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08/12/2022 | FRANCE | N°21/01421

France | France, Cour d'appel de Nancy, Jex, 08 décembre 2022, 21/01421


République Française

Au nom du peuple français

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Cour d'appel de Nancy

Chambre de l'Exécution - JEX



Arrêt n° /22 du 08 DECEMBRE 2022



Numéro d'inscription au répertoire général :

RG n° 21/01421 - N° Portalis : DBVR-V-B7F-EZC7



Décision déférée à la Cour :

Jugement du juge de l'exécution du tribunal judiciaire de NANCY, R.G.n° 21/00082, en date du 21 mai 2021,



APPELANTE :

S.A. CREDIT IMMOBILIER DE FRANCE DEVELOPPEMENT (CEFID)
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br>Société anonyme, ayant son siège social [Adresse 2], prise en la personne de ses représentants légaux pour ce domiciliés audit siège

Représentée par Me Joëlle...

République Française

Au nom du peuple français

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Cour d'appel de Nancy

Chambre de l'Exécution - JEX

Arrêt n° /22 du 08 DECEMBRE 2022

Numéro d'inscription au répertoire général :

RG n° 21/01421 - N° Portalis : DBVR-V-B7F-EZC7

Décision déférée à la Cour :

Jugement du juge de l'exécution du tribunal judiciaire de NANCY, R.G.n° 21/00082, en date du 21 mai 2021,

APPELANTE :

S.A. CREDIT IMMOBILIER DE FRANCE DEVELOPPEMENT (CEFID)

Société anonyme, ayant son siège social [Adresse 2], prise en la personne de ses représentants légaux pour ce domiciliés audit siège

Représentée par Me Joëlle FONTAINE de l'AARPI MILLOT-LOGIER, FONTAINE & THIRY, avocat au barreau de NANCY

INTIMEE :

Madame [V] [P] épouse [O]

née le [Date naissance 1] 1969 à [Localité 9], domiciliée [Adresse 3]

Représentée par Me Anne-lise LE MAITRE, avocat au barreau de NANCY

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 17 Novembre 2022, en audience publique devant la Cour composée de :

Monsieur Francis MARTIN, président de chambre,

Madame Nathalie ABEL, conseillère,

Madame Fabienne GIRARDOT conseillère, chargée du rapport

qui en ont délibéré ;

Greffier, lors des débats : Mme Christelle CLABAUX-DUWIQUET ;

ARRÊT : contradictoire, prononcé publiquement le 08 décembre 2022 date indiquée à l'issue des débats, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de Procédure Civile ;

signé par Monsieur Francis MARTIN président de chambre, et par Mme Christelle CLABAUX-DUWIQUET, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire ;

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Copie exécutoire délivrée le à

Copie délivrée le à

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EXPOSE DU LITIGE

Par actes authentiques établis les 24 novembre 2006 et 28 décembre 2006, la SA Banque Patrimoine et Immobilier (BPI) a consenti à M. [U] [O] et Mme [V] [P] épouse [O] trois prêts de 150 000 euros, 160 000 euros et 76 000 euros, afin d'acquérir par l'intermédiaire de la société Apollonia trois biens immobiliers en l'état futur d'achèvement situés respectivement à [Localité 7] pour les deux premiers prêts (n° 2083091 et n°2083085) et à [Localité 4] pour le dernier prêt (n°2083095).

Par courrier recommandé avec demande d'avis de réception en date du 23 avril 2009, la BPI a adressé à M. [U] [O] et Mme [V] [P] épouse [O] une mise en demeure de payer valant déchéance du terme des prêts consentis.

Par arrêt en date du 29 mars 2018, devenu définitif suite au rejet du pourvoi par décision de la Cour de Cassation du 26 février 2020, la cour d'appel de Nancy a condamné solidairement M. [U] [O] et Mme [V] [P] épouse [O] à payer à la SA Banque Patrimoine et Immobilier les sommes suivantes :

- au titre du prêt n°2083085, la somme de 139 271,51 euros, majorée des intérêts à compter du 7 octobre 2016 au taux contractuel sur la somme de 106 347,53 euros et au taux légal sur celle de 11 338,24 euros, avec capitalisation des intérêts dans les termes de l'article 1154 du code civil,

- au titre du prêt n°2083091, la somme de 175 023,53 euros, majorée des intérêts à compter du 7 octobre 2016 au taux contractuel sur la somme de 137 239,07 euros et au taux légal sur celle de 14 412,11 euros, avec capitalisation des intérêts dans les termes de l'article 1154 du code civil,

- en déduction desquelles viendra le versement de 23 932,72 euros opéré depuis le dernier arrêté en date du 6 octobre 2016,

- au titre de l'article 700 du code de procédure civile, la somme de 5 000 euros.

-o0o-

Par requête reçue au greffe le 25 janvier 2019, la SA Crédit Immobilier de France Développement (ci-après la SA CIFD), venant aux droits de la SA Banque Patrimoine et Immobilier, a saisi le juge de l'exécution du tribunal judiciaire de Nancy aux fins de conciliation et à défaut de saisie des rémunérations de Mme [V] [O] à hauteur de 216 186,91 euros, en exécution de l'arrêt de la cour d'appel de Nancy du 29 mars 2018, se détaillant comme suit :

- principal : 314 295,04 euros,

- intérêts : 6 006,62 euros,

- frais : 1 519,21 euros,

- à déduire,

* versements : 23 932,72 euros,

* versements : 32 156,48 euros,

* versements : 46 761,53 euros,

* acomptes CIC EST : 2 783,33 euros,

soit total versements : 105 634,06 euros.

A l'audience du 1er mars 2021, la SA CIFD a produit un décompte de créance arrêté à la somme de 179 611,43 euros détaillée comme suit, après déduction d'un ' disponible mal affecté en décembre 2018 ' :

- au titre du prêt n°203805 : total dû de 101 205 euros :

* capital restant dû au 29 mars 2018 : 139 271,51 euros,

* article 700 du code de procédure civile : 5 000 euros,

* intérêts capitalisés au taux contractuel du 7/10/2016 au 01/03/2021 : 4 436,07 euros,

* intérêts capitalisés au taux légal du 7/10/2016 au 01/03/2021 : 443,01 euros,

* versements à déduire : 47 394,95 euros, 675 euros et 1 261,53 euros,

* frais de procédure : 1 385,89 euros,

- au titre du prêt n°2038091 : total dû de 78 406,43 euros :

* capital restant dû au 29 mars 2018 : 151 090,81 euros (après déduction de versements à hauteur de 23 932,72 euros),

* intérêts capitalisés au taux contractuel du 7/10/2016 au 01/03/2021 : 4 945,51 euros,

* intérêts capitalisés au taux légal du 7/10/2016 au 01/03/2021 : 563,20 euros,

* versements à déduire : 78 000 euros, 675 euros et 1 261,53 euros,

* frais de procédure : 1 743,44 euros.

