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04/11/2022 | FRANCE | N°21/02485

France | France, Cour d'appel de Nancy, Première présidence, 04 novembre 2022, 21/02485


COUR D'APPEL DE NANCY

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Requête en indemnisation à raison

d'une détention provisoire

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N° RG 21/02485 - N° Portalis DBVR-V-B7F-E3ML



Minute : 9/2022

du 04 Novembre 2022







REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



A l'audience du 16 Septembre 2022, présidée par Monsieur Marc JEAN-TALON, Premier Président de la Cour d'Appel de NANCY, assisté de Madame Céline PAPEGAY, greffier et statuant sur la requête

enregistrée au secrétariat de la Première Présidence le 15 Octobre 2021 sous le numéro N° RG 21/02485 - N° Portalis DBVR-V-B7F-E3ML, conformément a...

COUR D'APPEL DE NANCY

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Requête en indemnisation à raison

d'une détention provisoire

--------------------------------------

N° RG 21/02485 - N° Portalis DBVR-V-B7F-E3ML

Minute : 9/2022

du 04 Novembre 2022

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

A l'audience du 16 Septembre 2022, présidée par Monsieur Marc JEAN-TALON, Premier Président de la Cour d'Appel de NANCY, assisté de Madame Céline PAPEGAY, greffier et statuant sur la requête enregistrée au secrétariat de la Première Présidence le 15 Octobre 2021 sous le numéro N° RG 21/02485 - N° Portalis DBVR-V-B7F-E3ML, conformément aux dispositions de l'article 149-2 du Code de Procédure Pénale et formée par :

Monsieur [X] [V]

né le [Date naissance 1] 1987 à [Localité 4] (Meurthe-et-Moselle)

demeurant [Adresse 2]

[Localité 3]

Représenté par Maître Eléonore DUPLEIX, avocat au barreau de NANCY, substituée par Maître Andreas GARCIA TRULA, avocat au barreau de NANCY

L'agent judiciaire de l'État étant représenté par Maître Hélène MASSIN TRACHEZ, membre de la SELAS DEVARENNE ASSOCIES GRAND EST, avocat au barreau de NANCY, substituée par Maître Charlotte JACQUENET, avocat au barreau de NANCY.

Le ministère public étant représenté aux débats par Monsieur Philippe RENZI, avocat général près la cour d'appel de NANCY.

Vu la requête déposée le 15 octobre 2021 par Maître Eléonore DUPLEIX au nom de M. [X] [V] notifiée par lettre recommandée avec avis de réception le 19 octobre 2021 ;

Vu les conclusions de l'agent judiciaire de l'État notifiées par lettre recommandée avec avis de réception le 22 décembre 2021 ;

Vu les conclusions du procureur général près la cour d'appel de Nancy, notifiées par lettre recommandée avec avis de réception le 24 mars 2022 ;

Vu l'avis de fixation à l'audience du 16 septembre 2022 ;

Vu les articles 149 à 150, R. 26 à R. 40-22 du code de procédure pénale ;

EXPOSE DU LITIGE

M. [X] [V] a été renvoyé le 11 février 2021 devant le tribunal correctionnel de Nancy, selon la procédure de comparution immédiate, pour avoir commis le délit de vols par effraction dans un local d'habitation ou un lieu d'entreposage de marchandises ou matériels, en état de récidive légale.

Il a été placé en détention provisoire le même jour par le juge des libertés et de la détention.

Le tribunal correctionnel, statuant le 12 février 2021, l'a déclaré coupable d'avoir commis les faits reprochés, l'a condamné à la peine de 1 an d'emprisonnement et l'a maintenu en détention.

Par arrêt du 7 avril 2021, la cour d'appel de Nancy a maintenu M. [V] en détention.

Puis, par arrêt rendu le 15 avril 2021, la même cour a infirmé le jugement du 12 février 2021 et a renvoyé M. [V] des fins de la poursuite.

Suivant requête parvenue au secrétariat de la première présidence le 15 octobre 2021, M. [X] [V] a sollicité l'indemnisation de sa détention provisoire à hauteur des sommes de :

- 3.109,04 euros au titre de son préjudice matériel, correspondant à 2 mois de salaire,

- 4.000 euros en réparation de son préjudice moral,

- 2.000 euros au titre des frais non compris dans les dépens.

L'agent judiciaire de l'État a opposé à titre principal l'irrecevabilité de la requête faute de justifier le caractère définitif de la décision de relaxe. Il a conclu au fond à la réduction à 3.000 euros de la demande au titre du préjudice moral et au rejet de celle présentée au titre du préjudice matériel.

