionale des MJC DE LORRAINE à compter du 20 juin 2014, en qualité de comptable.
Au dernier état de son contrat, le temps de travail de Madame [L] [E] a été porté à 35 heures hebdomadaires par avenant du 29 juin 2018 avec effet au 01 juillet 2018.
Par courrier du 15 octobre 2019, la Fédération régionale des MJC DE LORRAINE a proposé à Madame [L] [E] une modification de son contrat de travail, portant la durée du temps de travail hebdomadaire à 17h30, qui a été refusée par la salariée.
Par courrier du 11 décembre 2019, Madame [L] [E] a été convoquée à un entretien préalable au licenciement fixé au 27 décembre 2019, durant lequel il lui a été proposé un contrat de sécurisation professionnelle qu'elle a accepté.
En date du 18 janvier 2020, à l'issu du délai de réflexion pour l'adhésion au contrat de sécurisation professionnelle, Madame [L] [E] a été licenciée pour motif économique.
Par requête du 22 décembre 2020, Madame [L] [E] a saisi le conseil de prud'hommes de Nancy, aux fins de constater que :
- son licenciement pour motif économique abusif,
- il n'y a pas de motif économique,
- elle était la seule salariée concernée par une réduction du temps de travail,
- aucune proposition de reclassement ne lui a été faite,
- son licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse,
*
En conséquence, d'obtenir le versement des sommes suivantes :
- 20 256,80 euros au titre de dommages et intérêt pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
- 5 064,20 euros au titre de l'indemnité de préavis,
- 506,42 euros au titre des congés payés afférents,
- 2 000,00 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- d'ordonner l'exécution provisoire du jugement.
Vu le jugement du conseil de prud'hommes de Nancy rendu le 24 novembre 2021, lequel a :
- dit que le licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse en raison du motif économique injustifié,
- en conséquence, la Fédération régionale des MJC DE LORRAINE à verser à Madame [L] [E] les sommes suivantes :
- 12 500,00 euros au titre de dommages et intérêt pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
- 5 064,20 euros au titre de l'indemnité de préavis,
- 506,42 euros au titre des congés payés afférents,
- 1 000,00 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- ordonné l'exécution provisoire totale de la décision en application de l'article 515 du code de procédure civile,
- débouté la Fédération régionale des MJC DE LORRAINE de l'ensemble de ses demandes,
- condamné la Fédération régionale des MJC DE LORRAINE aux entiers frais et dépens éventuels de l'instance.
Vu l'appel formé par la Fédération régionale des MJC DE LORRAINE le 09 décembre 2021,
Vu l'article 455 du code de procédure civile,
Vu les conclusions de la Fédération régionale des MJC DE LORRAINE déposées sur le RPVA le 13 juin 2022, et celles de Madame [L] [E] déposées sur le RPVA le 25 avril 2022,
Vu l'ordonnance de clôture rendue le 07 septembre 2022,
La Fédération régionale des MJC DE LORRAINE demande :
- d'infirmer le jugement rendu par le conseil de prud'hommes de Nancy le 24 novembre 2021 en ce qu'il a :
- dit que le licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse en raison du motif économique injustifié,
- en conséquence, la Fédération régionale des MJC DE LORRAINE à verser à Madame [L] [E] les sommes suivantes :
- 12 500,00 euros au titre de dommages et intérêt pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
- 5 064,20 euros au titre de l'indemnité de préavis,
- 506,42 euros au titre des congés payés afférents,
- 1 000,00 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- ordonné l'exécution provisoire totale de la décision en application de l'article 515 du code de procédure civile,
- débouté la Fédération régionale des MJC DE LORRAINE de l'ensemble de ses demandes, notamment de sa demande tendant à voir Madame [L] [E] déboutée de l'ensemble de ses demandes, fins et prétentions, et de sa demande tendant à voir condamnée Madame [L] [E] à lui payer la somme de 2 000,00 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers frais et dépens d'instance.
- condamné la Fédération régionale des MJC DE LORRAINE aux entiers frais et dépens éventuels de l'instance,
*
Statuant à nouveau :
- de dire et juger que le licenciement pour motif économique est justifié et repose sur une cause réelle et sérieuse,
- de débouter Madame [L] [E] de l'ensemble de ses demandes, fins et prétentions,
- de condamner Madame [L] [E] à payer à la Fédération régionale des MJC DE LORRAINE la somme de 2 000,00 euros au titre de l'article 700 code de procédure civile pour la première instance, ainsi qu'aux dépens,
*
Y ajoutant :
- de condamner Madame [L] [E] à payer à la Fédération régionale des MJC DE LORRAINE la somme de 2 000,00 euros au titre de l'article 700 code de procédure civile pour l'appel, ainsi qu'aux dépens,
*
En tout état de cause :
- de débouter Madame [L] [E] de son appel incident, et de l'ensemble de ses demandes, fins et prétentions.