Mme [V] [O] a conclu à la nécessité de faire le compte entre les parties, en quittances et deniers, compte tenu de la saisie à exécution successive se poursuivant entre les mains de la société Appart City, locataire, et à la fixation de la créance à la somme de 70 310,74 euros, puis a sollicité les plus amples délais de paiement afin de lui permettre de vendre ses biens immobiliers sis à [Adresse 8] (lots 111 et 143, ce dernier faisant l'objet d'un commandement de payer valant saisie immobilière délivré le 10 juin 2020) aux prix respectifs de 85 900 euros et 83 928 euros, en rappelant que ces délais emportaient de plein droit la suspension de l'exigibilité de la dette et des mesures d'exécution forcée immobilière engagées devant le juge de l'excution du tribunal judiciaire de Créteil. Il a demandé d'ordonner au CIFD de ne pas s'opposer à la vente amiable de ces biens et de dire que le produit de leur vente s'imputera par priorité sur le capital de la dette restant due. Subsidiairement, Mme [V] [O] a demandé de limiter le montant de la saisie sur les rémunérations à 200 euros par mois sur les deux salaires des époux [O].

Par jugement en date du 21 mai 2021, le juge de l'exécution du tribunal judiciaire de Nancy statuant en matière de saisie des rémunérations a :

- dit que la créance détenue par la SA CIFD envers Mme [V] [O] s'établit comme suit :

* principal : 295 362,28 euros,

* intérêts au 1er mars 2021 : 10 387,79 euros,

* frais : 1 519,21 euros,

* acomptes à déduire : 132 051,34 euros,

Soit un total de 175 217,84 euros,

- ordonné le report à deux ans du paiement de la créance de la SA CIFD,

- dit que les éventuels paiements effectués pendant la durée du report s'imputeront par priorité sur la créance en principal,

- rappelé que le délai de grâce suspend l'exigibilité de la créance de la SA CIFD ainsi que les procédures d'exécution qui auraient été engagées,

- rappelé que les majorations d'intérêts ou les pénalités prévues en cas de retard ne sont pas encourues pendant le délai fixé par le jugement,

- rejeté la demande de la SA CIFD de saisie des rémunérations de Mme [V] [O],

- rejeté les demandes des parties au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné Mme [V] [O] aux dépens.

Le juge de l'exécution a indiqué que les poursuites étant engagées sur le fondement de l'arrêt rendu le 29 mars 2018 par la cour d'appel de Nancy, il n'avait pas le pouvoir de remettre en cause le montant des créances de la SA CIFD au titre des deux prêts, ni le montant des règlements effectués à une date antérieure à celle de l'arrêt au titre des saisies attribution de loyers ou sur compte bancaire ou au titre du déblocage des assurances-vie nanties. Il a néanmoins déduit du décompte du créancier la somme de 2 783,33 euros saisie en exécution de la saisie-attribution pratiquée le 8 novembre 2018. Il a retenu les frais détaillés à hauteur de 1 519,21 euros correspondant aux frais de signification de l'arrêt de la cour d'appel de Nancy, des saisies-attribution pratiquées les 7 novembre 2018 et 3 janvier 2019 ainsi qu'au coût de la requête en saisie des rémunérations. Le juge de l'exécution a accordé à Mme [V] [O] un report à deux ans du paiement de la créance détenue par la SA CIFD en indiquant qu'il avait pour conséquence de suspendre les procédures d'exécution engagées, et a rejeté la demande de saisie des rémunérations.

Par jugement du 4 novembre 2021,le juge de l'exécution du tribunal judiciaire de Créteil statuant en matière de saisie immobilière a constaté la suspension de la procédure de saisie immobilière eu égard aux délais de grâce accordés par le juge de l'exécution du tribunal judiciaire de Nancy.

-o0o-

Le 7 juin 2021, la SA CIFD a formé appel du jugement tendant à son annulation ou sa réformation en tous ses chefs critiqués hormis celui ayant condamné Mme [V] [O] aux dépens.

Par ordonnance en date du 14 mars 2022, le conseiller de la mise en état a déclaré irrecevable la partie des conclusions du CIFD notifiées le 16 décembre 2021 tendant aux termes de leur dispositif à voir ' déclarer Mme [V] [O] irrecevable et mal fondée en son appel incident et ses demandes ' et ' déclarer irrecevable, comme nouvelle, la demande de Mme [V] [O] tendant à minorer la créance du CIFD au visa de l'article R.211-8 alinéa 2du code des procédures civiles d'exécution '.

Dans ses dernières conclusions transmises le 22 septembre 2022, auxquelles il convient de se reporter pour l'exposé détaillé de ses prétentions et moyens, la SA CIFD, appelante, demande à la cour sur le fondement des articles L. 213-6 du code de l'organisation judiciaire, R.121-1 du code des procédures civiles d'exécution, 1353 du code civil, L. 111-8 du code des procédures civiles d'exécution, 510 du code de procédure civile, 1343-5 du code civil, L. 3252-1 et suivants du code du travail, R. 3252-1 et suivants du code du travail et 564 du code de procédure civile :

- de la déclarer recevable et bien fondée en son appel et ses demandes,

- de déclarer ses dernières conclusions conformes et régulières,

- de confirmer le jugement rendu le 21 mai 2021 par le juge de l'exécution près le tribunal judiciaire de Nancy en ce qu'il a condamné Mme [V] [O] aux dépens,

- d'infirmer le jugement rendu le 21 mai 2021 par le juge de l'exécution près le tribunal judiciaire de Nancy en ce qu'il a :

- dit que la créance détenue par la SA CIFD envers Mme [V] [O] s'établit comme suit :

* principal : 295 362,28 euros,

* intérêts au 1er mars 2021 : 10 387,79 euros,

* frais : 1 519,21 euros,

* acomptes à déduire : 132 051,34 euros,

Soit un total de 175 217,84 euros,

- ordonné le report à deux ans, du paiement de la créance de la SA CIFD,

- dit que les éventuels paiements effectués pendant la durée du report s'imputeront par priorité sur la créance en principal,

- rappelé que le délai de grâce suspend l'exigibilité de la créance de la SA CIFD ainsi que les procédures d'exécution qui auraient été engagées,

- rappelé que les majorations d'intérêts ou les pénalités prévues en cas de retard ne sont pas encourues pendant le délai fixé par le jugement,

- rejeté la demande de la SA CIFD de saisie des rémunérations de Mme [V] [O],

- rejeté les demandes des parties au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Statuant à nouveau,

- de dire que sa créance détenue envers Mme [V] [O] s'élève à la somme globale de 97 007,07 euros, arrêtée au 16 septembre 2022, outre les intérêts capitalisables jusqu'au parfait paiement,

- de l'autoriser à saisir les rémunérations de Mme [V] [O] en recouvrement de ce montant,

En tout état de cause,

- de débouter Mme [V] [O] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,

- de condamner Mme [V] [O] au paiement de la somme de 2 000 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile, tant en première instance qu'en appel,

- de condamner Mme [V] [O] aux entiers dépens d'appel et de première instance.

