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06/10/2022 | FRANCE | N°21/00637

France | France, Cour d'appel de Nancy, Chambre sociale-2ème sect, 06 octobre 2022, 21/00637


ARRÊT N° /2022

PH



DU 06 OCTOBRE 2022



N° RG 21/00637 - N° Portalis DBVR-V-B7F-EXMW







Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire d'EPINAL

20/00142

01 mars 2021











































COUR D'APPEL DE NANCY

CHAMBRE SOCIALE - SECTION 2













APPELANTE :



S.A.S. EURO STRUCTURE agissant poursuite

s et diligences de son représentant légal pour ce domicilié audit siège

[Adresse 3]

[Adresse 3]

Représentée par Me Clarisse MOUTON de la SELARL LEINSTER WISNIEWSKI MOUTON LAGARRIGUE, avocat au barreau de NANCY substitué par Me DE RANCOURT, avocat au barreau de LYON









INTIMÉ :



Monsieur [W] [N]

[...

ARRÊT N° /2022

PH

DU 06 OCTOBRE 2022

N° RG 21/00637 - N° Portalis DBVR-V-B7F-EXMW

Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire d'EPINAL

20/00142

01 mars 2021

COUR D'APPEL DE NANCY

CHAMBRE SOCIALE - SECTION 2

APPELANTE :

S.A.S. EURO STRUCTURE agissant poursuites et diligences de son représentant légal pour ce domicilié audit siège

[Adresse 3]

[Adresse 3]

Représentée par Me Clarisse MOUTON de la SELARL LEINSTER WISNIEWSKI MOUTON LAGARRIGUE, avocat au barreau de NANCY substitué par Me DE RANCOURT, avocat au barreau de LYON

INTIMÉ :

Monsieur [W] [N]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Représenté par Me Franck KLEIN de la SELARL AVOCAT JURISTE CONSEIL, avocat au barreau D'EPINAL

COMPOSITION DE LA COUR :

Lors des débats et du délibéré,

Président :WEISSMANN Raphaël,

Conseiller : STANEK Stéphane,

Greffier lors des débats :RIVORY Laurène

Lors du délibéré,

En application des dispositions de l'article 945-1 du Code de Procédure Civile, l'affaire a été débattue en audience publique du 30 juin 2022 tenue par Raphaël WEISSMANN, Président, et Stéphane STANEK , conseiller, qui ont entendu les plaidoiries, les avocats ne s'y étant pas opposés, et en ont rendu compte à la Cour composée de Raphaël WEISSMANN, président, Dominique BRUNEAU, Stéphane STANEK, conseillers, dans leur délibéré pour l'arrêt être rendu le 06 octobre 2022;

Le 06 octobre 2022, la Cour après en avoir délibéré conformément à la Loi, a rendu l'arrêt dont la teneur suit :

EXPOSÉ DU LITIGE ET PRÉTENTIONS RESPECTIVES DES PARTIES

Monsieur [W] [N] a été engagé sous contrat de travail à durée indéterminée, par la société EURO STRUCTURE à compter du 01 mars 2017, en qualité de monteur de charpentes métalliques.

La convention collective nationale de la métallurgie s'applique au contrat de travail.

Par courrier du 21 février 2020, avec copie transmise par message téléphonique SMS, Monsieur [W] [N] a été convoqué à un entretien préalable au licenciement fixé au 04 mars 2020, avec notification de sa mise à pied à titre conservatoire.

Par courrier du 13 mars 2020, Monsieur [W] [N] a été licencié pour faute grave.

Par requête du 05 juin 2020, Monsieur [W] [N] a saisi la formation de référé du conseil de prud'hommes d'Epinal aux fins de condamnation de la société EURO STRUCTURE à lui remettre sous astreinte les documents de fin de contrat, outre le paiement des reliquats d'indemnités journalières de la sécurité sociale.

Par ordonnance de référé rendue le 07 juillet 2020, le conseil de prud'hommes d'Epinal a débouté Monsieur [W] [N] de l'ensemble de ses demandes.

Par requête du 28 septembre 2020, Monsieur [W] [N] a saisi le conseil de prud'hommes d'Epinal, aux fins de :

- dire que son licenciement est abusif et sans cause réelle et sérieuse et de condamnation de la société EURO STRUCTURE à lui payer les sommes suivantes :

- 6 713,68 euros bruts à titre d'indemnité compensatrice de préavis,

- 671,37 euros bruts à titre d'indemnité compensatrice de congés payés sur préavis,

- 1 500,00 euros bruts à titre de rappel de salaire pendant la mise à pied conservatoire,

- 150,00 euros bruts à titre de congés payés sur rappel de salaire,

- 2.545,22 euros à titre d'indemnité de licenciement,

- 13 450,00 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et abusif,

- 5 000,00 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement vexatoire,

- 1 405,20 euros à titre de remboursement des indemnités journalières de la sécurité sociale,

*

Subsidiairement :

- 5 350,06 euros bruts à titre d'indemnité compensatrice de préavis,

- 535 euros bruts à titre d'indemnité compensatrice de congés payés sur préavis,

- 2 028,25 euros à titre d'indemnité de licenciement

- 10 700,00 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et abusif,

*

- de dire qu'il a effectué des heures supplémentaires et en conséquence, aux fins de condamnation de la société EURO STRUCTURE à lui verser les sommes de :

- 7 298,61 euros à titre de rappel de salaire pour heures supplémentaires,

- 729,86 euros bruts à titre d'indemnité compensatrice de congés payés sur rappel de salaire pour heures supplémentaires,

- 20 141,04 euros à titre de dommages et intérêts pour travail dissimulé,

- 15 325 euros au titre des repos compensateurs non attribués,

- 431,25 euros bruts au titre des heures travaillées les dimanches,

- 43,12 euros bruts à titre de congés payés sur rappel de salaire

-316,25 euros au titre des heures travaillées les jours fériés

- 31,62 euros bruts à titre de congés payés sur rappel de salaire,

- 2 000 euros à titre de dommages et intérêts pour retard dans la transmission des documents de fin de contrat.

