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19/10/2022 | FRANCE | N°21/02902

France | France, Cour d'appel de Nancy, Chambre sociale-1ère sect, 19 octobre 2022, 21/02902


ARRÊT N° /2022

SS



DU 19 OCTOBRE 2022



N° RG 21/02902 - N° Portalis DBVR-V-B7F-E4JY







Pole social du TJ de CHARLEVILLE-MEZIERES

20/00049

19 novembre 2021











































COUR D'APPEL DE NANCY

CHAMBRE SOCIALE

SECTION 1









APPELANTE :



Etablissement URSSAF CHAMPAGNE ARDENNE prise en la person

ne de son représentant légal pour ce domicilié au siège social

[Adresse 3]

[Localité 4]

Représentée par Me Yves SCHERER de la SCP YVES SCHERER, avocat au barreau de NANCY









INTIMÉE :



S.A.S. SOCIETE DE [5] prise en la personne de son représentant légal pour ce domicilié au siège social

[...

ARRÊT N° /2022

SS

DU 19 OCTOBRE 2022

N° RG 21/02902 - N° Portalis DBVR-V-B7F-E4JY

Pole social du TJ de CHARLEVILLE-MEZIERES

20/00049

19 novembre 2021

COUR D'APPEL DE NANCY

CHAMBRE SOCIALE

SECTION 1

APPELANTE :

Etablissement URSSAF CHAMPAGNE ARDENNE prise en la personne de son représentant légal pour ce domicilié au siège social

[Adresse 3]

[Localité 4]

Représentée par Me Yves SCHERER de la SCP YVES SCHERER, avocat au barreau de NANCY

INTIMÉE :

S.A.S. SOCIETE DE [5] prise en la personne de son représentant légal pour ce domicilié au siège social

[Adresse 2]

[Localité 1]

Représentée par Me Serge DUPIED de la SELARL SERGE DUPIED, avocat au barreau de NANCY

COMPOSITION DE LA COUR :

Lors des débats, sans opposition des parties

Président :M. HENON

Siégeant en conseiller rapporteur

Greffier :Madame TRICHOT-BURTE (lors des débats)

Lors du délibéré,

En application des dispositions de l'article 945-1 du Code de Procédure Civile, l'affaire a été débattue en audience publique du 21 Septembre 2022 tenue par M. HENON, magistrat chargé d'instruire l'affaire, qui a entendu les plaidoiries, les avocats ne s'y étant pas opposés, et en a rendu compte à la Cour composée de Guerric HENON, président, Dominique BRUNEAU et Catherine BUCHSER-MARTIN, conseillers, dans leur délibéré pour l'arrêt être rendu le 19 Octobre 2022 ;

Le 19 Octobre 2022, la Cour après en avoir délibéré conformément à la Loi, a rendu l'arrêt dont la teneur suit :

FAITS ET PROCÉDURE :

La SAS SOCIETE DE [5] (ci-après désignée SAS [5]) a fait l'objet de la part de l'union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales de CHAMPAGNE ARDENNE (ci-après désignée l'URSSAF) d'une vérification de l'application des législations de sécurité sociale, d'assurance chômage et de garantie des salaires, pour la période du 1er janvier 2016 au 31 décembre 2017.

Par lettre du 7 juin 2019, l'URSSAF a communiqué à la SAS [5] ses observations relatives aux points suivants :

1. forfait social et participation patronale aux régimes de prévoyance au 01/01/2012 (crédit de 116 €)

2. réduction du taux de la cotisation AF sur les bas salaires (crédit de 27 €)

3. réduction générale des cotisations : absences ' proratisation (crédit de 1 979 €)

4. prise en charge par l'employeur de contraventions (redressement de 263 €)

5. retraite supplémentaire- non-respect du cadre collectif (redressement de 590 €)

6. prévoyance complémentaire : non-respect du cadre collectif (redressement de 971 €)

7. PEE-abondement : caractère collectif et critères d'attribution (redressement de 696 €)

8. PERCO- abondement : caractère collectif et critères d'attribution (redressement de 696 €)

9. prise en charge de dépenses personnelles du salarié- vêtements (redressement de 2 536 €)

10. prise en charge de dépenses personnelles du salarié- vêtements- dépenses non justifiées (redressement de 688 €)

11. primes diverses (redressement de 431 €)

12. frais professionnels non justifiés- principes généraux (redressement de 50 673 €)

13. non fourniture de documents : fixation forfaitaire de l'assiette (redressement de 763 €).

et a conclu à un rappel de cotisations et contributions de sécurité sociale, d'assurance chômage et de garantie des salaires d'un montant de 56 185 €.