Au soutien de ses demandes, la SA CIFD fait valoir en substance :

- qu'elle s'est strictement conformée aux termes de l'ordonnance du conseiller de la mise en état du 14 mars 2022 dans ses dernières conclusions ; qu'en sa qualité d'appelante, elle a régulièrement critiqué le jugement querellé en ce qu'il a notamment fixé le montant de sa créance et ordonné un report de paiement à deux ans en rejetant la saisie des rémunérations de Mme [V] [O] ;

- que le quantum de sa créance n'a pas à être diminué d'une somme de 46 295,89 euros ; que la saisie-attribution de loyers en 2009 a permis de solder le prêt n°2083095 pour plus de 83 000 euros bien avant le prononcé de la première décision de condamnation et que les époux [O] ne justifient pas pour la période postérieure à l'arrêt que le montant des sommes saisies excède les sommes mises en compte ; que la somme de 2 783,33 euros appréhendée le 27 décembre 2018 entre les mains de la banque CIC EST suite à une saisie-attribution pratiquée le 8 novembre 2018 a permis, après compensation, d'apurer pour partie les frais de recouvrement forcé engagés par l'huissier de justice instrumentaire qui sont à la charge du débiteur, tel que ressortant de l'état de frais de l'huissier et du décompte qui déduit à ce titre deux sommes de 675 euros lui revenant le 14 avril 2019 ; que le décompte comporte l'imputation par deux fois de la somme de 1 261,53 euros correspondant au déblocage des contrats d'assurance-vie ; que s'agissant des frais, si les montants mentionnés au décompte résultent après vérification d'une procédure de saisie immobilière, en revanche, la somme retenue à hauteur de 1 519,21 euros par le premier juge doit être portée à 2 015,30 euros au titre des frais de recouvrement à la charge effective du débiteur ; qu'en conséquence, sa créance s'élève à la somme de 178 497,40 euros au 1er mars 2021, outre les intérêts aux taux contractuels capitalisables jusqu'à parfait paiement ;

- que les époux [O] ne rapportent nullement la preuve d'une quelconque négligence imputable au créancier saisissant sur le fondement de l'article R. 211-8 du code des procédures civiles d'exécution ; que sur la base d'une simple estimation, ils prétendent sans la moindre démonstration que les saisies des loyers opérées depuis 2009 auraient dû générer une somme globale de 344 084,82 euros alors que le décompte de l'huissier mentionne un montant de 297 788,93 euros ; qu'aucune négligence n'est établie dans l'absence de réclamation de cette hypothétique différence aux tiers saisis ; que les époux [O] sont parvenus à paralyser la vente d'un bien dont le prix aurait permis de désintéresser partiellement le CIFD, étant ajouté que la vente a finalement été réalisée le 2 juin 2022, de sorte qu'ils ont bénéficié d'un délai de quatre ans pour apurer leur dette ;

- que les époux [O] ne peuvent juridiquement solliciter la fixation de la créance à la somme de 124 273,64 euros ressortant d'un précédent décompte (ne tenant pas compte des intérêts) au motif que des incohérences ont affecté les décomptes communiqués, alors qu'elle a corrigé ses décomptes conformément à leur demande et que l'erreur de calcul ne fait pas droit ;

- que rien ne justifie une imputation des règlements sur le principal en priorité pendant la durée du report, concernant plus précisément le produit de la vente des biens saisis ; que les dispositions de l'article L. 3252-13 du code du travail ne concernent que les sommes reçues dans le cadre de la saisie des rémunérations ;

- que les époux [O] ne sont pas légitimes à obtenir un délai de grâce de 24 mois ; qu'en réponse à un courriel adressé par les époux [O] le 18 mai 2020, elle a informé l'huissier instrumentaire qu'elle ne s'opposait pas à la vente amiable des deux biens immobiliers et qu'il convenait de lui transmettre les mandats de vente et à défaut les compromis, et de les inviter à formuler une proposition de soulte au cas où le prix de vente ne permettrait pas d'apurer les créances ; que les négociations ont échoué tel que ressortant d'un courriel du 19 octobre 2020 ; que le comportement passif des emprunteurs depuis leur condamnation du 29 mars 2018 démontre une absence totale de bonne foi ; que la CIFD s'est également constituée partie civile au titre des agissements de la société Apollonia, qu'elle n'a plus d'activité bénéficiaire et doit assumer des charges financières extrêmement lourdes pour se restructurer en vue de sa résolution ordonnée et de bénéficier de manière limitée de la garantie de l'Etat français portant sur les créances qu'elle détient notamment à l'encontre de ses emprunteurs ; que l'allongement des délais de recouvrement aggrave significativement sa charge financière ;

- qu'elle communique un ultime décompte actualisé au 16 septembre 2022 aux termes duquel les prix de vente des biens récemment vendus ont été imputés sur la dette des époux [O], dont il ressort que leur dette s'élève à la somme globale de 97 007,07 euros, outre les intérêts postérieurs jusqu'au parfait paiement.

Dans ses dernières conclusions transmises le 30 juin 2022, auxquelles il convient de se reporter pour l'exposé détaillé de ses prétentions et moyens, Mme [V] [O], intimée et appelante à titre incident, demande à la cour sur le fondement des articles L. 111-2 et L. 213-6 du code des procédures civiles d'exécution, 1343-5 du code civil, L. 211-4 alinéa 2, R. 211-8 alinéa 2 et L. 211-4 du code des procédures civiles d'exécution :

I. Sur l'appel principal,

- de déclarer l'appel de la SA CIFD irrecevable, en tout état de cause mal fondé,

En conséquence,

- de confirmer le jugement rendu le 21 mai 2021 en ce qu'il a :

* accordé le report à deux ans du paiement de la créance du CIFD,

* ordonné que tous les paiements intervenus pendant la durée du report s'imputeront par priorité sur la créance en capital,

* rappelé que le délai de grâce suspend l'exigibilité de la créance du CIFD ainsi que de toutes les mesures d'exécution forcée qui auraient été engagées,

