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10/11/2022 | FRANCE | N°21/01170

France | France, Cour d'appel de Nancy, Chambre sociale-2ème sect, 10 novembre 2022, 21/01170


ARRÊT N° /2022

PH



DU 10 NOVEMBRE 2022



N° RG 21/01170 - N° Portalis DBVR-V-B7F-EYRC







Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de NANCY

F 19/00221

07 avril 2021











































COUR D'APPEL DE NANCY

CHAMBRE SOCIALE - SECTION 2













APPELANTE :



S.A.R.L. H24 AMBULANCES prise en la

personne de ses représentants légaux domiciliés audit siège

[Adresse 2]

[Adresse 2]

Représentée par Me Wilfrid FOURNIER, avocat au barreau de NANCY









INTIMÉE :



Madame [B] [X]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Représentée par Me Vincent LOQUET substitué par Me DUMINIL de la SELARL FILOR AVOCATS, avocat...

ARRÊT N° /2022

PH

DU 10 NOVEMBRE 2022

N° RG 21/01170 - N° Portalis DBVR-V-B7F-EYRC

Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de NANCY

F 19/00221

07 avril 2021

COUR D'APPEL DE NANCY

CHAMBRE SOCIALE - SECTION 2

APPELANTE :

S.A.R.L. H24 AMBULANCES prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés audit siège

[Adresse 2]

[Adresse 2]

Représentée par Me Wilfrid FOURNIER, avocat au barreau de NANCY

INTIMÉE :

Madame [B] [X]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Représentée par Me Vincent LOQUET substitué par Me DUMINIL de la SELARL FILOR AVOCATS, avocats au barreau de NANCY

COMPOSITION DE LA COUR :

Lors des débats, sans opposition des parties

Président : BRUNEAU Dominique

Siégeant comme magistrat chargé d'instruire l'affaire

Greffier : RIVORY Laurène (lors des débats)

Lors du délibéré,

En application des dispositions de l'article 945-1 du Code de Procédure Civile, l'affaire a été débattue en audience publique du 09 Septembre 2022 tenue par BRUNEAU Dominique, magistrat chargé d'instruire l'affaire, qui a entendu les plaidoiries, les avocats ne s'y étant pas opposés, et en a rendu compte à la Cour composée de Raphaël WEISSMANN, président, Dominique BRUNEAU et Stéphane STANEK, conseillers, dans leur délibéré pour l'arrêt être rendu le 10 Novembre 2022 ;

Le 10 Novembre 2022, la Cour après en avoir délibéré conformément à la Loi, a rendu l'arrêt dont la teneur suit :

EXPOSÉ DU LITIGE ET PRÉTENTIONS RESPECTIVES DES PARTIES.

Mme [B] [X] a été nommée co-gérante non associée, non salariée de la société H24 à compter du 24 février 2018.

A compter de mai 2019, les parts du capital de la société H24 Ambulances ont été rachetées par l'un des associés.

En date du 28 mai 2019, Mme [B] [X] a adressé à la société H24 Ambulances un courrier par lequel elle indiquait 'démissionner'.

Par requête du 09 mai 2019, Mme [B] [X] a saisi le conseil de prud'hommes de Nancy aux fins de constatation de l'existence d'un contrat de travail entre elle et la société H24 Ambulances à compter du 24 février 2018.

Par jugement du 18 novembre 2020, le conseil de prud'hommes de Nancy a :

- dit que la société H24 Ambulances et Mme [B] [X] étaient liées par un contrat de travail à durée indéterminée ayant pris effet le 24 février 2018 ;

- dit que le litige relève de la compétence du juge du contrat de travail ;

- déclaré le conseil de prud'hommes de Nancy matériellement compétent pour connaître du litige qui lui est soumis ;

- renvoyé l'affaire pour être jugée au fond.

Les parties n'ayant pas interjeté appel de ce premier jugement, il est devenu définitif sur la reconnaissance de l'existence d'un contrat de travail entre Mme [B] [X] et la société H24 Ambulances.