Vu le jugement du conseil de prud'hommes d'Epinal rendu le 01 mars 2021, lequel a :

- dit et jugé que le licenciement de Monsieur [W] [N] est sans cause réelle et sérieuse et abusif,

- condamné la société EURO STRUCTURE à payer à Monsieur [W] [N], les sommes suivantes :

- 6 713,68 euros bruts à titre d'indemnité compensatrice de préavis,

- 671,37 euros bruts à titre d'indemnité compensatrice de congés payés sur préavis,

- 1 500,00 euros bruts à titre de rappel de salaire pendant la mise à pied conservatoire,

- 150,00 euros bruts à titre de congés payés sur rappel de salaire,

- 2 545,22 euros à titre d'indemnité de licenciement,

- 13 450,00 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et abusif,

- dit et jugé que Monsieur [W] [N] a effectué des heures supplémentaires dont les majorations n'ont pas été payées,

- en conséquence, condamné la société EURO STRUCTURE à payer à Monsieur [W] [N], les sommes suivantes :

- 7 298,61 euros à titre de rappel de salaire pour heures supplémentaires,

- 729,86 euros bruts à titre d'indemnité compensatrice de congés payés sur rappel de salaire pour heures supplémentaires,

- 15 325 euros au titre des repos compensateurs non attribués,

- 1 000,00 euros à titre de dommages et intérêts pour retard dans la transmission des documents,

- 1 000,00 euros au titre de l 'article 700 du code de procédure civile,

- ordonné l'exécution provisoire du jugement à intervenir,

- rappelé qu'en application des dispositions de l'article R1454-28 du code du travail, la présente décision est de droit exécutoire à titre provisoire dans la limite maximum de neuf mois de salaire pour les sommes visées à l'article R1454-14 du Code du Travail, calculés sur la moyenne des trois derniers mois de salaire,

- fixé la moyenne des salaires à 3 356,84 euros bruts,

- ordonné, en application de l'article L 1235-4 du code du travail le remboursement par l'employeur fautif, la société EURO STRUCTURE, aux organismes intéressés de tout ou partie des indemnités de chômage versées au salarié licencié, du jour de son licenciement au jour du jugement prononcé en l'espèce 1 Mois,

- débouté Monsieur [W] [N] du surplus de ses prétentions,

- condamné la société EURO STRUCTURE aux entiers dépens de l'instance.

Vu l'appel formé par la société EURO STRUCTURE le 15 mars 2021,

Vu l'article 455 du code de procédure civile,

Vu les conclusions de la société EURO STRUCTURE déposées sur le RPVA le 13 avril 2022, et celles de Monsieur [W] [N] déposées sur le RPVA le 26 avril 2022,

Vu l'ordonnance de clôture rendue le 15 juin 2022,

La société EURO STRUCTURE demande :

- d'infirmer le jugement du conseil de prud'hommes d'Epinal du 1er mars en ce qu'il a :

- dit et jugé que le licenciement de Monsieur [W] [N] est sans cause réelle et sérieuse et abusif,

- l'a condamné à payer à Monsieur [W] [N], les sommes suivantes :

- 6 713,68 euros bruts à titre d'indemnité compensatrice de préavis,

- 671,37 euros bruts à titre d'indemnité compensatrice de congés payés sur préavis,

- 1 500,00 euros bruts à titre de rappel de salaire pendant la mise à pied conservatoire,

- 150,00 euros bruts à titre de congés payés sur rappel de salaire,

- 2.545,22 euros à titre d'indemnité de licenciement,

- 13 450,00 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et abusif,

- dit et jugé que Monsieur [W] [N] a effectué des heures supplémentaires dont les majorations n'ont pas été payées,

- en conséquence, l'a condamnée à payer à Monsieur [W] [N], les sommes suivantes :

- 7 298,61 euros à titre de rappel de salaire pour heures supplémentaires,

- 729,86 euros bruts à titre d'indemnité compensatrice de congés payés sur rappel de salaire pour heures supplémentaires,

- 15 325 euros au titre des repos compensateurs non attribués,

- 1 000,00 euros à titre de dommages et intérêts pour retard dans la transmission des documents,

- 1 000,00 euros au titre de l 'article 700 du code de procédure civile,

- ordonné l'exécution provisoire du jugement à intervenir,

- fixé la moyenne des salaires à 3 356,84 euros bruts,

- ordonné, en application de l'article L 1235-4 du code du travail le remboursement par l'employeur fautif aux organismes intéressés de tout ou partie des indemnités de chômage versées au salarié licencié, du jour de son licenciement au jour du jugement prononcé en l'espèce 1 Mois,

*

- de confirmer le jugement du conseil de prud'hommes d'Epinal du 1er mars pour le surplus,

*

- en conséquence, de dire et juger que le licenciement de Monsieur [W] [N] est fondé sur une faute grave,

- de débouter Monsieur [W] [N] de l'ensemble de ses demandes,

*

A titre subsidiaire :

- d'établir la moyenne des salaires à 2 675,03 euros,

*

En tout état de cause :

- de condamner Monsieur [W] [N] à lui payer la somme de 3 000,00 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens de l'instance.