* ordonné l'arrêt du cours des intérêts de retard et des pénalités,

* rejeté la demande du CIFD de saisie de ses rémunérations,

II. Sur l'appel incident,

- de déclarer son appel incident recevable et bien fondé,

- de déclarer irrecevables les conclusions du CIFD tendant aux termes de leur dispositif à voir :

* déclarer Mme [V] [O] irrecevable et mal fondée en son appel incident et ses demandes,

* déclarer irrecevable, comme nouvelle, la demande de Mme [V] [O] tendant à minorer la créance du CIFD au visa de l'article R. 211-8 alinéa 2 du code des procédures civiles d'exécution,

Par conséquent,

- d'infirmer le jugement rendu le 21 mai 2021 en ce qu'il a :

* fixé la créance du CIFD détenue à son encontre à la somme de 175 217,84 euros,

* rejeté les demandes des parties au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

* condamné Mme [V] [O] aux dépens,

En conséquence, statuant à nouveau,

- de déclarer que la créance du CIFD a été apurée en cours de procédure,

- de condamner le CIFD à rembourser aux époux [O] le trop-perçu de 25 539,27 euros,

Subsidiairement,

- de réduire de 46 295,89 euros la créance du CIFD au titre de sa négligence en qualité de créancier saisissant dans le cadre de la saisie à exécution successive en cours depuis 2009,

- de réduire la créance du CIFD de l'ensemble des sommes saisies et versées entre ses mains et qui n'apparaissent pas au décompte justifiant la requête en saisie des rémunérations,

- de réduire la créance du CIFD du montant du prix de vente du lot 143 selon virement de 66 260, 841 euros effectué le 02 juin 2022,

En conséquence,

- de fixer la créance du CIFD après imputation des différentes saisies et de rappeler que cette dette est solidaire entre Mme [V] [P] épouse [O] et M. [U] [O],

- de rappeler que cette créance doit être régulièrement réactualisée compte tenu de la saisie à exécution successive qui se poursuit entre les mains de la société Appart City, locataire,

III. A titre très subsidiaire sur la saisie des rémunérations,

- d'enjoindre au CIFD de produire un décompte détaillé de sa créance postérieur au jugement dont appel,

- de limiter le montant de la saisie des rémunérations à 200 euros par mois sur les deux salaires réunis de Mme [V] [P] épouse [O] et M. [U] [O],

IV. En tout état de cause,

- de débouter le CIFD de l'ensemble de ses fins, moyens et prétentions,

- de condamner le CIFD à lui payer une somme de 2 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,

- de condamner le CIFD aux entiers frais et dépens de la présente procédure.

Au soutien de ses demandes, Mme [V] [O] fait valoir en substance :

- que l'ensemble de l'argumentation développée par le CIFD pour faire échec à l'action en responsabilité pour négligence et formée sur le fondement de l'article R. 211-8 alinéa 2 du code des procédures civiles d'exécution est irrecevable conformément à l'ordonnance du magistrat désigné par le président de chambre du 14 mars 2022 ;

- que le CIFD ne défère aucunement à la charge de la preuve et ne justifie nullement du quantum de la créance dont il se prévaut, qui est incertain au regard des différents montants ressortant de la requête en saisie du 22 janvier 2019 (216 186,81 euros), des décomptes de l'huissier ayant opéré la saisie des loyers dès 2009 (136 661,05 euros au 7 novembre 2019 et 126 437,08 euros au 18 mai 2020), du commandement de payer valant saisie immobilière du 10 juin 2020 (193 326,71 euros), d'un décompte du 3 décembre 2020 (187 335,13 euros), d'un décompte du CIFD du 2 mars 2021 afférent à deux prêts (179 611,43 euros) et d'un décompte de l'huissier ayant procédé à la saisie des loyers du 2 mars 2021 afférent aux trois prêts (124 273,64 euros), ainsi que du dernier décompte de l'huissier chargé de la saisie des loyers du 16 juin 2022 (94 684,44 euros) ; que le quantum de la créance est incertain et fluctuant, que le décompte annexé à la requête est erroné et que les décomptes du CIFD ne sont ni fiables ni crédibles ;

- que la créance du CIFD ne saurait être supérieure à 124 273,64 euros au 2 mars 2021, et en dernier état à 94 684,44 euros, selon décompte actualisé de l'huissier du 16 juin 2022, dont il convient de déduire les loyers perdus du fait de la négligence du CIFD dans le suivi de la saisie des loyers (46 295,89 euros) de même que les autres montants saisis, à savoir 3 754,32 euros au titre des saisies-attribution pratiquées le 27 juillet 2009 (970,99 euros) et en novembre 2018 (2 783,33 euros), outre 3 912,69 euros au titre du déblocage des trois assurances-vie nanties, ainsi que 66 260,81 euros correspondant au prix de vente du lot 143 du bien immobilier de [Localité 7] ; qu'il en résulte un solde en faveur des époux [O] de 25 539,27 euros ;

- que s'agissant des frais mis en compte, ils seront conservés à l'entière charge du CIFD qui a engagé des mesures inutiles pour être en concurrence avec de précédentes saisies, à savoir la réitération en 2019 (dénonciation du 10 janvier 2019) de la saisie à exécution successive des loyers entre les mains de Suites Inn (aux droits de laquelle est venu Appart City) en cours depuis le procès-verbal du 21 juillet 2009, de même que la saisie immobilière initiée le 10 juin 2020 alors qu'une proposition transactionnelle avait été transmise le 18 mai 2020 ; que le CIFD ayant donné son accord à la mainlevée des inscriptions sur le bien vendu n'a transmis un décompte de remboursement, sollicité le 7 avril 2022, que le 19 mai 2022 ;

- que subsidiairement, le juge de l'exécution est compétent pour statuer sur une demande de délai de grâce après un acte de saisie conformément aux dispositions des articles 510 du code de procédure civile et R. 121-1 alinéa 2 du code des procédures civiles d'exécution, par application des dispositions de l'article 1343-5 du code civil ; que l'octroi de délais de grâce permettra de vendre le lot n°111 estimé à 85 900 euros selon mandat de vente du 9 juillet 2020, afin d'éviter que la procédure de saisie immobilière ne soit réinscrite au rôle au tribunal judiciaire de Créteil ; qu'ils sont victimes du scandale national Apollonia et qu'ils ont entamé des démarches pour mettre en vente leurs biens financés, ayant vendu le lot n°143 le 2 juin 2022 ; que le CIFD a signé une promesse de mainlevée des inscriptions sur le lot n°111 le 7 juin 2022 ;

- que la publication du commandement de saisie immobilière (4 et 5 août 2020) est postérieure à la demande de délais de grâce formulée le 2 juillet 2020, avant la fixation de l'audience d'adjudication, ce qui aura pour effet de suspendre toute mesure d'exécution forcée à compter de cette date, en ce compris la saisie-immobilière ;

- que les paiements qui interviendront dans le cadre des ventes des biens viendront s'imputer sur le principal de la dette et non sur les intérêts ;

- que très subsidiairement, la saisie sera cantonnée à 200 euros sur les deux salaires des époux [O] (5 076 euros et 1 884 euros), compte tenu de la charge de trois enfants, dont deux faisant des études supérieures à [Localité 6] et [Localité 5], ainsi que des taxes foncières à payer sur les biens financés (plus de 5 000 euros annuels), des échéances de crédit pour l'achat d'un véhicule (468 euros) et d'un endettement de près de 2 000 000 euros dans le cadre de l'affaire Apollonia à l'origine de poursuites en cours.