Vu le jugement du conseil de prud'hommes de Nancy rendu le 07 avril 2021 qui a:

- prononcé la résiliation judiciaire du contrat de travail de Mme [X] aux torts de la société H24 Ambulances ;

- dit qu'il y a lieu à produire les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

- condamné la société H24 Ambulances à verser à Mme [B] [X] les sommes de :

- 4 992,66 euros à titre d'indemnité de préavis ;

- 499,26 euros de congés payés afférents ;

- 1 248,00 euros à titre d'indemnité de licenciement ;

- 4 992,00 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

- 29 420,00 euros à titre de rappels de salaire ;

- 2 942,00 euros de congés payés afférents ;

- 5 000,00 euros de dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail ;

- 3 031,00 euros à titre de remboursement des cotisations RSI ;

- 939,82 euros à titre de remboursement des frais de mutuelle ;

- 1 500,00 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- débouté Mme [B] [X] de sa demande au titre du travail dissimulé

- débouté la société H24 Ambulances de l'ensemble de ses demandes.

- condamné la société H24 Ambulances aux entiers frais et dépens de l'instance.

Vu l'appel formé par la société H24 Ambulances le 06 mai 2021,

Vu l'article 455 du code de procédure civile,

Vu les conclusions de la société H24 Ambulances déposées sur le RPVA le 22 décembre 2021, et celles de Mme [B] [X] déposées sur RPVA le 12 janvier 2022,

Vu l'ordonnance de clôture rendue le 09 février 2022,

La société H24 Ambulances demande à la cour:

- d'infirmer la décision du conseil des prud'hommes de Nancy en date du 7 avril 2021, sauf en ce qui concerne le travail dissimulé ;

- de juger que la rupture du contrat de travail de Mme [B] [X] résulte de sa démission ;

- de juger que Mme [B] [X] n'est pas recevable en ses réclamations tant au titre du travail dissimulé, de l'exécution déloyale du contrat de travail, de l'indemnité de licenciement, des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, de l'indemnité de préavis et des congés payés afférents, des rappels de salaire et congés payés afférents, du remboursement des cotisations RSI, du remboursement des cotisations mutuelle et de l'article 700 du code de procédure civile pour la procédure de première instance ;

- de condamner Mme [B] [X] à verser à la société H24 Ambulances une somme de 10 000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive ;

- de condamner Mme [B] [X] à verser à la société H24 Ambulances une somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile pour la procédure de première instance ainsi qu'une somme équivalente pour la procédure devant la cour d'appel.

Mme [B] [X] demande à la cour:

- d'infirmer le jugement du conseil de prud'hommes de Nancy du 7 avril 2021 en ce qu'il a débouté Mme [B] [X] de sa demande relative au travail dissimulé ;

- d'infirmer le jugement du conseil de prud'hommes de Nancy du 7 avril 2021 en ce qu'il a limité le montant des condamnations au titre du licenciement sans cause réelle et sérieuse et au titre des rappels de salaire et congés payés afférents ;

- statuant à nouveau sur ces points :

- de condamner la société H24 Ambulances à verser à Mme [B] [X] la somme de 21 268,73 euros pour travail dissimulé ;

- de condamner la société H24 Ambulances à verser à Mme [B] [X] les sommes suivantes :

- 10 000,00 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

- 42 222,66 euros à titre de rappel de salaire pour heures supplémentaires de mars 2018 à mai 2019

- 4 222,26 euros nets au titre des congés payés afférents ;

- de confirmer le jugement sur le surplus ;

- y ajoutant :

- de débouter la société H24 Ambulances de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions ;

- de condamner la société H24 Ambulances à verser à Mme [B] [X] la somme de 2 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile en appel, ainsi qu'aux entiers dépens.

Vu l'arrêt de la chambre sociale de la Cour d'appel de Nancy rendu le 19 mai 2022, lequel a :

- sursis à statuer sur les demandes,

- rouvert les débats,

- invité les parties à conclure sur la nature de la demande de Mme [B] [X] s'agissant du mode de rupture du contrat de travail,

- dit que les débats seront repris le Vendredi 9 septembre 2022 à 9 heures 30,

- dit que la notification du présent arrêt vaut convocation à ladite audience,

- dit n'y avoir lieu à révocation de l'ordonnance de clôture,

- réservé les dépens.