Madame [L] [E] demande :
- de confirmer le jugement intervenu en ce qu'il a :
- dit que le licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse en raison du motif économique injustifié,
- en conséquence, la Fédération régionale des MJC DE LORRAINE à verser à Madame [L] [E] les sommes suivantes :
- 5 064,20 euros au titre de l'indemnité de préavis,
- 506,42 euros au titre des congés payés afférents,
- 1 000,00 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- débouté la Fédération régionale des MJC DE LORRAINE de l'ensemble de ses demandes,
- condamné la Fédération régionale des MJC DE LORRAINE aux entiers frais et dépens éventuels de l'instance,
*
- d'infirmer le jugement intervenu en ce qu'il a condamné la Fédération régionale des MJC DE LORRAINE au versement de la somme de 12 500,00 euros au titre de dommages et intérêt pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
*
Statuant à nouveau :
- de condamner la Fédération régionale des MJC DE LORRAINE à verser à Madame [L] [E] la somme de 20 256,80 euros au titre de dommages et intérêt pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
*
Y ajoutant :
- de condamner la Fédération régionale des MJC DE LORRAINE au versement de la somme de 2 500,00 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile pour la procédure à hauteur d'appel
- de débouter la Fédération régionale des MJC DE LORRAINE de l'intégralité de ses demandes,
- de dire et juger que l'ensemble des condamnations à intervenir portera intérêt au taux légal en vigueur,
SUR CE, LA COUR
Pour plus ample exposé sur les moyens et prétentions des parties, il sera expressément renvoyé aux dernières écritures de la Fédération régionale des MJC DE LORRAINE déposées sur le RPVA le 13 juin 2022, et de celles de Madame [L] [E] déposées sur le RPVA le 25 avril 2022.
Sur le motif économique du licenciement :
La lettre de licenciement est ainsi rédigée :
« Aujourd'hui, la FRMJC Lorraine affilie 166 MJC en 2019. Ce réseau constitué par ces MJC est le plus important de France en nombre de MJC, en nombre de professionnels de direction, en nombre d'adhérents, etc....
Toutefois, et à ce jour, notre association connaît malheureusement de sérieuses difficultés économiques et sa survie est menacée.
Le CA du 5/10/2019 a constaté d'importantes difficultés économiques passées, actuelles, et prévisionnelles qui vont se poser à la FRMJC Lorraine à partir de Janvier 2020 et pour les années suivantes. Ces difficultés mettront en péril sa survie économique à moyen terme et donc la survie de son projet mené au bénéfice des associations MJC affiliées à la FRMJC Lorraine.
Nous vous exposons par des éléments chiffrés les difficultés rencontrées.
En effet, les budgets restent déficitaires depuis 2015 dans les proportions suivantes :
Résultat 2015 : -21985.92€
Résultat 2016 : -795€
Résultat 2017 : -335€
Résultat 2018 : -5043€.
Résultat prévisionnel 2019 : évalué à l'équilibre
Résultat prévisionnel 2020 : déficit évalué entre 38 et 42 K€
Ces difficultés s'expliquent notamment par une diminution importante de nos recettes en raison de l'affaiblissement du recouvrement des cotisations de la part des MJC affiliées à la Fédération Régionale qui connaissent elles-mêmes des difficultés financières qui les amènent à être liquidées ou à ne pas pouvoir fonctionner à 100% ou à ne pas pouvoir payer leur cotisation ; certaines aussi ont perdu « confiance » avec le réseau fédéral et se désaffilient.
Par exemple, nous enregistrons une perte du nombre de MJC affiliées à 34 en 10 ans dont 7 MJC qui bénéficiaient d'un poste de direction fédérale, MJC structurant le territoire et bénéficiant de nombreux adhérent pour lesquels ces MJC versaient des cotisations que nous n'avons plus aujourd'hui.
Mais ce n'est pas tout.