-o0o-

La clôture de l'instruction a été prononcée le 12 octobre 2022.

MOTIFS DE LA DECISION

Au préalable, il y a lieu de préciser que l'ordonnance du magistrat désigné par le président de chambre en date du 14 mars 2022 a déclaré irrecevable la partie des conclusions du CIFD notifiées le 16 décembre 2021 tendant aux termes de leur dispositif à voir ' déclarer Mme [V] [O] irrecevable et mal fondée en son appel incident et ses demandes' et ' déclarer irrecevable, comme nouvelle, la demande de Mme [V] [O] tendant à minorer la créance du CIFD au visa de l'article R.211-8 alinéa 2du code des procédures civiles d'exécution '.

Aussi, il en résulte que la cour ne peut statuer sur la recevabilité de l'appel incident des époux [O] ou de leur demande en dommages et intérêts, étant précisé que le CIFD n'a pas repris dans le dispositif de ses dernières conclusions les prétentions déclarées irrecevables par l'ordonnance du 14 mars 2022.

Pour autant, la cour devra apprécier le bien fondé de l'appel incident des époux [O] portant plus précisément sur la responsabilité du CIFD, pouvant donner lieu à l'allocation de dommages et intérêts venant en déduction du montant de la créance du CIFD, de sorte que ce dernier, ayant formé appel à titre principal du chef du jugement ayant fixé le montant de sa créance détenue à l'encontre des époux [O] et ayant en tout de cause conclu au débouté ' de l'ensemble des demandes, fins et conclusions' de Mme [V] [O], peut développer dans la motivation de ses conclusions une argumentation tendant à s'opposer à l'allocation des dommages et intérêts sollicités pour négligence de sa part.

Dans ces conditions, il n'y a pas lieu de déclarer irrecevable l'argumentation présentée par le CIFD au soutien de son absence de responsabilité.

Sur la fixation du montant de la créance détenue par le CIFD à l'encontre de Mme [V] [O]

Par arrêt en date du 29 mars 2018, devenu définitif suite au rejet du pourvoi formé par décision de la Cour de Cassation du 26 février 2020, la cour d'appel de Nancy a condamné solidairement M. [U] [O] et Mme [V] [P] épouse [O] à payer à la SA Banque Patrimoine et Immobilier les sommes suivantes :

- au titre du prêt [n°2083085], la somme de 139 271,51 euros, majorée des intérêts à compter du 7 octobre 2016 au taux contractuel sur la somme de 106 347,53 euros et au taux légal sur celle de 11 338,24 euros, avec capitalisation des intérêts dans les termes de l'article 1154 du code civil,

- au titre du prêt [n°2083091], la somme de 175 023,53 euros, majorée des intérêts à compter du 7 octobre 2016 au taux contractuel sur la somme de 137 239,07 euros et au taux légal sur celle de 14 412,11 euros, avec capitalisation des intérêts dans les termes de l'article 1154 du code civil,

en déduction desquelles viendra le versement de 23 932,72 euros opéré depuis le dernier arrêté en date du 6 octobre 2016,

- au titre de l'article 700 du code de procédure civile, la somme de 5 000 euros.

Il convient de constater que le CIFD demande à la cour en dernier état de ses conclusions de dire que sa créance s'élève à la somme globale de 97 007,07 euros, arrêtée au 16 septembre 2022, outre les intérêts capitalisables jusqu'au parfait paiement, et verse aux débats un décompte détaillant les sommes dues établi le 16 septembre 2022.

Au préalable, il convient de relever que l'erreur prétendue sur le montant de la somme visée dans le cadre de la requête aux fins de saisie des rémunérations n'est pas une cause de nullité.

- sur les sommes dues au principal

Le décompte du 16 septembre 2022 dont se prévaut le CIFD mentionne une créance en principal d'un montant total de 271 429,60 euros détaillé comme suit :

- au titre du prêt n°2083085,

* capital restant dû : 139 271,51 euros,

* versements clients à déduire : 23 932,72 euros, soit la somme totale due au principal de 115 338,79  euros,

- au titre du prêt n°2083091,

* capital restant dû : 175 023,53 euros,

* versements clients à déduire : 23 932,72 euros, soit la somme totale due au principal de 151 090,81 euros,

- condamnation au titre de l'article 700 du code de procédure civile : 5 000 euros.

Par ailleurs, il y a lieu de constater que Mme [V] [O] ne formule aucune observation sur les sommes dues au principal.

Aussi, la créance en principal sera fixée à la somme de 271 429,60 euros, conformément aux dernières demandes du CIFD en ce qu'elles correspondent à la condamnation prononcée par la cour d'appel le 29 mars 2018, étant précisé que le décompte du 16 septembre 2022 auquel se rapporte le CIFD est manifestement erroné en ce qu'il a déduit deux fois la somme de 23 932,72 euros du montant dû au principal.

- sur les sommes venant déduction du principal

* sur les loyers saisis et sur la responsabilité du CIFD

Le décompte établi le 16 septembre 2022 dont se prévaut le CIFD mentionne la déduction d'une somme totale de 119 072,95 euros au titre de la saisie des loyers détaillée comme suit :

- au titre du prêt n°2083085 : 41 072,95 euros (lot n°111),

- au titre du prêt n°2083091 : 78 000 euros (lot n°143).

Or, force est de constater que l'arrêt de la cour d'appel indique précisément qu'une somme totale de 187 499,07 euros a été encaissée à la date du 10 février 2017 en exécution de la mesure de saisie-attribution des loyers versés par la SA Suites Inn, locataire des locaux financés, mise en oeuvre le 21 juillet 2009, et qu'un montant de 23 932,72 euros versé depuis le dernier décompte arrêté au 6 octobre 2016 doit venir en déduction des sommes réclamées.