Vu les nouvelles conclusions de Mme [B] [X] déposées sur le RPVA le 30 juin 2022, la société H24 Ambulances n'ayant pas déposée de nouvelles conclusions.

Mme [B] [X] demande à la cour:

- d'infirmer le jugement du conseil de prud'hommes de Nancy du 7 avril 2021 en ce qu'il a débouté Mme [B] [X] de sa demande relative au travail dissimulé ;

- d'infirmer le jugement du conseil de prud'hommes de Nancy du 7 avril 2021 en ce qu'il a limité le montant des condamnations au titre du licenciement sans cause réelle et sérieuse et au titre des rappels de salaire et congés payés afférents ;

- de confirmer le jugement du conseil de prud'hommes de Nancy du 7 avril 2021 en ce qu'il a:

- prononcé la résiliation judiciaire du contrat de travail de Mme [X] aux torts de la société H24 Ambulances ;

- dit qu'il y a lieu à produire les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

- condamné la société H24 Ambulances à verser à Mme [B] [X] les sommes suivantes :

- 4 992,66 euros à titre d'indemnité de préavis ;

- 499,26 euros de congés payés afférents ;

- 1 248,00 euros à titre d'indemnité de licenciement ;

- 5 000,00 euros de dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail ;

- 3 031,00 euros à titre de remboursement des cotisations RSI ;

- 939,82 euros à titre de remboursement des frais de mutuelle ;

- 1 500,00 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamné la société H24 Ambulances sur le principe des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, des rappels de salaire et congés payés afférents, mais pas sur leur quantum

- condamné la société H24 Ambulances aux entiers frais et dépens de l'instance,

*

Statuant à nouveau, à titre principal,

- de prononcer la résiliation judiciaire du contrat de travail de Mme [B] [X] aux torts de l'employeur produisant les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse à la date du 28 mai 2019,

*

A titre subsidiaire,

- de requalifier la démission de Mme [B] [X] du 28 mai 2019 en prise d'acte produisant les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse en raison des manquements commis par la société H24 Ambulances,

*

- en conséquence, de condamner la société H24 Ambulances à verser à Mme [B] [X] les sommes suivantes :

- 10 000,00 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

- 4 992,66 euros nets indemnité de préavis,

- 499,26 euros nets congés payés sur préavis,

- 1 248,00 euros à titre d'indemnité de licenciement,

- de condamner la société H24 Ambulances à verser à Mme [B] [X] les sommes suivantes :

- 21 268,73 euros d'indemnité pour travail dissimulé,

- 42 222,66 euros de rappel de salaire pour heures supplémentaires de mars 2018 à mai 2019,

- 4 222,26 euros nets au titre des congés payés afférents

- 5 000,00 euros de dommages et intérêts pour manquement à l'obligation de loyauté,

- 3 031,00 euros de remboursement des cotisations RSI,

- 939,82 euros de remboursement des cotisations mutuelles,

*

En tout état de cause,

- de débouter la société H24 Ambulances de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,

- de condamner la société H24 Ambulances à verser à Mme [B] [X] la somme de 2 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile en appel, ainsi qu'aux entiers dépens.

SUR CE, LA COUR ;

La cour renvoie pour plus ample exposé des prétentions et moyens des parties aux conclusions déposées sur le RPVA par Mme [B] [X] le 30 juin 2022, et par la société H24 Ambulances le 22 décembre 2021.

- Sur le défaut de paiement des cotisations RSI.

Mme [B] [X] expose avoir réglé en lieu et place de la société H24 Ambulances la somme de 3031 euros au titre de cotisations RSI.

La société soutient que, du fait de la requalification de la relation contractuelle, ces cotisations n'ont pas de cause et qu'au surplus Mme [X] ne justifie pas les avoir réglées.

Si Mme [B] [X] produit (pièce n° 7 de son dossier) un appel de cotisations au titre d'une situation de travailleur indépendant, elle ne justifie pas du paiement de celles-ci.