Nous sommes en effet également confrontés à des demandes de subventions annuelles dont les critères sont plus contraints, dont les résultats sont incertains et dont les montants sont en baisse ce qui peut s'expliquer par l'application de la LOI NOTRe qui a engendré des changements d'orientation des financements du nouveau Conseil Régional Grand Est par rapport à l'Ex Conseil Régional Lorraine, rendant leur accès par la même difficile et aléatoire dans le contexte de transition.
Par ailleurs, les aides FONJEP de l'Etat sont également soumises à des remaniements qui rendent leur accès aléatoire depuis la circulaire FONJEP 2017 ; cet effet se manifestera dès 2020.
De même que les subventions et recettes liées à la formation des bénévoles sont incertaines soit par l'incertitude des réponses du réseau aux formations proposées, soit par l'incertitude des financements remaniés depuis 2 ans par la Région Grand Est.
Nous constatons également que la stratégie de développement des conventions d'accompagnement pilotées par la FRMJC Lorraine auprès des MJC adhérentes ou des collectivités locales financées par elles, nous mettent dans l'obligation de consolider le pilotage avec les fédérations départementales par manque de moyens humains à la FRMJC Lorraine et que de ce fait, les recettes liées à ce développement sont nécessairement insuffisantes pour impacter positivement le résultat de la FRMJC Lorraine.
Enfin, nous constatons un arrêt des conventions d'accompagnement comptable de la MJC Haut du Lièvre et MJC Massinon courant 2019, grevant par la même les recettes de la FRMJC pour un montant conséquent de 24 K€.
Vous comprendrez que l'ensemble de ces évènements contribuent à la baisse de nos recettes d'année en année.
S'agissant des dépenses, la masse salariale, et les frais accessoires liés aux déplacements des professionnels et des bénévoles, les coûts des outils de travail notamment, constituent le premier pôle de dépense.
Bien évidemment, nous avons d'ores et déjà cherché des solutions en amont pour tenter de redresser la situation et des efforts ont été en effet déjà réalisés.
Par exemple, la FRMJC Lorraine a maintenu l'emploi régional. Elle a déposé des dossiers de demande de financement. Elle a optimisé les processus de travail pour améliorer le recouvrement des cotisations des MJC. Elle a prévu une augmentation régulière de la cotisation votée en AG. Elle s'est impliquée plus fortement sur les territoires en rencontrant collectivement les MJC et a réorienté la mission de direction régionale pour accentuer la dynamisation du réseau en complément d'un suivi institutionnel pour rendre visible et crédible l'utilité des cotisations des MJC versées au titre de leur affiliation et faire fédération. Elle a participé à la Création de « MJC Grand EST » qu'elle administre avec la FRMJC Alsace et la FRMJC Champagne -Ardennes dans un partenariat privilégié avec le Conseil régional Grand Est au bénéfice et dans l'intérêt des MJC affiliées.
Malgré tout, ces efforts n'apparaissent pas comme suffisants. Pour exemple, entre 2015 et 2019, le montant des cotisations est passé de 134 K€ à 145 K€ alors que les subventions sont passées de 68K€ à 33K€.
De plus, aujourd'hui, la FRMJC Lorraine doit faire face à des nouvelles demandes beaucoup plus techniques et complexes de la part de ses associations affiliées. Ces dernières demandes par exemple à être davantage accompagnées sur le terrain et auprès des interlocuteurs locaux ou pour répondre à des questions juridiques de plus en plus complexes, mais également sur des dimensions d'ingénierie territoriale, de redéploiement de leur projet associatif et d'animation collective. Ces nouvelles demandes ont nécessité le recrutement d'une directrice en charge de l'accompagnement du réseau vosgien et de la dynamisation du réseau sur la thématique « animation vie sociale et territoire » en avril 2019.
La dématérialisation des outils de travail est également venue modifier les méthodes de travail afin de les rendre plus fluides, accessibles, réactives, partageables et utilisables par tous les membres de l'équipe cadre.
L'association est à but non lucratif et le contexte général de baisse de subventions publiques à son égard et à l'égard des associations affiliées depuis 15 ans et la baisse du nombre de MJC affiliées l'oblige à réfléchir avec prudence et discernement quant aux priorités qu'elle se donne pour continuer à vivre et à fédérer et ce dès l'année prochaine.
Les subventions, aides de toutes natures et les cotisations des adhérentes sont indispensables pour assurer la survie de la fédération.
Aussi, et pour valoriser ces sources de recettes, il apparait capital pour l'association de prioriser sa fonction d'animation et de dynamisation du réseau afin de maintenir voire développer le nombre d'associations affiliées, et augmenter par la même les chances d'obtenir des subventions.