Au surplus, le même arrêt précise que le prêt n°2083095, non concerné par la requête aux fins de saisie des rémunérations, a été soldé du fait des encaissements intervenus au terme des dernières écritures du CIFD.

Aussi, Mme [V] [O] ne peut utilement se prévaloir de la déduction de la totalité des sommes portées au crédit du décompte établi par l'huissier de justice chargé du recouvrement des loyers en date du 16 juin 2022 à hauteur de 327 378,13 euros (déduction faite d'une somme de 970,99 euros portée au crédit le 6 septembre 2009 dans le cadre d'une saisie-attribution), dans la mesure où sont pris en compte des loyers versés du 3 octobre 2009 au 1er mai 2022 correspondant pour partie aux encaissements pris en compte par l'arrêt de la cour d'appel du 29 mars 2018 jusqu'au 10 février 2017.

Pour autant, il ressort du décompte du 16 juin 2022 qu'une somme totale de 138 908,07 euros a été portée au crédit pour des loyers perçus postérieurement au 10 février 2017.

En effet, il y a lieu de constater de façon concordante que le précédent décompte produit par le CIFD le 1er mars 2021 comprend en annexe une rubrique intitulée ' disponibles d'huissier-saisie des loyers ' dont il ressort que la saisie des loyers a été affectée postérieurement au 10 février 2017 à hauteur de 53 716,95 euros jusqu'au 12 mai 2021 en paiement du prêt n°2083085, et à hauteur de 70 111 euros jusqu'au 27 juillet 2021 sur le prêt n°2083091.

Aussi, il convient de déduire des sommes dues par Mme [V] [O] les loyers saisis depuis le 10 février 2017 jusqu'au 1er mai 2022 inclus d'un montant total de 138 908,07 euros, tel que ressortant du décompte de l'huissier chargé des saisies de loyers du 16 juin 2022 et pris en compte par le décompte du 16 septembre 2022 produit par le CIFD seulement à hauteur de 119 072,95 euros.

En outre, Mme [V] [O] sollicite l'allocation de dommages et intérêts à hauteur de 46 295,89 euros correspondant à des loyers impayés que le CIFD n'aurait pas recouvrés dans le cadre de la saisie mise en oeuvre le 21 juillet 2009.

En effet, elle explique que, selon ses calculs, une somme totale de 344 084,82 euros aurait dû être saisie et venir en déduction des sommes dues, alors que le décompte de l'huissier du 16 juin 2022 mentionne une somme totale portée au crédit de 297 788,93 euros.

Néanmoins, il y a lieu de constater d'une part, que le tableau des loyers devant être perçus sur la période de 2009 à 2020 comprise établi par Mme [V] [O] concerne neufs lots, alors que les prêts concernés correspondent aux lots n°111 et 143, et d'autre part, porte pour partie sur une période prise en compte par l'arrêt de la cour d'appel du 29 mars 2018.

En tout état de cause, ce document établi par Mme [V] [O] elle-même ne saurait établir à la fois le défaut de diligence du CIFD dans la saisie des loyers des lots n°111 et n°143 ainsi que la preuve du préjudice en résultant.

Dans ces conditions, Mme [V] [O] ne saurait utilement se prévaloir de l'allocation de dommages et intérêts d'un montant de 46 295,89 euros devant venir en déduction des sommes dues.

* sur les sommes saisies en vertu de saisies-attribution

Le décompte établi le 16 septembre 2022 dont se prévaut le CIFD mentionne la déduction d'une somme totale de 1 350 euros perçue au titre des saisies attribution mises en oeuvre détaillée comme suit :

- au titre du prêt n°2083085 : 675 euros,

- au titre du prêt n°2083091 : 675 euros

Au contraire, Mme [V] [O] sollicite la déduction d'une somme totale de 3 754,32 euros au titre des saisies-attribution pratiquées le 27 juillet 2009 à hauteur de 970,99 euros et le 8 novembre 2018 à hauteur de 2 783,33 euros.

Pour autant, il ressort du décompte du 16 juin 2022, dont se prévaut Mme [V] [O], qu'une somme de 970,99 euros a été portée au crédit suite à un virement du CIC du 3 septembre 2009.

En outre, force est de constater que cette saisie est intervenue au cours de la période prise en compte par la cour d'appel dans son arrêt du 29 mars 2018.

Par ailleurs, s'agissant de la saisie-attribution dénoncée le 8 novembre 2018, le CIFD indique que la somme de 2 783,33 euros appréhendée le 27 décembre 2018 entre les mains de la banque CIC EST a permis, après compensation, d'apurer pour partie les frais de recouvrement forcé engagé par l'huissier de justice instrumentaire qui sont à la charge du débiteur, tel que ressortant de l'état de frais de l'huissier et du décompte qui déduit à ce titre deux sommes de 675 euros au titre du solde lui revenant le 4 avril 2019.

Néanmoins, il convient de relever d'une part, que les frais d'huissier demeurant à la charge du débiteur doivent être imputés séparément après vérification par le juge, et d'autre part, qu'une somme de 2 783,33 euros figure au titre des versements à déduire le 27 décembre 2018 dans la requête saisissant le juge de l'exécution sous l'intitulé ' acompte CIC EST SNVB '.

Aussi, il en résulte que le montant saisi à hauteur de 2 783,33 euros suivant dénonciation de saisie-attribution du 8 novembre 2018 doit venir en déduction des sommes dues au lieu et place de la somme de 1 350 euros (675 euros x2).

* sur le déblocage des assurances-vie nanties

Mme [V] [O] soutient que le déblocage des assurances-vie porte sur trois contrats pour chacun des trois prêts (soit à hauteur de 1 304,23 euros chacun) et correspond à un montant total à déduire de 3 912,69 euros.

Le CIDF indique au contraire que le décompte d'huissier du 16 septembre 2022 comporte l'imputation par deux fois de la somme de 1 261,53 euros correspondant au déblocage des contrats d'assurance-vie liés aux deux prêts concernés.

En l'espèce, Mme [V] [O] produit un courrier de la SA Generali Vie du 20 mars 2020 mentionnant une épargne atteignant au 31 décembre 2019 la somme de 1 304,23 euros dans le cadre d'un contrat Multi-placements à effet du 31 juillet 2018.

Néanmoins, ce courrier est afférent à un seul contrat pour lequel aucune référence n'est indiquée.

Aussi, Mme [V] [O] ne peut utilement solliciter la déduction d'une somme totale de 3 912,69 euros au titre des sommes débloquées sur les assurances-vie des trois prêts consentis par le CIFD.

Dans ces conditions, il convient de déduire des sommes dues, conformément au décompte du 16 septembre 2022, une somme totale de 2 523,06 euros (soit 1 261,53 euros au titre des assurances-vie des deux prêts concernés) correspondant au déblocage des contrats d'assurance-vie.