Monsieur [W] [N] demande :

- de déclarer recevable mais mal fondé l'appel interjeté par la société EURO STRUCTURE à l'encontre du jugement rendu le 1er mars 2021 par le conseil de prud'hommes d'Epinal,

- de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a condamné la société EUROSTRUCTURE à verser les sommes de :

- 6 713,68 euros bruts à titre d'indemnité compensatrice de préavis,

- 671,37 euros bruts à titre d'indemnité compensatrice de congés payés sur préavis,

- 1 500,00 euros bruts à titre de rappel de salaire pendant la mise à pied conservatoire,

- 150,00 euros bruts à titre de congés payés sur rappel de salaire,

- 2 545,22 euros à titre d'indemnité de licenciement,

- 13 450,00 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et abusif,

- 7 298,61 euros à titre de rappel de salaire pour heures supplémentaires,

- 729,86 euros bruts à titre d'indemnité compensatrice de congés payés sur rappel de salaire pour heures supplémentaires,

- 15 325 euros au titre des repos compensateurs non attribués,

- condamné la société EURO STRUCTURE à titre de dommages et intérêts pour retard dans la transmission des documents de fin de contrat,

- condamné la société EURO STRUCTURE au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné la société EURO STRUCTURE aux entiers dépens,

- d'infirmer le jugement entrepris en ce qu'il l' a débouté des demandes de condamnation de la société EURO STRUCTURE à verser les sommes de :

- 5 000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement vexatoire,

- 20 141,04 euros à titre de dommages et intérêts pour travail dissimulé,

- 431,25 euros bruts au titre des heures travaillées les dimanches,

- 43,12 euros bruts à titre de congés payés sur rappel de salaire,

- 316,25 euros au titre des heures travaillées les jours fériés,

- 31,62 euros bruts à titre de congés payés sur rappel de salaire,

*

Statuant à nouveau :

- de dire et juger ses demandes recevables et bien fondées,

- en conséquence, de dire et juger que son licenciement est abusif et sans cause réelle et sérieuse,

- de condamner la société EURO STRUCTURE à lui verser les sommes de :

- 6 713,68 euros bruts à titre d'indemnité compensatrice de préavis,

- 671,37 euros bruts à titre d'indemnité compensatrice de congés payés sur préavis,

- 1 500,00 euros bruts à titre de rappel de salaire pendant la mise à pied conservatoire,

- 150,00 euros bruts à titre de congés payés sur rappel de salaire,

- 2.545,22 euros à titre d'indemnité de licenciement,

- 13 450,00 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et abusif,

- 5 000,00 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement vexatoire,

*

Subsidiairement :

- 5 350,06 euros bruts à titre d'indemnité compensatrice de préavis,

- 535 euros bruts à titre d'indemnité compensatrice de congés payés sur préavis,

- 2 028,25 euros à titre d'indemnité de licenciement

- 10 700,00 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et abusif,

*

- de dire qu'il a effectué des heures supplémentaires qui ne lui ont pas été rémunérées,

- en conséquence, de condamner la société EURO STRUCTURE à lui verser les sommes suivantes :

- 7 298,61 euros à titre de rappel de salaire pour heures supplémentaires,

- 729,86 euros bruts à titre d'indemnité compensatrice de congés payés sur rappel de salaire pour heures supplémentaires,

- 20 141,04 euros à titre de dommages et intérêts pour travail dissimulé,

- 15 325 euros au titre des repos compensateurs non attribués,

- 431,25 euros bruts au titre des heures travaillées les dimanches,

- 43,12 euros bruts à titre de congés payés sur rappel de salaire

-316,25 euros au titre des heures travaillées les jours fériés

- 31,62 euros bruts à titre de congés payés sur rappel de salaire,

- 2 000 euros à titre de dommages et intérêts pour retard dans la transmission des documents de fin de contrat.

- de condamner la société EURO STRUCTURE à lui verser la somme 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- de condamner la société EURO STRUCTURE aux entiers dépens.

SUR CE, LA COUR

Pour plus ample exposé sur les moyens et prétentions des parties, il sera expressément renvoyé aux dernières écritures qu'elles ont déposées sur le RPVA, s'agissant de l'employeur le 13 avril 2022, et en ce qui concerne le salarié le 26 avril 2022.

Sur le licenciement

La lettre de licenciement du 13 mars 2020, qui fixe les limites du litige, fait état des griefs suivants :

« Monsieur,

Par courrier recommandé du 21 février dernier, nous vous avons convoqué à un entretien préalable en vue d'un éventuel licenciement fixé au 4 mars 2020.

Vous ne vous êtes pas présenté à cet entretien.

Pourtant, nous avons décidé de vous notifier votre licenciement pour faute grave, pour les motifs ci-après exposés.

Vous êtes entré au service de notre Société à compter du I er mars 2017, en qualité de Monteur Charpentes Métalliques.

Dans le cadre de votre contrat de travail, vous êtes notamment tenu d'une obligation de loyauté et de respect de vos collègues et de votre hiérarchie.

Or, force est de constater que votre récent comportement constitue un manquement grave à vos obligations les plus élémentaires de loyauté, de respect et de correction.

Ainsi, le mercredi 12 février dernier, vous vous êtes rendu coupable d'une agression physique à l'encontre de votre collègue, Monsieur [U], sur un chantier.

Après avoir mis en cause les compétences de l'équipe, vous avez empoigné votre collègue, le poussant violemment vers un amas de ferraille dans lequel vous l'avez fait tomber.

Ce comportement inacceptable qui est de nature à porter atteinte à la santé et à la sécurité de votre collègue a eu lieu en public, situation portant atteinte à l'image de notre société et au travail de l'équipe.

Suite à cette altercation, Monsieur [U], sous le choc, nous a remis sa démission.

Ce comportement inadmissible caractérise à lui seul une faute grave justifiant votre licenciement.

Cet incident n'est malheureusement pas isolé, et s'inscrit dans le cadre d'un comportement, tantôt désinvolte, tantôt agressif, que vous avez adopté depuis plusieurs semaines, et que nous ne pouvons tolérer.

Votre chef d'équipe nous a informés que vous refusiez de répondre à ses appels, vous plaçant ainsi en situation d'insubordination.

Ainsi, le 17 février, le bureau d'étude et votre chef d'équipe ont tenté de vous joindre à de multiples reprises sur votre téléphone afin que vous puissiez prendre une mesure sur le chantier sur lequel vous étiez présent.

A défaut de réponse de votre part, votre supérieur a dû se rendre lui-même sur ce chantier, soit un déplacement de 4 heures, pour réaliser cette mesure, qui ne lui a pris que quelques minutes.

Plutôt que de vous excuser, vous n'avez pas contesté avoir reçu ses appels mais lui avez simplement indiqué que vous n'aviez « pas le temps de répondre », alors que ce dernier vous a vu plusieurs fois passer des appels personnels pendant vos heures de travail.