La SAS [5] n'a pas contesté ce redressement.

Par courrier recommandé avec accusé de réception du 28 octobre 2019, l'URSSAF a adressé à la SAS [5] une mise en demeure aux fins de recouvrement de la somme de 56 185 € en cotisations et 5 789 € en majorations, soit un total de 61 975 €.

Ce courrier a été retourné à l'URSSAF avec la mention « pli avisé non réclamé ».

Le 10 février 2020, l'URSSAF a fait signifier à la SAS [5] une contrainte n° 4688859 émise le 4 février 2020 portant sur un montant de 61 975 €.

Par requête expédiée le 24 février 2020, la SAS [5] a formé opposition à cette contrainte devant le pôle social du tribunal judiciaire de Charleville-Mézières.

Par jugement RG 20/49 du 19 novembre 2021, le pôle social du tribunal judiciaire de Charleville-Mézières a :

- déclaré recevable l'opposition à contrainte formée par la société de [5],

- annulé la contrainte établie le 4 février 2020 par l'Urssaf Champagne Ardenne, pour un montant de 52 768 euros au titre de cotisations impayées et majorations de retard sur la période de janvier 2016 à décembre 2017,

- condamné l'Urssaf à restituer à la société [5] la somme de 52 768 euros,

- validé la contrainte établie le 4 février 2020 par l'Urssaf Champagne Ardenne pour un montant de 3 790,82 euros au titre de cotisations impayées et majorations de retard sur la période de janvier 2016 à décembre 2017,

- débouté la société [5] de sa demande de remise des majorations de retard appliquées par l'Urssaf sur la période de janvier 2016 à décembre 2017,

- condamné l'Urssaf à payer les frais de signification résultant de la contrainte,

- condamné l'Urssaf à supporter les dépens exposés à compter du 1er janvier 2019,

- condamné l'Urssaf à payer à la société [5] la somme de 750 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,

- rappelé que la décision statuant sur opposition est exécutoire de plein droit à titre provisoire.

Par acte du 10 décembre 2021, l'URSSAF de CHAMPAGNE ARDENNE a interjeté appel à l'encontre de ce jugement.

A l'audience du 1er juin 2022, l'affaire a été renvoyée au 21 septembre 2022 à la demande des parties. Elle a été plaidée à cette dernière audience.

PRÉTENTIONS DES PARTIES :

L'URSSAF de CHAMPAGNE ARDENNE, représentée par son avocat a repris ses conclusions reçues au greffe le 15 avril 2022 et a sollicité ce qui suit :

- juger que la société ne peut contester le bienfondé du redressement dans le cadre d'une opposition à contrainte,

- constater que la procédure de contrôle est parfaitement régulière tant sur la forme que sur le fond,

- constater que la contrainte délivrée le 4 février 2020 est parfaitement régulière tant sur la forme que sur le fond,

- écarter les pièces produites par la société dans le cadre de l'opposition à contrainte et non soumises à l'inspecteur dans le cadre de la procédure de contrôle,

- juger subsidiairement que la société ne pouvait octroyer simultanément des indemnités de panier et des indemnités de grand déplacement en excluant ces deux indemnités de l'assiette des cotisations,

En conséquence et statuant à nouveau,

- réformer le jugement rendu le 19 Novembre 2021 par le pôle social du tribunal judiciaire de CHARLEVILLE MEZIERES,

- valider la contrainte du 4 Février 2020 pour son entier montant,

- constater que les chefs de redressement suivants ne sont pas contestés :

Chef de redressement n°1 - forfait social et participation patronale aux régimes de prévoyance au 01/01/2012

Chef de redressement n°2 - réduction du taux de la cotisation sur les bas salaires

Chef de redressement n°3 - réduction générale des cotisations : absences - proratisation