* sur la déduction du prix de vente du lot n°143

Il est constant qu'une somme de 66 260,81 euros, correspondant au prix de vente du lot n°143, doit être déduite des sommes dues, tel que ressortant du décompte du CIFD du 16 septembre 2022.

- sur les intérêts

Le décompte du 16 septembre 2022 mentionne une créance d'intérêts d'un montant total de 13 041,18 euros au 16 septembre 2022 détaillé comme suit :

- au titre du prêt n°2083085 :

* intérêts au taux contractuel sur la somme de 106 347,53 euros du 7 octobre 2016 au 16 septembre 2022 en tenant compte des règlements sur la période : 5 570,07 euros,

* intérêts au taux légal sur la somme de 11 338,24 euros du 7 octobre 2016 au 16 septembre 2022 en tenant compte des règlements sur la période : 586,86 euros,

- au titre du prêt n°2083091

* intérêts au taux contractuel sur la somme de 137 239,07 euros du 7 octobre 2016 au 16 septembre 2022 en tenant compte des règlements sur la période : 6 137,74 euros,

* intérêts au taux légal sur la somme de 14 412,11 euros du 7 octobre 2016 au 16 septembre 2022 en tenant compte des règlements sur la période : 746,81euros.

Pour autant, il résulte des développements précédents que le décompte du 16 septembre 2022 n'a pas pris en compte l'intégralité des règlements sur la période du 10 février 2017 au 16 septembre 2022 pour le calcul des intérêts tant au regard du montant des loyers saisis postérieurement au 10 février 2017, tel que ressortant du décompte de l'huissier chargé des saisies de loyers du 16 juin 2022, que du montant de la somme saisie en vertu de la saisie-attribution dénoncée le 8 novembre 2018.

Dans ces conditions, il y a lieu de considérer que le CIFD ne justifie pas, dans le cadre de sa requête en saisie des rémunérations de Mme [V] [O], du montant dû au titre des intérêts.

- sur les frais

Le décompte établi le 16 septembre 2022 mentionne une somme 1 743,44 euros au titre des ' frais de procédure imputables au client '.

Mme [V] [O] soutient que les frais mis en compte correspondent à des mesures inutiles en ce que d'une part, la réitération de la saisie-attribution à exécution successive des loyers par dénonciation du 10 janvier 2019 vient en concurrence avec la saisie à exécution successive des loyers entre les mains de Suites Inn (aux droits de laquelle est venu Appart City) en cours depuis le procès-verbal du 21 juillet 2009, et d'autre part, une saisie immobilière a été initiée le 10 juin 2020 alors qu'une proposition transactionnelle avait été transmise le 18 mai 2020.

En l'espèce, il y a lieu de constater au préalable que la somme de 1 743,44 euros n'est détaillée dans le cadre de la requête en saisie des rémunérations qu'à hauteur de 1 591,28 euros, et que le frais détaillés ne comprennent pas de frais afférents à des saisies immobilières.

Par ailleurs, la somme de 1 591,28 euros comprend deux fois le coût d'une requête en saisie des rémunérations, de sorte qu'une somme de 72,07 euros correspondant au coût de la requête supplémentaire doit venir en déduction.

En outre, concernant les saisies-attribution à exécution successive des loyers dénoncées les 21 juillet 2009 et 10 janvier 2019, il y a lieu de relever que leur effet attributif est à concurrence des sommes pour lesquelles elles ont été pratiquées.

Or, il convient de constater que la saisie-attribution dénoncée le 21 juillet 2009 a été pratiquée sur le fondement des copies exécutoires des trois actes authentiques de prêt accordés par la BPI pour un montant total figurant au décompte d'huissier de 422 509,42 euros.

Par suite, la saisie-attribution dénoncée le 10 janvier 2019 a été pratiquée en vertu de l'arrêt de la cour d'appel de Nancy du 29 mars 2018 revêtu de la formule exécutoire le 15 mai 2018 portant sur deux prêts consentis par la BPI (le troisième prêt ayant été soldé par les sommes saisies jusqu'au 10 février 2017) pour un montant total figurant au décompte d'huissier de 218 898,34 euros.

Aussi, la réitération de la saisie-attribution des loyers à exécution successive dénoncée le 10 janvier 2019 ne correspond pas à un acte inutile.

Dans ces conditions, les frais afférents à cette mesure d'exécution sont imputables à Mme [V] [O].

Dès lors, une somme de 1 519,21 euros doit être imputée au titre des frais de recouvrement engagés par le créancier et demeurant à la charge de Mme [V] [O].

- sur le montant total de la créance due par Mme [V] [O]

Il résulte des développements précédents que la créance du CIFD détenue solidairement à l'encontre des époux [O] peut être fixée à la somme totale de 62 473,54 euros détaillée comme suit :

* principal : 271 429,60 euros,

* frais : 1 519,21 euros,

* versements à déduire :

- 138 908,07 euros au titre de la saisie des loyers,

- 2 783,33 euros au titre de la saisie-attribution pratiquée le 8 novembre 2018,

- 2 523,06 euros au titre du déblocage des deux assurances-vie,

- 66 260,81 euros au titre du prix de vente.

Il est rappelé que le CIFD ne justifie pas dans le cadre de sa demande aux fins de saisie des rémunérations de Mme [V] [O] des intérêts dus calculés en tenant compte des paiements retenus au présent arrêt.

Le jugement déféré sera infirmé sur ce point.

Sur la demande de report de paiement et de suspension de la procédure de saisie immobilière

Mme [V] [O] a sollicité la confirmation du jugement rendu le 21 mai 2021 en ce qu'il a :

* accordé le report à deux ans du paiement de la créance du CIFD,

* ordonné que tous les paiements intervenus pendant la durée du report s'imputeront par priorité sur la créance en capital,

* rappelé que le délai de grâce suspend l'exigibilité de la créance du CIFD ainsi que de toutes les mesures d'exécution forcée qui auraient été engagées,

* ordonné l'arrêt du cours des intérêts de retard et des pénalités,

* rejeté la demande du CIFD de saisie de ses rémunérations.

Elle explique que le lot n°111 estimé à 85 900 euros fait l'objet d'un mandat de vente du 9 juillet 2020 et que le CIFD a signé une promesse de mainlevée des inscriptions sur ce lot le 7 juin 2022.

Au contraire, le CIFD expose que les époux [O] ne sont pas légitimes à obtenir des délais de grâce.