Votre chef d'équipe nous a malheureusement indiqué qu'il est régulièrement confronté à ce type de difficultés avec vous.

En tout état de cause, vous savez pertinemment qu'être joignable lors de vos travaux sur les chantiers pour prendre les consignes de votre hiérarchie correspond à l'exercice normal de vos fonctions.

Cette situation caractérise une défiance évidente à l'encontre de votre management et de la société, génératrice de perte de temps et de désorganisation.

Vous l'avez d'ailleurs informé que vous « en aviez marre » et que vous « prendriez un arrêt de travail » la semaine suivante, sans même avoir consulté votre médecin.

Ce comportement caractérise un désinvestissement de vos fonctions, une insubordination et une désinvolture fautive causant un préjudice à l'entreprise (retard de chantiers) et rendant impossible la poursuite de votre contrat de travail.

Vous avez adopté un comportement similaire vis-à-vis des équipes administratives et de la responsable comptabilité et RH que vous n'hésitez pas à invectiver sur son téléphone portable personnel.

Alors qu'elle tentait de vous expliquer en janvier dernier les modalités de décomptes du temps de travail dans l'entreprise, vous lui avez notamment crié « J'en ai rien à foutre de votre compteur de merde ! ».

Vous l'avez également menacée, la rendant personnellement responsable des difficultés que vous estimez rencontrer.

De même, lorsqu'elle vous a informé, comme l'ensemble du personnel, de la tenue des élections professionnelles dans l'entreprise, vous avez jugé utile de lui répondre, par SMS : « on en a rien à fout[re] »

Vous soumettez ainsi la responsable RH et vos collègues à un stress anormal et portant atteinte à leur santé, que nul de doit rencontrer dans le cadre de son travail et que nous ne saurions tolérer dans l'entreprise.

Dans ce contexte, votre comportement rend impossible la poursuite de votre contrat au sein de notre Société.

Par conséquent, nous vous notifions, par la présente, votre licenciement pour faute grave.

Ce licenciement, privatif d'indemnité de licenciement et d'indemnité de préavis, prend effet à compter de la date d'envoi de la présente.

Votre mise à pied à titre conservatoire ne sera pas rémunérée.

Nous vous rappelons qu'à compter de la rupture de votre contrat de travail, vous pouvez conserver le bénéfice des régimes de prévoyance et de frais de soins de santé en vigueur au sein de notre entreprise sous réserve de satisfaire aux conditions détaillées dans la notice d'information qui sera jointe à votre solde de tout compte.

Nous vous adresserons par courrier tous les documents relatifs à la rupture de votre contrat, de travail : certificat de travail, solde de tout compte, et attestation Pôle Emploi.

Nous vous prions de bien vouloir remettre à Monsieur [V] [E] sous quinzaine l'ensemble du matériel de l'entreprise que vous avez à votre disposition.

En tant que de besoin, nous vous confirmons que vous êtes libre de toute obligation de non concurrence. »

La société EURO STRUCTURE précise reprocher à M. [W] [N] une agression physique à l'encontre de l'un de ses collègues de travail, et un comportement désinvolte et agressif à l'encontre de ses collègues et de la direction.

Elle indique que le 12 février 2020, le salarié s'est rendu coupable d'une agression physique envers M. [U], un collègue : suite à un échange verbal vif, l'intimé a attrapé son collègue et l'a poussé dans un amas de ferraille. Elle ajoute que suite à ces faits M. [U] a donné sa démission.

La société EURO STRUCTURE renvoie à ses pièces 14 à 17.

Elle indique, s'agissant du reproche de désinvolture, qu'il était régulièrement injoignable sur les chantiers où il opérait ; elle renvoie à ses pièces 14 et 34.

Concernant l'attitude agressive reprochée, l'appelante explique que M. [W] [N] avait une attitude agressive et grossière ; elle renvoie à ses pièces 19, 27 et 28.

M. [W] [N] estime que son licenciement est abusif et injustifié, et constitue la seule réponse à sa demande de règlement des heures supplémentaires.

Il indique que si une altercation a bien eu lieu sur un chantier le 12 février 2020, il n'en est pas l'unique responsable ; qu'il ne s'agit que d'un différend entre collègues, fait isolé et unique, comme cela peut arriver parfois sur les chantiers du BTP et dans un contexte particulier ; que M. [C] précise dans son mail qu'une empoignade a commencé entre lui et M.[U] ; qu' à aucun moment il ne l'accuse d'être responsable de l'altercation.

Il ajoute que si M. [U] a démissionné, ce n'est pas suite à cet incident ; il avait déjà donné sa lettre de démission lorsque l'altercation a eu lieu ; de plus, dans son courrier de démission M. [U] ne précise à aucun moment qu'il démissionne à cause de lui.

En ce qui concerne le reproche d'attitude désinvolte et agressive, il estime ces affirmations surprenantes dans la mesure où il travaille à plus de 300 kms du siège de la SAS EURO STRUCTURE et que les seuls contacts qu'il peut avoir avec sa hiérarchie sont téléphoniques.

S'agissant du reproche de ne pas avoir répondu au téléphone le 17 février 2020, tant au bureau d'étude qu'à son chef d'équipe, il précise qu'il travaille en hauteur, et que s'il ne répond pas au téléphone c'est probablement qu'il ne peut pas ; que de plus, il n'est pas le seul salarié sur le chantier ; or, la SAS EURO STRUCTURE n'a appelé aucun autre salarié lorsqu'elle a vu qu'il ne répondait pas. Il ajoute qu'il a constaté l'existence de ces appels en fin de journée vers 18h30, sur son téléphone portable personnel ; or, M. [N] n'a pas son portable personnel sur lui quand il travaille et ceci conformément aux consignes d'interdiction imposées par la Direction ; par contre, il a un portable professionnel, sur lequel il n'a reçu aucun appel.

En ce qui concerne Mme [A], il indique ne l'avoir jamais vu, le peu d'échange qu'il y a pu avoir a eu lieu par téléphone.