Chef de redressement n° 4 - prise en charge par l'employeur de cotisations

Chef de redressement n° 6 - prévoyance complémentaire : non-respect du caractère collectif

Chef de redressement n° 9 - prise en charge de dépenses personnelles du salarie ' vêtements

Chef de redressement n° 10 - prise en charge de dépenses personnelles du salarie - vêtements - dépenses non justifiées

Chef de redressement n° 11 - primes diverses

- maintenir le chef de redressement n° 7 - PEE - abondement : caractère collectif et critères d'attribution,

- maintenir le chef de redressement n° 8 - perco - abondement: caractère collectif et critères d'attribution,

- maintenir le chef de redressement n° 12 - Frais professionnels non justifiés ' principes généraux,

- valider la contrainte émise le 4 Février 2020 et signifiée le 10 Février 2020 pour un montant de 61 975 euros,

- condamner la société au paiement d'une indemnité de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

La SAS SOCIETE DE [5], représentée par son avocat, a repris ses conclusions reçues au greffe le 25 mai 2022 et a sollicité ce qui suit :

- constater que l'URSSAF DE CHAMPAGNE-ARDENNE ne pouvait consigner, aux termes de sa lettre d'observations du 3 mai 2019, qu'il y avait lieu à redressement pour un montant en principal de 56 186,00 €,

- confirmer en toutes ses dispositions le jugement rendu par le tribunal judiciaire de CHARLE-VILLE-MEZIERES le 19 novembre 2021,

En sus,

- condamner l'URSSAF DE CHAMPAGNE-ARDENNE à devoir lui verser une indemnité d'un montant de 2 000,00 € par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner enfin l'URSSAF DE CHAMPAGNE-ARDENNE aux entiers dépens d'appel.

Pour l'exposé des moyens des parties, il convient de faire référence aux conclusions sus mentionnées, reprises oralement à l'audience.

L'affaire a été mise en délibéré au 19 octobre 2022 par mise à disposition au greffe par application des dispositions de l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile.

SUR CE, LA COUR :

Sur l'absence de contestation de la mise en demeure :

Aux termes de l'article R133-3 du code de la sécurité sociale, le débiteur peut former opposition à une contrainte par lettre recommandée avec demande d'avis de réception adressée au secrétariat dudit tribunal compétent dans les quinze jours à compter de la notification ou de la signification. L'opposition doit être motivée; une copie de la contrainte contestée doit lui être jointe.

Par ailleurs, par arrêt du 4 avril 2019 n°18-12014, la deuxième chambre civile de la cour de cassation avait considéré qu'il résulte des dispositions des articles R133-3 et R142-18 du code de la sécurité sociale, qui ne méconnaissent pas les exigences de l'article 6, § 1, de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales dès lors que l'intéressé a été dûment informé des voies et délais de recours qui lui sont ouverts devant les juridictions du contentieux de la sécurité sociale, que le cotisant qui n'a pas contesté en temps utile la mise en demeure qui lui a été adressée au terme des opérations de contrôle, ni la décision de la commission de recours amiable saisie à la suite de la notification de la mise en demeure, n'est pas recevable à contester, à l'appui de l'opposition à la contrainte décernée sur le fondement de celle-ci, la régularité et le bien-fondé des chefs de redressement qui font l'objet de la contrainte.

Cependant, par arrêt publié du 22 septembre 2022 n°21-10 105, la même chambre a dit que contrairement au cotisant qui a saisi la commission de recours amiable d'une contestation de la mise en demeure et qui, dûment informé des voies et délais de recours qui lui sont ouverts devant les juridictions chargées du contentieux de la sécurité sociale, n'a pas contesté en temps utile la décision de cette commission, le cotisant qui n'a pas contesté la mise en demeure devant celle-ci, ne dispose d'un recours effectif devant une juridiction, pour contester la régularité de la procédure et le bien-fondé des sommes qui font l'objet de la contrainte, que par la seule voie de l'opposition à contrainte.

Dès lors, le cotisant qui n'a pas contesté la mise en demeure devant la commission de recours amiable peut, à l'appui de l'opposition à la contrainte décernée sur le fondement de celle-ci, contester la régularité de la procédure et le bien-fondé des causes de la contrainte.