La demande sera rejetée, et la décision entreprise sera infirmée sur ce point.

- Sur le remboursement des frais de mutuelle.

Mme [B] [X] expose que la société H24 Ambulances n'a pas réglée la totalité des cotisations de mutuelle, sommes qui lui ont été réclamées par l'organisme ; elle produit (pièce n° 36 de son dossier) un rappel de cotisation contenant une proposition de paiement étalé ;

La société ne conteste pas cette demande.

Il y sera donc fait droit, et la décision entreprise sera confirmée sur ce point.

- Sur le rappel de rémunération.

Il ressort des dispositions de l'article L 3171-4 en sa rédaction applicable au litige qu'en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l'appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu'il prétend avoir accomplies afin de permettre à l'employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d'y répondre utilement en produisant ses propres éléments. Le juge forme sa conviction en tenant compte de l'ensemble de ces éléments au regard des exigences rappelées aux dispositions légales et réglementaires précitées. Après analyse des pièces produites par l'une et l'autre des parties, dans l'hypothèse où il retient l'existence d'heures supplémentaires, il évalue souverainement, sans être tenu de préciser le détail de son calcul, l'importance de celles-ci et fixe les créances salariales s'y rapportant.

Mme [B] [X] expose qu'elle a été amenée à effectuer un nombre important d'heures de travail qui ne lui ont pas été réglées.

La société H24 Ambulances soutient d'une part que les documents apportés par Mme [B] [X] ne sont pas probants ; que d'autre part elle a perçu des sommes au titre de son mandat social et qu'en tout état de cause elle a été rémunerée au delà des dispositions conventionnelles applicables ; qu'enfin elle apporte des documents, établis notamment par son expert-comptable, qui établissent le décompte exact des sommes perçues par la salariée.

Mme [B] [X] apporte au dossier des 'feuilles de route' et des relevés horaires (pièces n° 6 et 6 bis de son dossier) faisant état d'horaires qu'elle dit avoir effectués ; il importe peu que, comme le soutient la société H24 Ambulances, que ces décomptes contiennent quelques imprécisions, dans la mesure où ils permettent à l'employeur d'y répondre utilement.

Par ailleurs, la société H24 Ambulances fait valoir que les 'feuilles de route' ne sont pas fiables en ce qu'elles apparaissent surchargées, voire falsifiées.

Toutefois, le fait que des initiales correspondant au nom d'autres salariés de la société sur ces documents soient biffées et remplacées par celles de Mme [B] [X] ne démontre pas que ces documents sont insincères, étant relevé que la société ne sollicite pas qu'il soit procédé à une vérification d'écriture.

La société H24 Ambulances apporte au dossier des tableaux (pièces n° 19, 20 et 22) faisant état d'horaires effectués par la salariée, ces tableaux étant établis par un logiciel spécialisé ;

Toutefois, ces documents ne portent aucune mention du logiciel dont il s'agit et ne permettent pas de déterminer le procédé employé pour les établir.

La société apporte également une attestation émanant de son expert comptable récapitulant les rémunérations perçues par Mme [X], rémunérations qui excèdent les dispositions conventionnelles ;

Toutefois, l'attribution au salarié d'une rémunération supérieure à celle prévue par les dispositions conventionnelles n'a pas pour effet d'exclure l'application des dispositions légales relatives à la rémunération des heures supplémentaires ;

Par ailleurs, si la société H24 Ambulances soutient qu'une partie de ces rémunérations ont été versées au titre du mandat social détenu par Mme [B] [X], elle ne forme pas de demande de compensation entre ces sommes et celles qui sont dues au titre d'heures supplémentaires consécutivement à la requalification de la relation contractuelle, la différence de fondement juridique de ces créances excluant par ailleurs une compensation de droit.

Dès lors, il convient de faire droit à la demande en son principe.

C'est par une exacte appréciation des éléments apportés par Mme [B] [X] relatifs à ses horaires que les premiers juges ont évalué le montant des rémunérations qui lui sont dues à la somme de 29 420 euros.