Il soutient qu'il est faux d'affirmer qu'il a appelé Mme [A] le 11 février 2020 pendant 1 h30 pour l'insulter et tenir des propos désobligeants à son encontre ; si tel avait été le cas, il paraît évident que Mme [A] aurait raccroché ; elle ne se serait pas laissé insulter pendant 1 h 30 ; au contraire, les échanges entre eux ont toujours été cordiaux.

Il considère que la capture d'écran que la SAS EURO STRUCTURE produit en pièce 18 ne démontre pas que c'est lui qui a répondu « on en a rien à fout » ; ce sms date d'ailleurs du 9 décembre 2019, soit plus de deux mois avant la convocation de M. [N] à l'entretien préalable à son licenciement ; s'il a pu répondre « on en a rien à fout » cela n'avait rien à voir avec Mme [A] mais concernait les élections au CSE.

Quant au fait que M. [N] prenait contact avec la RRH de la société sur son téléphone personnel, c'est Mme [A] elle-même qui utilisait son téléphone personnel, et non pas celui mis à sa disposition par la SAS EURO STRUCTURE.

Lorsque M. [N] appelait Mme [A] c'était sur le téléphone que celle-ci utilisait pour

adresser les sms aux salariés.

Il renvoie à ses pièces 20, 37 et 38 et aux pièces avancées par l'employeur.

Motivation

L'article L 1232-1 du code du travail subordonne la légitimité du licenciement à l'existence d'une cause réelle et sérieuse.

La cause doit ainsi être objective, exacte et les griefs reprochés doivent être suffisamment pertinents pour justifier la rupture du contrat de travail.

La faute grave privative du préavis prévu à l'article L 1234-1 du même code est celle qui rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise.

La charge de la preuve de la faute grave repose exclusivement sur l'employeur.

En pièce 15 de l'employeur, M. [S] [C] explique que « (') suite à des cornières qui avaient du mal à rentrer dans son emplacement, [W] envoie un pic à [O] que ce n'était pas les cornières qui allait pas mais les bonhommes. [O] lui répondit qu'il allait qu'à monter les mettre en place de la une empoignade commençais. Je suis intervenue de suite avec l'aide d'un maçon pour les séparés voilà l'altercation qui a eu lieu sur le chantier entre [O] et [W] »

En pièce 16 de l'employeur (mail du 17 février 2020), M. [O] [U] écrit : « Bonjour, alors concernant mon altercation je vais vous décrire les événements de l'après-midi. (') Au début de l'après-midi nous avons commencé à monter le portique de la file 6 entre B et A. Dans les nacelles ils y avaient [X] et moi-même. Au sol [S] et [W] (qui n'avait pas l'intention de faire du montage) faisaient la préparation. [Il explique ensuite qu'ils n'arrivent pas à emboîter une pièce dans le reste de la charpente, qu'ils la font redescendre pour qu'elle soit découpée ; c'est M. [W] [N] qui effectue la découpe ; il est nécessaire de la faire redescendre à nouveau pour la reprendre] Je suis redescendu en disant que ça n'allait pas et qu'il fallait soit tourner la pièce ou la découper plus. En arrivant en bas j'ai entendu [W] dire que ce n'était pas la pièce qui n'allait pas mais les bonhommes. Je lui ai répondu que si c'était nous qui n'allions pas il n'avait qu'à monter et mettre la pièce en place sans la modifier ou la tourner. Ma réflexion ne lui a pas plu. Il a insisté le ton est monté. Il est venu sur moi m'a empoigné, m'a fait reculer, nous sommes arrivés dans la ferraille et nous sommes tombé. Moi en arrière et lui me poussant en avant sur moi, pendant la chute je me suis dégagé et retourné de tel façon qu'à la fin je le maintenai le dos plaqué au sol. [S] et un maçon sont venus nous séparer. (...) »

Il ressort de ces pièces que M. [W] [N] a empoigné son collègue M. [O] [U] et l'a poussé vers un amas de ferraille où ils sont tous deux tombés.

M. [W] [N] ne conteste pas dans ses conclusions cette relation de l'altercation, indiquant simplement ne pas être à l'origine de l'altercation.

Le grief de violence physique à l'encontre d'un collègue de travail est ainsi établi, le fait que M. [W] [N] a empoigné son collègue et l'a poussé contre un tas de ferraille n'étant pas contesté.

Ce motif justifie le licenciement prononcé pour faute grave, sans qu'il soit besoin d' analyser les autres griefs formulés dans la lettre de rupture.

Dans ces conditions, le jugement sera infirmé en ce qu'il a dit que le licenciement était abusif et en ce qu'il a condamné en conséquence la société EURO STRUCTURE à payer : 6 713,68 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis, 671,37 euros bruts à titre d'indemnité compensatrice de congés payés sur préavis, 1 500,00 euros à titre de rappel de salaire pendant la mise à pied conservatoire, 150,00 euros à titre de congés payés sur rappel de salaire, 2 545,22 euros à titre d'indemnité de licenciement, et 13 450,00 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Sur la demande au titre d'un licenciement vexatoire

M. [W] [N] fait valoir avoir été informé par sms, alors qu'il était en train de conduire le véhicule de l'entreprise, qu'il était convoqué à un entretien préalable dans le cadre d'un licenciement pour faute grave ; il a également été informé qu'il était mis à pied.

M. [X] [P], son collègue qui était présent dans le véhicule, atteste avoir dû reprendre le volant après qu'il ait reçu le sms de son employeur, étant dans l'incapacité de conduire.

Il précise avoir été mis en arrêt de travail par son médecin traitant.

Il renvoie à ses pièces 21, 5 et 6.

La société EURO STRUCTURE conteste toute intention malveillante ou vexatoire dans le fait d'avoir envoyé la convocation à l'entretien préalable, comportant une mise à pied conservatoire, par sms, expliquant que cette solution était meilleure que de le laisser revenir sur un chantier le lundi matin, faire plusieurs dizaines de kilomètres pour constater qu'il n'était pas prévu dans l'organisation du chantier, devant les autres travailleurs.