Elle souhaite également pouvoir assurer une réactivité maximale auprès des associations afin de répondre à leurs besoins diversifiés et de proximité en matière d 'accompagnement de leur projet associatif respectif, si elle veut asseoir ainsi une assiette de recouvrement de cotisation suffisante et si elle veut être crédible en portant des demandes de subventions pour accompagner un réseau qui maintient et développe son dynamisme, sa capacité d'innovation sociale et culturelle » (pièce n° 8 de l'appelante).
L'employeur fait valoir que ses difficultés économiques sont réelles et ce, depuis plusieurs années ; que l'exercice 2019 fait état d'un déficit définitif de 18 891,02 euros, après un déficit de 5043 euros en 2018 et de 335 euros en 2017.
Il indique qu'en 2019 la Fédération régionale des MJC de Lorraine comptait deux salariés.
Il précise que si au jour du licenciement le résultat prévisionnel de 2019 était évalué à l'équilibre, celui de 2020 était évalué à - 38 000 / - 42 000 euros.
Il indique avoir proposé à Madame [L] [E] une modification de son contrat de travail, par courrier du 15 octobre 2019, consistant en une réduction de son temps de travail à 17h30 par semaine, soit un passage à temps partiel et avoir dû la licencier à la suite de son refus, ses recherches de reclassement ayant échouées (pièces n° 4 et 11).
Il indique également qu'il a dû licencier la seconde salariée de l'association, Madame [Y], pour le même motif.
Madame [L] [E] fait valoir que l'employeur ne produit aucun élément comptable « officiel » sur sa situation économique.
Elle fait également valoir que la situation déficitaire du compte de résultat de 2019 est dû aux sommes provisionnées dans le cadre des litiges prud'homaux opposant l'association à ses deux salariées licenciées et au financement de leurs contrats de sécurisation professionnelle, soit un total de 37 836,17 euros, alors que le déficit était de 18 891,92 euros.
Motivation :
L'article L. 1233-3, 1°,du code du travail prévoit que constitue un licenciement pour motif économique le licenciement effectué par un employeur pour un ou plusieurs motifs non inhérents à la personne du salarié résultant d'une suppression ou transformation d'emploi ou d'une modification, refusée par le salarié, d'un élément essentiel du contrat de travail, consécutives notamment, à des difficultés économiques caractérisées soit par l'évolution significative d'au moins un indicateur économique tel qu'une baisse des commandes ou du chiffre d'affaires, des pertes d'exploitation ou une dégradation de la trésorerie ou de l'excédent brut d'exploitation, soit par tout autre élément de nature à justifier de ces difficultés.
Le juge doit se placer à la date du licenciement pour apprécier le motif de celui-ci, donc en l'espèce au 18 janvier 2020.
L'association employait deux salariés.
Il ressort des écritures de l'appelante et de la lettre de licenciement, qu'au moment du licenciement de Madame [L] [E] le résultat prévisionnel pour 2019 était « évalué à l'équilibre », alors que le résultat de 2018 était de - 5043 euros (- 335 euros en 2017, - 795 euros en 2016, -21 985,92 euros en 2015).
Le résultat définitif pour l'année 2019 est de - 18 891,03 euros, étant relevé que l'association a provisionné 37 836,17 euros en raison des licenciements de ses deux salariées et des litiges prud'homaux à venir (pièce n° 78 de l'appelante).
Sans ces licenciements, le résultat définitif aurait donc été de + 18 945,14, étant rappelé que le compte de résultat comprenait encore les rémunérations des deux salariées.
Le total des actifs pour 2018 était de 274 431 euros, pour un passif de 271 540 euros ; le total des actifs pour 2019 était de 242 695 euros, pour un passif de 261 586 euros, duquel il y a lieu de décompter les 37 836,17 euros provisionnés à la suite des licenciements de Mesdames [L] [E] et [Y] (pièce n° 77 de l'appelante).
Il résulte de ces chiffres que la situation économique de l'association ne s'est pas dégradée significativement en 2019 par rapport à 2018.
En outre, si on prend en compte les résultats de 2015 à 2019, on constate qu'il n'y a pas non plus de dégradation continue des comptes de l'association (pièce n° 73) de l'appelante.
En conséquence, l'employeur ne démontre pas que ses difficultés économiques ont rendu nécessaire le licenciement de Madame [L] [E].
Dès lors, le jugement du conseil de prud'hommes sera confirmé en ce qu'il a dit le licenciement de Madame [L] [E] sans cause réelle et sérieuse.