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En l'espèce, l'URSSAF fait valoir que le recours préalable auprès de la commission de recours amiable est une formalité substantielle à toute saisine ultérieure du pôle social et que n'ayant pas usé de cette voie de recours, la société n'est plus en mesure de contester le bienfondé du redressement dans le cadre d'une opposition à contrainte.

La SAS [5] fait valoir qu'elle a régulièrement formé opposition à la contrainte de telle sorte que son recours est recevable. Elle ajoute qu'elle n'a jamais réceptionné la mise en demeure préalable à la contrainte, que cette mise en demeure aurait dû être signifiée par huissier de justice, et qu'au regard du contenu de cette mise en demeure, il ne peut lui être reproché de ne pas avoir saisi la commission de recours amiable.

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A titre liminaire, il convient de constater que l'URSSAF ne conteste pas la recevabilité de l'opposition à contrainte, qui a été formée dans les quinze jours de la signification de ladite contrainte et qui est motivée, mais conteste la possibilité pour la SAS [5] de remettre en cause le bien-fondé du redressement dans le cadre d'une opposition à contrainte en l'absence de saisine de la commission de recours amiable.

La mise en demeure du 28 octobre 2019 a été notifiée par l'URSSAF par courrier recommandé avec accusé de réception présenté à la SAS [5] le 29 octobre 2019, retourné à l'URSSAF avec la mention « pli avisé non réclamé ».

La SAS [5] n'ayant pas contesté cette mise en demeure par-devant la commission de recours amiable, elle reste recevable à contester le bien-fondé des causes de la contrainte, à savoir le bien-fondé du redressement.

Sur les chefs de redressement n° 7 PEE 'abondement : caractère collectif et critères d'attribution et n° 8 PERCO- abondement : caractère collectif et critère d'attribution :

Aux termes de l'article R243-59 du code de la sécurité sociale, la personne contrôlée est tenue de mettre à disposition des agents chargés du contrôle tout document et de permettre l'accès à tout support d'information qui leur sont demandés par ces agents comme nécessaires à l'exercice du contrôle. Par ailleurs, La période contradictoire prévue à l'article L243-7-1 A est engagée à compter de la réception de la lettre d'observations par la personne contrôlée, qui dispose d'un délai de trente jours pour y répondre. La lettre mentionne la possibilité de se faire assister d'un conseil de son choix.

Aux termes de l'article L243-7-1 A du même code, à l'issue d'un contrôle, l'agent chargé du contrôle adresse à la personne contrôlée une lettre mentionnant, s'il y a lieu, les observations constatées au cours du contrôle et engageant la période contradictoire préalable à l'envoi de toute mise en demeure ou avertissement. La durée de la période contradictoire peut être prolongée sur demande du cotisant reçue par l'organisme avant l'expiration du délai initial, à l'exclusion des situations où est mise en 'uvre la procédure prévue à l'article L243-7-2 ou en cas de constat des infractions mentionnées aux 1° à 4° de l'article L8211-1 du code du travail.

A défaut de production d'éléments contraires aux constatations de l'inspecteur pendant la période contradictoire et avant la clôture des opérations de contrôle, la personne contrôlée ne peut produire d'éléments nouveaux aux débats (Cass 2e civ. 24 novembre 2016 n° 15-20493 diffusé, 19 décembre 2019 n° 18-22912, 7 janvier 2021 n°19-19395 et 19-20035).

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En l'espèce, l'URSSAF fait valoir que la société ne peut produire à l'instance des pièces non produites lors de la période contradictoire.

La SAS [5] fait valoir qu'elle a produit aux débats le compte-rendu de traitement du PEE et du PERCO, prouvant que les sommes litigieuses correspondaient bien à un abondement du PEE, que le PEE était d'application pour l'ensemble des salariés et que l'abondement était lié à un versement salarial.