Motivation

Aux termes des dispositions de l'article 1240 du code civil, celui qui cause un dommage à autrui s'oblige à le réparer.

En l'espèce, il n'est pas contesté que la convocation à l'entretien préalable avec mise à pied conservatoire a été notifiée à M. [W] [N] par sms le 21 février 2020.

Il s'agit d'un procédé expéditif, et par conséquent vexatoire.

M. [W] [N] produit en pièce 21 l'attestation de M. [X] [P], collègue de travail, qui indique : « (') je certifie avoir dû reprendre le volant de notre véhicule de société lors du trajet de retour de notre chantier situé à [Localité 2] (67) le 21/02/20 car mon collègue M. [N] [W] n'était plus en capacité de conduire suite à la lecture d'un SMS d'Euro structure lui annonçant sa mise à pied conservatoire sans aucun motif ».

Il produit également son arrêt de travail du 24 février 2020 pour « dépression ».

La société EURO STRUCTURE conteste la valeur de cet arrêt de travail, en renvoyant à sa pièce 14, lettre de M. [E] [V], supérieur hiérarchique du salarié, en date du 20 février 2020, faisant état de ce que « il m'a également indiqué cette semaine qu'il en avait marre et qu'il serait probablement absent la semaine prochaine et qu'il prendrait un arrêt de travail ». Cette pièce est cependant insuffisante d'une part pour contredire l'indication du médecin portée sur l'arrêt de travail, et d'autre part pour démontrer que cet arrêt de travail ne serait pas réellement et finalement intervenu, malgré cette déclaration rapportée de la part de l'intimé, à la suite de ce sms.

Le préjudice en résultant est ainsi établi ; il justifie que la société EURO STRUCTURE soit condamnée à ce titre à payer 1000 euros à M. [W] [N].

Le jugement sera réformé en ce qu'il a débouté M. [W] [N] de cette demande.

Sur les heures supplémentaires

M. [W] [N] rappelle avoir été embauché sur une base de 39 heures par semaine, et indique produire un relevé des heures supplémentaires effectuées sur les années 2017 à 2020.

Il ajoute qu'à la simple lecture de bulletins de paie on constate qu'il n'est pas réglé de l'intégralité des heures ; qu'en effet, ses bulletins de salaire font apparaître l'existence d'heures supplémentaires mensuelles, le cumul sur l'année ainsi que le règlement desdites heures supplémentaires chaque mois ; or, principalement à compter de 2019, les heures figurant sur le bulletin de paie ne sont plus rémunérées.

M. [W] [N] indique n'avoir jamais été informé de l'existence d'un compteur d'heures ; il n'en a jamais eu connaissance ; de plus, à aucun moment la SAS EURO STRUCTURE ne démontre qu'il a bien récupéré les heures supplémentaires qu'il aurait effectuées.

Quant aux notes de service des 22 mai et 27 juillet 2019 et du protocole d'accord d'entreprise du 5 novembre 2007 il n'est à aucun moment démontré que les salariés en ont eu connaissance.

Il renvoie à ses pièces 1, 22 à 36, 39.

Motivation

L'article L. 3171-4 du code du travail dispose qu' 'en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, l'employeur fournit au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié. Au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l'appui de sa demande, le juge forme sa conviction '.

Il ressort de cette règle que la preuve des heures de travail effectuées n'incombe spécialement à aucune des parties mais que le salarié doit appuyer sa demande en paiement d'heures supplémentaires par la production d'éléments suffisamment précis quant aux horaires effectivement réalisés pour permettre à l'employeur de répondre en fournissant ses propres éléments.

M. [W] [N] produit en pièce 28 des tableaux de décompte d'heures supplémentaires pour les années 2017 à 2020, et des agendas pour ces mêmes années, portant mentions d'horaires de travail quotidiens.

Ces éléments sont suffisamment précis pour permettre à l'employeur de répondre.

La société EURO STRUCTURE fait valoir que dans le courant de l'année 2019, un bug informatique a affecté le logiciel de la paie, ce qui a eu comme conséquence que sur les bulletins de paie, le nombre d'heures supplémentaires était doublé.

Elle ajoute que compte tenu de l'autonomie dont le salarié disposait, elle n'était pas en mesure de pouvoir vérifier s'il travaillait au-delà de ses heures de travail.

L'appelante précise également qu'il existait au sein de la société un système de récupération des heures, mis en place conformément à l'article L3121-37 du code du travail ; qu'ainsi les heures supplémentaires effectuées postérieurement étaient déduites, après majoration, des heures de ce compteur.

Elle renvoie à ses pièces 22, 29, 28 et 31.

La pièce 22 est une lettre du 16 janvier 2020, adressée au conseil du salarié en réponse à un courrier, dans laquelle elle explique l'existence du bug informatique susmentionné, et l'existence d'un dispositif de récupération des heures supplémentaires.

La pièce 28 est un sms du 09 décembre 2019 adressé au salarié : « (') voici votre récapitulatif d'heures dans le compteur. (...) »

La pièce 29 est constituée de deux tableaux « détail des heures dues à récupérer » pour l'ensemble des salariés, dont M. [W] [N], pour 2019 et 2020.

La pièce 31 est un extrait des tableaux produits en pièce 25 par M. [W] [N], et le bulletin de paie de ce denier pour mars 2018.

Ces éléments ne répondent pas à la demande de M. [W] [N] appuyée par des agendas indiquant ses horaires de travail : la société ne justifie ne produit aucun décompte justifié des heures de travail effectuées par son salarié, ni des modalités des récupérations qu'elle lui oppose ; elle ne développe pas davantage d'explications chiffrées dans ses écritures.

Compte tenu de ces éléments, et du décompte en pièce 28 de M. [W] [N], prenant en compte des heures supplémentaires payées, et réclamant un solde dû, il sera fait droit à sa demande, ainsi qu'à celle concernant les congés payés afférents.

Le jugement sera confirmé sur ce point.