Le procureur général près cette cour a soutenu le rejet de la requête en ce qui concerne le préjudice matériel et la réduction du surplus des demandes à de plus justes proportions.

Lors des débats, tenus à l'audience du 16 septembre 2022, les parties ont comparu et maintenu, chacune, la position développée dans leurs écritures.

Le demandeur a eu la parole en dernier.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur la recevabilité de la requête

En application de l'article 149 du code de procédure pénale, la personne qui a fait l'objet d'une détention provisoire au cours d'une procédure terminée à son égard par une décision de non-lieu, de relaxe ou d'acquittement devenue définitive a droit, à sa demande, à réparation intégrale du préjudice moral et matériel que lui a causé cette détention.

En l'espèce, M. [X] [V] a bénéficié d'une décision de relaxe rendue par la cour d'appel de céans le 15 avril 2021, devenue définitive comme en justifie le certificat de non-pourvoi en date du 25 janvier 2022, a présenté sa requête dans le délai de six mois fixé par l'article 149-2 du code de procédure pénale et n'apparaît pas se trouver dans l'un des cas d'exclusion prévus par l'article 149 précité.

Sa requête est donc recevable.

Sur le bien-fondé de la requête

S'agissant du préjudice moral

Le préjudice moral est évalué en tenant compte en particulier de :

- de la situation personnelle et familiale du requérant,

- de sa situation professionnelle,

- de l'existence ou non d'antécédents judiciaires,

- des conditions de la détention,

- de la durée de la détention.

M. [X] [V], alors âgé de 33 ans, célibataire sans enfant, a été placé en détention provisoire du 11 février 2021 au 15 avril 2021, soit durant 64 jours.

Il a ainsi nécessairement subi un préjudice moral résultant du choc carcéral ressenti par toute personne brutalement et injustement privée de liberté, et prolongé durant plus de deux mois.

Il n'importe qu'il ait précédemment connu un important passé pénal et carcéral, le choc résultant pour une personne innocente de son incarcération étant nécessairement élevé.

Il y a ainsi lieu de lui accorder la réparation sollicitée, qui apparaît indemniser intégralement le préjudice subi.

S'agissant du préjudice matériel

L'indemnité réparant la perte de revenus est de nature à remettre le demandeur dans la position dans laquelle il se serait trouvé s'il n'avait pas été détenu.

En l'espèce, si M. [V] établit par la production de contrats et bulletins de salaire avoir travaillé régulièrement après sa sortie de détention, il ne fournit aucun élément justificatif de sa situation antérieure.

M. [V] se fonde seulement à ce titre sur un courrier établi par M. [S] le 12 octobre 2021, selon lequel celui-ci, entrepreneur, recherchait un plombier pour les travaux de la piscine [Localité 4] [5], avait prévu d'engager M. [V] comme intérimaire, n'a pas trouvé un autre plombier dans la région et a dû attendre la sortie de M. [V] en avril 2021.

Toutefois ce seul document, qui ne saurait constituer une attestation et est très imprécis quant aux contacts préalablement noués avec M. [V], est insuffisant à justifier que ce dernier aurait été employé entre le 11 février et le 15 avril 2021 s'il n'avait été incarcéré, à défaut notamment de contrat signé.

La demande formée au titre du préjudice matériel doit alors être rejetée.

S'agissant des frais non compris dans les dépens

Il serait inéquitable que M. [X] [V] conserve la charge intégrale des frais non compris dans les dépens qu'il a déboursés du fait de la présente instance. La somme de 1.500 euros lui sera en conséquence accordée en application de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement, contradictoirement et en premier ressort,

Déclarons recevable en la forme la requête de M. [X] [V] ;

Lui allouons, en indemnisation de la détention provisoire injustifiée dont il a fait l'objet, les sommes de :

4.000 euros, en réparation de son préjudice moral,

1.500 euros, au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

Rejetons le surplus de la demande ;

Rappelons qu'en application de l'article R. 40 du code de procédure pénale, la présente décision est assortie de plein droit de l'exécution provisoire.

Laissons les frais à la charge de l'État.

Ainsi fait, jugé et prononcé par Monsieur Marc JEAN-TALON, premier président de la cour d'appel de NANCY, assisté de Madame Céline PAPEGAY, greffier, conformément aux dispositions de l'article 149-1 du code de procédure pénale.

Le greffierLe premier président

Céline PAPEGAY Marc JEAN-TALON


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Nancy
Formation : Première présidence
Numéro d'arrêt : 21/02485
Date de la décision : 04/11/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-11-04;21.02485 ?
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