Elle fait également valoir que le délai de 30 jours alloué par la lettre d'observations n'avait pas commencé à courir, à défaut pour l'URSSAF de justifier de la réception de cette correspondance. Elle ajoute que l'URSSAF ne mentionnait pas dans cette lettre la possibilité de solliciter un délai complémentaire de trente jours pour répondre à ses observations. Elle indique qu'aucun texte n'interdit à l'employeur de présenter de nouvelles pièces justificatives devant la juridiction saisie de son recours, qu'à hauteur d'appel, les parties peuvent produire de nouvelles pièces, et que la procédure est orale. Elle précise que l'arrêt du 7 janvier 2021 cité par l'URSSAF a été rendu alors que l'employeur avait communiqué de nouvelles pièces devant la commission de recours amiable, ce qui n'est pas le cas en l'espèce.

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La SAS [5], qui n'a jamais contesté avoir réceptionné la lettre d'observations qui lui a été adressée par l'URSSAF le 7 juin 2019 et n'a jamais remis en cause la régularité de la mise en demeure, est mal fondée à prétendre que le délai d'observations n'aurait pas commencé à courir.

De plus, aucune disposition légale ne contraignant l'URSSAF à mentionner dans la lettre d'observations la possibilité pour la personne contrôlée de solliciter un délai complémentaire pour répondre auxdites observations, la lettre d'observations est régulière en la forme.

Enfin, il appartenait à l'employeur de communiquer les pièces justificatives dont il disposait pendant la période contradictoire, et il importe peu qu'il ait, à l'issue de cette période contradictoire, saisi ou non la commission de recours amiable.

Par ailleurs, la SAS [5] ne conteste pas que le compte-rendu de traitement du PEE et du PERCO n'a pas été communiqué à l'inspecteur du recouvrement pendant la période contradictoire, mais a été produit pour la première fois devant le tribunal judiciaire.

Dès lors, à défaut de production des éléments contraires aux constatations de l'inspecteur pendant la période contradictoire, ce chef de redressement sera maintenu et le jugement sera infirmé de ce chef.

Sur le chef de redressement n°12 frais professionnels non justifiés- principes généraux :

Aux termes de l'article L242-1 du code de la sécurité sociale dans sa rédaction applicable au présent litige, pour le calcul des cotisations des assurances sociales, des accidents du travail et des allocations familiales, sont considérées comme rémunérations toutes les sommes versées aux travailleurs en contrepartie ou à l'occasion du travail, notamment les salaires ou gains, les indemnités de congés payés, le montant des retenues pour cotisations ouvrières, les indemnités, primes, gratifications et tous autres avantages en argent, les avantages en nature, ainsi que les sommes perçues directement ou par l'entremise d'un tiers à titre de pourboire.

Aux termes de l'article 1er de l'arrêté du 20 décembre 2002 relatif aux frais professionnels déductibles pour le calcul des cotisations de sécurité sociale (NOR: SANS0224282A), les frais professionnels s'entendent des charges de caractère spécial inhérentes à la fonction ou à l'emploi du salarié que celui-ci supporte au titre de l'accomplissement de ses missions.

Aux termes de l'article 4 du même arrêté, il y a grand déplacement lorsque le travailleur salarié ou assimilé est en déplacement professionnel et empêché de regagner chaque jour sa résidence habituelle. Il est présumé empêché de regagner sa résidence lorsque la distance séparant le lieu de résidence du lieu de déplacement est au moins égale à 50 kilomètres (trajet aller) et que les transports en commun ne permettent pas de parcourir cette distance dans un temps inférieur à 1 h 30 (trajet aller). Dans ces cas, les dépenses supplémentaires de repas et les indemnités de missions destinées à compenser les dépenses supplémentaires de logement et du petit déjeuner sont réputées utilisées conformément à leur objet pour la fraction qui n'excède pas des montants indiqués audit arrêté.

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En l'espèce, l'URSSAF fait valoir que les salariés cumulaient des indemnités de panier et de grand déplacement puisqu'ils percevaient des indemnités de repas pour le midi, des indemnités de repas pour le soir et des indemnités de grand déplacement, l'employeur ne soumettant aucune de ces sommes à cotisations et contributions sociales. Elle ajoute que la société n'a pas transmis de justificatifs probants quant à la réalité des grands déplacements et à l'exposition par les salariés de frais supplémentaires. Elle indique que les nouvelles pièces produites par la société, qu'elle juge elle-même non exhaustives, devront être écartées.