Sur la demande au titre des repos compensateurs

M. [W] [N] rappelle que l'article L 3121-30 al 1 du Code du travail dispose que les heures supplémentaires effectuées au-delà du contingent annuel ouvrent droit à une contrepartie obligatoire sous forme de repos, fixée à : 50 % pour les entreprises de 20 salariés au plus, et 100% pour celles de plus de 20 salariés.

Il indique que la Convention collective de la Métallurgie prévoit un contingent de 220 heures. Il explique n'avoir jamais bénéficié des repos compensateurs auxquels il avait droit en compensation des heures supplémentaires effectuées.

Il indique que compte tenu du délai de prescription, il sollicite le versement de la somme de 15.325 euros au titre des repos compensateurs non attribués.

La société EURO STRUCTURE développe les mêmes arguments contre cette demande que contre la demande au titre des heures supplémentaires.

Motivation

Aux termes des dispositions de l'article L3121-30 du code du travail, des heures supplémentaires peuvent être accomplies dans la limite d'un contingent annuel ; les heures effectuées au-delà de ce contingent annuel ouvrent droit à une contrepartie obligatoire sous forme de repos.

En l'espèce, au terme du développement qui précède, il est fait droit à la demande au titre des heures supplémentaires.

Dès lors qu'elle n'a pu justifier des heures travaillées par M. [W] [N], compte tenu du volume d'heures supplémentaires réalisées par ce dernier, et dans la mesure où elle ne critique pas à titre subsidiaire la somme qu'il réclame à ce titre, la société EURO STRUCTURE sera condamnée à lui payer 15 325 euros, outre les congés payés afférents, le jugement étant donc confirmé sur ce point.

Sur la demande au titre de dimanches et jours fériés travaillés

M. [W] [N] explique avoir travaillé les dimanches à raison de 30 heures sur les années 2017 et 2018, et avoir travaillé certains jours fériés sur les années 2017 à 2019 à raison de 22 heures, sans avoir perçu la majoration prévue par la convention collective.

Il renvoie à ses pièces 24 à 26.

La société EURO STRUCTURE rétorque que les quelques heures de travail du dimanche ont été régulièrement majorées à 100 %; elles apparaissent sur la ligne « heures supplémentaires » qui s'ajoute aux lignes « heures supplémentaires 25 % » sur les fiches de paie des mois correspondant.

Elle renvoie à ses pièces 31.

L'appelante ne répond rien sur les jours fériés.

Motivation

La majoration devant s'opérer sur les heures de dimanche et jours fériés à 100 % n'est pas contestée.

Des pièces 24 à 26 de M. [W] [N] (tableaux manuscrits, rapportant le volume d'heures travaillées par semaine, de 2017 à 2019), il ressort qu'il fait état de :

- 11,5 heures en jour férié en semaine 21 de 2017

- 4,5 heures le dimanche en semaine 23 de 2017

- 9,5 heures le dimanche en semaine 2 de 2018

- 5 heures le dimanche en semaine 6 de 2018

- 5 heures le dimanche en semaine 10 de 2018

La semaine 21 correspond au mois de mai, la semaine 23 au mois de juin, la semaine 2 au mois de janvier, la semaine 6 au mois de février, et la semaine 10 au mois de mars.

La pièce 31 de la société EURO STRUCTURE est constituée des deux bulletins de paie de février et mars 2018, annotés par l'appelante ; il y est indiqué sur chacun que la ligne « heures supplémentaires », à hauteur de 5 heures pour chacun de ces deux mois, correspond à la majoration supplémentaire du dimanche.

Ces 5 heures sont rémunérées au même taux salarial de 11,50 que le salaire mensuel, ce qui ne correspond pas à une majoration de 100 %.

Aucune pièce n'est par ailleurs fournie pour répondre aux autres dates avancées par M.[W] [N].

A défaut de démontrer qu'elle s'est acquittée de son obligation de paiement des heures supplémentaires de dimanche et jours fériés, la société EURO STRUCTURE sera condamnée à payer les sommes réclamées à ce titre par M. [W] [N], incluant les indemnités de congés payés afférents.

Le jugement sera réformé en ce qu'il a débouté M. [W] [N] de ces demandes.

Sur la demande au titre d'un retard dans la transmission de documents

M. [W] [N] explique que son contrat de travail a pris fin le 13 mars 2020, mais qu'il n'a reçu ses documents de fin de contrat que le 26 juin 2020, suite à l'intervention de son conseil auprès de la SAS EURO STRUCTURE ; ne disposant pas de son attestation Pôle Emploi, M.[N] n'a pu finaliser son inscription auprès de POLE EMPLOI et n'a pas perçu de ressource pendant toute cette période.

Il renvoie à ses pièces 10 à 17.

La société EURO STRUCTURE fait valoir avoir adressé au salarié ses documents de fin de contrat le 20 mars 2020 ; par courrier de son Conseil du 24 mars 2020, M. [W] [N] indiquait ne pas avoir reçu ces documents ; elle répondait le 24 mars par l'intermédiaire de son propre Conseil que les documents réclamés avaient bien été envoyés ; le 05 juin M. [W] [N] saisissait en référé le conseil des prud'hommes afin de se voir remettre les documents ; elle lui envoyait alors les documents par lettre recommandée.

Elle renvoie à ses pièces 6 à 11.

Motivation

Aux termes des dispositions des articles L1234-20 et R1234-9 du code du travail, l'employeur, en cas de rupture du contrat de travail, doit remettre au salarié le solde de tout compte ainsi que les attestations et justifications qui lui permettent d'exercer ses droits aux allocations de chômage.

En l'espèce, la société EURO STRUCTURE justifie par sa pièce 6 d'avoir établi à la date du 20 mars 2020 l'attestation de fin de contrat, le solde de tout compte et le chèque de paiement de ce solde, l'attestation destinée à Pôle Emploi et le certificat de travail.

Ces documents de fin de contrat n'étant pas portables mais quérables, et M. [W] [N] ne soutenant aucun engagement de la part de l'employeur de lui adresser les documents de fin de contrat, ce dernier sera débouté de sa demande ; le jugement sera réformé sur ce point.