Il convient de préciser que lorsque le juge accorde des délais de paiement sans autoriser la saisie des rémunérations, il peut faire application de l'article 1343-5 alinéa 2 du code civil lui permettant d'ordonner que les sommes correspondant aux échéances reportées porteront intérêt à un taux réduit au moins égal au taux légal ou que les paiements s'imputeront d'abord sur le capital. Par ailleurs, lorsque la saisie des rémunérations est autorisée, l'article L. 3252-13 du code du travail permet d'ordonner la réduction des intérêts, le cas échéant à 0%, ou l'imputation des versements sur le capital.

Aussi, Mme [V] [O] a sollicité l'octroi de délais de paiement dans le cadre de l'article 1343-5 du code civil qui dispose que ' le juge peut, compte tenu de la situation du débiteur et en considération des besoins du créancier, reporter ou échelonner, dans la limite de deux années, le paiement des sommes dues. Par décision spéciale et motivée, il peut ordonner que les sommes correspondant aux échéances reportées porteront intérêt à un taux réduit au moins égal au taux légal, ou que les paiements s'imputeront d'abord sur le capital. Il peut subordonner ces mesures à l'accomplissement par le débiteur d'actes propres à faciliter ou à garantir le paiement de la dette. La décision du juge suspend les procédures d'exécution qui auraient été engagées par le créancier. Les majorations d'intérêts ou les pénalités prévues en cas de retard ne sont pas encourues pendant le délai fixé par le juge. '

En l'espèce, s'il est justifié par le CIFD de l'échec de discussions transactionnelles entre les parties au cours de la procédure de saisie des rémunérations suivant courriel du 19 octobre 2020, en revanche, il y a lieu de constater que par courriel du 2 juillet 2020, le CIFD prenait ' note de la mise en vente des biens de [Localité 7] (....) ' en sollicitant la transmission des mandats de vente, à défaut des compromis, ainsi qu'une ' proposition de soulte ' permettant de ' solder intégralement la condamnation '.

Or, il y a lieu de constater au préalable que le 10 juin 2020, le CIFD a fait délivrer à Mme [V] [O] un commandement de payer valant saisie immobilière des lots n°143 et n°111 financés par deux des prêts consentis non soldés par la saisie attribution des loyers à exécution successive dénoncée en 2009 et réitérée en 2019.

En outre, il résulte des pièces versées aux débats que Mme [V] [O] a justifié des mandats de vente pour les deux lots du 9 juillet 2020, et que le lot n°143 ayant fait l'objet d'un compromis de vente du 3 mars 2022 a été cédé le 2 juin 2022, le produit de la vente ayant été versé au CIFD.

En outre, par courrier du 7 juin 2022, le CIFD a indiqué au notaire chargé de la vente du lot n°111 qu'il donnerait mainlevée des garanties à réception des fonds issus de la vente évalués à 67 921 euros.

Dans ces conditions, la mauvaise foi de Mme [V] [O] ne saurait être caractérisée.

Par ailleurs, si le CIFD fait état de charges financières extrêmement lourdes pour se restructurer, ce qui nécessite de procéder au recouvrement des créances détenues dans un temps limité, il y a lieu de constater que les démarches permettant la vente amiable du lot n°111 sont très avancées et que le prix tiré de cette vente ne sera pas grevé des frais inhérents à la vente forcée.

Aussi, compte tenu de la situation de Mme [V] [O] et en considération des besoins du CIFD, il convient de rejeter la demande de saisie des rémunérations de Mme [V] [O] et de reporter, dans la limite de deux années accordée afin de vendre le lot n°111, le paiement des sommes dues, sur le fondement des dispositions de l'article 1343-5 du code civil qui prévoient, conformément au jugement déféré, que le délai de grâce suspend toutes les mesures d'exécution forcée qui auraient été engagées par le CIFD et que les majorations d'intérêts ou les pénalités prévues en cas de retard ne sont pas encourues pendant ce délai.

Pour le surplus, seul le juge de l'exécution statuant en matière de saisie immobilière a compétence pour se prononcer sur la suspension de la procédure dont il est saisi.

Dès lors, le jugement déféré sera confirmé sur ces points.

Par ailleurs, dans la mesure où le montant de la créance fixé par le présent arrêt ne comprend pas les sommes dues au titre des intérêts, la demande d'imputation des paiements par priorité sur le capital devient sans objet.

Sur les demandes accessoires

Le jugement critiqué sera confirmé en ses dispositions relatives aux dépens et aux frais irrépétibles.

Le CIFD qui succombe à hauteur de cour sera condamné aux dépens d'appel et débouté de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Mme [V] [O] a dû engager des frais non compris dans les dépens afin de faire valoir ses droits à hauteur de cour, de sorte qu'il convient de lui allouer la somme de 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS :

LA COUR, statuant publiquement, par arrêt contradictoire prononcé par mise à disposition au greffe, conformément aux dispositions de l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,

CONSTATE que le dispositif des dernières conclusions du CIFD n'a pas repris les prétentions déclarées irrecevables par l'ordonnance du 14 mars 2022,

DIT n'y avoir lieu à déclarer irrecevable l'argumentation développée par le CIFD au soutien de son absence de responsabilité,

INFIRME partiellement le jugement déféré et, statuant à nouveau,

DIT que la créance détenue par le CIFD à l'encontre de Mme [V] [O], tenue solidairement avec M. [U] [O], peut être fixée à la somme totale de 62 473,54 € (soixante deux mille quatre cent soixante treize euros et cinquante quatre centimes) détaillée comme suit :

- principal : 271 429,60 euros,

- frais : 1 519,21 euros,

- versements à déduire :

- 138 908,07 euros au titre de la saisie des loyers,

- 2 783,33 euros au titre de la saisie-attribution pratiquée le 8 novembre 2018,

- 2 523,06 euros au titre du déblocage des deux assurances-vie,

- 66 260,81 euros au titre du prix de vente du lot n°143,

CONSTATE que la demande d'imputation des paiements par priorité sur le capital est sans objet à défaut pour le CIFD de justifier dans le cadre de sa demande aux fins de saisie des rémunérations de Mme [V] [O] des intérêts dus calculés en tenant compte des paiements retenus au présent arrêt,

CONFIRME le jugement déféré pour le surplus,

Y ajoutant,

DEBOUTE le CIFD de sa demande sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNE le CIFD à payer à Mme [V] [O] la somme de 1 000 € (mille euros) sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNE le CIFD aux dépens d'appel.

Le présent arrêt a été signé par Monsieur MARTIN, président de chambre à la Cour d'Appel de NANCY, et par Mme Christelle CLABAUX-DUWIQUET, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LE GREFFIER, LE PRESIDENT,

Minute en vingt pages.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Nancy
Formation : Jex
Numéro d'arrêt : 21/01421
Date de la décision : 08/12/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-12-08;21.01421 ?
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