La décision entreprise sera confirmée sur ce point.

- Sur la demande au titre du travail dissimulé.

L'article L.8221-5, 2°, du code du travail dispose notamment qu'est réputé travail dissimulé par dissimulation d'emploi salarié le fait pour tout employeur :

1° Soit de se soustraire intentionnellement à l'accomplissement de la formalité prévue à l'article L. 1221-10, relatif à la déclaration préalable à l'embauche ;

...

3° Soit de se soustraire intentionnellement aux déclarations relatives aux salaires ou aux cotisations sociales assises sur ceux-ci auprès des organismes de recouvrement des contributions et cotisations sociales ou de l'administration fiscale en vertu des dispositions légales.

Toutefois, la dissimulation d'emploi salarié prévue par ces textes n'est caractérisée que s'il est établi que l'employeur a agi de manière intentionnelle.

Mme [B] [X] expose que la société H24 Ambulances a sciemment voulu faire une utilisation frauduleuse du statut d'associé gérant pour se soustraire au statut du salariat alors que ses fonctions s'exerçaient dans ce cadre, ainsi que le démontre la requalification de la relation contractuelle en contrat de travail, qualification que la société n'a pas remise en cause ; qu'en la soumettant au régime juridique et social des gérants non salariés alors que son mandat social était fictif, la société H24 Ambulances a intentionnellement commis des faits relevant des dispositions rappelées.

Toutefois, le choix erroné d'un statut juridique qui fait l'objet d'une requalification postérieure ne constitue pas à lui seul l'élément intentionnel exigé par ces dispositions.

En conséquence, la demande sera rejetée, et la décision entreprise sera confirmée sur ce point.

- Sur la demande relative à l'exécution déloyale du contrat de travail.

Mme [B] [X] expose que la société H24 Ambulances a manqué à son obligation d'exécution loyale du contrat:

- en l'excluant de fait du rôle de gérant ;

- en ne rémunérant pas les heures supplémentaires exécutées ;

- en organisant le dépassement de la durée maximale hebdomadaire de travail ;

- en ne veillant pas au respect des repos hebdomadaires.

- en ne payant pas les cotisations sociales et de mutuelle qui lui incombaient.

Il ressort des des 'feuilles de route' et des relevés horaires que ces griefs sont établis ;

Ils constituent un manquement de l'employeur à à son obligation d'exécution loyale du contrat.

Toutefois, Mme [B] [X] ne démontre pas un préjudice distinct de celui réparé par le rappel de rémunération et l'indemnité pour travail dissimulé.

En conséquence, la demande sera rejetée et la décision entreprise sera infirmée sur ce point.

- Sur la demande relative à la rupture du contrat.

- Sur la demande de résiliation judiciaire du contrat de travail.

La prise d'acte de la rupture par le salarié en raison de faits qu'il reproche à l'employeur entraîne la cessation immédiate du contrat de travail en sorte qu'il n'y a plus lieu de statuer sur la demande de résiliation judiciaire introduite auparavant.

Il ressort du dossier que Mme [B] [X] a saisi le conseil de prud'hommes d'une demande de résiliation judiciaire du contrat de travail le 9 mai 2019 ; qu'elle a démissionné de son 'mandat de gérant' par lettre du 28 mai 2019.

Il ressort de cette lettre que Mme [B] [X] formule à l'encontre de la société H24 Ambulances un certain nombre de griefs relatifs à ses conditions de travail ; dès lors, par l'effet de la requalification, cette rupture présente la nature d'une prise d'acte.

Dès lors, la demande de résiliation judiciaire est sans objet ;

La décision entreprise sera infirmée sur ce point.

- Sur la validité de la prise d'acte.

Il résulte de la combinaison des articles L.1231-1, L.1237-2 et L.1235-1 du code du travail que la prise d'acte permet au salarié de rompre le contrat de travail en cas de manquement suffisamment grave de l'employeur qui empêche la poursuite du contrat de travail.

En cas de prise d'acte de la rupture du contrat de travail par le salarié, cette rupture produit, soit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse si les faits invoqués la justifiaient, soit, dans le cas contraire, d'une démission.