Sur la demande au titre d'un travail dissimulé

M. [W] [N] motive sa demande en indiquant avoir effectué un nombre important d'heures supplémentaires sans qu'elles ne figurent sur son bulletin de paie. Il en déduit l'élément intentionnel.

La société EURO STRUCTURE fait valoir que s'il devait être retenu que le salarié a effectué des heures supplémentaires, il sera relevé qu'il a bien été payé de ces heures, et qu'il n'apporte pas la preuve de son intention de dissimuler des heures de travail.

Motivation

L'article L.8221-5, 2°, du code du travail dispose qu'est notamment réputé travail dissimulé par dissimulation d'emploi salarié le fait pour un employeur de mentionner sur les bulletins de paie un nombre d'heures de travail inférieur à celui réellement accompli.

En cas de travail dissimulé et de rupture de la relation de travail, le salarié a droit à une indemnité forfaitaire égale à 6 mois de salaires.

Toutefois, la dissimulation d'emploi salarié n'est caractérisée que s'il est établi que l'employeur a agi de manière intentionnelle.

En l'espèce, le seul fait que l'employeur ne puisse justifier du décompte des heures effectuées par son salarié ne vaut pas démonstration de l'élément intentionnel nécessaire au soutien du grief de travail dissimulé.

A défaut de faire cette démonstration, M. [W] [N] sera débouté de sa demande.

Le jugement sera confirmé sur ce point.

Sur la condamnation à rembourser Pôle Emploi

Le jugement étant réformé en ce qu'il a dit le licenciement sans cause réelle et sérieuse, il sera en conséquence réformé en ce qu'il a condamné la société EURO STRUCTURE à rembourser à Pôle emploi les indemnités de chômage servies à M. [W] [N].

Sur l'exécution provisoire du jugement et la moyenne des salaires

La société EURO STRUCTURE demande dans le dispositif de ses conclusions que le jugement soit réformé sur ce point.

Elle ne motive cependant pas ces demandes dans le corps de ses écritures.

Elle en sera donc déboutée, sur le fondement des articles 6 et 9 du code de procédure civile.

Sur les dépens et les frais irrépétibles

La société EURO STRUCTURE sera condamnée aux dépens d'appel ; le jugement sera confirmé en ce qu'il l'a condamnée aux dépens de première instance.

La société sera condamnée à lui payer 1500 euros sur le fondement de l'article 700, au titre de la procédure en appel. La condamnation de première instance au titre de l'article 700 sera confirmée.

PAR CES MOTIFS

La Cour, chambre sociale, statuant par arrêt contradictoire mis à disposition au greffe, après débats en audience publique et après en avoir délibéré,

Infirme le jugement rendu par le conseil de prud'hommes d'Epinal le 1er mars 2021 en ce qu'il a :

- dit et jugé que le licenciement de Monsieur [W] [N] est sans cause réelle et sérieuse et abusif,

- condamné la société EURO STRUCTURE à payer à Monsieur [W] [N], les sommes suivantes :

- 6 713,68 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis,

- 671,37 euros à titre d'indemnité compensatrice de congés payés sur préavis,

- 1 500,00 euros à titre de rappel de salaire pendant la mise à pied conservatoire,

- 150,00 euros à titre de congés payés sur rappel de salaire,

- 2 545,22 euros à titre d'indemnité de licenciement,

- 13 450,00 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et abusif,

- débouté M. [W] [N] de sa demande de dommages et intérêts pour circonstances vexatoires du licenciement,

- débouté M. [W] [N] de ses demandes au titre d'heures supplémentaires, sur le principe ou le quantum,

- débouté M. [W] [N] de sa demande de rappel de salaire pour travail le dimanche et les jours fériés, et les congés payés afférents,

- condamné la société EURO STRUCTURE à payer à Monsieur [W] [N] 1 000,00 euros à titre de dommages et intérêts pour retard dans la transmission des documents,

- ordonné, en application de l'article L 1235-4 du code du travail le remboursement par la société EURO STRUCTURE, aux organismes intéressés des indemnités de chômage versées au salarié licencié, du jour de son licenciement au jour du jugement prononcé dans la limite d'un mois,

Le confirme pour le surplus ;

Statuant à nouveau, dans ces limites,

Condamne la société EURO STRUCTURE à payer à M. [W] [N]:

- 1000 euros (mille euros) à titre de dommages et intérêts pour circonstances vexatoires du licenciement,

- 7 298,61 euros (sept mille deux cent quatre vingt dix huit euros et soixante et un centimes) à titre de rappel de salaire pour heures supplémentaires,

- 729,86 euros (sept cent vingt neuf euros et quatre vingt six centimes) bruts à titre d'indemnité compensatrice de congés payés sur rappel de salaire pour heures supplémentaires,

- 15 325 euros (quinze mille trois cent vingt euros) au titre des repos compensateurs non attribués,

- 431,25 euros (quatre cent trente et un euro et vingt cinq centimes) bruts au titre des heures travaillées les dimanches,

- 43,12 euros (quarante trois euros et douze centimes) bruts à titre de congés payés sur rappel de salaire

-316,25 euros (trois cent seize euros et vingt cinq centimes) au titre des heures travaillées les jours fériés

- 31,62 euros (trente et un euros et soixante deux centimes) bruts à titre de congés payés sur rappel de salaire ;

Déboute les parties du surplus de leurs demandes ;

Y ajoutant,

Condamne la société EURO STRUCTURE à payer à M. [W] [N] 1500 euros (mille cinq cents euros) sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, pour la procédure en appel ;

Condamne la société EURO STRUCTURE aux dépens d'appel.

Ainsi prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Et signé par Monsieur Raphaël WEISSMANN, Président de Chambre, et par Madame Laurène RIVORY, Greffier.

LE GREFFIERLE PRESIDENT DE CHAMBRE

Minute en dix neuf pages


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Nancy
Formation : Chambre sociale-2ème sect
Numéro d'arrêt : 21/00637
Date de la décision : 06/10/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-10-06;21.00637 ?
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