La SAS [5] fait valoir que lors du contrôle, elle a communiqué à l'URSSAF le détail général des sommes allouées lors des déplacements. Elle ajoute qu'au regard de son activité, elle est amenée à travailler sur des chantiers éloignés de son siège. Elle indiqua qu'elle a produit en première instance un récapitulatif par salarié et par mois de janvier 2016 à décembre 2017 permettant de justifier les indemnisations de grand déplacement et de repas du soir, et qu'il est possible de faire la corrélation entre ces relevés et les factures produites, qui ne sont pas exhaustives.

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C'est à juste titre que les premiers juges ont relevé que compte-tenu de l'activité de la société, les indemnités de repas de midi ont effectivement donné lieu à exonération de cotisations, de telle sorte que seules les indemnités des repas du soir et les indemnités de grand déplacement sont litigieuses.

Si la SAS [5] produit aux débats des récapitulatifs des frais exposés par les salariés et des factures pour des chantiers y correspondant, elle ne conteste pas ne pas avoir produit ces documents au cours de la période contradictoire.

En effet, dans la lettre d'observations, l'URSSAF indique que « lors du contrôle, aucun justificatif n'a été présenté. Un délai d'un mois a été laissé à l'employeur pour rassembler les pièces manquantes (dont les justificatifs de frais). Le seul élément transmis a été le détail général des sommes allouées lors des déplacements. En revanche, aucune pièce n'est venue corroborer la réalité des grands déplacements (ordre de mission, compte-rendu de chantier, localisation des chantiers, fiches individuelles de déplacement pour chaque salarié concerné') ». En outre, malgré ces observations très précises, la société n'a pas communiqué les documents nécessaires pendant la période de contrôle contradictoire.

Dès lors, ces justificatifs ne pourront être pris en compte.

En conséquence, ce chef de redressement sera maintenu et le jugement sera infirmé de ce chef.

Sur le chef de redressement n°13 : non fourniture de documents : fixation forfaitaire de l'assiette :

L'URSSAF n'évoque pas spécifiquement ce chef de redressement, tout en sollicitant la validation de l'entière contrainte.

La SAS [5] fait valoir qu'elle a produit aux débats le justificatif, notamment, du contrat de retraite du président de la société et les fiches annuelles de l'ensemble des contrats et le certificat d'adhésion au contrat santé.

Là encore, ces justificatifs n'ont été communiqués qu'après la clôture de la période contradictoire et ne pourront être pris en compte.

Au vu de ce qui précède, le jugement sera infirmé en toutes ses dispositions et la contrainte sera validée.

Sur les frais et dépens :

La SAS [5] succombant, elle sera condamnée aux dépens de première instance et d'appel et déboutée de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Par ailleurs, il n'est pas inéquitable de laisser à la charge de l'URSSAF l'intégralité des frais irrépétibles qu'elle a exposés de telle sorte qu'elle sera déboutée de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Le jugement sera infirmé en ce qu'il a condamné l'URSSAF à supporter les dépens exposés à compter du 1er janvier 2019 et à payer à la SAS [5] la somme de 750 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

PAR CES MOTIFS,

La cour, chambre sociale, statuant par arrêt contradictoire mis à disposition au greffe, après débats en audience publique et après en avoir délibéré,

INFIRME le jugement RG 20/49 du 19 novembre 2021 du pôle social du tribunal judiciaire de Charleville-Mézières en toutes ses dispositions,

Statuant en nouveau,

VALIDE pour son montant de 61 975 euros la contrainte n° 4688859 délivrée le 4 février 2020 par l'URSSAF de CHAMPAGNE ARDENNE et signifiée le 10 février 2020 à la SAS SOCIETE DE [5],

Y ajoutant,

CONDAMNE la SAS SOCIETE DE [5] aux dépens de première instance et d'appel,

DÉBOUTE les parties de leurs demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Ainsi prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Et signé par Monsieur Guerric Henon, Président de Chambre et par Madame Clara Trichot-Burté, Greffier.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT DE CHAMBRE

Minute en dix pages


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Nancy
Formation : Chambre sociale-1ère sect
Numéro d'arrêt : 21/02902
Date de la décision : 19/10/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-10-19;21.02902 ?
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