Sur les dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse :
Madame [L] [E] fait valoir que son ancienneté était de 7 ans et 3 mois au moment de son licenciement et que la moyenne de son salaire était de 2532,10 euros ; qu'elle a occupé deux emplois à durée déterminée en juillet 2022, pendant deux mois, et depuis février 2022 pour une durée de 5 mois ; qu'elle a subi une perte de revenus de plus de 700 euros par mois (pièces 18-1, 19 et 20 de l'intimée).
Elle réclame en conséquence que l'employeur soit condamné à lui verser la somme 20 256,80 correspondante à 8 mois de salaire.
L'employeur fait valoir que Madame [L] [E] n'apporte la preuve d'aucun préjudice particulier et qu'elle a rapidement retrouvé un emploi.
Motivation :
Il résulte de l'article L. 1235-3 du code du travail que la perte injustifiée de son emploi par le salarié lui cause un préjudice dont il appartient au juge d'apprécier l'étendue, le montant des dommages et intérêts qu'il peut décider étant compris entre les montants minimaux et maximaux fixés par l'article visé ci-dessus.
Il n'est pas contesté que la rémunération moyenne à prendre en compte pour le calcul des dommages et intérêts est de 2532,10 euros.
Compte-tenu de l'ancienneté de Madame [L] [E] et des pièces qu'elle a fourni sur sa situation professionnelle, l'employeur devra lui verser la somme de 12 500 euros, le jugement du conseil de prud'hommes étant confirmé sur ce point.
Sur l'indemnité compensatrice de préavis :
Madame [L] [E] fait valoir qu'en l'absence de motif économique du licenciement, le contrat de sécurisation professionnelle devient sans cause de sorte que l'employeur est alors tenu à l'obligation du préavis et des congés payés afférents.
Elle réclame en conséquence la somme de 5064,20 euros au titre de l'indemnité compensatrice de préavis, outre 506,42 euros pour les congés payés y afférant.
L'employeur fait valoir que Madame [L] [E] ne peut bénéficier d'une indemnité compensatrice de préavis alors qu'elle avait adhéré à un CSP.
Motivation :
En l'absence de motif économique de licenciement, le contrat de sécurisation professionnelle n'a pas de cause et l'employeur est alors tenu à l'obligation du préavis et des congés payés afférents.
L'employeur sera donc condamné à verser les sommes de 5064,20 euros au titre de l'indemnité compensatrice de préavis, outre 506,42 euros pour les congés payés y afférant, le jugement du conseil de prud'hommes étant confirmé sur ce point.
En application de l'article L. 1235-4 du code du travail il y lieu d'ordonner le remboursement par l'ASSOCIATION FEDERATION REGIONALE DES MAISONS DES JEUNES ET DE LA CULTURE LORRAINE des indemnités chômage éventuellement versées par Pôle Emploi à Madame [L] [E] postérieurement à son licenciement, dans la limite de 6 mois.
Sur l'article 700 du code de procédure civile et sur les dépens :
L'employeur sera condamné à verser à Madame [L] [E] la somme de 2000 euros au titre des frais irrépétibles et sera débouté de sa propre demande.
L'employeur sera condamné aux dépens.
PAR CES MOTIFS
La Cour, chambre sociale, statuant contradictoirement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, après débats en audience publique et après en avoir délibéré,
CONFIRME le jugement en ses dispositions soumises à la cour ;
Y AJOUTANT
Condamne l'ASSOCIATION FEDERATION REGIONALE DES MAISONS DES JEUNES ET DE LA CULTURE LORRAINE à verser à Madame [L] [E] la somme de 2000 euros (deux mille euros) au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
Déboute l'ASSOCIATION FEDERATION REGIONALE DES MAISONS DES JEUNES ET DE LA CULTURE LORRAINE de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
Condamne l'ASSOCIATION FEDERATION REGIONALE DES MAISONS DES JEUNES ET DE LA CULTURE LORRAINE aux dépens,
Ordonne le remboursement par l'ASSOCIATION FEDERATION REGIONALE DES MAISONS DES JEUNES ET DE LA CULTURE LORRAINE des indemnités chômage éventuellement versées par Pôle Emploi à Madame [L] [E] postérieurement à son licenciement, dans la limite de 6 mois.
Ainsi prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
Et signé par Monsieur Raphaël WEISSMANN, Président de Chambre, et par Madame Laurène RIVORY, Greffier.
LE GREFFIER LE PRESIDENT DE CHAMBRE
Minute en dix pages