Il appartient au salarié d'établir les faits qu'il allègue à l'encontre de l'employeur.

Mme [B] [X] expose que l'employeur a gravement manqué à ses obligations contractuelles, ces manquements ayant rendu la poursuite du contrat de travail impossible.

Au regard des manquements de l'employeur relatif au grand nombre d'heures supplémentaires effectuées par la salariée, la poursuite du contrat de travail a été rendue impossible ; Mme [B] [X] a donc à bon droit pris acte de la résiliation du contrat aux torts de l'employeur.

La prise d'acte de la résiliation du contrat de travail aux torts de l'employeur produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Il sera fait droit à la demande sur ce point.

- Sur les conséquences indemnitaires de la rupture du contrat de travail.

La rémunération mensuelle moyenne brute de Mme [B] [X] était de 2496,33 euros.

Elle avait à la date de la rupture du contrat une ancienneté d'un an et trois mois.

C'est par une exacte appréciation de ces éléments que les premiers juges ont fixé les sommes dues à Mme [B] [X] à:

- 4 992,66 euros à titre d'indemnité de préavis ;

- 499,26 euros de congés payés afférents ;

- 1 248,00 euros à titre d'indemnité de licenciement.

La décision entreprise sera confirmée sur ces points.

- Sur l'indemnité pour licenciement pour cause réelle et sérieuse.

Mme [B] [X] avait 39 ans et 1 an et 3 mois d'ancienneté à la date de la rupture du contrat de travail ;

Elle justifie avoir exercé à compter du 10 juin 2019 une activité d'ambulancier dans le cadre de contrats à durée déterminée, puis avoir été reçue au concours d'aide-soignant ; elle n'apporte toutefois aucun élément sur le niveau de rémunération dont elle disposait pour ces emplois.

Conformément aux dispositions de l'article L 1235-3 du code du travail, il sera fait droit à la demande à hauteur d'un mois de salaire, soit la somme de 2496,33 euros.

La décision sera infirmée sur ce point.

La société H24 Ambulances, qui succombe, supportera les dépens de l'instance.

Il apparaît inéquitable de laisser à la charge de Mme [B] [X] l'intégralité des frais irrépétibles qu'elle a exposés ; il sera fait droit à la demande à hauteur de 2000 euros.

PAR CES MOTIFS:

La Cour, chambre sociale, statuant par arrêt contradictoire mis à disposition au greffe et après débats en audience publique et après en avoir délibéré,

INFIRME le jugement rendu le 7 avril 2021 par le conseil de prud'hommes de Nancy en ce qu'il a:

- prononcé la résiliation judiciaire du contrat de travail de Mme [X] aux torts de la société H24 Ambulances ;

- condamné la société H24 Ambulances à verser à Mme [B] [X] les sommes de :

- 4 992,00 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

- 5 000,00 euros de dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail ;

- 3 031,00 euros à titre de remboursement des cotisations RSI ;

STATUANT A NOUVEAU sur ces points ;

DIT que la rupture de la relation contractuelle entre Mme [B] [X] et la société H24 Ambulance présente la nature d'une prise d'acte ;

CONDAMNE la société H24 Ambulances à verser à Mme [B] [X] la somme de 2496,33 euros (deux mille quatre cent quatre vingt seize euros et trente trois centimes) à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

DEBOUTE Mme [B] [X] de ses autres demandes ;

DEBOUTE la société H24 Ambulances de ses demandes ;

Y ajoutant:

CONDAMNE la société H24 Ambulances aux dépens d'appel ;

LA CONDAMNE à payer à Mme [B] [X] une somme de 2000 euros (deux mille euros) au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Ainsi prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Et signé par Monsieur Raphaël WEISSMANN, Président de Chambre, et par Madame Laurène RIVORY, Greffier.

LE GREFFIER LE PRESIDENT DE CHAMBRE

Minute en onze pages


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Nancy
Formation : Chambre sociale-2ème sect
Numéro d'arrêt : 21/01170
Date de la décision : 10/11/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-11-10;21.01170 ?
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